[Lieu] La ferme Desmoulins

[Galathée]

C’était un matin comme les autres, ensoleillé, tranquille. Taliesin fut réveillé par les trilles des oiseaux au dehors. En tant que barde, il avait l’oreille pour ces mélodies naturelles qu’une magie ancienne transmettait d’oiseau en oiseau depuis des siècles. Le timbre chaud du merle, un des premiers levés, perché sur la corniche, le chant aigrelet du rouge-gorge qui nichait dans la haie de noisetiers sous leur fenêtre, les accords complexes d’un grive musicienne pourchassant les limaces dans le potager, le gazouillis revendicateur d’un chardonneret posé sur le faîte du toit.
De Galathée, bien sûr, nulle trace. L’elfe avait désormais l’habitude de se lever seul : la rôdeuse se faufilait hors du lit quand il faisait encore noir pour aller s’occuper des animaux de la ferme. Ils avaient en effet acquis un petit troupeau de six vaches une veille plus tôt, et il fallait traire les bêtes chaque matin. Pour l’heure, la jeune femme le faisait spontanément et sans déplaisir, aussi personne ne lui avait disputé la corvée.
Il n’y avait pas d’autres bruits dans la ferme, signe que, sans doute, personne d’autre n’était encore levé.

[Taliesin]

Autrefois tout sauf matinal, l'elfe avait dû modifier ses habitudes depuis l'arrivée des jumeaux et... il s'y était fait, globalement. Se sentant plutôt bien réveillé, il ne paressa pas mais, comme chaque fois qu'il émergeait en premier - enfin, presque en premier -, il se leva, se vêtit et gagna le rez-de-chaussée, afin de préparer le copieux petit déjeuner nécessaire pour sustenter la nombreuse maisonnée. C'était une tâche qui ne lui déplaisait en rien, d'autant qu'il pouvait profiter du calme qui, pour peu de temps encore, régnait dans la ferme. Le calme avant la tempête, en quelque sorte. Une tempête joyeuse qu'il aimait cependant assez, il fallait l'avouer.

[Galathée]

La première personne qui descendit fut bien sûr Guillhem, mal réveillé, rapidement suivi de Baptiste, qui ne parvenait pas à se défaire de ses habitudes lathandrites. Pendant de longues minutes, personne ne dit rien, chacun luttant encore contre les brumes de la nuit. Mais ils n'avaient pas besoin de communiquer verbalement pour s'accorder, et le thé fut bientôt servi.
" Je referai du pain tout à l'heure, proposa Baptiste en contemplant celui qui leur restait, un peu dur, de la veille.
— Oui, oui." grommela Guillhem en se frottant le visage des deux paumes, manifestement incapable d'avoir une conversation sensée à une heure aussi matinale.

[Taliesin]

Pour taquiner le fermier, il fut tenté de lui poser moult épineuses questions ou d'esquisser un grand débat philosophique. Mais... cela n'aurait pas été très charitable, surtout avec le programme qui l'attendait. Aussi se contenta-t-il d'acquiescer à la proposition de Baptiste puis, silencieux, de songer à son propre emploi du temps. Entre la classe, les tâches domestiques, les traveaux de la ferme, les jumeaux... Il ne manquait pas d'occupations. Il se demandait d'ailleurs comment il arriverait à caser, au milieu de tout cela, la reprise de ses activités de barde. Car il faudriat bien qu'il recommence à travailler : l'argent ne tombait pas du ciel et, surtout... cela lui faisait envie.

[Galathée]

Il y avait désormais du mouvement à l'étage, des bruits de pas traînants, puis un glapissement aigu, signalant le réveil d'un des jumeaux. Taliesin n'eut cependant pas le temps d'esquisser un geste : Baptiste avait sauté sur ses pieds et bondi hors de la pièce. Guillhem le regarda filer d'un oeil vitreux puis poussa un profond soupir.
" Je me fais vieux, Taliesin, c'est horrible. Ces gosses vont me tuer rien qu'en... bondissant autour de moi."

[Taliesin]

Il sourit, encourageant.
-Allons, tu n'es pas aussi vieux que tu le prétends, loin s'en faut. Simplement, tu n'as pas une minute pour toi, tu es constamment débordé et tu es donc fort logiquement épuisé...
Il but une gorgée de thé.
-Mais souviens toi que la proposition que Galathée et moi t'avons faite tient toujours : si tu souhaites prendre un peu de repos, aller t'aérer ailleurs, nous tiendrons le fort. Je crois vraiment que ça te ferait du bien.

[Galathée]

" Arrête, veux-tu. J'en faisais le double il y a deux ans, sans fléchir. Ici... Les deux gars m'aident beaucoup et efficacement. On peut dire ce qu'on veut sur les halfelins, mais ils ont du courage, mine de rien. Ta femme gère les animaux à elle seule, Baptiste fait un meilleur intendant que moi, et tu t'occupes des enfants de main de maître. Non, je deviens vieux, c'est tout. Ce n'est pas grave, c'est juste un fait que je dois assimiler."
Il se redressa et s'étira.
" Bon. Je crois que je vais aller au village, aujourd'hui. Ton aîné m'a fait une liste effrayante de choses à rapporter. Tu veux m'accompagner, pour une fois ?"

[Taliesin]

Taliesin hésita.
-C'est tentant, admit-il. Mais comme je n'avais pas du tout envisagé cette possibilité, il faudrait que je change mon programme et... je risque de te mettre en retard.
Noubelle gorgée de thé. Depuis qu'il était libre d'aller et de venir à sa guise, il avait fait quelques expéditions hors de la ferme, ne serait-ce que pour simplement se promener. Pas beaucoup, cependant : il y avait tant de travail !
-Écoute, on verra comment ça se met. Si c'est trop compliqué, je viendrai la prochaine fois.

[Galathée]

" Tu devrais un peu te laisser aller, Taliesin, dit le fermier. Deux ou trois heures d'absence ne provoqueront pas un cataclysme. On peut même embarquer un ou deux de ces lascars, si cela te tranquillise."
La porte s'ouvrit sur le petit Mathieu, qui escalada le banc à côté du barde et attrapa un quignon de pain. Il le pressa entre ses doigts puis, constatant qu'il était trop dur, le remit dans le panier et se mit à genoux pour atteindre les bols.
" Dis, Taliesin, tes bébés, ils vont arrêter quand, de pleurer ? Parce qu'on sait pas dormir tranquillement." demanda-t-il ensuite d'un ton extrêmement sérieux.

[Taliesin]

Il avait failli dire à Guilhem que lui aussi devrait un peu se laisser aller mais... l'arrivée de Mathieu l'avait interrompu dans son élan. Aussi répondit-il plutôt à ce dernier, tout aussi sérieux.
-Laisse -leur encore un peu de temps : pour l'instant, pleurer est le seul moyen dont ils disposent pour nous signaler qu'ils sont réveillés et qu'ils ont besoin qu'on s'occupe d'eux. Mais ne t'en fais pas, ça finira par changer. Et puis...
Il sourit.
-Es-tu bien sûr que tu te lèverais beaucoup plus tard s'ils n'étaient pas là ?

[Galathée]

" T'as raison, c'est pas sûr. Mais c'est à cause de Baptiste. Il se lève toujours tellement tellement tôt ! Il fait plein de bruit dans la chambre ! Il croit qu'il est silencieux mais toutes les lattes du plancher craquent ! Et puis il fredonne. Ça, c'est vraiment horrible."
Guillhem gloussa en lui servant une louche de gruau. La porte s'ouvrit sur Félix, qui avait l'air beaucoup plus réveillé. Il portait Tristan qui fit un sourire ravi en apercevant son père et se mit à gigoter, si bien que le jeune Merlu franchit rapidement les derniers mètres qui le séparaient du barde et lui livra son paquet. A presque un an, les jumeaux se déplaçaient désormais allègrement à quatre pattes et il fallait les surveiller tout le temps... sauf quand ils dormaient. Le fermier servit aussi du gruau à Félix — son aîné à la ferme, désormais — et au plus jeune des garçons de la ferme.

[Taliesin]

Que le barde entreprit aussitôt de nourrir - non sans avoir, évidemment, remercié Felix au préalable.
Tout en donnant à manger à son fils, il songea aux paroles de Mathieu. Il amiait beaucoup la vie qu'ils menaient, cette manière de communauté ou plutôt de grande famille qu'ils formaient : cela lui rappelait sa propre enfance. Mais il fallait admettre qu'ils étaient entassés les uns sur les autres... Sans doute Galathée avait-elle raison : que tout le monde dispose d'un peu plus d'espace, cela leur ferait peut-être du bien. Et puis, ce n'était pas comme si le déménagement qui se profilait les emmènerait de l'autre côté de l'île...

[Galathée]

Tristan se montra semi-collaborant, crachotant de joyeux éclats de gruau sur la table et les genoux de son père. Baptiste ne tarda pas à revenir avec Héloïse, qu'il garda avec lui et entreprit à son tour de nourrir. Benoît et Jehan survinrent de concert, alors que Guillhem terminait. Galathée arriva lors, le sourire tranquille, et elle libéra Baptiste d'Héloïse pour qu'il puisse petit-déjeuner. Le fermier en profita pour s'esquiver. Autour de la table, les enfants piaillaient, se chamaillant pour la confiture, se remémorant leurs menues aventures de la veille, se disputant le tour à la salle d'eau ou le droit d'aller chercher les oeufs des poules.
Victor entra dans la pièce bon dernier, alors que pratiquement tout le monde avait terminé. C'était son habitude et personne ne s'en soucia réellement. Baptiste débarrassa la table avec Félix, ne laissant que le nécessaire pour le petit Desmoulins, lequel se sustenta comme un prince tranquille, aveugle à l'excitation ambiante.

[Taliesin]

Il songea à discuter avec Galathée de la possibilité qu'il aille au village avec Guilhem mais préféra attendre d'être seul avec elle. Pour qu'il puisse faire cette escapade, il faudrait soit renoncer à l'école ce jour-là - ce qui réjouirait la majorité des enfants -, soit la déplacer à l'après-midi, moment où ils étaient moins concentrés. Dans tous les cas, il faudrait les occuper, changer le programme de leurs corvées... Rien d'infaisable, certes, mais cela demandait malgré tout de l'organisation. Et il rechignait à laisser, alors que ce n'était pas prévu, sa compagne seule avec toute la bande, y compris les jumeaux : cela aurait pu avoir des allures de mauvaise surprise.

[Galathée]

Galathée paraissait hésiter à prendre la parole, elle aussi, puis finit par sourire et hausser les épaules. Victor était le dernier dans la pièce, tous les autres avaient déguerpi, mais on entendait le bruit d'une vaisselle en cours à la cuisine.
" Taliesin, je me disais... Je... me demandais... ce que tu penserais d'engager... quelqu'un pour les bébés. Une jeune fille bien. Pour les journées. Au moins l'été."

[Taliesin]

-Oh...
Il s'était attendu à ce que le sujet finisse par être abordé, car ils avaient de plus en plus de choses à faire et... de moins en moins de temps pour les faire. Bien sûr, il aurait préféré qu'ils puissent agir autrement mais... Il fallait voir la réalité en face : ils n'avaient guère le choix, surtout si Galathée et lui reprenaient leur travail à plein temps.
-Honnêtement, je ne vois pas trop comment nous pourrions nous passer d'une telle aide. Je regrette juste que nous ne connaissions pas déjà quelqu'un.

[Galathée]

La rôdeuse sourit, manifestement soulagée.
" Je connais quelqu'un. C'est la seconde fille d'un berger qui vit à quelques lieues d'ici. Ce sont des gens aux moyens modestes et j'ai soigné plusieurs fois des bêtes gracieusement, pour eux. Je pense que si nous leur proposons de prendre Flore à notre service, de la loger, de la nourrir... et de la payer un peu, ils seront ravis. Elle a trois petits frères, elle connait bien les enfants... Je l'ai déjà vue à l'oeuvre, elle est très douce... Ce serait vraiment une bonne solution, je pense. J'ai de plus en plus de travail et tu ne peux pas... Enfin, je n'en sais rien. Tu es peut-être heureux de jouer les nounous mais... j'avais l'impression que tu étais mûr pour te dégager un peu plus de temps, à nouveau."

[Taliesin]

-Tu sais, même si la perspective d'avoir davantage de temps me plait assez, j'aurais pu, dans l'absolu, continuer comme ça un bon moment. Cependant...
Il jeta un regard à Victor. Même si leur situation financière n'était pas totalement désastreuse, il rechignait à l'aborder en sa présence : il préférait le préserver de ce genre de souci.
-Cependant, il va falloir que je recommence à travailler, conclut-il.

[Galathée]

Elle grimaça. Victor bâilla aux corneilles et leur décocha un sourire narquois.
" Tu n'as pas besoin de travailler, Taliesin." lui dit Galathée, en le regardant droit dans les yeux.
Il y avait le trésor de Mersant, le barde ne pouvait pas l'avoir oublié. La part de Victor, celle de Jehan et Benoît et celle de Martin qu'il avait laissée derrière lui. Plus les revenus de la ferme et ceux de Galathée. La rôdeuse ne lui mentait pas.

[Taliesin]

Mais il ne voulait toucher ni à la part des enfants, qui leur appartenait et dont, le moment venu, ils useraient comme bon leur semblait, ni à celle de Martin, à qui il espérait bien, un jour, pouvoir la restituer.
-Ce serait quand même mieux, répondit-il. Et puis, si je reste trop longtemps sans officier... Je perdrai la main. Comment, dès lors, serais-je en mesure d'enseigner mon métier à certaines personnes de notre entourage qui aimeraient s'y initier ?
Il sourit.
-Par ailleurs, si embaucher cette jeune fille lui rend service, rend service à sa famille... Ce serait égoïste de n'en rien faire.

[Galathée]

" Ah, je te reconnais bien là à vouloir soulager tous les malheurs du monde !"
Elle l'embrassa sur la tempe. Héloïse décida alors de changer de genoux, et Victor gloussa.
" Va donc changer ton frère, tu veux ?" demanda Galathée en lui tendant Tristan.
En ronchonnant, le gamin vint chercher le bébé puis sortit de la pièce.

[Taliesin]

-En fait, soyons lucides : on se fait déjà beaucoup aider, dit-il quand le petit garçon eut disparu. Par Victor, par Baptiste, par Guilhem, par plusieurs de ses enfants... Si Mathilde n'avait pas eu la bonne idée de prendre son envol juste à temps, elle aurait joué les nounous. Bref, je crois qu'il n'y a pas à hésiter : engageons cette jeune fille. Certes, ce ne sera pas exactement la même chose, vu qu'elle n'est pas de la famille. Néanmoins, je me fie entièrement à ce que tu m'en as dit et je suis sûr qu'elle s'intégrera très bien et qu'elle s'occupera on ne peut mieux des jumeaux.

[Galathée]

" On peut voir ce que ça dit... Elle ne vit pas très loin. Que dirais-tu de la prendre... Cinq jours par veille, par exemple ? Comme ça, elle gagne un peu d'argent, on est un peu soutenus, et elle peut retourner aider sa famille..."
Héloïse s'était saisie de deux mèches de cheveux de son père et les secouait joyeusement, comme si elle avait été au grand galop, cramponnée à la crinière d'un cheval blond.
" Disons que c'est un test. Mais je dois passer là cet après-midi... Alors si tu es d'accord..."

[Taliesin]

-Bien sûr.
Il lui sourit.
-Bon, mais sinon... Guilhem m'a proposé de l'accompagner au village, ce matin. Est-ce que tu te sens d'attaque pour gérer toute la troupe durant quelques heures ? Je pourrais leur dire qu'il n'y aura pas classe, aujourd'hui, et qu'ils auront quartiers libres cet après-midi s'ils sont sages ce matin...

[Galathée]

La rôdeuse sourit.
" Oh, oui, vas-y donc, c'est une bonne idée. A deux, vous devriez aller plus vite que quand Guillhem y va seul, de toute façon. Essayez de trouver un maximum des choses qui sont sur la liste de Baptiste, cela dit, sinon il va être triste. Et j'ai des peaux à emmener chez le tanneur. Je devrais aller les préparer tout de suite, pour que vous ne preniez pas de retard."
Elle se leva.
" Profites-en pour musarder, aussi. Tout ira bien, ici. Personne ne mettra le feu à la grange."
Elle le gratifia d'un clin d'oeil, puis quitta la pièce.

[Taliesin]

Les choses étant entendues, il ne demeura pas oisif. Portant sa fille d'un bras, il entreprit de ramener - en plusieurs étapes - la vaisselle sale subsistante à la cuisine. Puis, lorsqu'il pourrait confier Héloïse à quelqu'un, il irait se changer, histoire de ne pas aller au village constellé de tâches de gruau... Ensuite, il serait à peu près paré. Resterait à voir si certains des enfants souhaitaient les accompagner. Si tel était le cas, bah, cela ne les retarderait en rien et ils pourraient toujours les charger de l'une ou l'autre course, ce qui lui laisserait davantage de temps pour simplement se promener, ce dont il entendait ne pas se priver.

[Galathée]

Ce fut Galathée qui le délesta d'Héloïse et elle lui interdit d'embarquer les enfants : c'était une sortie entre hommes, la marmaille était cantonnée sur le domaine. Guillhem avait déjà attelé les chevaux et le barde eut tout juste le temps de se débarbouiller et d'enfiler une tenue décente avant de prendre place sur le siège voisin du fermier. Les chiens les suivirent en courant jusqu'à la sortie de la ferme, aboyant derrière leurs roues, et ils débouchèrent sur la route de terre, sans trouver le moindre soldat ou agent luménien embusqué. Il était encore tôt, le soleil était bas dans le ciel, mais la journée serait radieuse.
Guillhem claqua de la langue et les chevaux prirent le trot, direction Pré-aux-Sources.

[Taliesin]

Bien sûr, ce n'était pas la première fois qu'il se rendait au village : il l'avait déjà fait à quelques reprises au cours des veilles précédentes. Pour autant, l'excursion n'en était pas pour autant devenue banale. Non, il s'émerveillait toujours de sa liberté renouvelée et, surtout, de l'avenir dégagé. Il n'avait plus à s'inquiéter ni pour ses proches, ni pour lui-même ; il n'était plus tenu, non plus, de parcourir le monde à la recherche des survivants de sa cité - il avait accompli sa tâche, à ce niveau. En fait, il se demandait s'il s'était déjà senti aussi libre. Sans doute que oui, mais cela remontait à un bon siècle...
Tout à son émerveillement, il n'en oubliait pas malgré tout ce pour quoi ils entreprenaient cette sortie. C'est pourquoi, désireux de s'acquitter au mieux de leur tâche, il entreprit de lire la liste préparée par Baptiste.

[Galathée]

Guillhem n'avait pas menti, le petit garçon s'était lâché. Il lui fallait des trois sortes de poisson différentes, des épices aux noms tout à fait biscornus, des champignons multiples, du sucre de betterave et une grosse dinde, des ferments pour faire du fromage, des infusions et quatre sortes de grain qu'ils ne cultivaient pas sur la ferme. Galathée les avait chargés de trois ballots de peaux à déposer chez le tanneur, et le fermier annonça à Taliesin qu'il devait investir dans une nouvelle bêche.
Ils croisèrent rapidement d'autres voyageurs, des voisins pour la plupart, que Guillhem salua avec bonhomie, par leur nom. L'elfe devait encore se familiariser avec certains, mais il reconnut Gideon, l'éleveur de canards qui vivait sur les bords du petit lac au sud de leur exploitation, et Dara, une tisserande demi-elfe dont les étoffes se vendaient sur les marchés à Luménis.
" J'espère qu'il y a un ou deux colporteurs à l'auberge, sinon je ne vois pas comment on va satisfaire ton gamin..."

[Taliesin]

-J'espère également qu'il y en aura. D'autant que si Baptiste est satisfait, nous ne tarderons pas à l'être à notre tour, grâce à ses prouesses culinaires...
Il sourit.
-Et si notre quête s'achève par un échec, nous trouverons bien une occasion de l'emmener faire les boutiques et les marchés de Lumménis : là, il trouvera tout ce dont il rêve et bien plus encore...