La Couronne de Cuivre

Et c'était tant mieux car il aurait besoin d'avoir les idées claires pour ce qui l'attendait. Il commença par le plus simple : aider Martha à préparer le petit déjeuner puis dresser la liste des matériaux qui lui avaient manqué : de la chaux et quelques planches notamment ainsi que le nécessaire pour poncer, clouer et réparer les parties abîmées de la cabane. bien sûr, une remise à neuf complète devrait attendre le printemps et il faudrait faire quelques choix de ce qui était faisable en quelques jours mais autant prévoir large si les beaux jours se poursuivaient assez longtemps.

Cette liste était aussi une bonne excuse pour attendre le réveil de Sylvia - et même s'il ne se l'avouait pas totalement - lui donner le temps de réfléchir à ce qu'il dirait à Marco.

Sylvia fit son apparition près de deux heures plus tard, alors qu'il avait terminé sa liste, fait la vaisselle, rassemblé ses affaires... et qu'il était plus ou moins à cours d'idées pour justifier de reporter encore son départ. Mais Martha était sortie depuis un moment déjà, et ne risquait pas de s'apercevoir qu'il traînait davantage que nécessaire. Elle lui avait ré-expliqué où se trouvait la coupe de bois de Marco, et comptait le prévenir immédiatement de l'arrivée prochaine du rôdeur.

Un peu vaseuse, Sylvia ne jeta qu'un coup d’œil rapide à la liste que Kasumi avait rédigé, tout en avalant un petit déjeuner consistant : malgré son inactivité, elle avait faim en permanence, et les nausées matinales du début de grossesse étaient oubliées depuis longtemps.
" Tu manges là à midi?" questionna-t-elle, pragmatique, une fois qu'une demi-douzaine de tartines lui eurent rendu l'esprit plus clair.

Puisque la matinée était déjà bien avancée et qu'il lui restait encore à mener l'entretien avec Marco, il pensait être encore dans les parages à la mi-journée. Ce n'était guère prudent de se mettre en route si tardivement mais il ne pourrait de toute façon plus atteindre l'emplacement de la meute avant la nuit. Dans ces conditions, autant profiter encore un peu d'un moment paisible en bonne compagnie avant plusieurs jours à passer seul dans les bois.

- Oui, mais je vais d'abord parler à Marco. Je pourrai être de retour à temps mais je ne voulais pas partir avant d'avoir pu te dire bonjour.

" Parfait ! Je vais nous préparer un bon petit plat : ça vaut davantage le coup si on est trois... Mais file vite, va. On mangera à ton retour."
Ainsi congédié, il ne lui restait plus qu'à se mettre en route.

Il avait plu pendant la nuit, rafraîchissant l'atmosphère et humidifiant le sol : la terre des chemins, devenue boue, collait à ses bottes tandis qu'il se dirigeait vers l'orée du bois. Il entendait au loin les haches des bûcherons, et, beaucoup plus proche, une hache isolée : celle de l'ancien chasseur, qu'il trouva exactement là où Martha le lui avait indiqué.
Face à un tas impressionnant de bois datant de l'hiver précédent, Marco s'activait, avec des gestes calmes et précis. Chaque tronçon de bois devait être découpé en bûches prête à servir, celles-ci étant ensuite entassées dans une charrette.
" Ah, vous voilà", s'exclama Martha, surgissant de derrière le tas de bois. Elle portait trois bûches dans ses bras, qu'elle rangea soigneusement dans la charrette.
Marco, plus bourru, se contenta de le saluer d'un signe de tête et d'un sourire.
" Vous tombez bien, je commençais à avoir mal aux reins ! Si vous n'avez pas besoin de moi ici, je pense que je vais aller au verger. La pluie a dû faire tomber les pommes..."

Frapper quelques bûches - surtout pour rendre service - n'était pas pour lui déplaire mais Kasumi avait avant tout besoin de parler à Marco. Il espérait simplement que Martha comprendrait et offrirait d'aller chercher les pommes pendant que lui-même s'occuperait du bois :

- Je peux vous relayer ici, vous avez bien mérité une pause. Mais si cela ne vous dérange pas, j'aurais un sujet important à aborder avec vous, Marco...

Martha lui jeta un regard intrigué, mais n'osa pas poser poser de questions.
" On se voit à midi à la maison, lança-t-elle à Kasumi. Marco, si tu veux dîner avec nous, tu es le bienvenu !"
Et elle s'en fut en direction du village.
Marco, un peu embarrassé, adressa un sourire un tendu à Kasumi.
" Heu... C'est gentil à vous d'aider. J'ai une deuxième hache, si vous voulez, on avancera plus vite... Prenez-la, elle est à l'avant de la charrette"
Il semblait lui aussi intrigué par les paroles de Kasumi, sans trop savoir qu'en dire...

S'occuper l'esprit n'était pas une mauvaise chose, même si Kasumi aurait certainement préféré que cette conversation se déroule sans que son interlocuteur n'ait un objet tranchant entre les mains. Néanmoins, les dés en étaient jetés et il alla chercher la seconde hache avant de réunir un peu de bois à couper. Il ne savait pas vraiment comment aborder le sujet mais il finit par se lancer à l'eau :

- Pardonnez-moi de faire tant de mystères. Mais je pensais que c'était nécessaire. Je voulais m'assurer de ce que j'avais découvert avant de vous donner de faux espoirs. Mais j'ai sans doute trop tarder à aborder le sujet avec vous...

Marco le regarda sans comprendre.
" De quel genre... d'espoir vous voulez parler ?"
Il y avait une tension dans sa voix, comme s'il appréhendait la réponse. Il tenait sa hache baissée, oubliant totalement la grume de bois qu'il était occupé à trancher une seconde plus tôt.

Kasumi aussi avait délaissé son travail pour se concentrer sur la conversation et la tournure de mots qui seraient le moins susceptible de blesser le père en deuil :

- Cela concerne votre fils. J'ai récemment découvert que la secte qui sévissait dans ces bois ne l'avait pas tué il y a des années. une partie de lui a même survécu...

Il marqua une pause, cherchant à nouveau ses mots avant de poursuivre :

- Je ne sais pas comment trouver les mots... Votre fils n'est pas mort... Mais il a été maudit. Une malédiction difficile à lever. Je n'en avais pas les compétences.

Marco avait blêmi aux premiers mots de Kasumi, puis l'avait fixé d'un air effaré, semblant ne pas comprendre où le jeune clerc voulait en venir.
" J'comprends pas, fit-il, bourru. Si vous arrêtiez de tourner autour du pot, ça m'aiderait. Ça fait des années qu'il a disparu, d't'façon. J'ai fait mon deuil, pas eu l'choix. Alors pourquoi vous v'nez m'embrouiller ? Vous voulez en venir où ? Une partie de lui a survécu, ça veut dire quoi ? Qu'il est une sorte d'âme en peine ou de fantôme ? Mais vous dites qu'il est pas mort... De quelle malédiction vous voulez parler ?"

Kasumi se sentait un peu bête de ne pas être allé droit au but : son interlocuteur n'était visiblement pas familier des circonvolutions et il était assez solidse pour entendre toute la vériré sans fard. Il aurait du le savoir. Il l'invita à s'asseoir avant de poursuivre :

- Très bien. Votre fils a été mordu par un loup-garou à l'époque. Il a survécu à ses blessures mais il a contracté la maladie. Sa personnalité en a été étouffée toutes ces années mais il restait tout de même une part de lui quand nous l'avons découvert, Mylène et moi. Si cela n'avait pas été le cas, il aurait été trop dangereux pour que je le laisse en vie. Mais j'ai préféré lui laisser une chance de reprendre le dessus. Les chances sont faibles mais je l'ai confié à des amis qui pourraient l'y aider. Je sais que cela doit vous faire un choc et j'aurais du vous en parler. Mais les événements se sont précipités et j'ai été dépassé.

Marco avait beau prétendre avoir fait son deuil depuis plusieurs années, Kasumi le vit accuser nettement le coup. Il blêmit et porter la main à son cœur, presque au bord du malaise, avant de se laisser tomber lourdement sur un tronc coupé.
" Il... C'est... un... un loup-garou ?" fit-il d'une voix blanche.
Il se tut, les yeux dans le vague, peinant à assimiler les informations qu'il venait de recevoir.

Kasumi l'invita doucement à s'asseoir sur la souche coupée la plus proche. Il s'était montré maladroit et sans doute un peu brutal dans sa façon d'aborder ce terrible sujet. Un peu comme la façon dont il avait tenté de contrôler les émotions de sa jeune apprentie - décidément il n'était pas doué dans les relations humaines. Son espit vagabonda pour s'interroger sur ce qu'était devenue la jeune adolescente. Il espérait qu'elle ne lui en voulait pas au point de l'éviter sciemment pendant des jours. Sans doute s'était-il aliéné Marco de la même façon mais il s'en voulut d'une telle pensée égoïste. Il tenta d'adoucir son propos du mieux qu'il pouvait :

- Oui mais ce n'était pas sa faute. Et malgré tout le temps qui est passé, il a conservé assez de force de caractère pour lutter contre le mal qui l'afflige. Peut-être assez pour un jour le contrôler suffisamment pour redevenir le fils que vous avez perdu. Je n'ose imaginer la peine qui est la vôtre...

Le vieil homme ne réagit pas tout de suite, puis le regarda avec une certaine incrédulité.
" Ce que vous dite... c'est absurde. Je ne suis pas totalement gâteux, je sais ce qu'est qu'un loup-garou. Il n'est plus un homme. Sauf erreur de ma part, c'est lui qui a capturé le gosse de Bertrand ? Lui qui dirigeait les malarites et a voulu vous tuer ? Il n'y avait pas deux loup-garous, n'est-ce pas, il n'y en a qu'un ? Comment, avec ça, osez-vous vouloir me faire croire qu'il reste de l'humanité en lui ? Je comprends bien que vous essayiez de me ménager, mais... Ce n'est pas utile. Il est mort pour moi depuis des années. J'aurais préféré qu'il le reste..."

Kasumi ne put réprimer un élan coupable de soulagement en songeant que les retrouvailles entre Yvan et son père auraient pu virer au drame au vu de la prime réactoion de ce dernier. Sans justifier le fait qu'il ait gardé ces informations pour lui, cela légitimait en partie son choix mais c'était là une pensée bien égoïste car elle ne soulageait que sa propre conscience.

- Je comprends votre réaction. Et je suis désolé d'être porteur de mauvaises nouvelles.

Il aurait pu ajouter qu'Yvan n'était pas responsable des actes qu'il avait commis mais Marco n'était pas prêt à l'entendre. Peut-être plus tard, quand il aurait en partie digéré ces nouvelles.

Marco ne répondit pas, le visage sombre, fermé. Puis il se redressa, saisit une hache, et entreprit de couper des tronçons de bois, sans un mot. Il était visiblement perdu dans ses pensées. Peut-être, avec le temps, pourrait-il accepter la nouvelle de façon plus positive... mais pour le moment, il semblait avoir surtout besoin d'évacuer ses sentiments négatifs. Il évitait le regard de Kasumi.
" Je comprends bien que vous avez voulu me ménager et essayer de me présenter les choses de façon positive, finit-il par dire d'une voix un peu rauque. Et je vous remercie pour ça. Vous aviez l'air sincère. Mais moi... je ne crois pas qu'il puisse redevenir un jour mon fils. Ce n'est sans doute pas très lathandrite... mais je n'ai jamais été l'un de ces optimistes béats qui espèrent n'importe quoi. Et donc, je préfère ne pas voir ce qu'il est devenu. Je préfère me souvenir de ce qu'il était autrefois. Si vous dites que vous l'avez confié à des amis qui peuvent l'aider, alors je vous fait confiance. Tout ce qui compte, c'est qu'il ne cause pas d'autres morts..."

Kasumi se releva pour aller reposer la seconde hache à l'endroit où il l'avait prise : ce dont avait besoin Marco était de rester un peu seul pour évacuer ses sentiments et intégrer les possibilités que recelaient les informations à propos de son fils. Le demi-elfe ajouta cependant qu'il était parfaitement d'accord avec ce point de vue : il avait fait certains choix avec un espoir de rédemption pour un innocent mais avait surtout eu à coeur que ce dernier ne puisse plus menacer la communauté qu'il s'était mis en devoir de défendre :

- La seule que nous pouvons décemment espérer est qu'il en ressortira quelque-chose de bon ou en tous cas rien de mauvais. Je dois maintenant vous laisser. Je vous remercie d'avoir pris le temps de m'écouter.

Après avoir pris congé de Marco, il lui restait une autre converastion potentiellement plus difficile avec son apprentie cette fois. Soudain la perspective que quelques nuits passées en pleine Forêt Maudite ne semblait plus si terrible. Au moins s'y sentirait-il un peu dans son élément et aurait l'impression de plus contrôler la situation et son destin.

Il trouva Mylène chez elle, en train d'enlever les mauvaises herbes du jardin. Elle avait le visage fermé, le regard triste. Il lui sembla qu'elle avait maigri, mais peut-être était-ce une illusion.
Elle parut surprise de le voir approcher, et un peu mal à l'aise également. Elle se redressa, sa bêche à la main.
" Heu... Bonjour..."
Elle semblait ne pas savoir quoi ajouter, et elle resta à se dandiner d'un pied sur l'autre.

Kasumi se sentait soudain encore plus bête que face au père d'Yvan. Avant d'aller prendre des nouvelles de Mylène, il avait tenté d'imaginer ce qu'il pourrait bien lui dire sans vraiment parvenir à une conclusion satisfaisante. La trouvant encore plus mutique qu'il l'avait craint, il en fut réduit à une maladroite improvisation :

- Hum... tu as l'air en forme - ce qui était loin d'être vrai. Je commençais à m'inquiéter que tu ne donnes aucune nouvelle alors je suis venu voir comment tu allais. Je sais que tu dois encore m'en vouloir...

Mylène lui retourna un regard morne... et un brin rancunier.
" Je vous en veux surtout d'avoir envisagé sérieusement de le tuer, fit-elle d'un ton sec. Ça... c'est un truc que je ne peux pas digérer."
Elle détourna le regard, et haussa les épaules.
" Après, je suppose que je vais bien, oui. Je suis rentrée en un seul morceau, c'est l'essentiel, non?"

Pour le coup, Kasumi s'était préparé à ce genre de reproches et il estimait qu'il était temps de crever cet abcès avant qu'il ne s'infecte au point de rendre toute relation impossible avec son apprentie. Il répondit d'un ton calme et patient sans vraiment s'attendre à une réaction positive. Du moins à courte terme :

- Te permettre de rentrer en vie était bien la première de mes responsabilités. Tout comme assurer qu'Yvan ne puisse plus être un problème pour les villageois ou les voyageurs de la région. L'idéalisme est une belle chose qu'il ne faut pas que tu perdes de vue. Jamais. Mais parfois tu seras confrontée à des choix difficiles et la sagesse te fera choisir le moindre des maux. Du moins je l'espère. Pour l'heure, tu es en colère et tu as raison de l'être : je n'aurais pas dû t'impliquer dans une mission qui te touchait de si près mais je l'ai fait par honnêteté à ton égard.

Comme il s'y attendait, la colère de la jeune fille ne fit qu'augmenter.
" Ah parce qu'en plus, vous imaginez que vous auriez peut-être dû me garder à l'écart ?! J'avais le droit de savoir ! Et de vous empêcher de faire n'importe quoi ! C'est mon ami, alors je devais le défendre ! Et son père aussi, il avait le droit de savoir... Vous lui avez dit, finalement ? Il doit être furieux, non ? A sa place, je ne pourrais pas pardonner..."

Même s'il n'en voyait pas encore le moindre bénéfice immédiat, Kasumi était assez avisé pour deviner qu'il était bon que cette colère contenue s'exprime, que Mylène puisse livrer le fond de sa pensée à ses dépens. Peut-être pourrait-elle passer à autre chose et profiter des prochains jours pour s'apaiser plutôt que fulminer en ressassant ses griefs. Il jugea bien sûr préférable de ne pas lui livrer l'état de ses réflexion au risque de gâcher tout l'effet de sa démarche.

- Tu as raison. Son père n'était pas heureux de l'entendre mais il avait mérité de le savoir. Tout comme tu as mérité mes excuses avant que je ne m'en aille, pour ce que ça vaut. Au revoir, Mylène.

La jeune fille parut interloquée par cette déclaration brutale.
" Heu... Parce que... vous partez ? Vous allez où ? Vous quittez le village, comme ça ? Me dites pas que je suis censée juste écouter vos excuses sans poser de question ?"
Il y avait indéniablement de la curiosité sous la colère.

C'était bien ce qu'il avait escompté entendre, un espoir que sa relation naissante et houleuse avec son apprentie ne s'était pas irrémédiablement achevée au premier douloureux dilemne que le destin avait mis sur leur chemin. Il décida toutefois de ne pas poursuivre cette petite mise en scène au risque de faire plus de mal que de bien :

- Je dois retrouver Première Neige, j'ai perdu le contact avec elle. Et aussi essayer de déplacer les loups comme nous l'avions prévu au départ. Cela ne devrait pas me prendre plus de quelques jours.

" Oh..."
Elle haussa les épaules. Puis elle sembla réfléchir quelques instants et reprit.
" J'espère que vous arriverez à les déplacer. Mais je comprends que ça vous inquiète d'avoir perdu le lien. Je suppose que c'est parce qu'elle est trop loin... "
A nouveau, elle haussa les épaules, comme si tout cela ne la concernait pas vraiment.
" Bon voyage, en tout cas..."

Kasumi ne s'était attendu à rien de plus de cette rencontre - et il aurait très certainement été embarassé si Mylène l'avait surpris en suggérant de l'accompagner. Le demi-elfe se déplacerait plus vite seul et la mission délicate qui l'attendait pour convaincre les loups de le suivre et de lui faire confiance exigerait toute sa concentration. Il prit congé sur quelques platitudes de circonstances. Désormais, plus rien e s'opposait à son départ mais il avait promis de déjeuner avec Sylvia, une perspective bien plus douce et réjouissante que ses obligations de la matinée.

Sylvia avait préparé le repas -un repas de fête en comparaison de ce qu'il avait avalé durant sa récente expédition- et était visiblement enchantée de l'avoir auprès d'elle. Il fallait bien admettre que sa présence à la mi-journée était très rare. Martha avait eu l'excellente idée d'aller déjeuner avec sa fille et ses petits-enfants, les laissant en tête à tête, ce qui était presque aussi rare. Tout contribuait donc à mettre la jeune rôdeuse d'excellente humeur, et elle semblait parfaitement épanouie. Peut-être parce qu'elle savait que son absence prochaine serait de courte durée.
Elle lui demanda un compte-rendu détaillé de ses visites du matin, ne s'étonna pas de l'humeur de Mylène mais parut surprise de la réaction de Marco.
" Je pensais qu'il voudrait voir par lui-même, et insister pour aller en Lorien. Tu lui as dit que tu essaierais de retourner le voir dans quelques temps ? Enfin... si tu comptes toujours y aller... "

Kasumi sentait, comme toujours, le poids des préoccupations s'allégeait considérablement quand il était en compagnie de sa fiancée et échangeait posément sur ses intentions et les décisions qu'il devait prendre. Il se rendait bien compte que c'était la solitude qu'il avait connu ces dernières années qui aurait fini par le rendre amer voire cynique et qu'il s'était souvent mis beaucoup de pression en tâchant de tout gérer seul, y compris les conséquences de ses choix. Avec Sylvia, il pouvait simplement se sentir libre de parler et d'échanger, cherchant son avis au-delà de son assentiment. Il se plaisait à penser qu'à deux, ils fonctionnaient beaucoup mieux. Comme cela avait été le cas durant tout leur apprentissage en Haute Forêt.

- Oui, je n'ai pas changé d'avis mais nous aurons le temps d'y penser. Je pense que Marco a vécu des moments extrêmement douloureux pour faire son deuil. Et aussi qu'il doit craindre d'avoir à les revivre s'il se laisse aller à espérer. Mais si je revenais avec de bonnes nouvelles, il les accueillerait certainement différemment.

" Je ne sais pas si ce sera possible, de revenir avec de bonnes nouvelles..."
Sylvia secoua la tête d'un air désabusé, puis grimaça.
" Bon... Je crois que je n'ai pas encore bien saisi l'essence lathandrite de ton île d'adoption, reconnut-elle. Je suppose que je devrais plutôt dire que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir, quelque chose comme ça. Mais nos druides de Haute-Forêt ne m'ont pas appris ce genre d'optimisme. Et je comprends bien que Marco n'y croie pas trop, lui non plus. Enfin... nous en saurons davantage au printemps."
Elle sourit.
" Mais donc, je devrais t'avoir tout à moi jusqu'à la fin de l'hiver, c'est ça ? C'est formidable ! J'ai commencé à me mettre à la recherche des matériaux dont tu m'as donné la liste. J'aurai tout à ton retour... et on déménagera enfin ! Par contre, Bertrand m'a demandé quand on se mariait, ajouta-t-elle plus sérieusement. Je lui avais parlé des Grandes Moissons... et ça approche rudement vite. C'est dans guère plus de deux veilles. Il faut qu'on lui donne le nom des témoins, et il y a de la paperasse. Il faut lui dire si on fait une grosse fête et si on a besoin de la salle communale..."
La perspective du mariage l'emplissait d'un bonheur qui irradiait sur son visage.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Peyregorde - maison de Martha