La Couronne de Cuivre

Caron était venu s’asseoir à côté de Taliesin, avec l’elfe aux cheveux sombres qui le flanquait. Il laissa cependant le barde se sustenter sans l’importuner pendant de longues minutes avant d’intervenir.
« Faut pas que vous vous en fassiez. Personne n’en mène large, à l’arrivée. Bon, c’est rare qu’ils nous fourguent des mecs plutôt légers, mais regarde Pelaniel… »
L’elfe à ses côté leva les sourcils et leur jeta un regard mauvais.
« Ou ce fluet de Mélégorn… Ils sont là depuis un bail, maintenant. Ce qu’ils avaient dans le ciboulot s’est déplacé dans leurs bras. »
« Parle pour toi, Caron. » grommela l’elfe.
« Ce que j’veux dire, c’est que vous prendrez le pli. »

Taliesin offrit à Caron un sourire fatigué. Il avait pris le parti de l'affabilité et s'y maintenait quoi qu'il en coûte, même si sa mine joviale ne pouvait effacer les marques de son épuisement.
-Bah, de toute façon, ce n'est pas comme si nous avions vraiment le choix ! fit-il en haussant les épaules. Je suppose qu'un bon moyen de tenir le coup est de se focaliser sur les petites joies qu'on nous offre ici, comme les repas... Et même le trajet jsuqu'aux mines. Cela fait du bien de prendre un peu l'air et de se dégourdir les jambes...
Il ne pouvait que parler ainsi, d'un ton léger, raconter des choses sans importance. Il ne savait rien de Caron, ni des autres. Il n'avait que de vagues impressions... Une chose était certaine, cependant : il ne pouvait pas se fier à eux. Qu'il se montre par trop imprudent, et on le dénoncerait, ce qui annihilerait définitivement ses espoirs déjà bien maigres de se carapater.
D'un autre côté, il ne pouvait pas ne rien essayer : le temps pressait. Il devait donc tenter le coup, avancer à mots couverts, tâter le terrain, par des choses anodines... Une idée lui vint, et il l'a saisit au vol. Après tout, il ne risquait pas grand chose à parler dans le vide...
-N'empêche, poursuivit-il, leur système est un peu idiot. Je sais bien que le but est de nous faire expier, et donc, de nous en faire baver. Mais ils l'utilisent quand même, le charbon qu'on sort. Ils le vendent ! Et il y aurait moyen d'en sortir plus. Beaucoup plus. Si on me laissait chanter, jouer d'un instrument, user de mes talents bardiques, par exemple... Ce n'est pas le peu que je fais là qui vous aide beaucoup. Si j'utilisais mes chansons, au contraire, cela vous galvaniserait, vous ne sentiriez plus la fatigue... Je me détruirait la gorge et les bronches à cause des poussières, excellente expiation, et eux verraient leurs profits croître. Et nous... Nous serions sans nul doute l'équipe la plus productive, recevant au passage les récompenses dont vous parliez la dernière fois...
Il sourit à nouveau.
-D'ailleurs, ces récompenses, quelles sont-elles ? Cela pourrait bien faire partie des petites joies et des objectifs propres à faire tenir mes bras faiblissants et a rendre un peu plus attrayant ce quotidien qui s'annonce on ne peut plus monotone.

« Un jour de congé par mois, déjà, on crache pas dessus, mon gars. » fit Caron.
« Tu es crédule, toi. Tu penses que nous sommes les seuls à exploiter la mine ? » intervint l’elfe, railleur. « Il y a une autre entrée, là où se trouve la mine commerciale. Ce qu’on tire d’ici est rajouté à leur charbon. Ils se fichent bien de la rentabilité. On voit bien que tu n’es pas d’Ithilion ! »
« Arrête, Pel, tu veux ? » intervint le chef d’équipe. « On trime beaucoup plus que les mineurs professionnels, et on n’est pas payé. Crois-moi, on leur rapporte assez. Et Pelaniel n’a pas tort. Ils ne veulent pas se faire d’argent. Ils pourraient nous faciliter la tâche de mille manières si c’était le cas… mais ce n’est pas le cas. »
Il se pencha ensuite en avant jusqu’à l’oreille du barde.
« Quant à tes histoires de chansons, si j’étais toi, je ne la ramènerais pas trop. » ajouta-t-il à voix basse. « Tu vois Mélégorn, là… C’est le demi-elfe qui est attaché à Krik Krak. C’était un ensorceleur, un bon. Quand il est arrivé ici, on l’a prévenu de pas faire de son nez… que ça barderait pour lui s’il tentait quoi que ce soit… Il a pas écouté… Quelques jours après son arrivée, il a essayé de se faire la malle en attaquant les gardes avec des projectiles magiques… Malheureusement pour lui, les gardes sont protégés, eux. On lui a coupé la langue et pour le punir de sa tentative, on l’a enchaîné à Krik Krak. Depuis, je peux te dire qu’il doit regretter amèrement le jour où il a essayé de s’échapper. Et depuis ce jour, aussi, on coupe la langue de tous les magiciens qui se retrouvent parmi nous. Ils sont pas nombreux, comme je te disais, c’est pas un endroit pour les costauds d’la cervelle. Mais si j’étais toi, je la ramènerais pas avec mes chants… ça non. »

Taliesin grimaça ostensiblement;
-Hum, merci pour le conseil. Je ne suis effectivement pas très coutumier de ce genre de... pratiques. Même si mes pauvres talents ne sont guère dangereux, je me le tiendrai pour dit.
Il y avait une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise, c'était que les gardes étaient intouchables. La bonne, qu'il n'était peut-être pas incapable de lancer des sorts, comme il l'avait cru. Il faudrait donc qu'il réfléchisse à une évasion des plus discrètes. Il pouvait briser ses chaînes d'une façon ou d'une autre, se rendre invisible, sa faufiler dans les galeries pour gagner les zones occupées par les vrais mineurs...
Bien sûr, on le poursuivrait. Et il devrait embarquer Lars : il ne pouvait décemment pas le laisser en arrière. Mais il avait^sans doute plus de tours dans son sac qu'il ne l'avait envisagé de prime abord.
Réfléchir, encore. Observer, inlassablement. Guetter le bon moment, les possibles facilités, l'opportunité à saisir.
Restait à espérer qu'elle ne tarderait pas trop. Et que ni Caron ni son compagnon de chaîne ne le dénonceraient comme un lanceur de sorts.

La journée de travail reprit peu après, sans que les muscles courbaturés du barde et de son compagnon d’infortune n’aient pu réellement récupérer. En milieu d’après-midi, Taliesin put constater qu’il avait la paume des mains à vif et lorsque l’heure du retour au campement sonna enfin, une toux insistante, sèche et irritante, s’était nichée dans sa gorge. Il était épuisé. Lars ne valait pas mieux, et finit par s’appuyer sur son guide titubant alors qu’ils regagnaient l’air libre. A l’extérieur, un vent glacial soufflait, chargé de neige, frappant les prisonniers sans pitié. Il remontait de la vallée et ils durent marcher contre la bise. Heureusement, Taliesin constata que la présence d’un demi-ogre dans leurs rangs était des plus utiles : ce dernier ouvrait la route et tout le monde se pressait dans son ombre, profitant de la maigre protection que son corps massif offrait. Krik-Krak, de son côté, sifflait avec entrain, même si le son de sa ritournelle était avalé par le hululement du vent.

La fin de journée s'écoula, identique à la précédente, à la différence près que le barde était si fatigué que le moindre geste lui demandait un effort de concentration tel qu'il devait renoncer, un temps, à ses réflexions silencieuses.
On les conduisit au décrassage, lequel acheva de le glacer jusqu'aux os. Puis ce fut le repas, chaud, heureusement, et Taliesin avala sa part sans se faire prier, sans presque faire attention au goût. Il valait mieux : sa bouche était emplie de celui du charbon, sa gorge irritée aussi. Mais il avait faim, au combien faim, et il n'aurait pas hésité à se resservir, si on leur offrait semblable possibilité.
Ce qui n'était bien sûr pas le cas.
Il prit à peine part aux conversations des autres : il n'avait pas d'énergie à gaspiller en vaines palabres. Mais il dut parfois répondre à quelques questions ou remarques, rebondir lorsque son avis semblait plus ou moins attendu. Il le fit de son mieux, tentant de conserver son masque détendu et plaisant malgré le tournis qui menaçait et la douleur insistante de ses muscles.
Il devait partir le plus rapidement possible. C'était impératif. Une semaine comme celle-ci, deux, peut-être, et il deviendrait incapable d'aligner la moindre pensée. Ou de faire quoi que ce soit de ses mains. Déjà, tenir sa cuiller lui arrachait parfois des grimaces.
Enfin, ce fut le retour au dortoir, le retrait des gardes dans leur alcôve, sitôt les chaînes cadenassées, l'atmosphère confinée de l'espace étroit sous le plafond.
La fatigue menaçait de l'emporter, de le faire sombrer dans le sommeil, mais l'elfe tenta d'y résister. Il devait essayer de réfléchir, d'élaborer un plan, de songer à ce qu'il avait vu, entendu au fil de la journée écoulée.
Il pouvait peut-être utiliser la magie..;
Mais cela lui paraissait impensable. Comment Kanter aurait-il pu oublier de préciser sa profession ? Cela ne lui ressemblait pas. C'était une erreur par trop grossière, indigne de l'homme intelligent et machiavélique qu'il avait entrevu. Il s'agissait peut-être simplement d'un piège qu'on lui tendait. D'une fausse opportunité dont il mesurerait bien vite les conséquences.
A moins que Kanter n'ait secrètement voulu qu'il s'échappe.
Pour le faire tomber encore plus bas...

Le jour suivant fut semblable au précédent, en tous points. Ils se levèrent avant le soleil, se préparèrent pour la mine et s’y rendirent dans le blizzard. Un fois à l’abri des éléments, ils furent pris d’assaut par l’air suffocant des galeries obscures, où flottait déjà la fumée des lampes à huile qu’un autre groupe avait allumées peu avant leur arrivée. Ce jour-là, ils avaient été affectés à un conduit plus large et plus agréable, du moins en comparaison de celui de la veille, et cela se ressentait dans l’ardeur que les prisonniers mettaient à la tâche. La mine semblait gigantesque et s’y retrouver des plus ardus. Taliesin avait compris, désormais, qu’ils étaient perpétuellement accompagnés de six gardes, un par duo. Hormis leurs fouets, qu’ils ne brandissaient pour ainsi dire jamais, ils portaient tous une épée courte au côté. Les deux qui partageaient leur dortoir se nommaient William et Corey, un humain et un demi-elfe, sévères sans être malveillants. L’elfe ne savait pas s’il y avait une rotation entre les gardes à ce niveau-là mais soupçonnait que c’était le cas. Il était impossible de bavarder pendant le labeur, mais l’heure du midi était une fenêtre pendant laquelle la tension se relâchait, et des paroles s’échangeaient.

Harassé, les mains en sang, la gorge en feu, Taliesin n'avait guère de forces pour parler ou pour réfléchir. Mais, tout en avalant sa pitance charbonneuse, il s'efforçait d'analyser les éléments qu'avait apportés cette nouvelle demi-journée de travaux forcés. Ils étaient rares : les gardes étaient bien armés et vigilants, la mine un gigantesque dédale où l'on avait plus de chances de s'égarer que de regagner la lumière du jour, les occasions d'agir sans être vu quasi inexistantes. Pour tester sa magie, il ne voyait guère que le moment du décrassage, en espérant que personne ne lui prête attention, ou la nuit, en priant pour que ni les gardes ni les autres prisonniers n'entendent son incantation. Cela faisait beaucoup de conditions hasardeuses, mais il faudrait qu'il se décide à agir rapidement, pour savoir à quoi s'en tenir, savoir s'il pouvait compter ou non sur ses sorts. Et si c'était non... Il ne voyait guère de moyens pour s'en sortir. Le système du camp était bien rôdé, ils étaient toujours sous surveillance, n'avaient pas la moindre liberté d'action. Et la fatigue se faisait sans cesse croissante... Bientôt, il ne serait peut-être même plus capable d'user de sortilèges : sa voix était déjà enrouée, et le moindre mouvement une épreuve.
Tu vois ? Tu aurais mieux fait de ne pas te raccrocher à ce fol espoir et de te supprimer...
Il s'efforçait de ne pas écouter ses doutes pourtant croissants, de se concentrer sur le souvenir des siens, sur leur funeste destin, les épreuves qu'ils devaient traverser. Il ne pouvait les abandonner, n'en avait pas le droit.
Mais pouvait-il faire quoi que ce soit, en réalité ?
Qu'importe, il essaierai. Quitte à tenter une évasion désespérée. Il doutait qu'une occasion se présente, que la chance soit de son côté. Alors, tôt ou tard, il tenterait le coup. Et si cela devait échouer, il s'arrangerait pour qu'on ne puisse pas lui faire subir le même sort qu'au malheureux "lié" de l'ogre Krik-Krak...

En fin de journée, après qu’ils se soient décrassés et alors qu’ils s’apprêtaient à aller prendre un repos bien mérité, Taliesin et Lars furent entraînés à l’écart par deux gardiens, tandis que le reste de l’équipe rentrait dans le dortoir. On les mena jusqu’au baraquement du premier jour, où ils avaient rencontré le chef du camp, et les fit entrer dans la petite pièce qui servait de hall. Là, un des gardiens les abandonna et revint peu après avec une clef qu’il fit tourner dans la serrure du fer de l’elfe, le libérant de sa moitié. Lorsque Lars sentit qu’on l’avait délivré du barde, il se mit à trembler, mais ce n’était pas après lui qu’on en avait. Le garde qui avait défait la chaîne de Taliesin lui menotta les poignets dans le dos et l’entraîna dans les couloirs, suivant l’itinéraire qu’ils avaient emprunté deux jours plus tôt, jusqu’au bureau du responsable de la mine. A leur arrivée, ce dernier leva les yeux de ses documents, qu’il compulsait à la lueur d’une bougie, et fit signe au barde de s’asseoir sur la chaise qui lui faisait face. Le garde escorta le prisonnier jusque là et le fit s’exécuter d’une pression ferme sur l’épaule.
« Bonsoir, mon ami. J’espère que votre installation se passe bien ? » fit le chef de camp avec un sourire contraint.

Le cœur de l'elfe s'était mis à battre la chamade et sa gorge était devenue sèche comme du papier.
Que signifiait cette soudaine convocation ? Caron ou Pélaniel avaient-ils parlé ? Évoqué ses pouvoirs dont il avait imprudemment fait mention, sans véritablement avoir le choix ?
Ne rien laisser paraître. Il devait absolument ne rien laisser paraître. C'était peut-être simplement une formalité. Après en avoir terminé avec lui, on ferait sans doute venir Lars...
Ne rien laisser paraître et ne pas faire d'esclandre, surtout.
Il s'efforça donc d'arborer une mine simplement fatigué - ce qui ne devait pas être très difficile, vu son état - et haussa vaguement les épaules.
-Oui, messire, répondit-il d'une voix enrouée. L'adaptation est un peu... rude, mais je commence à prendre le pli, je crois.

Le chef de camp grimaça et s’assit sur son bureau. Il semblait chercher ses mots.
« Je sais que vous êtes barde. » déclara-t-il finalement de but en blanc. « Comme on vous l’a peut-être dit… Il est de coutume au camp d’empêcher les lanceurs de sorts, qu’ils soient profanes ou divins, de pouvoir exercer leur art dangereux. En général, on leur coupe la langue. C’est une petite opération sans douleur et rapide. Elle a l’avantage d’être efficace. »
Il sourit distraitement à l’elfe.
« Cependant, en général, les prisonniers ne sont pas très volontaires. Et je préfère toujours garder de bons contacts avec des personnes qui vont rester nos pensionnaires pendant vingt ou cent ans. »
Son regard se fit plus pénétrant.
« Je suis disposé à faire un marché avec vous. Notre personnel manque cruellement de distractions, et l’hiver est particulièrement rébarbatif… Il est impossible de rallier Ithilion et ses plaisirs, notamment, ce qui pèse à bon nombre des gardiens. »
Il sourit à nouveau.
« Je vous propose de vous laisser votre langue en échange d’un divertissement hebdomadaire pour le personnel. Si vous voulez la nuit pour y réfléchir, je comprendrai. C’est un engagement sur le long terme. Mais si vous y mettez du coeur, peut-être même pourrais-je imaginer quelques compensations connexes, au bout d'un certain temps... »

Ainsi donc, on l'avait trahi.
Évidemment, il pouvait envisager la possibilité que, lors de leur première rencontre, l'homme ait été trop occupé pour songer à ce détail. Mais, en l'occurrence, ce n'était pas exactement un détail, et le soin méticuleux apporté à la surveillance des prisonnier semblait rendre impossible cette vision des choses. Non, on devait l'avoir trahi. Qui avait été l'initiateur ? Il penchait pour Pélaniel, bien qu'il n'eut aucun moyen d'en être sûr.
Et puis, peu importait, en réalité : la chose servait finalement ses intérêts. Il ne pouvait présumer des opportunités que lui offriraient ces représentations, mais il y en aurait peut-être. Dans tous les cas, cela lui éviterait de se voir trancher la langue, ce qui n'était pas négligeable.
-Il faudrait être fou pour refuser votre offre, messire... dit-il d'un ton humble. Et pas seulement à cause des conséquences de l'opération que vous évoquiez. La musique fut mon métier et ma passion. Pouvoir encore m'y adonner malgré mes crimes... Je ne peux considérer cela que comme un honneur, une faveur insigne, et non pas une contrainte.
Il lorgna ses mains abîmées, racla sa gorge irritée et fit la grimace.
-Cependant, je ne voudrais pas que vous regrettiez votre mansuétude et veniez à considérer avoir conclu un marché de dupe. c'est pourquoi je me dois de vous prévenir : il se peut que mes performances ne soient pas à la hauteur de vos attentes. Alors, il vaudrait sans doute mieux instaurer une période d'essai, pour voir si vous êtes satisfait de mes services.
En la circonstance, il faisait preuve d'une complète honnêteté. Mais que l'autre le comprenne ou le prenne pour un flagorneur, cela ne changeait rien. Dans le premier cas, ce pouvait même lui être profitable.

« Ne vous inquiétez pas, je suis certain que vous ne pourrez pas faire pire que le joyeux chœur des gardiens réunis. » fit le chef de camp en gloussant. « Vous me voyez ravi de pouvoir compter sur votre coopération. »
Il se leva, la mine réjouie, puis son regard se fit à nouveau plus sérieux.
« Vos gardes seront bien entendu au courant de ce dont vous êtes capable. Je ne voudrais pas que vous soyez malencontreusement tenté de faire usage de vos tours en dehors de ces occasions spéciales. Je pense que nous allons nous entendre et je serais désolé de devoir renoncer à vos talents parce qu’une idée saugrenue de fuite vous est passée par l’esprit… »

L'elfe, souriant, haussa les épaules.
-Vous surestimer mes pouvoirs et ma propension à me bercer de folles illusions, messire. Mes tours concernent uniquement la musique, et le seul dont j'userai, avec votre permission et sous la surveillance des gardes, sera une convocation d'instrument. Quant à tenter de m'enfuir... L'édifiant destin de l'un de mes camarades suffirait à décourager des gens bien plus puissants que moi.
Il secoua la tête, souriant à nouveau.
-Je ferai en sorte que vous ne regrettiez pas de m'avoir offert cette chance, messire. Vous n'aurez pas à vous plaindre de moi.

« Je l’espère aussi. » répondit le chef de camp en faisant signe au garde qui était demeuré dans l’ombre du barde. « Bonne nuit, à présent. Je vous ferai mander dans quelques jours. »
Puis il se retourna, signe que le prisonnier était congédié, et Taliesin fut ramené dans le petit hall d’entrée, où attendait toujours Lars, flanqué de son cerbère qui fumait la pipe d’un air distrait. Il faut dire que le jeune luménien faisait pâle figure et aurait pu sans conteste disputer son titre de forçat le plus misérable à Mélégorn, le lié du demi-ogre. Il parut cependant reprendre vie lorsque l’elfe reparut et le barde fut surpris de lire un réel soulagement sur ses traits lorsqu’on les enchaîna à nouveau l’un à l’autre.
Ils sortirent ensuite dans la nuit froide, sous une petite neige légère, noircie avant de toucher le sol. Ils ne lambinèrent pas en chemin, on les invita à se vider la vessie une dernière fois, puis ils pénétrèrent dans le dortoir endormi. Taliesin aurait néanmoins pu jurer qu’une partie de leurs camarades de labeur les attendaient et guettaient leurs moindres mouvements. Dans un coin, des gémissements s’échappaient d’une couchette, lesquels s’interrompirent pendant qu’ils s’installaient, pour redémarrer de plus belle après le départ des gardes. Si certains avaient des questions, ils les gardèrent pour eux-mêmes, alors que les ténèbres s’installaient entre leurs murs huileux.

Le barde était tellement épuisé que le sommeil s'abattit sur lui sitôt qu'il fut couché. Et, contrairement à la veille, il ne fit rien pour le repousser. Il avait besoin de tout le repos qu'il pourrait prendre afin de garder son esprit éveillé et ses sens en alerte tout au long de la journée suivante. De plus, il n'avait guère de sujets de réflexion, ce soir-là. Il se dit bien que le reste de l'équipe pourrait lui en vouloir de ce qui lui apparaîtrait immanquablement comme un privilège. Il s'interrogea aussi, vaguement, sur ce que lui apporterait ledit privilège en matière d'opportunités de fuite... Songea au temps qui passait, à ce que devaient endurer Galathée et Victor, à la nécessité d'agir au plus vite... Mais la fatigue balaya tout sur son passage et l'elfe sombra en quelques minutes à peine dans un sommeil profond et sans rêves.

Les deux jours suivants se succédèrent sans événements notoires. Il faisait toujours aussi froid au dehors, toujours aussi oppressant à l’intérieur de la mine, et Taliesin constata que ses compagnons de misère n’avaient pas menti : même s’il rentrait moulu de ses journées de labeur, ses yeux et ses poumons semblaient s’accoutumer à l’air vicié et piquant. Un midi, il vit que les hommes échangeaient à son sujet, avec moult éclats de rire, mais il n’eut pas à s’inquiéter longtemps : l’un d’entre eux vint lui demander s’il était fumeur. Apparemment, son équipe venait de prendre des paris à ce sujet, et lorsqu’il avoua son goût pour la pipe, il fit quelques heureux, d’autres moins, et on lui expliqua que les amateurs de fines herbes s’habituaient toujours plus facilement à l’atmosphère chargée du campement. Ce qui ne voulait pas dire, malheureusement, qu’ils survivaient plus longtemps. Ces quelques jours permirent à Taliesin de se faire une meilleure idée du plan du campement, qui avait trois portes principales, l’une menant vers la mine, l’autre probablement vers la ville, puisqu’elle était empruntée par les chariots chargés, la dernière vers une destination indéterminée et qui n’avait encore jamais été ouverte depuis l’arrivée du barde. On ne le prévoyait d’ailleurs pas, car elle n’était pas dégagée comme les deux autres, et la neige y atteignait la hauteur d’un pied. Les contacts avec l’extérieur étaient réduits au plus strict minimum : le charbon et les provisions circulaient sur la même route, convoyés par le même groupe de personnes, qui étaient, elles aussi, des prisonniers. C’était les « amendables », selon les mots de Caron, des hommes qu’on pensait récupérables et qui purgeaient une peine de travail plus légère avant d’être réintégrés à la société ithilionne. Ils n’avaient plus aucun contact avec les forçats, suite à une série d’incidents sanglants qui avaient eu lieu quelques années plus tôt.

Lars, de son côté, abattait sa part de travail maladroitement mais sans se plaindre, plongé dans un mutisme de mauvaise augure, qui n’avait rien à envier à l’ensorceleur sans langue. Taliesin l’entendait parfois sangloter pendant la nuit, un comportement qui ne lui avait jamais attiré la moindre remarque, de personne, même s’il pouvait difficilement passer inaperçu.

Le matin du troisième jour, on les leva plus tard qu’à l’accoutumée et Taliesin sentit qu’une ambiance plus légère flottait dans le dortoir alors que ses compagnons de labeur s’habillaient avec des vêtements propres que distribuaient les gardes. Il se passait manifestement quelque chose de spécial.

Taliesin s'habilla à son tour, maussade. Il ne savait pas ce qui se préparait : on ne lui en avait rien dit. Peut-être une journée de repos relatif, ou l'un des événements qui rythmaient la vie du camp et permettait aux prisonniers de tenir le coup plus longtemps. Quoi qu'il en soit, lui-même n'y trouvait aucun motif de réjouissance : il n'était pas résigné à demeurer ici, contrairement à ce qui semblait être le cas pour la plupart des autres. Au contraire, il ne voyait que le défilement des jour et les chances de retrouver Galathée et Victor qui s'amenuisaient d'autant. Pourtant, il devait lutter contre le sentiment d'urgence qui l'opressait, pouvait le pousser à agir inconsidérement, par désespoir. Il devait demeurer vigilant, patient, observer et guetter, toujours. Chercher le bon moment. Au final, peut-être cette journée particulière lui permettrait-elle de découvrir certaines pistes d'évasion...
Il se dit aussi qu'il serait grand temps de parler à Lars. Il ne pourrait rien tenter sans lui, à moins de briser la chaîne qui les reliait. Et quand bien même l'aurait-il fait, il ne se sentait pas le droit d'abandonner le jeune homme derrière lui. Il avait une dette à son égard, et il comptait bien s'en acquitter. Au moins, ce serait quelque chose de bon au milieu de cette désastreuse affaire.
Et il fallait que Lars tienne le coup, qu'il le réconforte de son mieux, malgré la maigreur flagrante de ses moyens. Il lui parlerait, oui. Il se rendait compte qu'il ne l'avait interrogé sur rien, en dehors du destin de sa famille. Obnubilé par son envie de la retrouver et ses projets d'évasion, il avait manqué à son devoir. Il était grand temps d'y remédier.

Ils ne descendirent pas à la mine mais furent affectés au chargement des chariots qui partaient vers la cité d’Ithilion. C’était un labeur physique, mais partiellement au grand air, et même le hangar où était entreposé le charbon était moins confiné que la mine. Il faisait bien évidemment plus froid, mais cela avait quelque chose de vivifiant après toutes ces journées passées des ténèbres aux ténèbres, de la nuit aux mines et des mines à la nuit. Taliesin réalisa qu’il n’avait plus vu le soleil depuis près d’une demi-veille. Ils travaillèrent dans une ambiance plus guillerette qu’à l’accoutumée, renforcée par le ciel limpide qui les couvrait ce jour-là, jusqu’à la pause de midi, où ils purent réintégrer le réfectoire pour manger au chaud. Ils prirent place, comme de coutume, autour de leur table désignée, chacun à sa place habituelle, tranquille, routinière, sans fracas, et on leur servit une soupe épaisse rehaussée d’un peu de crème, qui les revigora.

Comme les autres forçats discutaient avec animation, le laissant relativement tranquille, Taliesin tenta d'ignorer ses muscles endoloris pour se concentrer sur Lars. Celui-ci mangeait doucement, d'humeur aussi pitoyable que de coutume, et l'elfe pensa enfin comprendre d'où venait son désespoir. Le jeune homme n'avait tout simplement plus le moindre espoir de s'en tirer. Sans doute se pensait-il condamné à une perpétuelle vie de forçats, sans la moindre porte de sortie, pas même le suicide. Et il ne savait rien de ses plans d'évasion. Il ne lui en avait pas touché mot, non pas tant par manque de confiance - même s'il ne savait pas dans quelle mesure il pouvait se fier à lui - mais par peur du reste de l'équipe et des gardes qui n'étaient jamais bien loin. Dans ces circonstances, la moindre parole pouvait s'avérer fatale...
Toutefois, Taliesin ne pouvait pas le laisser sombrer ainsi. Il avait besoin de lui... et lui devait beaucoup. Alors, après avoir jeté un regard au reste de la tablée, il décida se se lancer. Il ne savait pas bien par où commencer, mais il ne pouvait guère tergiverser. Plus assez d'énergie pour cela.
-Dites-moi, Lars... fit-il finalement en lui touchant légèrement le bras. Je ne vous l'ai jamais demandé, mais... Y a-t-il quelqu'un qui compte pour vous, au dehors ? Quelqu'un qui puisse se demander ce qui vous est arrivé ?

Lars parut surpris que son voisin lui adresse la parole et se recroquevilla au-dessus de son assiette.
« Non, non, personne ne me cherche. » murmura-t-il. « Ce qui me restait de famille… »
Il eut un sourire contraint.
« Tout le monde est mort pendant la dictature morféenne. C’est pour cela que… que votre croisade… »
Il se tut.
« Ça n’a plus d’importance, n’est-ce pas ? » ajouta-t-il à voix basse.

Du coin de l'œil, Taliesin lorgna les autres forçats. Ils paraissaient toujours ne pas leur prêter attention, mais les apparences pouvaient être trompeuse. D'autant qu'on l'avait déjà dénoncé une fois. Si cela devait se reproduire, il y avait peu de chances pour qu'il s'en tire aussi bien... Il devait donc surveiller ses paroles, se fendre d'une réponse sibylline dont on ne pourrait rien déduire mais qui vaudrait toujours mieux qu'un non définitif.
-Nous sommes vivants, Lars, souffla-t-il. Et tant que ça sera le cas, les choses garderont une certaine importance.

« Je sais pas si je vais être vivant longtemps. » fit le jeune homme d’une voix lugubre. « Mais je m’en fiche… Je voudrais juste que ça ne fasse pas trop mal. »
Il se tut, lorgnant son assiette sans la voir.
« Mais c’est normal que je sois puni. Je suis puni pour vous avoir obéi, et puni pour vous avoir trahi. Beshaba lorgne sur mon destin, je ne puis pas espérer grand chose. »

Taliesin soupira.
-J'ai longtemps cru la même chose, vous savez. Qu'elle s'était entichée de moi... Je serais même prêt à le croire aujourd'hui encore, si d'autres gens ne m'avaient convaincu que ce n'était pas le cas, si ma vie n'avait été émaillée d'événements heureux qui compensent tout le reste... Si je n'étais, envers et contre tout, toujours vivant.
Il baissa encore le ton.
-Et vous ne méritez pas ce qui vous arrive, Lars. Ce que vous avez fait pendant la dictature, vous l'avez fait sous mon influence, à mon instigation. C'est ma faute si vous avez commis ces atrocités. Me serais-je contenté de vous libérer que vous seriez heureux, aujourd'hui. Mais non, j'ai voulu me servir de vous... Dès lors, vu ce qui s'est passé, c'est chose fort naturelle que d'avoir songé à vous racheter en me dénonçant. N'en éprouvez aucun remord, vraiment. C'est moi qui doit éprouver les remords, moi seul : ce qui vous arrive, ce qui m'arrive, c'est entièrement ma faute. Alors, ne vous torturez pas davantage qu'on ne vous torture déjà, et n'oubliez pas... J'ai une dette envers vous. Et je la paierai.

Lars ne répondit d’abord rien.
« Je ne veux plus vous croire. » finit-il par dire. « Vous avez dit beaucoup de choses quand nous étions à Luménis, et… et j’ai été crédule, à l’époque. Je ne veux plus l’être. Pardonnez-moi mais… j’aurais mieux fait de ne pas retourner vers vous… et je pense… que je ferais mieux de ne plus trop… je sais que je ne peux pas me détacher de vous, mais… je ne veux pas que vous ayez l’impression de me devoir quelque chose… C’est moi qui nous ai mis dans cette situation parce que… j’ai pensé que je pouvais… mettre un terme à… Mais vous… vous portez la poisse. »

Taliesin grimaça.
-Oh, ça, j'aurais du mal à vous contredire, et m'est avis que vous n'êtes pas le seul à le penser, loin s'en faut.
Il soupira.
-Comme je vous l'avais dit le premier jour de notre présence ici, je comprends fort bien que je sois la dernière personne avec qui vous avez envie d'être. Je peux juste vous assurer que je vous ennuierai aussi peu que le permet notre proximité forcée.
Il ne savait que penser de la rancœur qui pointait désormais chez Lars, laquelle tranchait avec sa presque servilité des premiers temps, s'il fallait en déduire qu'il reprenait du poil de la bête ou, au contraire, qu'il s'enfonçait toujours un peu plus avant dans son marasme. Une chose était sûre, cependant : il ne pouvait pas compter sur lui. A la longue, peut-être aurait-il réussi à le convaincre, mais c'était inenvisageable ici. Trop d'oreilles à portée, en permanence. Il devrait donc agir seul. Peut-être les "concerts" qu'il allait devoir donner pour la garde lui en fourniraient-ils l'occasion : il doutait qu'on l'y maintienne enchaîné au jeune homme. Il rechignait à le laisser en arrière, à l'abandonner à son sort. Il le tirerait de là malgré lui, s'il le pouvait. Mais si c'était trop dur, il s'en irait seul. Il n'avait pas vraiment le choix. Et le destin des siens passait avant tout le reste.

La conversation toucha à son terme avec la fin du repas. Les gardes entraînèrent le groupe au dehors et ils regagnèrent la froidure du hangar et les pelletées de charbon. La journée se déroula tranquillement, puis ils regagnèrent le dortoir. Les deux journées suivantes les ramenèrent au noir des mines et à un labeur à vous casser le dos. La routine s’installait peu à peu. Le médecin était repassé les voir, lui et Lars, avait prescrit des pansements apaisants pour leurs mains meurtries, mais sans les dispenser de creuser. Le matin du troisième jour, ou était-ce le quatrième ?, le chef de camp aborda l’elfe alors que son équipe quittait le dortoir et lui apprit qu’il serait invité à jouer le soir-même. On lui offrirait une heure de rabais sur la journée pour qu’il puisse se laver et se préparer. Il lui souffla également de penser à des choses printanières et joyeuses plutôt que des lamentations de saison. Puis il s’esquiva, laissant une série de regards suspicieux sur le barde. Néanmoins, personne ne lui posa de questions, et les gens ne l’interrogèrent pas davantage lorsqu’ils s’arrêtèrent pour manger à midi. En fin de journée, finalement, un garde vint relever leur duo et ils remontèrent vers la surface, laissant le reste de l’équipe aux prises avec le roc, dans les profondeurs de la terre.

Taliesin, plus épuisé que jamais et se demandant comment il allait bien pouvoir s'acquitter de sa nouvelle tâche au regard de son épuisement, constata néanmoins qu'il avait vu juste : on le sépara de Lars avant de lui fournir l'opportunité d'un décrassage. C'était un bon point. Du moins, ça le serait si ces représentations lui fournissaient des opportunités, des facilités d'évasion, ce qui restait encore à prouver.
Tout en procédant à des ablutions aussi poussées que possible - se rendre visage elfique ne pourrait pas le desservir - le barde, qui doutait l'être encore, ne put que noter à nouveau l'état déplorable de ses mains. Les pansements fournis par le médecin du camp étaient d'une efficacité douteuse et, entre les plaies, les ampoules éclatées, les cals durcis, il peinait à les reconnaître. S'il parvenait à jouer de la harpe, ce serait un miracle. Le luth, peut-être, s'il recourait à un biais comme un plectre, pourrait à la rigueur passer. Mais le résultat ne serait guère brillant non plus...
Il ne pouvait toutefois pas se contenter de chanter : sa voix était trop rauque, trop enrouée par la poussière de charbon. Si on le laissait faire, il pourrait toujours lancer une ou deux illusions sonores, histoire de composer un accompagnement décent...
Bah, il verrait bien comment les choses tourneraient. Peut-être le métier reprendrait-il le dessus, même s'il ne l'avait plus exercé depuis ce qui lui paraissait une éternité. Et puis, les gardes n'étaient certainement pas de grands mélomanes. S'il présentait quelque chose de passable, sans doute s'en satisferaient-ils.
Il ne fallait cependant pas que ce soit un fiasco complet. Sans quoi, il pourrait dire adieu à sa langue.

Lorsqu'il en eut fini avec ses ablutions, le garde qui était resté avec lui le raccompagna jusqu'au dortoir, lequel était désert. Ce qu'ils avaient fait de Lars, impossible de le savoir. Une tenue propre l'attendait sur son lit, qui sans être folichonne, avait un drapé un peu plus soigné que son uniforme de prisonnier. Elle était de couleur violet sombre, en laine épaisse, ce qui n'était pas un luxe vu le froid glacial.
Après qu'il se soit changé, il fut conduit jusqu'au bâtiment où se trouvaient les bureaux du pénitencier et le garde l'emmena jusqu'à une petite salle chaleureuse où brûlait une petite flambée agréable. Sur une table, un souper acceptable attendait, et Taliesin fut invité à s'asseoir devant une soupe épaisse, du pain et du fromage, et même une petite coupe de vin odorant. Cependant, on ne le laissa pas courir. Son gardien lui enchaîna une cheville à un anneau rivé au sol, avant de s'écarter pour le laisser manger. De la pièce voisine s'échappaient des rires et des bribes de conversation impossibles à comprendre, ainsi que le bruit de couverts qui s'entrechoquent. Apparemment, ses hôtes faisaient bombance avant sa grande entrée.

Taliesin ne bouda ni le semblant de confort qu'on lui offrait ni les mets mis à sa disposition : tout ce qui pouvait lui redonner un semblant de force était mille fois bienvenu. Il mangea rapidement, apprécia le vin qui, peut-être, apaisera un peu sa gorge irritée et lorsqu'il en eut terminé, il se tourna vers le garde qui se tenait près de lui.
-Pardonnez-moi, messire... fit-il d'un ton humble. Sauriez-vous s'il m'est permis de convoquer un instrument de musique ? Si c'est le cas, j'aimerais, avec votre permission, le faire dès à présent, afin de m'assurer que... je suis toujours capable d'en jouer. Et d'y renoncer, le cas échéant... Il eut un bref regard pour ses mains. Ah, et...Pensez-vous que j'aurais la possibilité, durant la représentation, d'user d'un de mes tours pour amener un supplément d'accompagnement ? Cela pourrait faire un bon effet... Il est évident que je me soumettrai à toutes les mesures de sécurité et de surveillance que vous jugerez appropriées. Et que je n'y aurais pas recours, si cela vous paraît inopportun.
Si on lui laissait cette latitude, peut-être le "concert" serait-il moins lamentable qu'il ne le craignait. Sans parler du fait que cela lui permettrait enfin de s'assurer qu'il avait toujours la possibilité de recourir à la magie...

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Mine pénitentiaire de Gargouille

Quête : Les Squelettes du Placard, Chapitre 3.

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Quête : Les Squelettes du Placard, chapitre 2.

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