[Quête] Rapports diplomatiques: La fontaine d'Inselwenn
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Faibles étaient les chances de trouver de l’eau courante dans une région où l’on se donnait la peine de creuser des puits, mais vu que le puits était à sec ils n’avaient pas trop le choix…
« Si j’ai bien compris, ce n’est pas encore ce matin que je serai guéri... Bon ! Je suppose que ces soldats ne vont pas tarder à revenir avec une troupe bien armée. J’aurais bien préféré un prêtre et la version corrigée des accords, mais je ne suis pas en position de réclamer… je crois.»
Il sourit, tout en épongeant d’un revers de main l’eau que Mornagest lui avait versée sur le visage.
« Au fait, s’ils reviennent… »
Il désigna du doigt le soleil qui perçait timidement à travers les feuillages.
« Le danger, s’il y en a, arrivera par l’est. Et si ce sont des elfes, peu de chances qu’ils prennent la route... D’ailleurs, il est temps de savoir ce qui les intéresse ici.»
Cela lui rappelait qu’il n’avait toujours pas déchiffré les écritures de la margelle. La version simple aurait été d’aller voir, mais la version simple lui était désormais hors de portée.
Le semi-drow fouilla dans les poches de sa cape, agrippa un œil de verre et se concentra comme il put. Un sérieux mal de crâne en perspective.
Lothringen = => clairvoyance = => deux pas au-dessus du puits
Le capteur lui montrait bien les inscriptions heureusement lisibles, il reconnaissait bien les caractères effilés de la langue elfique, mais les symboles et les mots eux-mêmes lui étaient presque étrangers, comme si la langue avait grandement évolué depuis lors. Ou bien comme si cette écriture était différente de l’elfique féerunien ? Il se rendit compte qu’il ignorait absolument tout de l’ancienneté de l’implantation elfique dans ce coin-là de Dorrandin. Et il ne fallait pas compter sur les elfes pour les éclaircissements…
Lothringen = => compréhension des langages = => Lothringen
Le semi-drow resta un instant stupéfait, puis éclata de rire.
« Hé bien ? » lui lança Mornagest qui avait commencé à s’éloigner en quête d’un improbable ruisseau.
« Rends-toi au puits et pose la main sur l’espèce d’étoile qui sert de symbole central en dessous des inscriptions, tu vas comprendre. »
« Si j’ai bien compris, ce n’est pas encore ce matin que je serai guéri... Bon ! Je suppose que ces soldats ne vont pas tarder à revenir avec une troupe bien armée. J’aurais bien préféré un prêtre et la version corrigée des accords, mais je ne suis pas en position de réclamer… je crois.»
Il sourit, tout en épongeant d’un revers de main l’eau que Mornagest lui avait versée sur le visage.
« Au fait, s’ils reviennent… »
Il désigna du doigt le soleil qui perçait timidement à travers les feuillages.
« Le danger, s’il y en a, arrivera par l’est. Et si ce sont des elfes, peu de chances qu’ils prennent la route... D’ailleurs, il est temps de savoir ce qui les intéresse ici.»
Cela lui rappelait qu’il n’avait toujours pas déchiffré les écritures de la margelle. La version simple aurait été d’aller voir, mais la version simple lui était désormais hors de portée.
Le semi-drow fouilla dans les poches de sa cape, agrippa un œil de verre et se concentra comme il put. Un sérieux mal de crâne en perspective.
Lothringen = => clairvoyance = => deux pas au-dessus du puits
Le capteur lui montrait bien les inscriptions heureusement lisibles, il reconnaissait bien les caractères effilés de la langue elfique, mais les symboles et les mots eux-mêmes lui étaient presque étrangers, comme si la langue avait grandement évolué depuis lors. Ou bien comme si cette écriture était différente de l’elfique féerunien ? Il se rendit compte qu’il ignorait absolument tout de l’ancienneté de l’implantation elfique dans ce coin-là de Dorrandin. Et il ne fallait pas compter sur les elfes pour les éclaircissements…
Lothringen = => compréhension des langages = => Lothringen
Le semi-drow resta un instant stupéfait, puis éclata de rire.
« Hé bien ? » lui lança Mornagest qui avait commencé à s’éloigner en quête d’un improbable ruisseau.
« Rends-toi au puits et pose la main sur l’espèce d’étoile qui sert de symbole central en dessous des inscriptions, tu vas comprendre. »
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Curieux, Mornagest s'exécuta sans trop se poser de questions. Il avait hâte de savoir ce qui provoquait l'hilarité chez Lothringen, au point d'en oublier ses fautes commises. Il repartit donc prestement en direction du puits, longeant la série de cadavres elfes, et s'agenouillant devant les pierres.
Des yeux, il en scruta la surface, à la recherche du symbole en étoile. Rien de compréhensible dans ces inscriptions, sinon qu'elles devaient probablement représenter des divinités elfiques, ou désigner des personnages de la communauté qui avait creusé ce puits. Les talents d'archéologue de Mornagest se limitaient à cela.
Il finit par trouver ce fameux symbole, et posa ses doigts dessus. Aucune sensation particulière, à part la froideur de la pierre sur sa peau. Il se sentit un peu ridicule, mais attendit que quelque chose se produise. Lothringen semblait sûr de lui...
A part lui, il s'interrogeait sur la signification de cette étoile. Il ne connaissait pour ainsi dire pas la mythologie elfique, et celle des humains ne comportait pas de dieu des étoiles... Mystra, éventuellement. Mais, quel rapport avec un puits ?
Il secoua la tête et appuya un peu plus fort sur ce symbole si particulier.
Des yeux, il en scruta la surface, à la recherche du symbole en étoile. Rien de compréhensible dans ces inscriptions, sinon qu'elles devaient probablement représenter des divinités elfiques, ou désigner des personnages de la communauté qui avait creusé ce puits. Les talents d'archéologue de Mornagest se limitaient à cela.
Il finit par trouver ce fameux symbole, et posa ses doigts dessus. Aucune sensation particulière, à part la froideur de la pierre sur sa peau. Il se sentit un peu ridicule, mais attendit que quelque chose se produise. Lothringen semblait sûr de lui...
A part lui, il s'interrogeait sur la signification de cette étoile. Il ne connaissait pour ainsi dire pas la mythologie elfique, et celle des humains ne comportait pas de dieu des étoiles... Mystra, éventuellement. Mais, quel rapport avec un puits ?
Il secoua la tête et appuya un peu plus fort sur ce symbole si particulier.
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"Ne vous imaginez pas être différente de ce qu'il eût pu sembler à autrui que vous fussiez ou eussiez pu être en restant identique à ce que vous fûtes sans jamais paraître autre que vous n'étiez avant d'être devenue ce que vous êtes." (Lewis Caroll)
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"Manque le mot de pouvoir correspondant..."
Lothringen le prononça depuis sa place à vingt pas de là mais dut le répéter une bonne demi-douzaine de fois avant que le guerrier, qui ignorait tout de cette langue, parvienne à son tour à l'articuler correctement. L'effet en fut si peu spectaculaire que les deux compères se demandèrent un instant s'ils n'avaient pas échoué. Mais en reprenant contact avec la clairvoyance qu'il avait placée au-dessus du puits, Lothringen put se rassurer sur la validité de ses déductions. Ce fut un léger bruit de clapotis qui attira à son tour l'attention du mélandien au-dessus de la margelle: aussi improbable que cela puisse paraître, l'eau revenait dans le puits, montant progressivement de plusieurs brasses avant de se stabiliser. Elle paraissait assez claire, pour autant qu'il puisse en juger.
" Nos amis les elfes ne sont pas prêteurs, railla le semi-drow. Nos amis les elfes détournent les sources pour laisser croire que la région n'est pas cultivable. Nos amis les elfes contrôleraient volontiers toute l'alimentation en eau de la région pour dissuader les hommes de s'implanter..."
Se désintéressant du puits, Lothringen reporta l'attention de son oeil magique sur son compagnon. En pleine lumière, son teint grisâtre, ses cernes et ses vêtements souillés faisaient peine à voir.
" Idéal pour la toilette du matin en tout cas. Tu n'as pas dormi? "
Lothringen le prononça depuis sa place à vingt pas de là mais dut le répéter une bonne demi-douzaine de fois avant que le guerrier, qui ignorait tout de cette langue, parvienne à son tour à l'articuler correctement. L'effet en fut si peu spectaculaire que les deux compères se demandèrent un instant s'ils n'avaient pas échoué. Mais en reprenant contact avec la clairvoyance qu'il avait placée au-dessus du puits, Lothringen put se rassurer sur la validité de ses déductions. Ce fut un léger bruit de clapotis qui attira à son tour l'attention du mélandien au-dessus de la margelle: aussi improbable que cela puisse paraître, l'eau revenait dans le puits, montant progressivement de plusieurs brasses avant de se stabiliser. Elle paraissait assez claire, pour autant qu'il puisse en juger.
" Nos amis les elfes ne sont pas prêteurs, railla le semi-drow. Nos amis les elfes détournent les sources pour laisser croire que la région n'est pas cultivable. Nos amis les elfes contrôleraient volontiers toute l'alimentation en eau de la région pour dissuader les hommes de s'implanter..."
Se désintéressant du puits, Lothringen reporta l'attention de son oeil magique sur son compagnon. En pleine lumière, son teint grisâtre, ses cernes et ses vêtements souillés faisaient peine à voir.
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Mornagest était impressionné par la magie qui avait permis de bloquer cette eau, et l'empêcher de revenir à la surface. Il se demandait s'il était possible que le désert entourant Melandis puisse avoir été créé de la même manière... après tout, rien de tangible n'expliquait sa présence en cet endroit, sinon un manque cruel de cours d'eau, tout comme ici.
"Il semblerait que les intégristes soient partout, et pas seulement au sein d'un groupe religieux, ou d'une cité quelconque."
Il incluait également Melandis, qui, en fin de compte, semblait plus "libre" que Manost, de par sa philosophie générale : n'importe qui pouvait y faire n'importe quoi. Peut-être cela pouvait-il sembler dérangeant pour des gens extérieurs à la Cité, mais ce point de vue convenait très bien à Mornagest, qui ne pourrait sans doute jamais s'acclimater à Manost.
"J'ai dormi, mais... mal. Des cauchemars... et je me suis réveillé en sursaut. Un peu de toilette me fera du bien. Mais, avant tout, remplir cette gourde. Tu crois que l'eau est buvable ?"
La clarté d'une eau n'indiquait certainement pas qu'elle était exempte de poison ou de substances d'origine magique, dont les effets étaient aussi variés que pervers...
"Il semblerait que les intégristes soient partout, et pas seulement au sein d'un groupe religieux, ou d'une cité quelconque."
Il incluait également Melandis, qui, en fin de compte, semblait plus "libre" que Manost, de par sa philosophie générale : n'importe qui pouvait y faire n'importe quoi. Peut-être cela pouvait-il sembler dérangeant pour des gens extérieurs à la Cité, mais ce point de vue convenait très bien à Mornagest, qui ne pourrait sans doute jamais s'acclimater à Manost.
"J'ai dormi, mais... mal. Des cauchemars... et je me suis réveillé en sursaut. Un peu de toilette me fera du bien. Mais, avant tout, remplir cette gourde. Tu crois que l'eau est buvable ?"
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[color=#7AC5D]"Apporte-moi un échantillon et je n'aurai pas trop de mal à te le dire..."[/color]
Mornagest lança le seau au bout de sa corde et fit grincer la poulie pour le remonter une fois rempli. Le mécanisme fonctionnait assez bien, et la corde paraissait en bon état, ce qui était plutôt bon signe. Quand il eut apporté au semi-drow la gourde pleine, ce dernier en versa dans un récipient avant d'incanter à la suite deux sorts divinatoires mineurs :
Lothringen = = > détection du poison ==> eau elfique
Lothringen = = > détection de la magie = = > eau elfique
"Eau fraîche et rires légers. Il n'y a pas de risques, ils ont préféré la garder pure pour leur propre ravitaillement."
Lothringen en fut quelque peu soulagé, même si c'était prévisible. Cela ressemblerait assez peu aux elfes que de souiller la nature... Mais les derniers événements ne le portaient guère à leur accorder le moindre bénéfice du doute.
Mornagest lança le seau au bout de sa corde et fit grincer la poulie pour le remonter une fois rempli. Le mécanisme fonctionnait assez bien, et la corde paraissait en bon état, ce qui était plutôt bon signe. Quand il eut apporté au semi-drow la gourde pleine, ce dernier en versa dans un récipient avant d'incanter à la suite deux sorts divinatoires mineurs :
Lothringen = = > détection du poison ==> eau elfique
Lothringen = = > détection de la magie = = > eau elfique
"Eau fraîche et rires légers. Il n'y a pas de risques, ils ont préféré la garder pure pour leur propre ravitaillement."
Lothringen en fut quelque peu soulagé, même si c'était prévisible. Cela ressemblerait assez peu aux elfes que de souiller la nature... Mais les derniers événements ne le portaient guère à leur accorder le moindre bénéfice du doute.
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Satisfait de la réponse, Mornagest sourit.
"Enfin une bonne nouvelle. Ça commençait à manquer, ces temps-ci. Je vais me laver un peu, ça me fera du bien."
Il retira sa tunique déchirée en de nombreux endroits, et puisa l'eau glacée dans le seau, avant de s'en asperger le torse, les bras et le visage avec entrain. Il frotta ensuite énergiquement, et s'affaira à nettoyer le sang séché qui avait coulé sur sa peau dure.
Il grimaça quelques fois, quand il frottait trop près des plaies, ou trop fort. Les blessures semblaient bien se refermer. Il retira ses pansements de fortune, et les remplaça après avoir lavé les croûtes de sang, par d'autres morceaux de tissu. Il ne resterait plus grand-chose de sa tunique, après tout cela...
"Je vais te chercher un autre seau, j'ai presque tout utilisé." Il retourna près du puits et replongea le seau, puis le remonta. Il but rapidement quelques gorgées d'eau avec ses mains en coupe, puis porta le reste au drow.
"Ça ira ? Elle est un peu froide..."
"Enfin une bonne nouvelle. Ça commençait à manquer, ces temps-ci. Je vais me laver un peu, ça me fera du bien."
Il retira sa tunique déchirée en de nombreux endroits, et puisa l'eau glacée dans le seau, avant de s'en asperger le torse, les bras et le visage avec entrain. Il frotta ensuite énergiquement, et s'affaira à nettoyer le sang séché qui avait coulé sur sa peau dure.
Il grimaça quelques fois, quand il frottait trop près des plaies, ou trop fort. Les blessures semblaient bien se refermer. Il retira ses pansements de fortune, et les remplaça après avoir lavé les croûtes de sang, par d'autres morceaux de tissu. Il ne resterait plus grand-chose de sa tunique, après tout cela...
"Je vais te chercher un autre seau, j'ai presque tout utilisé." Il retourna près du puits et replongea le seau, puis le remonta. Il but rapidement quelques gorgées d'eau avec ses mains en coupe, puis porta le reste au drow.
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Mornagest se lavait devant le puits. Il avait retiré le haillon qui lui servait de tunique et se frottait vigoureusement pour faire partir la crasse et la peau morte, dévoilant un torse musculeux, couturé de cicatrices malgré sa jeunesse, sur lequel l’eau ruisselait abondamment. Et elle ruisselait jusque sur le caleçon de toile qui, détrempé, commençait de marquer ses formes d’un peu trop près…
Assis à vingt pas de là, le regard baissé, Lothringen, grâce à la clairvoyance, n’en perdait rien. Et sa mauvaise conscience avait beau lui souffler de penser à autre chose, il se savait incapable de détourner son attention de ce qu’il voyait, prenant enfin conscience de la nature réelle de l’intérêt qu’il portait à Mornagest. Est-ce que ce dernier était beau ? Il n’avait rien du joli cœur dont rêvent les filles à marier, il n’avait pas la finesse de trait d’un elfe ni la grâce aérienne d’un halfeling. C’était un grand gaillard à la blondeur nordique, massif et fort, semblable à un grand chêne dont la verdeur printanière se souvient des orages. Etrange comme cette apparente robustesse pouvait dissimuler une fragilité psychique pourtant bien réelle…
Comme Lothringen détestait l’attirance qu’il éprouvait à présent pour le guerrier. Son maître avait sûrement eu la même à son égard... et lui envers son maître, d’une certaine façon. Et cela ne l’avait conduit qu’à l’aliénation et au dégoût, à l’avilissement et à la honte. Il ne voulait pas revivre cela. Il releva les yeux comme Mornagest s'approchait de lui, un seau à la main. Et puis non ! Comment pouvait-il seulement songer à comparer les deux situations? ! Dorson le prenait dans les filets d’une prison mentale, lui envoyait encore en rêve des pluies de sang. Mornagest ne lui apportait qu’un peu d’eau claire…
« Tant mieux si elle est froide », répondit enfin le semi-drow en se hâtant de plonger le regard et les mains dans l’eau fraîche. « C'est ce qu'il me faut. »
Lothringen se rinça les avant bras et le visage, puis but plusieurs gorgées. N’étant pas en mesure de se lever, il ne pouvait se livrer à une toilette aussi poussée que le mélandien. Du reste, il en avait moins besoin…
« Je te remercie… » ajouta-t-il en s’adossant à nouveau au tronc d’arbre, épuisé des efforts physiques et magiques qu’il venait de fournir. C’était sobre mais cela venait du fond du cœur. « Je vais me reposer à présent. Si tu as envie d’un repas, je crois que tu vas devoir lui courir après... »
Assis à vingt pas de là, le regard baissé, Lothringen, grâce à la clairvoyance, n’en perdait rien. Et sa mauvaise conscience avait beau lui souffler de penser à autre chose, il se savait incapable de détourner son attention de ce qu’il voyait, prenant enfin conscience de la nature réelle de l’intérêt qu’il portait à Mornagest. Est-ce que ce dernier était beau ? Il n’avait rien du joli cœur dont rêvent les filles à marier, il n’avait pas la finesse de trait d’un elfe ni la grâce aérienne d’un halfeling. C’était un grand gaillard à la blondeur nordique, massif et fort, semblable à un grand chêne dont la verdeur printanière se souvient des orages. Etrange comme cette apparente robustesse pouvait dissimuler une fragilité psychique pourtant bien réelle…
Comme Lothringen détestait l’attirance qu’il éprouvait à présent pour le guerrier. Son maître avait sûrement eu la même à son égard... et lui envers son maître, d’une certaine façon. Et cela ne l’avait conduit qu’à l’aliénation et au dégoût, à l’avilissement et à la honte. Il ne voulait pas revivre cela. Il releva les yeux comme Mornagest s'approchait de lui, un seau à la main. Et puis non ! Comment pouvait-il seulement songer à comparer les deux situations? ! Dorson le prenait dans les filets d’une prison mentale, lui envoyait encore en rêve des pluies de sang. Mornagest ne lui apportait qu’un peu d’eau claire…
« Tant mieux si elle est froide », répondit enfin le semi-drow en se hâtant de plonger le regard et les mains dans l’eau fraîche. « C'est ce qu'il me faut. »
Lothringen se rinça les avant bras et le visage, puis but plusieurs gorgées. N’étant pas en mesure de se lever, il ne pouvait se livrer à une toilette aussi poussée que le mélandien. Du reste, il en avait moins besoin…
« Je te remercie… » ajouta-t-il en s’adossant à nouveau au tronc d’arbre, épuisé des efforts physiques et magiques qu’il venait de fournir. C’était sobre mais cela venait du fond du cœur. « Je vais me reposer à présent. Si tu as envie d’un repas, je crois que tu vas devoir lui courir après... »
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Sans avoir remarqué le trouble de Lothringen, le guerrier se rhabilla avec les quelques morceaux de tissus qu'il lui restait à présent, puis, agacé par les lambeaux qui venaient lui chatouiller la peau dès qu'il exécutait un mouvement, les retira avec un geste nerveux, décidant que rester en caleçon ne lui ferait pas de tort ; la saison était loin d'être froide.
Chasser ne lui poserait aucun problème, hormis ses blessures qui entravaient quelque peu ses mouvements. Il aurait besoin d'un peu plus de temps, sans doute, mais cela restait possible.
"Je vais essayer de nous trouver quelque chose. Repose-toi, je risque de ne pas attraper du lapin très facilement."
Il partit alors dans les fourrés, essayant de repérer quelque trace de passage d'animaux. Vu la végétation environnante, il devait y avoir du gibier à se mettre sous la dent.
Il trouva, au bout d'une demi-heure, des empreintes d'herbivore, un genre de biche. Rapide à la course, mais il pourrait tenter de la surprendre contre le vent. La chasse commença donc.
Mornagest repéra enfin sa proie dans un bois, à quelques lieues déjà de la fontaine : une jeune biche qui broutait paisiblement, à l'orée d'une clairière, et qui lui tournait le dos. Parfait. Il s'approcha doucement, se méfiant des branches mortes qui jonchaient le sol. Fort heureusement, le vent couvrait quelque peu ses mouvements, car le crissement des feuilles desséchées lorsqu'il marchait produisait beaucoup de bruit, au risque d'alerter la bête.
Néanmoins, cette dernière ne se méfiait pas outre mesure, et continuait à manger tranquillement l'herbe qui allait commencer à se faire rare. Le guerrier arriva à quelques mètres d'elle, derrière un chêne centenaire. Retenant sa respiration, il passa subrepticement la tête. Toujours aucun problème en vue. Il bondit alors, épée au poing. La biche sursauta et se mit à courir, mais pas assez vite : la lame du guerrier lui faucha les pattes arrière, et elle chut au sol, poussant un cri. Mornagest l'acheva rapidement ; il n'aimait guère faire souffrir les animaux, envers lesquels il avait probablement plus d'estime que ses congénères.
Le guerrier ramena son trophée à la fontaine. Il lui avait fallu deux heures en tout, un rendement assez moyen, mais cela leur suffirait pour deux ou trois jours, sans doute.
Lothringen dormait à poings fermés, et Mornagest entreprit de découper la viande, puis prépara un petit feu.
Chasser ne lui poserait aucun problème, hormis ses blessures qui entravaient quelque peu ses mouvements. Il aurait besoin d'un peu plus de temps, sans doute, mais cela restait possible.
"Je vais essayer de nous trouver quelque chose. Repose-toi, je risque de ne pas attraper du lapin très facilement."
Il partit alors dans les fourrés, essayant de repérer quelque trace de passage d'animaux. Vu la végétation environnante, il devait y avoir du gibier à se mettre sous la dent.
Il trouva, au bout d'une demi-heure, des empreintes d'herbivore, un genre de biche. Rapide à la course, mais il pourrait tenter de la surprendre contre le vent. La chasse commença donc.
Mornagest repéra enfin sa proie dans un bois, à quelques lieues déjà de la fontaine : une jeune biche qui broutait paisiblement, à l'orée d'une clairière, et qui lui tournait le dos. Parfait. Il s'approcha doucement, se méfiant des branches mortes qui jonchaient le sol. Fort heureusement, le vent couvrait quelque peu ses mouvements, car le crissement des feuilles desséchées lorsqu'il marchait produisait beaucoup de bruit, au risque d'alerter la bête.
Néanmoins, cette dernière ne se méfiait pas outre mesure, et continuait à manger tranquillement l'herbe qui allait commencer à se faire rare. Le guerrier arriva à quelques mètres d'elle, derrière un chêne centenaire. Retenant sa respiration, il passa subrepticement la tête. Toujours aucun problème en vue. Il bondit alors, épée au poing. La biche sursauta et se mit à courir, mais pas assez vite : la lame du guerrier lui faucha les pattes arrière, et elle chut au sol, poussant un cri. Mornagest l'acheva rapidement ; il n'aimait guère faire souffrir les animaux, envers lesquels il avait probablement plus d'estime que ses congénères.
Le guerrier ramena son trophée à la fontaine. Il lui avait fallu deux heures en tout, un rendement assez moyen, mais cela leur suffirait pour deux ou trois jours, sans doute.
Lothringen dormait à poings fermés, et Mornagest entreprit de découper la viande, puis prépara un petit feu.
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Lothringen s'éveilla alors qu'un fumet de gibier grillé chatouillait agréablement ses narines. Quand il eut vu la viande que Mornagest préparait, sa première réaction fut pour vérifier la présence des corps des elfes dans la clairière. Même disposition... pas de traces apparentes de piétinement... bon. C'est qu'il n'avait pas du tout eu l'intention de se rendormir, à cause des soldats manostiens qu'il n'avait pas envie de laisser passer une seconde fois s'ils revenaient sur les lieux. Mais, de rêverie en somnolence, il avait fini par sombrer dans le sommeil. Il fallait croire qu'il avait plus besoin de récupérer qu'il ne le souhaitait.
Il reporta les yeux sur la carcasse qui rôtissait, ainsi que sur la peau, la tête et autres morceaux immangeables que Mornagest avait laissés de côté. Une biche, rien que cela... Et il avait réussi à la tuer avec... une simple épée?
"Tu as vu large", remarqua-t-il avec un sourire moqueur, tout en se redressant. Et, quand vint l'heure de déguster les gigots, il demanda à Mornagest de lui expliquer comment il avait bien pu réussir à la surprendre...
Ils prirent leur temps pour déjeuner. D'après Lothringen, ils n'avaient rien d'autre qu'à faire qu'à attendre le retour des soldats manostiens. Il fallait bien qu'ils reviennent ici, ne serait-ce que pour recueillir d'éventuels indices autour des cadavres des elfes. Mais il fallait compter le temps d'un aller retour à cheval à Graelon... Ce serait pour l'après-midi, sans doute.
Ils venaient d'achever leur repas qund le semi-drow reprit:
" Avant hier, au Loyal, tu m'as posé une question très pertinente à propos de mon ancien maître... Une question à laquelle je n'ai pas su répondre. Je pense avoir un peu plus de recul aujourd'hui, si la réponse t'intéresse toujours."
Il reporta les yeux sur la carcasse qui rôtissait, ainsi que sur la peau, la tête et autres morceaux immangeables que Mornagest avait laissés de côté. Une biche, rien que cela... Et il avait réussi à la tuer avec... une simple épée?
"Tu as vu large", remarqua-t-il avec un sourire moqueur, tout en se redressant. Et, quand vint l'heure de déguster les gigots, il demanda à Mornagest de lui expliquer comment il avait bien pu réussir à la surprendre...
Ils prirent leur temps pour déjeuner. D'après Lothringen, ils n'avaient rien d'autre qu'à faire qu'à attendre le retour des soldats manostiens. Il fallait bien qu'ils reviennent ici, ne serait-ce que pour recueillir d'éventuels indices autour des cadavres des elfes. Mais il fallait compter le temps d'un aller retour à cheval à Graelon... Ce serait pour l'après-midi, sans doute.
Ils venaient d'achever leur repas qund le semi-drow reprit:
" Avant hier, au Loyal, tu m'as posé une question très pertinente à propos de mon ancien maître... Une question à laquelle je n'ai pas su répondre. Je pense avoir un peu plus de recul aujourd'hui, si la réponse t'intéresse toujours."
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Mornagest était embarrassé. Il était certes intéressé, mais la réaction de Lothringen à ce moment l'avait décontenancé, et il s'en était un peu voulu. Il connaissait ce lourd sentiment, ne pas savoir retenir sa tristesse en parlant d'un passé sombre et douloureux. Ils avaient au moins ce point commun, la sensibilité cachée, enfouie sous une apparente austérité. Et lorsqu'on grattait la frêle cicatrice, les larmes resurgissaient, tel un flot de sang rouge vif, s'engouffrant dans la crevasse créée.
"Je ne veux pas te forcer à remuer un vieux souvenir, surtout s'il est douloureux".
Mais il savait que le drow voulait parler, ou en tout cas, en avait l'idée. Extérioriser ses craintes, son passé, s'en purger... et les oublier, ou du moins, les garder dans une partie de son esprit qui ne les triturait pas jour après jour, les retournant dans tous les sens, et faire rejaillir des remords acérés comme des lames de rasoirs... des "et si j'avais...", des regrets, des incertitudes...
Pourtant, le passé était le passé. Pourquoi, et comment parvenait-il à les torturer mentalement de la sorte ? Peut-être l'âge, la sagesse, leur donneraient la réponse. S'ils en avaient l'occasion.
"Je ne veux pas te forcer à remuer un vieux souvenir, surtout s'il est douloureux".
Mais il savait que le drow voulait parler, ou en tout cas, en avait l'idée. Extérioriser ses craintes, son passé, s'en purger... et les oublier, ou du moins, les garder dans une partie de son esprit qui ne les triturait pas jour après jour, les retournant dans tous les sens, et faire rejaillir des remords acérés comme des lames de rasoirs... des "et si j'avais...", des regrets, des incertitudes...
Pourtant, le passé était le passé. Pourquoi, et comment parvenait-il à les torturer mentalement de la sorte ? Peut-être l'âge, la sagesse, leur donneraient la réponse. S'ils en avaient l'occasion.
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"Ne vous imaginez pas être différente de ce qu'il eût pu sembler à autrui que vous fussiez ou eussiez pu être en restant identique à ce que vous fûtes sans jamais paraître autre que vous n'étiez avant d'être devenue ce que vous êtes." (Lewis Caroll)
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"Tu ne me forces en rien puisque c'est moi qui le propose! Peut-être bien que j'ai besoin d'en parler pour tourner la page. Si tu ne m'interromps pas... ça ne devrait pas poser problème."
Lothringen prit son inspiration et ferma les yeux à demi. Il se connaissait assez pour savoir qu'une fois qu'il se serait lancé... vraiment lancé... il ne s'arrêterait que lorsqu'il aurait tout à fait vidé son sac.
"Quand je parle d'Outreterre j'en parle par bribes et par allusions fines, afin d'être bien certain que personne ne comprenne. Cela ne fait qu'entretenir mes propres peurs et ce n'est pas une solution. Je vais reprendre dans l'ordre, pour une fois.
Je suis descendu dans Outreterre volontairement, et seul. J'étais un enfant qui se faisait quelques illusions sur son peuple d'origine. J'ai été rapidement réduit en esclavage et envoyé dans les mines. J'ai tenté de m'évader tant qu'il m'en restait encore la force... et comme j'ai échoué, j'ai été condamné à mort. A être fouetté à mort sur la place... C'est à ce moment-là que j'ai été racheté. Tu sais, mon cauchemar... c'est à ce moment-là qu'il renvoie. Qu'est-ce qu'un archimage comme lui pouvait bien me trouver d'intéressant, à moi, petit bâtard maigrichon, inculte, exsangue et à moitié mort? Je ne savais pas. Aucun drow ne savait. J'ai donc pensé que c'était de la générosité, qu'il m'avait sauvé la vie par bonté d'âme. Tout est parti de là.
Par la suite, rien ou presque n'est venu démentir cette première idée... Il ne me traitait pas comme les autres esclaves. Au début, j'ai dormi à la chaîne avec eux, mais on m'en a rapidement séparé. J'ai travaillé dans son laboratoire, à faire le nettoyage et la préparation des ingrédients... Je lisais en cachette. Plutôt que de s'en offusquer, il en a ri et m'a invité à le faire aussi devant lui, m'encourageant à l'interroger sur ce qu'il faisait si l'envie m'en venait. De fil en aiguille, je suis devenu son apprenti. Il ne me battait pas et se montrait très patient. J'avais un fer au pied et un collier au cou mais je ne les sentais pas, vu qu'il ne me venait jamais l'envie ni même l'idée de désobéir. Il ne me battait pas. La magie me passionnait.
Il ne serait pas faux de dire que j'ai passé quinze ans de ma vie entre un laboratoire d'alchimie et une bibliothèque. J'avais très peu de contacts avec le monde extérieur. Je ne voyais jamais les autres esclaves et j'avais presque oublié leur existence. Je ne voyais presque jamais les autres drows de la maison. Mon maître disait qu'ils étaient jaloux parce qu'il m'avait adopté, ce qui faisait de moi l'héritier de la maison en plus d'être celui de ses pouvoirs. Cela me semblait très lointain. Je n'avais pas d'autre ambition que de le satisfaire. Quand une de ses jeunes soeurs, qui m'avait donné l'ordre de réchauffer son lit, a mystérieusement disparu de mon horizon du jour au lendemain, je ne m'en suis pas étonné. Quand il m'a demandé de poursuivre la même activité avec lui, non plus. Rien ne me coûtait si je pouvais par là faire plaisir à mon bienfaiteur. Je croissais en savoir et en pouvoir, j'avais acquis un statut que m'enviaient les elfes libres. A l'époque, sans mentir, je me croyais heureux."
Il soupira. Comment avait-il pu se laisser berner aussi facilement, aussi complètement, en accepter jusqu'aux ultimes conséquences, quinze ans durant, sans jamais se poser de questions?
"Evidemment, il y avait une autre réalité..."
Lothringen prit son inspiration et ferma les yeux à demi. Il se connaissait assez pour savoir qu'une fois qu'il se serait lancé... vraiment lancé... il ne s'arrêterait que lorsqu'il aurait tout à fait vidé son sac.
"Quand je parle d'Outreterre j'en parle par bribes et par allusions fines, afin d'être bien certain que personne ne comprenne. Cela ne fait qu'entretenir mes propres peurs et ce n'est pas une solution. Je vais reprendre dans l'ordre, pour une fois.
Je suis descendu dans Outreterre volontairement, et seul. J'étais un enfant qui se faisait quelques illusions sur son peuple d'origine. J'ai été rapidement réduit en esclavage et envoyé dans les mines. J'ai tenté de m'évader tant qu'il m'en restait encore la force... et comme j'ai échoué, j'ai été condamné à mort. A être fouetté à mort sur la place... C'est à ce moment-là que j'ai été racheté. Tu sais, mon cauchemar... c'est à ce moment-là qu'il renvoie. Qu'est-ce qu'un archimage comme lui pouvait bien me trouver d'intéressant, à moi, petit bâtard maigrichon, inculte, exsangue et à moitié mort? Je ne savais pas. Aucun drow ne savait. J'ai donc pensé que c'était de la générosité, qu'il m'avait sauvé la vie par bonté d'âme. Tout est parti de là.
Par la suite, rien ou presque n'est venu démentir cette première idée... Il ne me traitait pas comme les autres esclaves. Au début, j'ai dormi à la chaîne avec eux, mais on m'en a rapidement séparé. J'ai travaillé dans son laboratoire, à faire le nettoyage et la préparation des ingrédients... Je lisais en cachette. Plutôt que de s'en offusquer, il en a ri et m'a invité à le faire aussi devant lui, m'encourageant à l'interroger sur ce qu'il faisait si l'envie m'en venait. De fil en aiguille, je suis devenu son apprenti. Il ne me battait pas et se montrait très patient. J'avais un fer au pied et un collier au cou mais je ne les sentais pas, vu qu'il ne me venait jamais l'envie ni même l'idée de désobéir. Il ne me battait pas. La magie me passionnait.
Il ne serait pas faux de dire que j'ai passé quinze ans de ma vie entre un laboratoire d'alchimie et une bibliothèque. J'avais très peu de contacts avec le monde extérieur. Je ne voyais jamais les autres esclaves et j'avais presque oublié leur existence. Je ne voyais presque jamais les autres drows de la maison. Mon maître disait qu'ils étaient jaloux parce qu'il m'avait adopté, ce qui faisait de moi l'héritier de la maison en plus d'être celui de ses pouvoirs. Cela me semblait très lointain. Je n'avais pas d'autre ambition que de le satisfaire. Quand une de ses jeunes soeurs, qui m'avait donné l'ordre de réchauffer son lit, a mystérieusement disparu de mon horizon du jour au lendemain, je ne m'en suis pas étonné. Quand il m'a demandé de poursuivre la même activité avec lui, non plus. Rien ne me coûtait si je pouvais par là faire plaisir à mon bienfaiteur. Je croissais en savoir et en pouvoir, j'avais acquis un statut que m'enviaient les elfes libres. A l'époque, sans mentir, je me croyais heureux."
Il soupira. Comment avait-il pu se laisser berner aussi facilement, aussi complètement, en accepter jusqu'aux ultimes conséquences, quinze ans durant, sans jamais se poser de questions?
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Le guerrier avait fermé les yeux pendant que Lothringen parlait. Il semblait essayer de se transposer dans le récit du drow, comme pour mieux se représenter ce qu'il lui narrait avec sobriété, compte tenu de la douleur évidente que cela lui infligeait. Mais il ne pouvait se l'imaginer. Nul ne le pourrait, car son expérience, sa vie, étaient uniques. Et monstrueuses.
Certes, Mornagest avait souffert, durant son existence, mais pas de la sorte. Pas humilié comme cela. Il n'osait imaginer le mal que Lothringen avait ressenti, au cours de ces longues années. Et d'après lui, le pire restait à venir... si l'on pouvait imaginer pire que de partager la couche de son maître... y être contraint et forcé, sans même le savoir, après tout.
"Continue".
Il préféra ne pas l'interroger, ne pas l'interrompre davantage. Car le flot devait être continu, sans quoi, il lui serait peut-être plus difficile encore de redémarrer.
Certes, Mornagest avait souffert, durant son existence, mais pas de la sorte. Pas humilié comme cela. Il n'osait imaginer le mal que Lothringen avait ressenti, au cours de ces longues années. Et d'après lui, le pire restait à venir... si l'on pouvait imaginer pire que de partager la couche de son maître... y être contraint et forcé, sans même le savoir, après tout.
"Continue".
Il préféra ne pas l'interroger, ne pas l'interrompre davantage. Car le flot devait être continu, sans quoi, il lui serait peut-être plus difficile encore de redémarrer.
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« Jamais je n’aurais pu en prendre conscience par moi-même. C’est un autre esclave qui m’a permis d’ouvrir les yeux : Gythris, un humain des cuisines, qui parvenait à me rendre visite en cachette. Nos premiers échanges ne furent pas cordiaux. Il me disait que je n’étais qu’une marionnette entre les mains d’un être sans scrupules. Il me disait que le maître m’avait isolé et avait fait le vide autour de moi pour mieux me contrôler, qu’il me manipulait, qu’il se servait de moi, de ma reconnaissance, de mes talents pour la magie, de mon corps, qu’il me dictait mes désirs, mes pensées. Que je n’étais plus capable de la moindre émotion. Que je n’avais plus seulement conscience du soleil qui brillait encore quelque part, du vaste monde dont il m’avait coupé, des opportunités de la vie qui dépassaient les bornes d’un laboratoire. Plus seulement conscience de penser comme lui, de parler comme lui, de voir par ses yeux. Ni de l’absence des vivants autour de moi, ni même des entraves que je portais, et qui n’étaient pas là pour la décoration…
Je l’ai chassé sans ménagement, mais il revenait. Il n’avait pas le droit de me parler et j’ai menacé de le dénoncer, mais je n’osais souiller les oreilles de mon maître en répétant ses propos. Je ne croyais pas Gythris. Je le soupçonnais de vouloir me dégoûter de mon existence afin de favoriser ses propres projets d’évasion… Ma magie ne lui aurait pas été d’un petit secours si je l’avais accompagné. Néanmoins ses idées commençaient de se frayer lentement un chemin dans ma tête dure. Il n’avait pas de preuve, mais je n’avais pas de preuve du contraire non plus, exceptée une intime conviction qui ne pesait pas lourd face à la description des actions indéniablement maléfiques qu’accomplissait mon maître par ailleurs. Jouant son va-tout, Gythris m’a suggéré de lire ses notes secrètes. « Pour me convaincre qu’il ne me cachait décidément rien ». Quant un soupçon a grandi, il ne reste plus qu’à le tuer d’une manière ou d’une autre : il m’a fallu plus d’un an pour me décider à le faire, mais j’ai fini par aller lire le grimoire de mon maître. Je n’ai eu aucune peine à en déjouer les glyphes de protection. Je connaissais tous les mots de pouvoirs, depuis toujours. Le maître ne se cachait guère devant moi… Pour quoi faire ?
Je n’ai pas été déçu par ma lecture. Mon maître était apparemment obsédé par l’idée de sa mort… Certes c’était un drow, un archimage, mais même si cela ne se voyait guère il avait près de mille ans. N’ayant jamais pratiqué la magie nécromancienne – par principe, pourrait-on dire, et parce que cette école était opposée à la sienne – il n’avait jamais envisagé la métamorphose en liche. L’idée de se désincarner dans un simple squelette lui était insupportable. Il voulait trouver mieux. Ses recherches secrètes portaient sur des sortilèges pour lier les âmes entre elles et pour permettre la transmigration de celles-ci d’un corps mort à un autre vivant, ce dernier devenant l’hôte de deux âmes mêlées où il allait de soi que la plus forte étoufferait peu à peu la plus soumise. Une très grande proximité entre les deux âmes en question, une certaine passivité consentante de la part de l’ « hôte » devaient faciliter le processus.
Et mon tout petit monde s’écroulait… »
Il s’arrêta. Après une telle lecture, il avait d’abord été partagé entre le désir de mourir et celui d’aller se traîner aux pieds de son maître afin de s’enfoncer un peu loin dans les mensonges. Parce que cette vérité-là était insupportable, et que tout valait mieux que le dégoût qu’il avait alors commencé de ressentir envers lui-même. Un jouet. Un jouet naïf et stupide, qui aurait volontiers tout donné mais à qui l’on voulait prendre encore davantage. Briser son âme pour s’approprier la jeunesse de son corps, rien que cela… Et il s’était laissé faire… il avait prostitué l'une et l'autre... à quel point ! Quel que soit le personnage qu’il s’était efforcé de reconstruire sur de pareilles décombres, il ne pourrait jamais oublier d’avoir été… cela.
Je l’ai chassé sans ménagement, mais il revenait. Il n’avait pas le droit de me parler et j’ai menacé de le dénoncer, mais je n’osais souiller les oreilles de mon maître en répétant ses propos. Je ne croyais pas Gythris. Je le soupçonnais de vouloir me dégoûter de mon existence afin de favoriser ses propres projets d’évasion… Ma magie ne lui aurait pas été d’un petit secours si je l’avais accompagné. Néanmoins ses idées commençaient de se frayer lentement un chemin dans ma tête dure. Il n’avait pas de preuve, mais je n’avais pas de preuve du contraire non plus, exceptée une intime conviction qui ne pesait pas lourd face à la description des actions indéniablement maléfiques qu’accomplissait mon maître par ailleurs. Jouant son va-tout, Gythris m’a suggéré de lire ses notes secrètes. « Pour me convaincre qu’il ne me cachait décidément rien ». Quant un soupçon a grandi, il ne reste plus qu’à le tuer d’une manière ou d’une autre : il m’a fallu plus d’un an pour me décider à le faire, mais j’ai fini par aller lire le grimoire de mon maître. Je n’ai eu aucune peine à en déjouer les glyphes de protection. Je connaissais tous les mots de pouvoirs, depuis toujours. Le maître ne se cachait guère devant moi… Pour quoi faire ?
Je n’ai pas été déçu par ma lecture. Mon maître était apparemment obsédé par l’idée de sa mort… Certes c’était un drow, un archimage, mais même si cela ne se voyait guère il avait près de mille ans. N’ayant jamais pratiqué la magie nécromancienne – par principe, pourrait-on dire, et parce que cette école était opposée à la sienne – il n’avait jamais envisagé la métamorphose en liche. L’idée de se désincarner dans un simple squelette lui était insupportable. Il voulait trouver mieux. Ses recherches secrètes portaient sur des sortilèges pour lier les âmes entre elles et pour permettre la transmigration de celles-ci d’un corps mort à un autre vivant, ce dernier devenant l’hôte de deux âmes mêlées où il allait de soi que la plus forte étoufferait peu à peu la plus soumise. Une très grande proximité entre les deux âmes en question, une certaine passivité consentante de la part de l’ « hôte » devaient faciliter le processus.
Et mon tout petit monde s’écroulait… »
Il s’arrêta. Après une telle lecture, il avait d’abord été partagé entre le désir de mourir et celui d’aller se traîner aux pieds de son maître afin de s’enfoncer un peu loin dans les mensonges. Parce que cette vérité-là était insupportable, et que tout valait mieux que le dégoût qu’il avait alors commencé de ressentir envers lui-même. Un jouet. Un jouet naïf et stupide, qui aurait volontiers tout donné mais à qui l’on voulait prendre encore davantage. Briser son âme pour s’approprier la jeunesse de son corps, rien que cela… Et il s’était laissé faire… il avait prostitué l'une et l'autre... à quel point ! Quel que soit le personnage qu’il s’était efforcé de reconstruire sur de pareilles décombres, il ne pourrait jamais oublier d’avoir été… cela.
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Il écoutait en silence, le coeur triste pour son... son ami ? Comment pouvait-il l'appeler autrement, après tout ce qu'ils avaient vécu ensemble, depuis quelques jours ? Jamais il n'avait été aussi proche de quelqu'un, même de son vieux tuteur, avec qui il avait passé plus de douze ans... ni même... d'Helena.
Il ressentait la douleur transportée dans ses paroles, dans les intonations de sa voix. Il frissonna presque, en essayant à nouveau, et en vain, de se mettre à sa place, lorsqu'il prenait peu à peu conscience de ce que l'archimage avait voulu faire de lui. Comme s'il avait assisté, toute sa vie, à un spectacle, et qu'à un moment, on lui annonçait que ce n'était pas cela, la vie, mais une façade, un trompe-l'œil.
Cruauté, vanité... et pour quoi ? Comment ce drow avait-il pu infliger pareil tourment à un de ses semblables, sans raison, sinon par simple désir de vivre plus longtemps ? Futilité...
Mornagest était plus terre-à-terre. Il n'aimait pas les hommes, mais ne les tuait que s'ils le méritaient. Jamais il n'aurait même songer à faire subir cela à quiconque, fut-il le pire criminel de tous les temps.
Et Lothringen avait vécu cela... il le vivait encore, car, lorsqu'il avait eu l'occasion de tuer son ancien "maître", il n'avait trouvé la force mentale de le faire. Comme s'il avait espéré que le mirage revienne, renaisse. Que l'illusion reprenne.
Maintenant, le mélandien comprenait. Et il s'en voulait d'avoir ainsi accusé le drow de lâcheté, le moment venu, car il savait désormais qu'il n'aurait pu le faire, s'il y avait été confronté.
"Comment as-tu trouvé la force de partir ? De t'en sortir ?"
Une telle prouesse forçait l'admiration. Et Mornagest admirait Lothringen. Il s'en rendait compte. C'était frappant.
Il ressentait la douleur transportée dans ses paroles, dans les intonations de sa voix. Il frissonna presque, en essayant à nouveau, et en vain, de se mettre à sa place, lorsqu'il prenait peu à peu conscience de ce que l'archimage avait voulu faire de lui. Comme s'il avait assisté, toute sa vie, à un spectacle, et qu'à un moment, on lui annonçait que ce n'était pas cela, la vie, mais une façade, un trompe-l'œil.
Cruauté, vanité... et pour quoi ? Comment ce drow avait-il pu infliger pareil tourment à un de ses semblables, sans raison, sinon par simple désir de vivre plus longtemps ? Futilité...
Mornagest était plus terre-à-terre. Il n'aimait pas les hommes, mais ne les tuait que s'ils le méritaient. Jamais il n'aurait même songer à faire subir cela à quiconque, fut-il le pire criminel de tous les temps.
Et Lothringen avait vécu cela... il le vivait encore, car, lorsqu'il avait eu l'occasion de tuer son ancien "maître", il n'avait trouvé la force mentale de le faire. Comme s'il avait espéré que le mirage revienne, renaisse. Que l'illusion reprenne.
Maintenant, le mélandien comprenait. Et il s'en voulait d'avoir ainsi accusé le drow de lâcheté, le moment venu, car il savait désormais qu'il n'aurait pu le faire, s'il y avait été confronté.
"Comment as-tu trouvé la force de partir ? De t'en sortir ?"
Une telle prouesse forçait l'admiration. Et Mornagest admirait Lothringen. Il s'en rendait compte. C'était frappant.
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Lothringen se détendit un peu. Le pire de son récit était passé. Le reste… était un peu plus joyeux. Encore que.
« Gythris m’a beaucoup aidé. Depuis longtemps il me parlait des forêts du Téthyr où il avait grandi lui aussi, de la lumière du soleil, de la chasse… Il me rappelait ma petite enfance, réveillant des sensations enfouies mais pas oubliées. Il m’avait fait parler de ma mère… Je savais que je ne la retrouverais pas mais le souvenir de son amour sincère ne m’était pas inutile quand je resongeais à la trahison de mon maître. J’essayais de ne pas y penser. Je ne savais plus à quoi me raccrocher, alors je me suis focalisé sur l’idée de la lumière du jour, sur sa chaleur, sur son éclat qui, contrairement aux autres drows, ne m’était pas odieux. Je ne voulais pas mourir avant de l’avoir revu.
Nous avons commencé à réfléchir à un plan d’évasion. Gythris attendait beaucoup d’un tunnel qu’il avait creusé patiemment depuis plusieurs années, derrière un fourneau. Je ne m’y fiais pas. Une fois sortis du domaine, on était loin d’être tirés d’Outreterre… Il fallait plus de préparation. Je pouvais nous téléporter mais mes souvenirs d’enfance étaient trop vagues pour nous renvoyer en surface, je ne voulais pas en prendre ce risque. J’ai pris le temps de dérober quelques potions. Et puis l’occasion nous est venue d’elle-même. Un peu trop facilement, même… Il n’est pas impossible que mon maître m’ait volontairement laissé fuir, comme je l’ai soupçonné par la suite. Ignorant que j’avais lu son grimoire, il devait malgré mes efforts avoir remarqué mon changement d’attitude et penser que j’avais besoin de me frotter un peu au monde avant de lui revenir… Il avait un peu trop confiance en son emprise sur moi, et en cela il n’a pas changé.
Comme il arrivait quelquefois, mon maître m’avait emmené dans une caverne hors de la cité, afin d’y recueillir des champignons et autres ingrédients pour ses sorts. J’ai profité d’un moment où il me tournait le dos pour l’assommer avec une pierre. Puis j’ai envoyé un message mental à Gythris, pour qu’il me rejoigne sur mes indications. Nous étions encore très près de la cité. Je nous ai téléportés vers une autre des cavernes où mon maître m’avait emmené auparavant, et que je pensais être beaucoup plus proche de la surface. J’ai lancé un sort d’invisibilité, et, en nous tenant par la main pour ne pas nous perdre, nous avons commencé de remonter les galeries au milieu des monstres… Ni lui ni moi n’étions préparés à ce que nous avons traversé. A peu près aveugle dans cette obscurité, Gythris a commis l’erreur de buter sur la toile d’une araignée géante qui a aussitôt alerté tout son nid. Nous avons fui mais leur poison coulait dans ses veines, et, ma réserve d’antidotes n’étant pas inépuisable, je n’ai pu que le regarder mourir… En bref, j’ai fini seul. Après plusieurs « jours » de fuite, si l’on peut dire, dans cette obscurité où le temps n’a pas de sens, j’ai revu la surface. Ironie du sort, c’était le plein midi et, comme cela faisait quinze ans que je ne l’avais pas revue, la lumière du jour m’éblouissait complètement… Je n’avais pas fait vingt pas mal assurés dans l’herbe qu’une patrouille elfique qui surveillait apparemment cette issue d’Outreterre me prenait en chasse », acheva-t-il avec un sourire de dérision en songeant aux cadavres qui les entouraient.
« Gythris m’a beaucoup aidé. Depuis longtemps il me parlait des forêts du Téthyr où il avait grandi lui aussi, de la lumière du soleil, de la chasse… Il me rappelait ma petite enfance, réveillant des sensations enfouies mais pas oubliées. Il m’avait fait parler de ma mère… Je savais que je ne la retrouverais pas mais le souvenir de son amour sincère ne m’était pas inutile quand je resongeais à la trahison de mon maître. J’essayais de ne pas y penser. Je ne savais plus à quoi me raccrocher, alors je me suis focalisé sur l’idée de la lumière du jour, sur sa chaleur, sur son éclat qui, contrairement aux autres drows, ne m’était pas odieux. Je ne voulais pas mourir avant de l’avoir revu.
Nous avons commencé à réfléchir à un plan d’évasion. Gythris attendait beaucoup d’un tunnel qu’il avait creusé patiemment depuis plusieurs années, derrière un fourneau. Je ne m’y fiais pas. Une fois sortis du domaine, on était loin d’être tirés d’Outreterre… Il fallait plus de préparation. Je pouvais nous téléporter mais mes souvenirs d’enfance étaient trop vagues pour nous renvoyer en surface, je ne voulais pas en prendre ce risque. J’ai pris le temps de dérober quelques potions. Et puis l’occasion nous est venue d’elle-même. Un peu trop facilement, même… Il n’est pas impossible que mon maître m’ait volontairement laissé fuir, comme je l’ai soupçonné par la suite. Ignorant que j’avais lu son grimoire, il devait malgré mes efforts avoir remarqué mon changement d’attitude et penser que j’avais besoin de me frotter un peu au monde avant de lui revenir… Il avait un peu trop confiance en son emprise sur moi, et en cela il n’a pas changé.
Comme il arrivait quelquefois, mon maître m’avait emmené dans une caverne hors de la cité, afin d’y recueillir des champignons et autres ingrédients pour ses sorts. J’ai profité d’un moment où il me tournait le dos pour l’assommer avec une pierre. Puis j’ai envoyé un message mental à Gythris, pour qu’il me rejoigne sur mes indications. Nous étions encore très près de la cité. Je nous ai téléportés vers une autre des cavernes où mon maître m’avait emmené auparavant, et que je pensais être beaucoup plus proche de la surface. J’ai lancé un sort d’invisibilité, et, en nous tenant par la main pour ne pas nous perdre, nous avons commencé de remonter les galeries au milieu des monstres… Ni lui ni moi n’étions préparés à ce que nous avons traversé. A peu près aveugle dans cette obscurité, Gythris a commis l’erreur de buter sur la toile d’une araignée géante qui a aussitôt alerté tout son nid. Nous avons fui mais leur poison coulait dans ses veines, et, ma réserve d’antidotes n’étant pas inépuisable, je n’ai pu que le regarder mourir… En bref, j’ai fini seul. Après plusieurs « jours » de fuite, si l’on peut dire, dans cette obscurité où le temps n’a pas de sens, j’ai revu la surface. Ironie du sort, c’était le plein midi et, comme cela faisait quinze ans que je ne l’avais pas revue, la lumière du jour m’éblouissait complètement… Je n’avais pas fait vingt pas mal assurés dans l’herbe qu’une patrouille elfique qui surveillait apparemment cette issue d’Outreterre me prenait en chasse », acheva-t-il avec un sourire de dérision en songeant aux cadavres qui les entouraient.
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Les soupçons de Lothringen quant à son évasion facilitée étaient justifiés. Un archimage, même confiant envers son protégé, ne se serait certainement pas laissé faire de la sorte. Du reste, il n'était pas compliqué pour ce mage, de retrouver rapidement Lothringen, même jusqu'à la surface s'il le fallait. Tout au moins, c'était ce que Mornagest pensait, même s'il se posait des questions sur les véritables motivations du mage... un jeu cruel, destiné à lui laisser goûter à la liberté, pour la lui reprendre ensuite, avec un délicieux sadisme ?
Mal à l'aise face à de telles pensées, qui le répugnaient lui-même, Mornagest s'efforça de penser à autre chose, et demanda alors à Lothringen :
"Et donc, tu as pu te frayer un chemin jusqu'ici. Tu n'as pas manqué de courage... même si tu le redoutes encore. Crois-tu qu'il viendrait te chercher ?"
Sa question était abrupte, mais justifiée.
Mal à l'aise face à de telles pensées, qui le répugnaient lui-même, Mornagest s'efforça de penser à autre chose, et demanda alors à Lothringen :
"Et donc, tu as pu te frayer un chemin jusqu'ici. Tu n'as pas manqué de courage... même si tu le redoutes encore. Crois-tu qu'il viendrait te chercher ?"
Sa question était abrupte, mais justifiée.
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"Ne vous imaginez pas être différente de ce qu'il eût pu sembler à autrui que vous fussiez ou eussiez pu être en restant identique à ce que vous fûtes sans jamais paraître autre que vous n'étiez avant d'être devenue ce que vous êtes." (Lewis Caroll)
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C'était la question que Lothringen n'avait cessé de ressasser depuis qu'il avait rejoint la surface, aussi ne le surprit-elle pas vraiment... Il prit le temps de méditer sa réponse. Il y avait tant de choses que Mornagest ne savait pas.
"Soyons clair, il n'avait qu'à le vouloir pour me rattraper. A partir du moment où j'avais renoncé à le tuer pendant son inconscience, je savais que je prenais ce risque... Pourtant il m'a laissé courir. Je doute que ce soit par respect pour ma décision. Il s'est contenté de mettre sur mes traces une poignée des siens chargés de me suivre, de me surveiller et de lui faire des rapports de temps à autres. Je les ai tués à Melandis l'an dernier. A cette occasion, ils m'ont révélé quelque chose d'intéressant: à savoir que le maître a perdu ma trace dans la magie depuis que je suis sur Dorrandin... "Quelque chose" fait obstacle à sa magie divinatoire. J'ignore quoi. En tout cas cela signifie qu'il ignore où je suis, et qu'il ignore mon identité actuelle."
Il sourit faiblement. Il avait tendance à croire que Tymora n'était pas étrangère à cette cécité soudaine de la magie divinatoire de Dorson, si vaniteux qu'il puisse paraître de supposer que sa déesse pourrait lui accorder une telle faveur...
"Ce n'est peut-être qu'un répit, mais je dois le mettre à profit pour m'affranchir de son influence. Au moins ça. C'est ce dont tu m'as fait prendre conscience, l'autre jour..."
"Soyons clair, il n'avait qu'à le vouloir pour me rattraper. A partir du moment où j'avais renoncé à le tuer pendant son inconscience, je savais que je prenais ce risque... Pourtant il m'a laissé courir. Je doute que ce soit par respect pour ma décision. Il s'est contenté de mettre sur mes traces une poignée des siens chargés de me suivre, de me surveiller et de lui faire des rapports de temps à autres. Je les ai tués à Melandis l'an dernier. A cette occasion, ils m'ont révélé quelque chose d'intéressant: à savoir que le maître a perdu ma trace dans la magie depuis que je suis sur Dorrandin... "Quelque chose" fait obstacle à sa magie divinatoire. J'ignore quoi. En tout cas cela signifie qu'il ignore où je suis, et qu'il ignore mon identité actuelle."
Il sourit faiblement. Il avait tendance à croire que Tymora n'était pas étrangère à cette cécité soudaine de la magie divinatoire de Dorson, si vaniteux qu'il puisse paraître de supposer que sa déesse pourrait lui accorder une telle faveur...
"Ce n'est peut-être qu'un répit, mais je dois le mettre à profit pour m'affranchir de son influence. Au moins ça. C'est ce dont tu m'as fait prendre conscience, l'autre jour..."
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Le guerrier médita ces dernières paroles. Un défi, peut-être ? Une envie de poursuivre le jeu ? Ou une réalité ? L'archimage avait-il failli dans sa distraction que lui procurait Lothringen ? Difficile de discerner la vérité des suppositions bancales. Mais le drow avait raison : il fallait se préparer sérieusement à cette éventualité.
"Je n'aurais jamais imaginé pouvoir aider quelqu'un à se rendre compte d'une réalité pareille, surtout involontairement. En fait, je croyais que tu étais aussi insensible... que ce que je pensais l'être."
Il baissa les yeux, retenant une larme douloureuse. C'était stupide de sa part, mais il pensait encore à lui. Pourrait-il un jour changer cela ? Ravalant sa tristesse, il regarda alors Lothringen.
"Si je le peux, je t'aiderai, le moment venu. Je te dois la vie, et ce n'est pas rien."
Ils étaient à un bon mètre l'un de l'autre, mais Mornagest se pencha vers le drow et posa la main sur son épaule, comme pour souligner ses propos. Ce n'était pas des paroles en l'air. Certes, il était brutal, sans égard envers ceux qui lui manquaient de respect, ou lui en voulaient pour sa simple nationalité, mais Lothringen n'était pas de ceux-là. Il ne l'avait pas jugé, il ne l'avait pas fustigé pour son étalage de sentiments à cette taverne mal famée de Manost, il lui avait sauvé la vie, après ce combat contre le freyeur... Lothringen était différent, mais pas seulement de par son apparence, bien au contraire. Sa différence était bien plus profonde, et bien plus touchante.
Mornagest lui sourit alors simplement, sans mot dire.
"Je n'aurais jamais imaginé pouvoir aider quelqu'un à se rendre compte d'une réalité pareille, surtout involontairement. En fait, je croyais que tu étais aussi insensible... que ce que je pensais l'être."
Il baissa les yeux, retenant une larme douloureuse. C'était stupide de sa part, mais il pensait encore à lui. Pourrait-il un jour changer cela ? Ravalant sa tristesse, il regarda alors Lothringen.
"Si je le peux, je t'aiderai, le moment venu. Je te dois la vie, et ce n'est pas rien."
Ils étaient à un bon mètre l'un de l'autre, mais Mornagest se pencha vers le drow et posa la main sur son épaule, comme pour souligner ses propos. Ce n'était pas des paroles en l'air. Certes, il était brutal, sans égard envers ceux qui lui manquaient de respect, ou lui en voulaient pour sa simple nationalité, mais Lothringen n'était pas de ceux-là. Il ne l'avait pas jugé, il ne l'avait pas fustigé pour son étalage de sentiments à cette taverne mal famée de Manost, il lui avait sauvé la vie, après ce combat contre le freyeur... Lothringen était différent, mais pas seulement de par son apparence, bien au contraire. Sa différence était bien plus profonde, et bien plus touchante.
Mornagest lui sourit alors simplement, sans mot dire.
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Le regard de Lothringen se perdait dans le vague, assombri par ce passé qu’il venait de laisser affleurer pour la première fois aussi explicitement depuis qu’il vivait au grand jour. Ce qu’il avait vécu à la surface de Toril, aussi mouvementée qu’y avaient été ces six dernières années, ne représentait pas plus du tiers de sa vie Outreterre… Il n’osait imaginer ce qu’il se passerait si Dorson resurgissait le lendemain sans crier gare. Il n’était pas de taille à lui tenir tête, ni sur le plan de la magie ni même sur celui de la volonté: il suffisait de considérer ses cauchemars pour s’en convaincre. Si Dorson revenait, aurait-il seulement le temps de se donner la mort avant de … avant. Et ses yeux se durcirent, progressivement, jusqu’à ressembler à deux pierres d’obsidienne: des puits de douleur et de haine. Comme il était tentant de s’y livrer pour oublier son impuissance… Mais la haine n’était-elle pas qu’une autre forme de dépendance ?
C’est la pression de la main de Mornagest sur son épaule qui le tira de ses pensées moroses. De surprise, le semi-drow cligna des yeux, comme on s’éveille d’un mauvais rêve. Le guerrier lui proposait son aide… Lothringen songea fugitivement au Grand Emissaire, qui lui avait fait la même offre, au festival d’Helonna. Avec la même sincérité sans doute, mais pour d’autres raisons… Aucune solidarité de corps, aucune éthique ne poussaient le mélandien à le faire - le contraire plutôt. Et cela ne rendait son amitié que plus précieuse. L’improbable amitié d’un guerrier qui se pensait insensible, et qui en avait d’ailleurs les larmes au bord des yeux…
Lothringen pressa fugitivement la main qu’il lui abandonnait.
« Tu ne me dois rien, mais tes paroles n’en comptent que davantage à mes yeux. »
Leurs sourires se croisèrent. Soudain fasciné par une touffe de trèfles, Lothringen chercha une phrase de sortie, et n’en trouva pas.
C’est la pression de la main de Mornagest sur son épaule qui le tira de ses pensées moroses. De surprise, le semi-drow cligna des yeux, comme on s’éveille d’un mauvais rêve. Le guerrier lui proposait son aide… Lothringen songea fugitivement au Grand Emissaire, qui lui avait fait la même offre, au festival d’Helonna. Avec la même sincérité sans doute, mais pour d’autres raisons… Aucune solidarité de corps, aucune éthique ne poussaient le mélandien à le faire - le contraire plutôt. Et cela ne rendait son amitié que plus précieuse. L’improbable amitié d’un guerrier qui se pensait insensible, et qui en avait d’ailleurs les larmes au bord des yeux…
Lothringen pressa fugitivement la main qu’il lui abandonnait.
« Tu ne me dois rien, mais tes paroles n’en comptent que davantage à mes yeux. »
Leurs sourires se croisèrent. Soudain fasciné par une touffe de trèfles, Lothringen chercha une phrase de sortie, et n’en trouva pas.
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Le guerrier cessa de regarder Lothringen. Un moment de gêne... non. Point de gêne entre eux. Un simple silence, un silence qui parlait plus que certains mots, certains discours inutiles. Après tout, que pouvaient-ils dire après de tels propos ? Le drow avait raconté l'essentiel, et Mornagest ne pouvait que compatir à la douleur vécue par le malheureux.
Compatir... un mot dont il avait presque oublié le sens. Il allait bien avec l'amitié, cette amitié qu'il découvrait, ou redécouvrait... Après tout, l'avait-il jamais connue, dans cette vie ? N'était-il pas mort depuis longtemps, et n'était-il pas rené depuis quelques jours, du moins, psychiquement ? Toutes ces sensations qu'il vivait, ces sentiments qui affluaient vers lui, souvent malvenus, mais si authentiques, si spontanés. Il n'avait guère besoin de se cacher, avec Lothringen. Et cela faisait une énorme différence.
Il ferma les yeux, écoutant simplement le vent qui bruissait dans les feuilles, autour d'eux. Un moment de répis. Il n'avait pas tellement envie de le briser, à vrai dire, même s'ils ne pourraient rester indéfiniment là. Mais, mieux qu'une nuit de sommeil, ces quelques instants lui procuraient un agréable sentiment de bien-être, presque... une envie de vivre.
Silencieusement, une larme coula le long de la joue de Mornagest.
Compatir... un mot dont il avait presque oublié le sens. Il allait bien avec l'amitié, cette amitié qu'il découvrait, ou redécouvrait... Après tout, l'avait-il jamais connue, dans cette vie ? N'était-il pas mort depuis longtemps, et n'était-il pas rené depuis quelques jours, du moins, psychiquement ? Toutes ces sensations qu'il vivait, ces sentiments qui affluaient vers lui, souvent malvenus, mais si authentiques, si spontanés. Il n'avait guère besoin de se cacher, avec Lothringen. Et cela faisait une énorme différence.
Il ferma les yeux, écoutant simplement le vent qui bruissait dans les feuilles, autour d'eux. Un moment de répis. Il n'avait pas tellement envie de le briser, à vrai dire, même s'ils ne pourraient rester indéfiniment là. Mais, mieux qu'une nuit de sommeil, ces quelques instants lui procuraient un agréable sentiment de bien-être, presque... une envie de vivre.
Silencieusement, une larme coula le long de la joue de Mornagest.
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Au beau milieu de ce silence, le grondement des chevaux s'entendait de très loin. Ils devaient être cette fois beaucoup plus nombreux qu'au matin, car tandis qu'ils approchaient le sol se mit à trembler. On piailla de dépit dans les taillis alentours. Quelques oiseaux, effrayés, s'envolèrent. Lothringen, toujours incapable de bouger, regarda significativement Mornagest. Cette cavalcade venait de l'ouest...
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Il se releva, en soupirant intérieurement. Jamais le repos n'était long, hélas...
"Je vais essayer de nous montrer, cette fois. J'espère qu'ils pourront te soigner avant de te placer sur une selle."
Il se releva avec les membres ankylosés, puis sortit des fourrés afin de se placer près du puits. C'est là qu'il serait le plus visible. Pour les amis, ou les ennemis...
"Je vais essayer de nous montrer, cette fois. J'espère qu'ils pourront te soigner avant de te placer sur une selle."
Il se releva avec les membres ankylosés, puis sortit des fourrés afin de se placer près du puits. C'est là qu'il serait le plus visible. Pour les amis, ou les ennemis...
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Mornagest était indéniablement bien visible, et la troupe des manostiens dut piler devant lui sur un signe de son capitaine, qui ne se lassait pas de considérer ce grand type en caleçon qui se tenait près du puits, au beau milieu de cinq cadavres commençant à flairer sérieusement la charogne.
Le mélandien se nomma et indiqua que le conseiller se trouvait non loin de là, blessé mais conscient. Le militaire voulut alors voir Lothringen, qui l'accueillit avec un soulagement visible. Le capitaine était préoccupé; envoyé à leur recherche, il était plutôt satisfait de ne pas devoir aller demander de leurs nouvelles aux elfes d'à côté, mais cela ne résolvait pas le problème que lui posaient ces cadavres. Aussi ne perdit-il pas de temps en mondanités; à peine avait-il salué qu'il enchaîna:
"Nos relations avec les elfes de cuivre sont assez tendues et s'ils vous retenaient pour je ne sais quel motif il nous aurait été plutôt difficile de leur faire entendre raison... Pourriez-vous me dire ce qu'il s'est passé? Nul doute qu'ils viendront nous demander des comptes pour la disparition de cette patrouille..."
Lothringen haussa les épaules. Demander des comptes, rien que ça...
"Alors voilà ce que vous allez faire. Vous allez ramasser ces cadavres qui leur appartiennent et vous allez les leur rendre avec nos condoléances officielles. Et s'ils vous demandent ce qu'il s'est passé, vous leur direz que vous les avez trouvés dans cet état, en cet endroit, et que vous ne savez pas qui a fait ça. Vous leur ferez remarquer en passant qu'il y a des maraudeurs dans ces régions et que vous vous étonnez de voir une patrouille elfique y circuler en armes alors que ce n'est plus leur territoire depuis longtemps."
Le capitaine fronça les sourcils.
"Vous... vous me demandez de mentir?"
Lothringen le foudroya du regard.
"Vous m'avez mal compris. Je vous *ordonne* de mentir. Cela vous poserait-il un problème de conscience, militaire?"
"Hé bien..."
"À moins que vous ne jugiez beaucoup plus judicieux de leur expliquer que le conseiller à la diplomatie, qui est d'ailleurs un elfe noir, et son ami mélandien, lui aussi diplomate, ont massacré cette patrouille qui passait malencontreusement sur le chemin de leur promenade?"
Le mélandien se nomma et indiqua que le conseiller se trouvait non loin de là, blessé mais conscient. Le militaire voulut alors voir Lothringen, qui l'accueillit avec un soulagement visible. Le capitaine était préoccupé; envoyé à leur recherche, il était plutôt satisfait de ne pas devoir aller demander de leurs nouvelles aux elfes d'à côté, mais cela ne résolvait pas le problème que lui posaient ces cadavres. Aussi ne perdit-il pas de temps en mondanités; à peine avait-il salué qu'il enchaîna:
"Nos relations avec les elfes de cuivre sont assez tendues et s'ils vous retenaient pour je ne sais quel motif il nous aurait été plutôt difficile de leur faire entendre raison... Pourriez-vous me dire ce qu'il s'est passé? Nul doute qu'ils viendront nous demander des comptes pour la disparition de cette patrouille..."
Lothringen haussa les épaules. Demander des comptes, rien que ça...
"Alors voilà ce que vous allez faire. Vous allez ramasser ces cadavres qui leur appartiennent et vous allez les leur rendre avec nos condoléances officielles. Et s'ils vous demandent ce qu'il s'est passé, vous leur direz que vous les avez trouvés dans cet état, en cet endroit, et que vous ne savez pas qui a fait ça. Vous leur ferez remarquer en passant qu'il y a des maraudeurs dans ces régions et que vous vous étonnez de voir une patrouille elfique y circuler en armes alors que ce n'est plus leur territoire depuis longtemps."
Le capitaine fronça les sourcils.
"Vous... vous me demandez de mentir?"
Lothringen le foudroya du regard.
"Vous m'avez mal compris. Je vous *ordonne* de mentir. Cela vous poserait-il un problème de conscience, militaire?"
"Hé bien..."
"À moins que vous ne jugiez beaucoup plus judicieux de leur expliquer que le conseiller à la diplomatie, qui est d'ailleurs un elfe noir, et son ami mélandien, lui aussi diplomate, ont massacré cette patrouille qui passait malencontreusement sur le chemin de leur promenade?"
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Mornagest sourit. La manœuvre était habile ; reporter la responsabilité sur les elfes, qui d'ailleurs les avaient agressé sans raison valable. Du reste, ils étaient en territoire adverse, d'après l'elfe qui s'était trahi. Restait à découvrir la raison qui les avait poussés à venir jusqu'ici, sans autorisation.
"Je me demande ce qu'ils mijotaient par ici. En tout cas, rien de pacifique. Ils nous ont attaqué sans que nous puissions décliner nos identités. Nous n'avons pas eu le choix."
Il se demandait si Lothringen avait envie de connaître le fin fond de cette histoire. Mais l'heure était aux soins. Le drow était blessé, et les bandages de fortune qui maintenait ses chairs en place ne tiendraient pas longtemps. Un bon prêtre lui serait bien plus utile.
"Quant à nous, nous avons besoin de soins... et de vêtements", ajouta-t-il avec un sourire amusé. "L'accrochage n'a pas été sans conséquences, comme vous pouvez le constater."
"Je me demande ce qu'ils mijotaient par ici. En tout cas, rien de pacifique. Ils nous ont attaqué sans que nous puissions décliner nos identités. Nous n'avons pas eu le choix."
Il se demandait si Lothringen avait envie de connaître le fin fond de cette histoire. Mais l'heure était aux soins. Le drow était blessé, et les bandages de fortune qui maintenait ses chairs en place ne tiendraient pas longtemps. Un bon prêtre lui serait bien plus utile.
"Quant à nous, nous avons besoin de soins... et de vêtements", ajouta-t-il avec un sourire amusé. "L'accrochage n'a pas été sans conséquences, comme vous pouvez le constater."
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"Ne vous imaginez pas être différente de ce qu'il eût pu sembler à autrui que vous fussiez ou eussiez pu être en restant identique à ce que vous fûtes sans jamais paraître autre que vous n'étiez avant d'être devenue ce que vous êtes." (Lewis Caroll)
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Le capitaine considéra un instant l’elfe noir.
« A quel point êtes-vous blessé ? Nous nous sommes équipés pour le combat, pas pour les secours, et nous n’avons pas pris de clerc avec nous. »
« C’est une erreur… »
« Je peux néanmoins vous donner des chevaux et une partie de mes hommes pour gagner Ysté, un village à pas plus de dix lieues plus au nord. Ils ont un temple et une auberge… »
Lothringen grimaça.
« Je ne suis pas en état de monter à cheval. N’avez-vous pas la moindre potion de soin ? »
« Si, répliqua le soldat en tirant deux fioles de ses fontes. J’ai deux potions de soin léger, mais elles ne suffiront pas, vu votre état. »
« Elles suffiront à me faire monter à cheval. N’avez-vous pas non plus une tunique de rechange ?» Le semi-drow fixa avec insistance cet individu trop peu coppératif à son goût.
« Hem… » A contrecœur, l’officier sortit du linge personnel de ses fontes, et le remit à Mornagest. « Voilà, c’est tout ce que j’ai. »
« Merci », répliqua Lothringen en traînant sur les syllabes d’un air moqueur. « Avez-vous des nouvelles du Palais des murmures ? »
« Ils nous ont annoncé par pigeon voyageur que la correction s’achevait, mais comme vous étiez portés disparus, nous avons différé la réponse… Un messager devrait être en route pour Graëlon avec toute cette paperasse, à l’heure actuelle. Avec un bon cheval et des relais, il devrait arriver demain. »
Lothringen se tourna vers Mornagest.
"Qu'en penses-tu? La prudence commanderait de quitter cet endroit, mais je n'éprouve aucun désir de rejoindre la "civilisation". Va pour Ysté?"
« A quel point êtes-vous blessé ? Nous nous sommes équipés pour le combat, pas pour les secours, et nous n’avons pas pris de clerc avec nous. »
« C’est une erreur… »
« Je peux néanmoins vous donner des chevaux et une partie de mes hommes pour gagner Ysté, un village à pas plus de dix lieues plus au nord. Ils ont un temple et une auberge… »
Lothringen grimaça.
« Je ne suis pas en état de monter à cheval. N’avez-vous pas la moindre potion de soin ? »
« Si, répliqua le soldat en tirant deux fioles de ses fontes. J’ai deux potions de soin léger, mais elles ne suffiront pas, vu votre état. »
« Elles suffiront à me faire monter à cheval. N’avez-vous pas non plus une tunique de rechange ?» Le semi-drow fixa avec insistance cet individu trop peu coppératif à son goût.
« Hem… » A contrecœur, l’officier sortit du linge personnel de ses fontes, et le remit à Mornagest. « Voilà, c’est tout ce que j’ai. »
« Merci », répliqua Lothringen en traînant sur les syllabes d’un air moqueur. « Avez-vous des nouvelles du Palais des murmures ? »
« Ils nous ont annoncé par pigeon voyageur que la correction s’achevait, mais comme vous étiez portés disparus, nous avons différé la réponse… Un messager devrait être en route pour Graëlon avec toute cette paperasse, à l’heure actuelle. Avec un bon cheval et des relais, il devrait arriver demain. »
Lothringen se tourna vers Mornagest.
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Mornagest venait de terminer d'enfiler les vêtements du garde manostien. Un rien petit, mais le guerrier était immense, rien d'étonnant à cela.
Son choix était vite fait. Et Lothringen le savait, d'autant qu'il n'était guère pour la "sécurité" que l'on pouvait espérer en ville. Il en avait suffisamment fait les frais à Manost comme cela.
"Eh bien, si les papiers de l'accord sont prêts, je suppose qu'ils n'ont pas besoin de nous dans l'immédiat. Et tu sais ce que je pense du calme qu'on trouve ici. Mon choix est donc fait : allons à Ysté."
Mieux valait de plus faire soigner Lothringen le plus tôt possible, et s'il y avait un temple là-bas, c'était parfait.
Son choix était vite fait. Et Lothringen le savait, d'autant qu'il n'était guère pour la "sécurité" que l'on pouvait espérer en ville. Il en avait suffisamment fait les frais à Manost comme cela.
"Eh bien, si les papiers de l'accord sont prêts, je suppose qu'ils n'ont pas besoin de nous dans l'immédiat. Et tu sais ce que je pense du calme qu'on trouve ici. Mon choix est donc fait : allons à Ysté."
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Ainsi fut fait. Lothringen avala d'un trait les deux potions de soins légers. Il put sentir les croûtes se durcir, la peau commencer de se reformer. Mais il en faudrait davantage pour lui permettre de reconstituer sa chair et son sang. Le semi-drow se releva avec lenteur, prenant appui contre le chêne. La tête lui tourna un peu... C'était passé. Il allongea quelques pas mal assurés pour se sortir des taillis, puis se traîna lentement jusqu'au puits, où il s'assit. La main sur le symbole étrange, Mornagest l'entendit murmurer le mot de pouvoir... Le puits d'Inselwenn avait retrouvé sa sècheresse. Mieux valait dissimuler son avantage si l'on voulait pouvoir en tirer parti quelque jour.
Sans se retourner, le conseiller donna quelques ordres brefs. Il voulait deux chevaux pour eux, trois cavaliers d'escorte. Il voulait que la petite troupe se rende directement auprès des elfes, quand elle aurait ramassé ces cadavres. Il leur recommandait la prudence, de ne surtout pas laisser voir qu'ils en savaient davantage. Il demandait d'envoyer un messager à Graëlon, pour rassurer qui de droit sur leur état et faire suivre les projets d'accords corrigés jusqu'à Ysté.
Monter en selle ne fut pas trop difficile quand on lui eut fait la courte échelle. Le semi-drow sourit. Une fois son assiette assurée, il se sentait beaucoup plus à son aise sur un canasson que sur ses deux jambes. Un paradoxe, car il n'avait toujours préféré sentir directement la terre ferme sous ses semelles.
Le capitaine qu'il abandonnait à sa délicate mission de convoyeur de cadavres faisait grise mine. En se séparant du gros de la troupe, Lothringen poussa la fourberie jusqu'à lui souhaiter le sourire de la dame.
Sans se retourner, le conseiller donna quelques ordres brefs. Il voulait deux chevaux pour eux, trois cavaliers d'escorte. Il voulait que la petite troupe se rende directement auprès des elfes, quand elle aurait ramassé ces cadavres. Il leur recommandait la prudence, de ne surtout pas laisser voir qu'ils en savaient davantage. Il demandait d'envoyer un messager à Graëlon, pour rassurer qui de droit sur leur état et faire suivre les projets d'accords corrigés jusqu'à Ysté.
Monter en selle ne fut pas trop difficile quand on lui eut fait la courte échelle. Le semi-drow sourit. Une fois son assiette assurée, il se sentait beaucoup plus à son aise sur un canasson que sur ses deux jambes. Un paradoxe, car il n'avait toujours préféré sentir directement la terre ferme sous ses semelles.
Le capitaine qu'il abandonnait à sa délicate mission de convoyeur de cadavres faisait grise mine. En se séparant du gros de la troupe, Lothringen poussa la fourberie jusqu'à lui souhaiter le sourire de la dame.
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Le mélandien n'avait pas souvent eu l'occasion de monter à cheval, mais heureusement, il avait quelques bases sur cette pratique somme toute agréable : il ne devait pas faire sans cesse attention aux trous que cachaient les hautes herbes du pays. Et c'était reposant, également.
Cependant, la présence de l'escorte l'ennuyait quelque peu ; aucun moyen de parler en privé... tant pis. Il ferait montre de patience. Mais cette sensation de ne plus être vraiment libre le dérangeait... Baste. Ils auraient un peu d'espace plus tard.
Tandis que les chevaux les menaient vers Ysté, Mornagest laissa son esprit voguer sur la sombre mer des pensées. Exercice qu'il affectionnait presque, depuis quelques temps. Il lui permettait d'enfin leur faire face, avec, certes, des "dérapages" sentimentaux. Encore tout à l'heure, cette larme... Mais, finalement, en quoi était-ce désagréable ? Le guerrier doutait que Lothringen s'en offusquât, et cela soulageait, quelque part. Une soupape de sécurité, quand la nervosité, la tristesse, devenaient trop grandes.
Evidemment, avec ces gardes autour d'eux, difficile de pousser aussi loin cette excavation de souvenirs morbides. D'un autre côté, en avait-il d'une autre nature ?
Cependant, la présence de l'escorte l'ennuyait quelque peu ; aucun moyen de parler en privé... tant pis. Il ferait montre de patience. Mais cette sensation de ne plus être vraiment libre le dérangeait... Baste. Ils auraient un peu d'espace plus tard.
Tandis que les chevaux les menaient vers Ysté, Mornagest laissa son esprit voguer sur la sombre mer des pensées. Exercice qu'il affectionnait presque, depuis quelques temps. Il lui permettait d'enfin leur faire face, avec, certes, des "dérapages" sentimentaux. Encore tout à l'heure, cette larme... Mais, finalement, en quoi était-ce désagréable ? Le guerrier doutait que Lothringen s'en offusquât, et cela soulageait, quelque part. Une soupape de sécurité, quand la nervosité, la tristesse, devenaient trop grandes.
Evidemment, avec ces gardes autour d'eux, difficile de pousser aussi loin cette excavation de souvenirs morbides. D'un autre côté, en avait-il d'une autre nature ?
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Tandis que les gardes leur montraient la route, Lothringen songea qu'il avait bien fait de demander cette escorte; sans aide, ils auraient eu quelque peine à ne pas se perdre dans les innombrables chemins de vacher qui couraient entre les herbes pour s'y entrelacer selon une géométrie à la logique plus sûrement indéchiffrable qu'un parchemin néthère. Leur tracé se perdait dans les hautes herbes, suivait des lignes courbes, s'interrompait parfois sur quelques centaines de pas, pour reprendre sans crier gare. Les chevaux y progressaient d'un pas confortable et nonchalant;on pouvait sans péril leur nouer la bride au garrot. Les uns et les autres commençaient bon gré mal gré de faire la sieste, bercé par le pas régulier de leurs montures.
Peu sensible aux charmes du paysage, le semi-drow laissait reposer ses mains sur les épaules du cheval, afin de mieux appréhender a priori ses mouvements: son côté le tirait encore, l'empêchant d'apprécier tout à fait la promenade. Quand il eut trouvé le rythme et la position qui lui convenaient le mieux, il se rapprocha néanmoins des gardes, afin de les interroger plus avant sur ce qu'il en était au juste des elfes du bosquet. Il avait cru les relations figées dans un statu quo rancunier depuis des dizaines d'années; il se trompait apparemment.
Les gardes lui apportèrent peu de révélations, mais confirmèrent beaucoup de choses qu'il soupçonnait déjà. Après avoir élu un nouveau chef, les elfes avaient commencé deux ans plus tôt de contester l'accord tacite qui les cantonnait depuis si longtemps dans la forêt du Bosquet. De plus en plus fréquemment, leurs patrouilles s'étaient montrées au public dans les territoires qui séparaient Graëlon de la lisière. S'ils n'attaquaient pas, ils inquiétaient grandement les fermiers. Plusieurs villages s'étaient vidés lors d'une période de sécheresse, le puits qui leur servait de garantie s'étant brutalement asséché... On parlait aussi de voyageurs isolés qui disparaissaient, d'épidémies dans le bétail, mais comment distinguer les superstitions des réalités? Toujours est-il que les elfes avaient l'ambition presque affichée de reconquérir leurs anciens territoires. Par quels moyens? Cela restait à voir...
Lothringen songeait aux deux elfes qu'il aurait pu capturer, et qui s'étaient donné la mort en avalant du poison... A quel usage ce dernier avait-il d'abord été promis?
Durant ces échanges, le conseiller garda un oeil sur Mornagest, qui paraissait de nouveau parti dans ses pensées sinistres. Des pensées où il ne pouvait le suivre... Devinant que les gardes le gênaient, Lothringen congédia ces derniers dès que les toits de chaume d'Ysté se firent apercevoir à l'horizon. Et, tandis que les trois cavaliers reprenaient au trot la route de Graëlon, le semi-drow se rapprocha de son compagnon, le temps d'écouter la cavalcade qui prenait ses distances. Une brise légère soufflait dans l'herbe, soulevant les crins des encolures. A présent, même le silence avait pris une autre épaisseur.
Peu sensible aux charmes du paysage, le semi-drow laissait reposer ses mains sur les épaules du cheval, afin de mieux appréhender a priori ses mouvements: son côté le tirait encore, l'empêchant d'apprécier tout à fait la promenade. Quand il eut trouvé le rythme et la position qui lui convenaient le mieux, il se rapprocha néanmoins des gardes, afin de les interroger plus avant sur ce qu'il en était au juste des elfes du bosquet. Il avait cru les relations figées dans un statu quo rancunier depuis des dizaines d'années; il se trompait apparemment.
Les gardes lui apportèrent peu de révélations, mais confirmèrent beaucoup de choses qu'il soupçonnait déjà. Après avoir élu un nouveau chef, les elfes avaient commencé deux ans plus tôt de contester l'accord tacite qui les cantonnait depuis si longtemps dans la forêt du Bosquet. De plus en plus fréquemment, leurs patrouilles s'étaient montrées au public dans les territoires qui séparaient Graëlon de la lisière. S'ils n'attaquaient pas, ils inquiétaient grandement les fermiers. Plusieurs villages s'étaient vidés lors d'une période de sécheresse, le puits qui leur servait de garantie s'étant brutalement asséché... On parlait aussi de voyageurs isolés qui disparaissaient, d'épidémies dans le bétail, mais comment distinguer les superstitions des réalités? Toujours est-il que les elfes avaient l'ambition presque affichée de reconquérir leurs anciens territoires. Par quels moyens? Cela restait à voir...
Lothringen songeait aux deux elfes qu'il aurait pu capturer, et qui s'étaient donné la mort en avalant du poison... A quel usage ce dernier avait-il d'abord été promis?
Durant ces échanges, le conseiller garda un oeil sur Mornagest, qui paraissait de nouveau parti dans ses pensées sinistres. Des pensées où il ne pouvait le suivre... Devinant que les gardes le gênaient, Lothringen congédia ces derniers dès que les toits de chaume d'Ysté se firent apercevoir à l'horizon. Et, tandis que les trois cavaliers reprenaient au trot la route de Graëlon, le semi-drow se rapprocha de son compagnon, le temps d'écouter la cavalcade qui prenait ses distances. Une brise légère soufflait dans l'herbe, soulevant les crins des encolures. A présent, même le silence avait pris une autre épaisseur.
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Plongé dans ses pensées, le guerrier ne jetait qu'un coup d'oeil distrait sur la promenade à cheval. Il se contentait de se tenir aux rennes, sans même guider sa monture, qui suivait docilement les autres, devant elle. Il remarqua à peine le départ des gardes vers le village, et s'extirpa alors de son voyage intérieur.
"Tu ne crains pas une attaque, si près du village, je présume. J'ai entendu que tu parlais aux gardes, mais je n'y ai pas fort prêté attention, je le crains..."
Ils continuèrent à chevaucher quelques instants, et le silence, entrecoupé du bruit des sabots des chevaux sur la terre, redevint le seul perturbateur.
"Tu voulais me dire quelque chose ?" s'enquit-il enfin. A vrai dire, il aurait pu continuer longtemps ses réflexions. Elles lui étaient moins douloureuses, maintenant. Il avait une idée là-dessus. Son combat contre le freyeur lui avait presque été salutaire : il lui avait permis d'explorer jusqu'au plus profond de lui-même, lui faire ressortir ses vieux démons, enfouis depuis si longtemps... qu'il ne pouvait craindre pire de sa part, de sa sinistre mémoire. Une piste à explorer. Mais il lui faudrait encore du temps, et du calme.
En ce moment, Lothringen était là, autant profiter de ces quelques instants. Mornagest s'était aperçu depuis un moment déjà, qu'il préférait de loin être seul avec l'elfe noir. De là à appeler cela de l'intimité, il n'y avait qu'un pas...
"Tu ne crains pas une attaque, si près du village, je présume. J'ai entendu que tu parlais aux gardes, mais je n'y ai pas fort prêté attention, je le crains..."
Ils continuèrent à chevaucher quelques instants, et le silence, entrecoupé du bruit des sabots des chevaux sur la terre, redevint le seul perturbateur.
"Tu voulais me dire quelque chose ?" s'enquit-il enfin. A vrai dire, il aurait pu continuer longtemps ses réflexions. Elles lui étaient moins douloureuses, maintenant. Il avait une idée là-dessus. Son combat contre le freyeur lui avait presque été salutaire : il lui avait permis d'explorer jusqu'au plus profond de lui-même, lui faire ressortir ses vieux démons, enfouis depuis si longtemps... qu'il ne pouvait craindre pire de sa part, de sa sinistre mémoire. Une piste à explorer. Mais il lui faudrait encore du temps, et du calme.
En ce moment, Lothringen était là, autant profiter de ces quelques instants. Mornagest s'était aperçu depuis un moment déjà, qu'il préférait de loin être seul avec l'elfe noir. De là à appeler cela de l'intimité, il n'y avait qu'un pas...
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