La Couronne de Cuivre

" Si vous êtes pris... J'espère que vous parviendrez à trouver de belles explications, oui. Mais c'est votre métier, je suppose. De deux choses l'une, soit vous faites complètement erreur et vous aurez à affronter l'ire d'un Semeur mécontent, soit vous voyez juste et... je ne sais pas si vous pourrez cacher quoi que ce soit à ceux qui vous prendront. Mais soit, n'envisageons pas votre échec, ça ne sert pas à grand chose."
Il soupira.
" Je pense que je vais aller me coucher. Je n'ai pas la chance d'être de race pure et mon sommeil est très humain. Si vous n'avez plus besoin de moi, je vous souhaite donc la bonne nuit."

Le barde lui souhaita amicalement la bonne nuit. Lui-même n'allait pas tarder à se coucher. Néanmoins, auparavant, sans doute irait-il s'aérer l'esprit dans le jardin, ne serait-ce que pour s'apaiser un peu. L'opération qu'ils s'apprêtaient à lancer était risquée et réclamait, de sa part, une implication plus grande qu'il ne l'avait imaginé - laquelle allait à l'encontre des engagements qu'il avait pris envers Baptiste : il faudrait qu'il se concentre sur les moyens de repli qui resteraient à sa portée au cas où cela tournerait mal... Cependant, si les jumeaux souhaitaient parler avec lui, il ne serait évidemment pas contraire.

Mais Dothiel et Caenlyn ne semblaient pas vouloir discuter de leur éventuelle intervention avant le lendemain et les dernières informations nécessaires. Le premier salua Taliesin et quitta la pièce un peu après Amrod, la seconde resta un moment à étudier la carte que le pouvoir de Lathandre leur avait procuré avant de prendre congé à son tour. Le barde eut donc tout le loisir de rejoindre le jardin intérieur, avec sa tour aux allures de donjon endormi, sa fontaine, ses petits bancs à l'abri de buissons fleuris. La nuit était encore dégagée mais, Taliesin le savait, il ne tarderait pas à pleuvoir, comme de coutume.

Il aurait bien fumé la pipe mais, étant à cours de tabac et n'ayant pas le cœur à déranger un domestique pour s'en procurer, il se contenta de marcher un moment, les mains dans le dos, l'esprit dans le vague. Il s'efforçait de ne pas trop songer à ses fils, laissés dans la clairière à la garde d'un pixie, à Galathée, qui devait commencer à s'étonner de ne pas recevoir de nouvelles, à Cordélia, dont il ne savait même pas si elle vivait toujours... Il s'efforçait de ne pas penser, non plus, à ce qui les attendait dans ce sanctuaire si mpystérieux... En fait, il s'efforçait de ne songer à rien, de s'imprégner plutôt de la quiétude du jardin. Quand il y fut plus ou moins parvenu, il gagna sa chambre pour s'étendre : puisqu'il n'était nullement nécessaire de demeurer aux aguets, c'est au bon vieux sommeil humain qu'il s'abandonnerait.

Et le matin vint sans que quoi que ce soit d'étrange ne se soit produit. La demeure d'Amrod était silencieuse à la nuit et si les domestiques se mirent en mouvement avant l'aube, Taliesin ne les entendit pas. Il fut réveillé par le chant des oiseaux dans le jardin voisin de sa fenêtre, puis la lumière qui verdit sa chambre d'inspiration elfique, jusqu'au moment où quelques coups frappés à la porte l'avertirent de l'arrivée d'un serviteur. Ce dernier n'entra pas, se contentant de lui demander s'il préférait prendre son petit déjeuner au jardin, dans sa chambre ou dans la salle à manger. Leur hôte était sorti tôt, il ne pourrait donc pas être présent pour rompre le jeûne en sa compagnie.

Le barde avoua poliment sa préférence pour le jardin. C'était ce qui le tentait le plus et, de surcroit, il se disait que c'est pour lui qu'opteraient ses camarades. Une fois sa réponse donnée, il se leva, s'habilla et entreprit de se rendre sur les lieux du déjeuner. Il n'était pas tout à fait serein - comment l'être, compte tenu de ce qui se préparait ? - mais au moins se sentait-il reposé : c'était toujours cela de pris !

Il fut donc invité au jardin quelques minutes plus tard : on lui avait installé une table sous la tonnelle où il avait rencontré Amrod et la princesse lors de sa première visite. Le petit déjeuner était plantureux et varié, mais sans aucun point commun avec ce qu'on servait ordinairement dans les tavernes de la région. Non, tout était fruité, léger, raffiné. Il n'y avait ni fromage, ni charcuterie, et le pain frais fleurait bon quelque chose d'indéterminé que Taliesin reconnut sans pouvoir nommer, un goût ancien, d'autrefois. Dothiel et Caenlyn firent leur apparition alors qu'il mangeait et lui apprirent qu'ils s'étaient levés des heures plus tôt, déjà, et étaient partis se promener en ville avant le réveil des humains. Ils avaient été sages, cependant, et discrets, du moins le pensaient-ils.

De toute façon, vu l'heure fort matinale - sinon tout bonnement nocturne - à laquelle ils étaient sortis, ils n'avaient pas dû croiser grand monde. Et quand bien même des badauds ou des gardes se seraient-ils intéressés à eux : c'était officiellement que leur trio avait franchi les portes de la cité et rien ne les obligeait donc à demeurer cantonnés dans la résidence de leur hôte. Bref, leur excursion n'était pas pour lui une source d'inquiétude et il se contenta de leur demander s'ils l'avaient trouvée à leur goût.

Les deux elfes n'avaient rien vu de très marquant : comme Taliesin l'avait deviné, les gens dormaient pour la plupart, et la petite cité agricole était tranquille, rutilante après la pluie nocturne, fleurie de partout, balcons et petits parcs, jardinets et vasques posées sous les porches ou dans les vitrines. Ils étaient revenus à la villa quand les premières fenêtres s'étaient ouvertes et que les premiers travailleurs du matin s'étaient mis en mouvement. Même en n'ayant rien à se reprocher, ils se sentaient déjà un peu coupables, probablement.
" Est-ce que tu penses qu'on doit prévoir des provisions, ce genre de choses ? Combien de temps penses-tu qu'on va rester là dedans ?" demanda finalement Dothiel.

-Alors là, je n'en ai pas la moindre idée : tout va dépendre de la taille des lieux, de notre capacité à rester discrets, de l'opposition que nous pourrions rencontrer, de ce que nous trouverons et devrons faire ensuite...
Il haussa les épaules.
-La dernière fois que j'ai infiltré un temple, l'opération s'est prolongée beaucoup plus que nous ne l'avions imaginé, à cause d'une série d'imprévus... Du coup, je serais d'avis de prendre de quoi pallier à toutes les éventualités sans pour autant nous surcharger.

" Je pense que c'est mieux aussi, dit Caenlyn. Et puis parfois manger aide à réfléchir.
— Mouais, il faut quand même qu'on reste légers."
Elle soupira.
" Tu penses qu'on va s'introduire clandestinement dans les lieux ? On aurait peut-être intérêt à chercher un passage sur la carte, alors... La butte est drôlement escarpée."

L'elfe acquiesça aussitôt.
-Tu as raison. De surcroit, mieux vaut mémoriser ce plan un maximum avant de nous mettre en route : cela pourrait nous épargner bien des déconvenues une fois sur place.
Ne restait plus qu'à aller chercher ce fameux document procuré par le pipeau. Ensuite, ils auraient de quoi s'occuper un bon moment.

Une fois Taliesin en retour, ils déployèrent la carte sur la table, écartant les reliefs de son repas. La brise les força à utiliser ici une tasse et là un petit panier de pains ronds pour éviter que le parchemin ne s'envole. Le plan comportait de nombreux détails mais il manquait une légende pour en faire parfaitement sens. Une vue sur l'abbaye, ou un expert des lieux aurait pu les aider, car ils ne pouvaient compter que sur leur mémoire — imparfaite — des lieux.
" Bon, ça c'est l'entrée principale, dit Caenlyn en désignant un passage dans l'enceinte extérieure. Puis on dirait qu'il y a deux autres enceintes à l'intérieur, comme pour diviser les lieux en trois zones ?"
Ils parcoururent la muraille extérieure du regard. Il semblait y avoir une petite porte de l'autre côté, à flanc de montagne, mais c'était difficile de savoir si c'était un passage réel ou simplement une trappe pour larguer les ordures... C'était la seule irrégularité sur le pourtour, à l'exception de l'entrée principale.

-Peut-être cela a-t-il une signification rituelle... avança le barde. Néanmoins, cet endroit me fait davantage penser à une forteresse qu'à un sanctuaire, ce qui est assez curieux. Sauf si, au moment de sa construction, la vallée était à ce point dangereuse qu'on ait jugé nécessaire de bâtir trois murs différents, là où la plupart des châteaux et des villages s'en contentent d'un seul... Mais pour en revenir à nns affaires, reste à espérer que ces enceintes intérieures ne soient pas trop surveillées ou que des tunnels permettent aisément de les franchir. Sinon, la partie sera vraiment ardue pour nous.

" Bah, on est des elfes. Escalader, se cacher, épier, c'est dans notre nature." dit Caenlyn avec désinvolture.
Dothiel continuait à scruter la carte.
" On pourrait aussi décider d'entrer plus frontalement... ou de profiter de l'ouverture du portail pour nous glisser à l'intérieur... Même si le temple est fermé aux gens, les portes s'ouvrent pour laisser sortir les prêtres, je suppose... ou au moins entrer de la nourriture... Ou alors ils vivent complètement repliés sur eux-mêmes ?"

-Pour autant que je sache, seules les femmes sont totalement coupées du monde. Les hommes, en tout cas certains d'entre eux, sortent parfois de l'abbaye. Et comme tu le disais, il faut bien leur livrer de la nourriture... Toutefois, je reste d'avis de fouiller la piste de cette possible issue secondaire. Si elle se confirme, cela nous aiderait beaucoup, car passer par la grande porte serait risqué et réclamerait au bas mot de se rendre invisibles. Certes, je dispose du sortilège adéquat, mais si je l'utilise d'emblée, il pourrait ensuite nous faire cruellement défaut...

" On pourrait aussi se planquer dans un tonneau à l'arrière d'une charrette..." dit Caenlyn en se servant un verre de jus de fruits.
Dothiel leva les yeux au ciel.
" Tu lis beaucoup trop de romans, toi." grommela-t-elle.
Elle revint à Taliesin.
" Si on décide d'aller par derrière... Caenlyn et moi pouvons aller repérer les lieux pendant que tu attends Amrod."

Il hésita.
-Comme vous voulez. Ça m'ennuie de rester ici à ne rien faire en vous laissant tout le travail mais vous êtes assurément beaucoup plus doués que moi pour ce genre de repérages. Par ailleurs, j'aurai sans doute pu recourir à la scrutation voire à d'autres sortilèges avant votre retour.

" Ne t'en fais pas... Je pense que tu auras mille occasions de te rendre utile d'ici à ce que nous repartions de cet endroit."
Caenlyn vida son verre.
" Une petite balade en forêt, voilà qui est dans mes cordes."
Ils se levèrent tous deux.
" Nous serons de retour avant la nuit." l'assura Dothiel avant qu'ils ne prennent congé.

Amrod ne revient qu'une petite heure plus tard, après que Taliesin ait pu profiter du jardin, encore, et de la salle d'eau, qui n'était pas désagréable. Le marchand parut légèrement fâché que les deux elfes soient sortis, mais il n'en dit rien. Il avait avec lui le parchemin de scrutation espéré.

Taliesin le salua amicalement mais ne lui demanda pas immédiatement le parchemin : certes, il lui faudrait un peu de temps pour l'étudier avant de savoir s'il serait bel et bien en mesure de s'en servir mais, du temps, ils en avaient d'ici le retour des jumeaux. De plus, il fallait qu'il tranche définitivement quant à la personne qu'il tenterait de cibler. Puisqu'il semblait probable que la princesse ait connu un sort funeste, il songeait à contacter Cordélia. Toutefois, si l'enlèvement de celle-ci n'avait aucun rapport avec ce qui se tramait au sanctuaire, le sortilège ne les avancerait pas sur ce plan, ce qui contrarierait sans doute ses compagnons...

Il faudrait pourtant qu'il prenne cette décision en son âme et conscience, sauf s'il entendait en discuter avec ses compagnons. Le parchemin, quant à lui, était des plus ordinaires : il reprenait l'incantation à prononcer, les gestes à effectuer, pour espionner une personne à distance. Il était préférable de disposer d'un objet ayant appartenu à la personne, ou d'un portrait, voire d'une mèche de cheveu, quelque chose du genre, mais si le souvenir que l'on en avait était suffisamment clair, c'était aussi possible de ne partir de rien. Quoi qu'il en soit, c'était un sortilège complexe et l'échec n'était pas exclu...

Puisque qu'il devait le parchemin au maître des lieux, puisque celui-ci prenait des risques en les aidant, il jugea préférable de lui faire part de ses projets. Comme il connaissait mieux Cordélia, comme il pensait avoir, dans son sac, l'un ou l'autre des objets récupérés dans la chambre qu'elle avait abandonnée, à l'auberge, il estimait avoir plus de chances de réussite si c'était elle qu'il s'efforçait de contacter. Toutefois, si Amrod préférait qu'il cible la princesse et s'il pouvait lui fournir un effet personnel lui ayant appartenu ou, au moins, un dessin la représentant, il se rangerait à son avis.

HRP : désolée, j'avais point vu ce message...

Taliesin trouva Amrod dans son bureau, une pièce vaste et lumineuse, et, de manière assez surprenante, extrêmement bien rangée, presque vide, avec une table en bois clair sur laquelle le demi-elfe plaçait les objets qu'il expertisait. Il était penché sur une tapisserie de belle taille lorsque le barde le rejoignit et il l'invita à s'asseoir avant d'écouter ses incertitudes.
" Ecoutez. Tout part de vos intuitions. Je décide de m'y fier. Donc je décide de m'y fier jusqu'au bout. Vous avez la conviction que votre amie est liée à la disparition d'Elwyn. Cela me suffit."

Taliesin sourit.
-Bigre, c'est un sacré poids que vous faites reposer sur mes épaulles ! Mais soit, je vais faire à mon idée. Et si d'aventure cela se solde par un échec cuisant, je promets de ne plus me perdre en vaines conjectures...
Surtout que, jusqu'ici, il n'avait pu vérifier aucune d'entre elles. Toutefois, l'heure était venue d'agir, ce qu'il allait faire sans tarder.

Il lui fallut trouver un endroit tranquille — sa chambre — et se mettre dans de bonnes conditions pour pouvoir lancer son sortilège. Il l'avait désormais suffisamment étudié pour se sentir à l'aise avec l'incantation, mais il s'installa devant le miroir poli nécessaire — un des objets personnels d'Amrod, un ouvrage elfique en argent de grande qualité — et disposa l'oeil de faucon et les minéraux requis devant lui. La formule en elle-même prenait une heure et l'elfe s'y mit sans attendre. La version bardique du sortilège était chantée, bien sûr, mais Taliesin, à l'aide du parchemin, était parfaitement capable d'en reproduire la mélodie. Pendant de longues minutes, sa voix résonna entre les murs clairs de la vaste pièce, générant peu à peu un courant de magie multicolore. Il évoqua Cordélia dans son esprit, tout ce qu'il savait d'elle, sa silhouette, son visage, sa voix, ses expressions, sa personnalité. En fin observateur qu'il était, il ne lui fut pas très difficile de retrouver des épisodes entiers de leur courte aventure commune, depuis son arrivée parmi eux, sur les bords de la Sylvestre, jusqu'à leur dernière rencontre, peu avant sa disparition.
Au bout de l'heure de chant, la surface du miroir se brouilla jusqu'à présenter une surface noire. Nulle trace de Cordélia, juste ce noir. Qui s'avéra être brun, un mur, quand Taliesin s'en écarta mentalement. Il avait réussi à projeter son esprit quelque part, mais l'objet de son sortilège demeurait invisible, protégé, vraisemblablement, par une barrière qui repoussait la magie de scrutation. Par contre, il avait toute liberté de s'en détourner, de regarder derrière lui. Il découvrit alors un espace de terre battue, d'herbe rase et de petites maisonnettes, à l'abri de hauts murs.
Deux femmes en robe blanche et brune arrachaient des mauvaises herbes dans un carré de potager. Une autre, assise sur un banc, lisait. Un peu plus loin, une troisième balayait un seuil en chantant d'une voix claire. Elles étaient toutes relativement jeunes, paraissaient en bonne santé. Aucune n'était Cordélia ou la princesse elfe.
Le barde put repérer la position du soleil, quelques toits, une fontaine, la flèche d'un temple sur la droite, des montagnes beaucoup plus loin.
Déjà, l'image devenait moins nette, moins précise... Le sortilège ne tarderait pas à se rompre...

Bien que la tentation soit grande, il se garda de s'interroger sur ce qu'il voyait, d'en tirer de grandes conclusions. Il consacra au contraire les dernières secondes qui lui étaient imparties à ouvrir grand les yeux et à se déplacer afin de relever le plus de détails possible, que ce soit sur le paysage lointain, les environs immédiats, les femmes qui s'y trouvaient... Autant de détails qu'il coucherait sur le papier sitôt que le sortilège aurait pris fin et qu'il soumettrait ensuite à Amrod, pour voir s'ils lui rappelaient quelque chose.

Quand il eut fait le récit de ce qu'il avait observé à Amrod, celui-ci demeura silencieux un moment.
" Il s'agit probablement de l'intérieur du sanctuaire... De ce que vous avez vu... Si vos souvenirs sont bons... C'est probablement entre la seconde et la troisième enceinte. Vous avez dit que le Temple était sur la droite... Il suffira sans doute d'examiner le plan pour pouvoir replacer exactement les bâtiments... Et votre amie est à l'intérieur. Vous aviez vu juste."

Probablement à cause des montagnes, qui n'étaient gère visibles depuis la vallée, Taliesin n'avait pas été certain que le sortilège lui ait montré l'intérieur du sanctuaire. Néanmoins, la réaction de son hôte balaya ses doutes.
-Croyez-bien que j'aurais préféré me tromper...
Ce qui était vrai : certes, il avait enfin réussi à localiser Cordélia, mais ils savaient désormais qu'il y avait quelque chose de pourri au royaume des Chauntéenss, et les chances pour que les autorités n'aient rien à voir avec toutes les horreurs qui se perpétraient dans la région étaient plus que minces.
-J'ai le plan avec moi, reprit-il en le sortant de sa poche.

Taliesin put donc dérouler le plan sur la table.
" Le temple est là, dit Amrod. Regardez si vous pouvez placer le reste..."
Comme l'avait supposé le demi-elfe, ce n'était pas très compliqué. Taliesin identifia aisément, parmi les petits rectangles tracés à l'encre de Chine, ceux qui figuraient les maisonnettes qu'il avait entrevues. Il identifia également le bâtiment, plus vaste, dans lequel son regard n'avait pu pénétrer. Le tout se trouvait, effectivement, entre la seconde et la troisième enceinte.

-Bon, ç'aurait pu être pire : nous aurions pu devoir aller à l'intérieur de la troisième enceinte, dans le saint des saints...
Ou l'impie des impies, songea-t-il en relevant les yeux.
-Il n'empêche : l'opération n'aura rien d'une promenade de santé. Même lorsque nous serons parvenus sur les lieux, il nous faudra triompher des défenses magiques dont est doté le bâtiment où Cordélia est enfermée : je doute en effet qu'il ne soit protégé que contre les sorts de divination. Et à cela s'ajoutera bien sûr le repli hors du sanctuaire... Bref, nous devrons veiller à ne pas être trop gourmands en termes d'objectifs : sans doute cela se limitera-t-il à libérer mon amie et les elfes survivants, ainsi qu'à récolter quelques preuves attestant de la corruption qui règne en ces lieux. Si nous parvenons à accomplir cela, ce sera déjà beaucoup.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] La Vallée Fertile