La Couronne de Cuivre

"Squale compte peut-être sur l'artefact, mais si tous les autres se font la malle, elle ne pourra pas faire grand chose, fit Guéric.
— Les autres sont tenus par la peur plus que par le respect, c'est en tout cas ce qu'Aigéan semblait sous-entendre.
— J'ai du mal à croire qu'il t'a raconté tout ça, Constance. Honnêtement. Tu ne penses pas qu'il t'a raconté des bobards ? Histoire de nous tromper quant à leur dynamique ?
— Non, je ne pense pas qu'il ait imaginé une seule seconde que j'allais m'enfuir."
Guéric croisa les bras.
"C'est sûr que si les deux autres bateaux disparaissaient dans la nuit, elle se retrouverait très isolée."
Il se tourna vers Taliesin.
"Es-tu sûr que les Hélonniens vont attaquer dans le noir ? Ce serait surprenant. La plupart d'entre eux sont humains, généralement, et Lathandre n'est pas exactement le dieu des ténèbres. Mais l'idée d'amener des troupes par la grotte me semble excellente."

Il secoua la tête.
-Martin m'a parlé d'une possibilité envisagée, non d'une décision déjà prise. Et il me semble qu'il a évoqué une attaque prochaine pour profiter de la désorganisation. Pas forcément de nuit, donc... Mais j'avoue mal me souvenir de notre conversation : j'étais alors perché sur une étroite corniche au beau milieu d'une falaise, situation quelque peu inconfortable pour se concentrer ou débattre stratégie...
Il se pencha et entreprit de fouiller ses frusques trempées afin d'y récupérer le caillou magique.
-Le mieux serait sans doute de contacter les Hélonniens pour en discuter avec eux. A moins que vous ne préfériez attendre que nous ayons fini de manger ?

"Si c'est toi qui parles, moi ça m'est égal !" s'exclama Guéric, la bouche à moitié pleine.
Constance leva les yeux au ciel et décocha une grimace au barde.
"C'est le stress, je suppose. Mieux vaut appeler les Hélonniens maintenant... La nuit est tombée, peut-être risquons-nous de les trouver couchés si nous tardons trop."
Taliesin dut donc reporter la fin de ses agapes à plus tard pour se concentrer sur la surface polie du petit caillou. Le contact ne tarda pas à s'établir, mais un brouhaha épouvantable jaillit de l'objet, réveillant à nouveau Jonas qui, cette fois, demeura hébété, assis sur son séant. Il ne fallut que quelques secondes aux compagnons pour réaliser que ce vacarme n'avait rien d'inquiétant. Il ne s'agissait pas d'un combat ou d'un naufrage, mais bien simplement des bruits tonitruants... d'une salle à manger où les conversations, rires et même quelques chansons allaient bon train.

Lorsqu'il comprit que les pirates prisonniers ne s'étaient pas mutinés, semant le carnage à bort du vaisseau hélonnien, le barde prit une profonde inspiration et lança d'une voix forte.
-Martin ? Tu n'as pas honte de festoyer et de boire tandis que nous autres grelottons et mourrons de faim dans les ténèbres souterrains de Mersant ? Ah, si je m'attendais à ça... Je suis déçu, déçu !

"Mais... mais... répondit rapidement la voix du courtisan. Mais c'est parce que je noie dans l'alcool mon terrible chagrin de te savoir loin de moi, hors de portée de mes bras et de mes... du reste, Taliesin, tu t'en doutes ! Ô cruel barde, comment peux-tu ainsi te gausser de mon désespoir !"
Constance croisa les bras avec une moue dubitative.
"Je vois que les rapports de certains ont évolué pendant mon absence, fit-elle.
— Je te jure que j'ai fermé mes petits yeux chastes, ajouta Guéric à l'intention de son capitaine.
— Vas-tu enfin m'annoncer que tu renonces à Mersant et que tu vas me rejoindre à bord de ce magnifique trois-mâts pour une traversée romantique ?" reprit Martin sur le même ton mélodramatique.

-Si tu savais à quel point j'aimerais ! répondit-il sans se démonter. Malheureusement, Guéric tient absolument à me garder près de lui. Il est tellement possessif, tu sais... Tellement que si je cédais à ma passion et te faisais cette annonce, il me poignarderai sur l'heure, préférant me voir mort plutôt que de devoir me partager... Hum, je crois que j'en ai déjà trop dit, d'ailleurs. Guéric fait une drôle de tête. Et le capitaine me foudroie du regard...

Guéric faisait effectivement une drôle de tête et il n'hésita pas longtemps.
"Martin ! Il ment ! Il ment complètement ! Je n'ai aucune vue sur son postérieur !
— Ah ! fit Constance. Ça suffit ! Je ne veux rien savoir ! Nous sommes coincés sur une île infestée de pirates, bon sang ! Vous avez vraiment le sens des priorités, c'est pathétique.
— Constance ?" fit alors une autre voix, dans le lointain ventre du navire luménien.
Le capitaine dissimula une grimace, une seconde.
" Seskan ?
— PAR LES DIEUX, FEMME ! QU'EST-CE QUE TU FICHES !?
— Femme ?
— Te sacrifier pour que les autres puissent se tirer d'affaire ? Qu'est-ce que c'est que ce plan foireux ? Qu'est-ce qui t'est passé par la tête ? Tu avais bu ? Encore abusé de ce maudit lotus noir à la manque que ce halfelin stupide fait monter sur le bateau chaque fois qu'il mouille à Mélandis ?
— Hé ho !
— Seskan...
— Je n'ai pas fini ! Nous allons envoyer une barque vers Mersant et tu vas me faire le plaisir de monter à bord sans discuter ! Ce foutoir n'est pas un endroit pour des civils !
— Et bien, ça a l'air super chez vos copains..." grommela Jonas en se grattant la tête.

Le barde lui adressa un clin d’œil puis, se levant, tendit le caillou au capitaine.
-Constance, si vous souhaitez être moins... entourée, disons, pour mener cette discussion, prenez-le. Jonas, Guéric et moi pouvons nous éloigner, sauf si vous souhaitez le faire vous-même. Dans tous les cas, nous ne tendrons pas l'oreille. Oh, et si Seskan tient absolument à envoyer une chaloupe, dites-lui de convaincre le capitaine d'en mettre plusieurs à l'eau. Avec un bon contingent de soldats dedans. Nous pourrions ainsi mieux nuire aux pirates... Plus on est de fous, plus on rit, n'est-ce pas ?

"Faux frère..." grommela Constance en prenant le caillou.
Guéric lui décocha un sourire triomphant. Mais la jeune femme ne s'écarta pas pour autant et prit une profonde inspiration.
"Ecoute, Seskan, je ne comprends pas du tout pourquoi tu fais tout un fromage de cette histoire. Je vais bien, je suis en un seul morceau, et je n'ai jamais été la "femme" de personne. Alors on en discutera face à face, d'accord ? Ici, on se les gèle, il fait noir et humide, et il y a encore un paquet de pirates au-dessus de nos têtes. Envoie donc une chaloupe ou deux ou trois, même, dans la grotte que Martin connait, et puis préparez quelque chose. Une intervention. Un truc musclé, efficace, pour botter les fesses des pirates. Et ne coulez pas la Liberté quand vous entrez dans le port, vous serez gentils, j'ai encore des courses à faire à Mélandis. Autre chose ?
— Heu...
— Ouah !
— Bon. Taliesin, tu avais autre chose à leur communiquer ?"

Il réfléchit un instant.
-Et bien, si les Hélonniens décident d'envoyer une escouade, se serait pas mal si elle comptait dans ses rangs des maîtres en l'art de la discrétion et de l'infiltration, des gens capables de disparaître dans les ombres, de se rendre invisibles... Mais je ne voudrais pas qu'ils se séparent de tous leurs meilleurs éléments et, ainsi, qu'ils compromettent leurs chances de réussite lors d'un futur débarquement. En dehors de ça... Guéric, tu vois quelque chose ? Du matériel, peut-être ? Armes de jet, armures, baguettes anti-pirates ?

"Une baguette anti-pirates... Tu racontes n'importe quoi, Taliesin, fit le halfelin avec le sourire.
— Malheureusement, je doute qu'il y ait exactement les gens que tu cherches à bord, intervint Martin. Je n'ai vu que de grands et beaux soldats baraqués, du genre qui portent des armures d'une tonne et des armes qui vont se coincer dans les stalactites.
— Tu ne les as peut-être pas vus. Même s'il ne doit y en avoir que trois ou quatre, il est rare qu'une troupe d'intervention n'embarque aucun éclaireur...
— Eclaireur. Comme c'est joliment mis.
— Ce sont des Luméniens, Guéric.
— Comme si c'était un gage de quoi que ce soit ! Mais donc, je pense que nous ferons avec ce qu'on nous envoie. Même des hommes un peu lourds seront utiles une fois déployés dans la lande, pour peu qu'ils ne soient pas trop peu nombreux. Mais ça vaut sans doute la peine que tu leur décrives un rien le parcours souterrain... Qu'ils ne se chargent pas inutilement.
— Ça marche.
— Est-ce qu'ils ont essayé de voir s'il y avait un accès par la mer du côté est de l'île ? Il y a peut-être moyen de remonter jusqu'à l'autre groupe ?
— Je pense qu'ils ont déjà sondé les falaises à la longue-vue et qu'ils n'ont rien détecté... Mais ils ne se sont pas approchés, à cause des sentinelles."

-Martin, intervint-il, si le capitaine décide de nous envoyer un corps expéditionnaire, surtout, ne te sens pas obligé de l'accompagner. Tu peux te contenter d'indiquer aux Hélonniens l'entrée de la caverne, tandis que nous irons les chercher là-bas pour leur montrer le chemin au cœur de ce labyrinthe. Nous ne savons pas comment les choses vont tourner, ici, et je m'en voudrais que tu t'exposes à nouveau au danger alors que ce n'est pas nécessaire... Sinon, et bien, je garde le caillou à portée de main : je doute que nous bougions cette nuit, aussi n'y a-t-il guerre de risques que je manque ton appel.

"Oh, Taliesin, je suis touché que tu t'inquiètes de mon bien-être, vraiment... fit le courtisan. Mais le capitaine Longuehune doute de mon courage, et mon honneur est en jeu ! Quoi ? Je n'ai pas d'honneur ? Ah non, c'est vrai, tiens. Mais bon, quoi qu'il en soit, je suis touché, vraiment. Je crois quand même que je vais revenir sur Mersant. Je ne peux pas vraiment t'expliquer pourquoi, et je ne vais certainement pas essayer alors qu'il y a plein d'oreilles indiscrètes qui m'écoutent ici et près de toi. Je te promets que j'essaierai de rester sage, cependant. Alors à tout à l'heure ! Essayez de dormir un peu !"
Comme il prononçait ces mots, Taliesin prit conscience à nouveau de sa terrible fatigue, du froid pénétrant qui lui glaçait la moelle et de sa cheville douloureuse. Il avait poussé son organisme dans ses derniers retranchements et il était, effectivement, urgent qu'il lui accorde une trêve.

Pour commencer, il reprit son repas là où il l'avait arrêté : aussi fatigué soit-il, il doutait de pouvoir dormir le ventre vide... Il demeura donc plusieurs minutes sans prononcer une parole, dévorant avec plaisir sa part des vivres rapportés par Guéric, et ce n'est qu'une fois rassasié qu'il s'adressa de nouveau à ses compagnons :
-Comment fait-on, pour le tour de garde ? Dans mon état, je serai incapable de veiller avant de m'être abandonné au moins quatre heures aux délices du sommeil. Par contre, après cela, je devrais être à peu près opérationnel...

"Repose-toi, fit Constance. Je somnole depuis des heures et maintenant qu'il y a un peu de lumière, je voudrais prendre le temps d'arranger un peu les vêtements que tu m'as dénichés. Toi aussi, Guéric. D'autant que vous devrez nous guider vers votre fameuse grotte.
— La route est assez longue. Nous ne dormirons que quelques heures... mais tu devrais te reposer aussi, Constance. C'est un terrain accidenté et tu n'es, excuse-moi, pas très en forme.
— Nous devons surveiller nos arrières...
— Mais Rrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrumoc le terrible va s'en charger !" explosa alors une voix tonitruante.
Constance s'était levée d'un bond, la main sur la poignée de son épée (enfin, celle de Taliesin, pour être exacte). Guéric ne put s'empêcher de rire de bon coeur.
"Qui a parlé ?" fit Constance.

Tout sourire, l'elfe désigna sa ceinture.
-Constance, je vous présente Rumoc. Nous nous sommes rencontrés dans la caverne abritant le trésor du dragon et il a accepté de faire un bout de chemin en notre compagnie. Depuis lors, il a été un allié précieux, et nous pouvons nous fier entièrement à lui : si un ennemi venait à s'approcher, nous en serions immédiatement informés !
Il s'en voulait un peu de ne pas avoir songé plus tôt à lui. Mais il était fatigué et n'avait donc plus les idées très claires.

Constance fixa Taliesin avec des yeux exorbités. Guéric suivit son regard et son sourire s'élargit.
"En fait, il parle de sa ceinture.
— Oh. De la ceinture.
— Une ceinture de la mort qui tue, mamzelle. D'ailleurs, Taliesin, je vais te proposer une énigme. Tu vois dans le noir. P'tit Poilu voit dans le noir. L'Otage Pathétique voit dans le noir. Dame Constance, elle, ne voit pas dans le noir. C'est une équation avec une seule inconnue. Ton degré de galanterie."

Le barde prit une mine peinée.
-Tu m'en veux parce que j'ai failli tomber dans la mer, t'entrainant du même coup dans les profondeurs aquatiques ? Ou bien es-tu las de mon pessimisme intérieur ? Enfin, quelle qu'en soit la raison, tu souhaites mettre un terme à notre collaboration et tu m'en vois fort chagriné. Toutefois, n'ayant pas l'âme d'un tyran, je vais me conformer à tes souhaits et te remettre au capitaine.
Ce qu'il fit, d'autant plus volontiers qu'il comprenait Rumoc : la ceinture avait depuis des jours dû subir ses pensées, ce qui, à force, devait être déprimant. Voire pire encore.

"C'est juste que je ne puis résister aux charmes d'une jolie femme quand je la rencontre... Ne le prends pas personnellement." dit Rumoc.
Constance la prit avec une mine inquiète.
"Est-ce que c'est vraiment sans danger ? Elle ne va pas me mordre, ou quelque chose du genre ?
— Elle peut juste te casser la tête. Sévèrement, même.
— Petit jaloux."
Le capitaine ne put s'empêcher d'esquisser un sourire.
"Bon, et bien... cher Rumoc... Je vais vous poser là, alors, pour la durée de votre... garde. Et puis je vous porterai.
— Vous êtes un amour, Dame Lamalice.
— Aaaah, mes oreilles ! Je souffre !" s'exclama Guéric avant de s'allonger dans un coin pour dormir.

-Allez Guéric, boude pas ! fit-il, souriant largement. Pas plus tard que tout à l'heure, Rumoc me disait que tu venais juste après Constance sur sa liste de futurs porteurs. Tu auras donc bientôt le plaisir de l'entendre également dans ta tête !
Sur ces belles paroles, il récupéra une couverture et s'étendit à son tour. Il avait l'impression que le sommeil ne serait pas long à l'emporter...

HRP : Taliesin est vraiment fatigué, il commence à dire Guéric pour Rumoc...

Un battement de coeur. Ténèbres. Un second. Une main lui secoue l'épaule.
"Il est l'heure de se mettre en mouvement, souffla la voix de Constance. Les Luméniens vont bientôt arriver et Guéric pense qu'il nous reste tout juste le temps de les rejoindre. Mais si tu préfères, tu peux nous attendre ici. Je suppose que tu dois être très fatigué, encore, et que tu dois préparer tes sortilèges..."
Guéric était debout, scrutant les ténèbres au-delà de leur petite alcôve. Jonas bâillait aux corneilles, assis sur son séant. Le temps semblait suspendu, comme toujours dans ces conduits coupés de l'extérieur et Taliesin n'avait pas vraiment la sensation d'avoir dormi.

Le barde se redressa et esquissa une grimace. Sa cheville, elle aussi, s'était réveillée, et si la douleur n'était pas insupportable, elle s'avérerait toutefois assez forte pour l'empêcher de faire un long trajet. A moins qu'il ne soit en mesure d'y remédier.
-Je préférerais vous accompagner, répondit-il. Mais il faut d'abord que je soigne une petite blessure... Si je n'ai pas assez dormi pour incanter, je serai incapable d'aller bien loin, auquel cas... Je monterai la garde ici. J'espère toutefois qu'il n'en sera rien.
Et d'essayer, sans plus tarder, de lancer un sortilège de soins légers.

Malgré sa brièveté, son sommeil avait été réparateur et la bienheureuse lueur bleutée du sortilège quitta ses doigts pour englober sa cheville, éteignant la douleur. Il put donc se lever pour rejoindre leur équipée. Guéric lui tendit un morceau de pain, vestige de leur festin de la veille, puis s'engagea dans le conduit étroit. Le barde put le suivre sans difficultés, Constance lui emboîta le pas et Jonas ferma la marche.
Il faisait froid et humide, et l'elfe éternua plusieurs fois. Si sa jambe était désormais fonctionnelle, il n'était pas dit qu'il ne tomberait pas malade... Mais il n'était plus temps d'y songer, il fallait progresser dans le ventre presque familier de l'île. Ils montèrent, descendirent, contournèrent, se faufilèrent, escaladèrent, tournèrent mille fois à gauche, mille fois à droite, silencieux, concentrés, bientôt un peu fatigués, puis ils débouchèrent enfin dans la grotte déserte. La mer venait mourir sur les rochers, apparemment tranquille. Au dehors, le ciel était encore sombre, mais on devinait déjà le jour, en liséré plus clair à l'horizon.

Si des renforts devient bel et bien leur être envoyés, mieux valait qu'ils aient atteint la grotte avant que l'aube n'ait complètement dissipé les ténèbres nocturnes. Bien sûr, s'il y avait des sentinelles en haut des falaises, ce qui était probable, elles ne manqueraient pas de repérer les barques. Mais, au moins, elles ne pourraient savoir exactement combien d'hommes elles transportaient... Quoi qu'il en soit, à présent que leur périple souterrain était terminé, une question lui était venue à l'esprit et il la posa aussitôt à ses compagnons :
-Comment savez-vous que les Hélonniens vont arriver ? Vous avez reçu un message par l'entremise du caillou ?
Il fallait qu'il ait dormi très profondément pour ne pas avoir entendu la voix de Martin. Cependant, vu l'état d'épuisement qui était le sien avant qu'il ne sombre, la chose ne paraissait pas impossible.

"Oui, fit Constance en s'asseyant sur un rocher. En fait, c'est Rumoc qui a reçu le message. Il a d'ailleurs conversé avec Martin un bon moment avant d'accepter de nous réveiller, si j'ai bien compris ce que Martin m'a raconté.
— Nous avions des choses à nous dire, c'est tout, intervint la ceinture.
— Bref, comme tu dormais profondément et que tu avais... as toujours... mauvaise mine, nous n'avons pas vu l'intérêt de te réveiller."
Guéric s'était posté au bord de la plateforme supérieure de la grotte, scrutant la mer.
"Je crois que je vois quelque chose." lâcha-t-il au bout d'un moment.
Jonas, lui, musardait au bord de l'eau.

-Jonas, éloigne-toi de la berge ! lança-t-il d'une voix forte. Ces eaux sont infestées de sirènes, et les charmes qu'elles lancent nous ont déjà coûté très cher...
Puis, se tournant vers Guéric :
-A ce propos, si ce sont bien les Hélonniens qui approchent, il faudra leur faire signe de se hâter et les prévenir sitôt qu'ils seront à portée de voix. Peut-être Martin et les autres leur auront-ils confié les médaillons que le pipeau nous avait procurés, mais, même si c'est le cas, il n'y en aura pas assez pour tout le monde. Il faut donc prendre des précautions afin que le débarquement se fasse le plus rapidement possible. Et sans incident regrettable...

Jonas obtempéra et les rejoignit en hauteur.
"Je doute que nous soyons suffisamment loin, si ces demoiselles décidaient d'agir... fit le halfelin avec une grimace. Mais je suis certain qu'ils auront les médaillons. Les sirènes les ont attaqués en cours de traversée, ils n'ont pas pu oublier... Et avec un peu de chance, les Luméniens sont équipés contre les charmes... Je pense..."
Il jeta un oeil vers Constance.
"Les chances sont élevées que Seskan soit à bord. Et ce ne sera probablement pas le seul clerc. Nous devons juste faire en sorte de ne pas nous faire avoir jusque là."

-Le mieux serait sans doute que seulement deux d'entre nous restent ici, tandis que les deux autres iront se mettre en retrait. Oh, et qu'ils emporteront toutes les armes, aussi... De cette manière, si ces fichues sirènes se manifestent, les victimes de leurs charmes ne représenteront guère de danger pour les autres et seront aisément maîtrisables. Qu'en pensez-vous ?

"Je ne veux pas être sinistre, mais franchement, je n'ai pas besoin d'une arme pour tordre le cou à quelqu'un... fit Guéric avec une grimace. Toi non plus, d'ailleurs... Trois petits mots chantants, et ça pourrait barder. Pardonne-moi l'expression.
— D'autant que s'il ne reste que deux personnes désarmées... Ne risquent-elles pas de se faire attaquer, tout simplement ? Ou attirer sous l'eau et noyer ? continua Constance.
— Et si on utilisait la ceinture magique qui parle ? demanda Jonas.
— Encore le sale boulot pour Rumoc ! J'vous jure, ces bipèdes, aucun respect."

Taliesin acquiesça : c'était une excellente idée, d'autant que, comme Martin connaissait la ceinture, il reconnaîtrait aussitôt sa voix et pourrait expliquer aux Hélonniens l'origine de ce prodige.
[color=#FFFFF66]-Rumoc, pour te donner du cœur à l'ouvrage, sache que si nous sortons vivants de cette aventure, il n'est pas impossible que je fasse une chanson pour narrer nos exploits. Auquel cas, je ne manquerai pas de mentionner comme il se doit l'aide précieuse que tu nous as apportée ![/color]

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Mersant