[Lieu] Nauru

[Galathée]

" Cette heure-ci, comme vous l'appelez, n'a pas le même sens pour les elfes que pour les humains. Je ne sais pas où ils sont et ce qu'ils font : mille choses, potentiellement... mais nous pouvons nous renseigner. Savez-vous quel genre de batelier vous cherchez ? Des gens susceptibles d'arpenter le fleuve tout entier ? Ils sont peu nombreux."
Ils semblaient avoir quitté la cité pour s'enfoncer dans un sous-bois. Astrée ne voyait plus de bâtiments. Pourtant, ils n'avaient pas quitté Nauru, ou en tout cas franchi aucune barrière visible.

[Voyageuse]

Astrée acquiesça.
" Oui, il me faut des bateliers qui vont régulièrement jusqu'à Anarion et même Belred Luyn. Comme ça, je suis sûre qu'ils connaissent ceux pour qui je m'inquiète, Palen et Jill... et ils ont une petite chance d'avoir des nouvelles."
Même sans moyens magiques, des informations pouvaient avoir circulé. Surtout si les choses avaient mal tourné.
" Mais je ne veux pas vous retarder trop. J'espère que nous les trouverons facilement."

[Galathée]

" La notion du temps est différente pour vous et pour moi, dit l'elfe avec flegme. Je n'en suis pas à une heure... ou même à une nuit."
Ils trouvèrent une auberge au détour d'un grand arbre. Ou plutôt, ils trouvèrent l'arbre qui abritait l'auberge et il leur fallut grimper dans les hauteurs, ce dont Astrée s'acquitta avec brio, selon ses critères. Une fois sur les plateformes branlantes situées dans les hauteurs, ils entrèrent dans un semblant de cabane. L'apparition de la rôdeuse suscita de la surprise mais pas d'hostilité, d'autant qu'elle était accompagnée. Le commun de la plupart des convives était cependant assez limité et le rôdeur servit d'interprète pour localiser des bateliers. Ils avaient de la chance, trois d'entre eux dînaient justement dans l'établissement et ils les trouvèrent un étage plus haut (si cela avait le moindre sens dans ce dédale de branchages et de passerelles). C'étaient des voyageurs, aussi étaient-ils un peu plus versés dans la langue humaine, et cette fois, le rôdeur laissa Astrée se débrouiller.

[Voyageuse]

Astrée se trouva bien embarrassée en voyant les regards se tourner vers elle lorsqu'elle entra dans la pièce. Sa requête lui paraissait bien dérisoire, ridicule peut-être, et elle commença par bafouiller quelques mots d'excuse qui se refusèrent à sortir clairement de sa gorge, avant de réussir à se reprendre suffisamment pour articuler des paroles compréhensibles.
" Je... Heu... 'Quelundome".
Elle avait eu le temps, pendant le trajet, de se remémorer quelques mots de politesse appris au contact de Garahel, mais avait bien failli tout oublier en se trouvant face à eux.
" Excusez-moi de vous importuner. Je cherche juste... J'aimerais savoir si l'un d'entre vous aurait eu des nouvelles récentes du capitaine Palen."

[Galathée]

" Palen ? Oui, je l'ai vu il y a deux mois à Anarion." répondit l'un des bateliers, un elfe d'âge indéterminable, lunaire.
Il haussa les épaules.
" Il ne remonte presque jamais jusqu'à Nauru. En général, il reste autour d'Anarion."

[Voyageuse]

Deux mois... Bien sûr. C'était récent à l'échelle elfique.
Astrée réprima un soupir.
" Je l'ai vu moi aussi, tout récemment, il y a à peine une veille. Mais... j'ai un pressentiment, sans doute absurde mais qui m'inquiète, et j'aurais voulu savoir si quelqu'un avait entendu parler de quoi que ce soit qui lui serait arrivé. Ou au Martin-Pêcheur. Ces jours derniers. Ou d'un événement grave sur l'autre bras de la rivière... Ou... -elle haussa les épaules- quoi que ce soit d'inquiétant."

[Galathée]

Ils la dévisagèrent avec incrédulité.
" On n'a rien entendu, dit l'un d'entre eux en secouant la tête.
— S'il s'était passé quelque chose d'important, on le saurait."
Il y eut quelques échanges en elfique et des sourires bourgeonnèrent, peut-être un peu moqueurs.
" Vous ne devriez pas vous inquiéter pour Palen. Il y en a vu d'autres, beaucoup d'autres, et il en verra encore que vous serez poussière depuis longtemps." dit finalement un autre des bateliers, sans agressivité, comme énonçant simplement un fait.

[Voyageuse]

Astrée se sentit rosir devant leur réaction. Bien sûr, son inquiétude devait paraître totalement absurde. Ils ne savaient pas qu'ils poursuivaient une barge pleine d'individus dangereux...
" Je... je m'en doute, oui. Je... J'avais juste envie de me rassurer. S'il n'y a pas de nouvelle, c'est que tout va bien, c'est ce qu'on dit en général", conclut-elle avec un haussement d'épaules fataliste.
Elle aurait bien voulu réussir à s'en persuader totalement, mais un doute, une inquiétude, subsisterait, tant qu'elle n'aurait pas de certitude. La seule solution pour se rassurer vraiment était de descendre à Belred Luyn, elle le savait depuis le début.
Il ne servait à rien de s'attarder ici. Elle plaqua un sourire de remerciement sur son visage.
" Merci en tout cas de m'avoir répondu. Je ne vous dérange pas plus longtemps..."

[Galathée]

" Pas de mal." dit le premier elfe, et les autres acquiescèrent, murmurant quelques salutations brèves en elfique, avant de reprendre le fil de leurs conversations.
Le rôdeur, resté en retrait, revint vers elle.
" Je vous raccompagne à l'auberge ?"

[Voyageuse]

Astrée hésita, puis secoua la tête en se dirigeant vers la sortie. Faire perdre son temps à un inconnu n'était pas son genre.
" Vous n'êtes pas obligé, vous avez sûrement mieux à faire. Vous êtes déjà bien aimable de m'avoir guidée jusqu'ici. Je saurai retrouver mon chemin, ne vous inquiétez pas. A moins bien sûr que le secteur soit interdit aux humains non accompagnés, ou quelque chose comme ça..."
Elle n'avait rien vu qui indique une interdiction, mais elle avait pu manquer une information, dans cette ville où tout était écrit en elfique.

[Galathée]

" Vous ne retrouverez pas votre chemin, dit l'elfe. Et c'est mieux d'éviter de traîner dans ce secteur quand on n'est pas elfe, oui. Vous risquez d'être importunée. Comme je vous l'ai dit, ça ne me dérange pas : la nuit est jeune, je peux quitter Naura dans l'heure, ou dans les cinq qui viennent, rien n'en sera bouleversé."

[Voyageuse]

Astrée sourit avec gratitude.
" Dans ce cas, si vous pensez que c'est plus sûr... je veux bien que vous me raccompagniez, oui. Je ne pensais pas que je risquais quoi que ce soit. Mais... je n'ai pas l'habitude des villes elfiques, à vrai dire. Je ne suis jamais venue en Lorien. Alors... je ne sais pas ce qui se fait ou pas. "
Elle se demandait qui l'importunerait. Des elfes qui estimeraient qu'elle n'avait pas sa place dans ce quartier en tant qu'humaine ? Ou, plus gênant, d'autres qui la prendraient pour une fille facile ? Elle n'avait rien ressenti de tel en venant ici, mais elle avait cru comprendre que les humaines pouvaient avoir cette réputation.... et il était certainement plus sage d'être accompagnée, dans ce cas, surtout en n'étant pas armée. Même si les elfes lui paraissaient être des personnes très civilisées qui n'importuneraient pas une jeune femme, elle pouvait se tromper.

[Galathée]

" C'est normal." dit simplement l'elfe avant de la raccompagner vers l'extérieur.
Ils redescendirent de leur perchoir et repartirent dans le sous-bois, désormais totalement obscur. Les rares lumières se trouvaient en hauteur, là où vivaient les elfes. Au sol, il faisait très noir, et la ramure des arbres, qui bouchait le ciel, n'aidait pas les étoiles ou la lune à éclairer le sol. Rien que pour cela, la présence de l'elfe était bienvenue. Il la guida dans les buissons, derrière les troncs et entre les racines, suivant un itinéraire invisible et qu'Astrée ne reconnut en rien. Mais après une marche d'une petite demi-heure environ, ils avaient atteint l'auberge.
" Vous voilà rendue. Bon séjour en Lorien."

[Voyageuse]

Astrée, qui avait eu toutes les peines du monde à éviter les obstacles dans l'obscurité, sourit avec un certain soulagement.
" Diola lle. Vous aviez raison, je me serais perdue sans guide. Merci à vous de m'avoir raccompagnée. Et... Namaarie."
Elle s'inclina légèrement en guise de salutations, comme il lui semblait avoir vu faire Mathieu ou Garahel.
Il ne lui restait plus qu'à rentrer dormir... et à repartir dès le lendemain. Après avoir fait quelques courses, tout de même.

[Galathée]

Les boutiques de Nauru n'étaient pas beaucoup plus faciles à localiser que les tavernes et Astrée dut recourir aux bons conseils de son aubergiste et à la bonne volonté de certains promeneurs pour rassembler tout ce qu'elle voulait acheter. Ce ne fut pas aussi facile que prévu, et certains des items ordinaires qu'elle avait imaginé trouver aisément avaient une forme, une couleur ou une texture différente de ce dont elle avait l'habitude. Ce n'était pas seulement dû à la culture elfique qui imprégnait les lieux, mais aussi à son isolement : il n'y avait que deux routes y menant, une rivière, peu de marchands, peu de visiteurs. Si Nauru recelait des trésors et des curiosités autres que son architecture étrange (ou son absence d'architecture), ce serait pour une autre fois : il était temps pour Astrée de rassembler ses affaires et de reprendre son périple vers Belred Luyn.

[Voyageuse]

Oubliant sa curiosité habituelle, Astrée ne s'attarda pas plus que nécessaire. Elle n'avait besoin que de quelques provisions pour les casse-croûtes du midi ou un éventuel bivouac imprévu -bien qu'elle ait toujours la possibilité de recourir à un sortilège pour se nourrir-, et, surtout, de renouveler certaines herbes médicinales de sa trousse de soins. Ce dernier point fut le plus problématique, les herbes de la Lorien étant différentes de celles qu'elle connaissait, et elle dut se fier aux explications laborieuses du vendeur pour trouver au moins de quoi soigner la fièvre et un anti-poison basique.
Si la situation avait été différente, elle aurait déambulé un moment dans cette étrange ville, et en aurait profité pour chercher des renseignements sur les montagnes, mais elle ne pensait pas un seul instant à ce qui était sensé être sa destination. Tant qu'elle ne saurait pas ce qui était advenu de Mathieu, de Palen et de cette fichue barge, elle ne pourrait se consacrer à rien d'autre. Elle reprit donc rapidement le chemin de l'auberge pour y récupérer ses armes et son sac. Et, comme Jack Deaglan le lui avait conseillé, elle prit quelques minutes pour questionner l'aubergiste sur la route qu'elle s'apprêtait à emprunter.

[Galathée]

L'aubergiste l'écouta.
" Vous devriez vous trouver un ou deux compagnons de route, idéalement, quitte à attendre au poste de garde pendant une heure, dit la jeune femme. Ce n'est pas franchement dangereux, mais c'est la partie la plus sauvage des routes de la Lorien, et les gens isolés sont forcément plus à risque que les gens en groupe. Les caravanes marchandes passent aisément, par exemple, il n'y a jamais aucune perte ni souci. Mais les cavaliers solitaires, et pire encore les randonneurs, sont parfois victimes de brigands. Ou de créatures sorties du bois. A cette saison comme à toutes les autres... Dès que vous retrouverez la proximité de la rivière, cela redeviendra gérable... mais au milieu de la zone forestière... qui sait."

[Voyageuse]

Astrée préférait, d'ordinaire, voyager seule plutôt qu'avec des inconnus, pour se sentir libre de son allure et ne pas être obligée de mener une conversation. Mais elle ne voulait pas pour autant prendre des risques inutiles. Elle se décida donc à suivre le conseil donné, sans regret finalement : après tout, les gens qui traversaient la Lorien pouvaient se révéler une source d'information intéressante, tant sur les elfes et leurs coutumes que sur la forêt ou les montagnes au-delà. Le seul inconvénient était que Prince ne pourrait pas galoper aussi vite qu'il l'aimait, et qu'ils mettraient peut-être plus de temps qu'espéré. Mais au point où elle en était, un jour de délai ne changerait pas grand-chose.
" Merci pour le conseil, je vais le suivre... et avant de partir, je dois vous féliciter aussi pour la cuisine. C'était vraiment aussi délicieux qu'on me l'avait annoncé !"
Sur un dernier sourire, elle s'apprêta à partir. Prince était discrètement caché dans ses cheveux, et il lui fallait trouver un endroit tranquille pour qu'il se transforme avant de rejoindre le poste de garde.

[Galathée]

Des endroits tranquilles, il y en avait plein Nauru, et à l'endroit où Prince redevint cheval, seuls deux écureuils assistèrent à sa métamorphose et parurent peu troublés par l'exercice. Ensuite, Astrée et sa monture rejoignirent la porte sud de la ville, au petit trot entre les arbres. Il semblait y avoir plus d'animaux que d'humanoïdes dans les rues, mais ils croisèrent quand même quelques humains et quelques elfes. La druidesse franchit la barrière végétale qui servait de rempart, saluée par les gardes elfes, et à peine se trouva-t-elle dans la forêt qu'elle fut interpelée par une voix aiguë, mais qui venait de drôlement haut.
" Holà, grande dame ! Vous ne seriez pas à la recherche d'un compagnon de route, si ?"
La voix appartenait à une halfeline perchée sur un énorme cheval de trait au pelage gris, qui mâchonnait les branches basses d'un chêne d'un air placide.
" Je ne veux pas vous importuner, mais on m'a dit que c'était mieux de voyager à plusieurs. Alors deux, c'est déjà plusieurs. Même si c'est pas encore beaucoup, c'est sûr."

[Voyageuse]

Astrée fit arrêter Prince sans se soucier de sa frustration -il adorait galoper le matin.
" On m'a donné le même conseil, à moi aussi. Mais deux, ça me va très bien en guise de groupe... Et si plus tard on trouve d'autres compagnons, on sera plus."
Elle observa d'un oeil critique l'énorme cheval de trait.
" Le seul tout petit souci va être de convaincre ma monture de ralentir son rythme... ou de faire des pauses entre deux sprints. Mais c'est un détail. Il s'y fera, ne vous en faites pas. Et je m'appelle Astrée...," ajouta-t-elle avec un sourire.

[Galathée]

" Moi c'est Félicie. Enchantée."
En raison de la hauteur de son cheval, c'était elle qui devait se pencher, et non Astrée, pour lui serrer la main.
" Je sais comment garder votre cheval avec moi !" s'exclama-t-elle joyeusement.
Elle se pencha sur ses fontes et en sortit deux petites pommes rouges et brillantes. Pour ne pas faire de jaloux, elle en donna une à son destrier et une à Prince. A la manière dont le petit étalon miel se trémoussa sous la selle, Astrée devina qu'il était éminemment satisfait de cette rencontre.

[Voyageuse]

Astrée leva au ciel un regard amusé.
" Un jour, son appétit le perdra. Il fait toujours passer son estomac avant tout. Mais au fond, c'est peut-être un trait de caractère typique des mâles en général, quelle que soit l'espèce..."
Elle flatta doucement l'encolure de Prince, qui bien sûr ne pouvait pas avoir compris la moquerie.
" Allons-y... On a une longue route devant nous."
Elle comptait chevaucher de front avec l'halfeline tant que c'était possible, et passer devant lorsque le chemin serait trop étroit : elle craignait que Prince ne piaffe d'impatience s'il devait rester derrière un tel compagnon.

[Galathée]

" Chez les halfelins, un bon appétit est signe de bonne santé, pour les garçons comme pour les filles, dit Félicie tandis que les deux compagnes d'un jour s'avançaient sur la route. Tripoter la nourriture, ou rechigner, ne pas finir son bol... C'est signe d'humeur morose. La gourmandise est une qualité nécessaire."
Prince devait presque trotter pour rester à la hauteur du cheval de trait tranquille, qui le dépassait d'une franche coudée.
" Les chevaux sont frais, nous devrions peut-être en profiter tant que le soleil ne tape pas trop fort."

[Voyageuse]

" Oui, il faut avancer au maximum avant les grosses chaleurs. D'habitude, je laisse Prince prendre le galop pendant un moment, il adore ça. Prince, c'est lui, mon cheval. Mais je ne suis pas certaine que le vôtre apprécie les pointes de vitesse... Enfin, vous le connaissez mieux que moi, il est peut-être plus rapide qu'il en a l'air !"
Elle encouragea Prince à passer au trot, espérant que le cheval de trait serait tenté d'en faire autant. A défaut d'un galop franc, ce serait un allure plus confortable pour le petit étalon.

[Galathée]

" Il ne faut pas sous-estimer Mémoire." dit la halfeline en riant.
Quelques minutes plus tard, les deux chevaux avaient pris le galop. Prince était plus rapide, mais la jument de Félicie ne semblait pas s'en soucier et son galop résonnait comme le tonnerre sur les traces du petit étalon. Astrée devrait réfréner sa monture, car voyager ensemble, ce n'était pas fuser cent toises devant... La route l'y aidait : elle était en piètre état et Prince se calma après avoir trébuché deux fois. Lorsque Mémoire le rattrapa, elle était tranquille, galopant à un rythme régulier, tandis que le petit cheval miel était trempé de sueur. Manifestement, l'un avait la vitesse, l'autre l'endurance.
Ils progressèrent environ une bonne heure dans le sous-bois avant de dépasser une caravane de trois chariots qui avait été plus matinale. Le soleil était pesant, l'air humide, peut-être pleuvrait-il avant la nuit.

[Voyageuse]

Il leur faudrait trouver un compromis au niveau de la vitesse, mais la cohabitation s'annonçait plutôt bien aux yeux d'Astrée : la présence de la halfeline ne la ralentirait pas. Et cela ne ferait pas de mal à Prince de devoir, pour une fois, respecter une allure un peu plus régulière.
Elle reprit le trot après avoir dépassé la caravane, mais sans vitesse excessive cette fois-ci pour ne pas distancer Mémoire. L'idée était d'avancer encore un moment, et de s'arrêter pour une bonne pause casse-croûte lorsque le soleil aurait dépassé son zénith et que la chaleur deviendrait trop insupportable. Il serait temps, alors, de faire davantage connaissance avec sa compagne du jour.

La suite dans la forêt....

[Galathée]

Quête : Des goûts, des couleurs, des valeurs, Féérie et aussi un peu de romance

Quittant la route de la Lorien, Astrée et Dimitri parvinrent au poste de garde de Nauru, dont les remparts étaient davantage des haies et des buissons touffus que de véritables murs. Les elfes en armure vert et or étaient toujours en faction, et leur arrivée avait été annoncée par les deux patrouilleurs qui avaient galopé devant eux pendant toute la journée. Ceux-ci les attendaient, pied à terre, à proximité de l'arche végétale qui signalait l'entrée de la cité sylvestre.
" Notre mission s'arrête ici, dit le plus âgé des demi-elfes, un vétéran qui devait approcher la fin de sa carrière sur la route. Mais Corfael et moi-même resterons en ville. Si vous avez besoin de nous, vous n'avez qu'à demander le caserne de la patrouille, on vous l'indiquera."
Sa mine se fit plus sérieuse.
" Je vous déconseille vraiment de poursuivre vers Anarion. Sortez de la forêt au plus vite. Vous trouverez plusieurs pistes qui montent vers le nord. Il y a notamment la route du nord-ouest, qui vous ramène sur la grande voie qui relie Togoria à Solarcis."

[Voyageuse]

" Oui, bien sûr. Nous suivrons votre conseil. De toute façon, nous allons au nord et nous ne repartirons pas vers le sud dans les veilles à venir."
Astrée avait répondu d'une voix neutre. Les patrouilleurs s'étaient montrés discrets, et n'étaient pas des gens particulièrement désagréable. Mais être ainsi accompagnés et surveillés comme deux gosses immatures, depuis cinq jours, lui pesait, même si elle s'efforçait de ne pas le montrer.
" Nous vous remercions pour votre escorte", s'obligea-t-elle à dire.
C'étaient là les phrases qu'ils voulaient entendre. L'indication qu'ils ne feraient rien de stupide -elle aurait presque eu envie de faire le contraire, juste par défi, si ses plans n'étaient pas déjà fixés-, et de vagues remerciements. Mérités, tout de même : ils s'étaient montrés corrects et lui avaient prêté du matériel.

[Galathée]

Une fois ces formalités remplies, ils durent passer devant les gardes de la cité, qui leur demandèrent de s'identifier et de signer le registre des entrées. Comme la fois précédente, ils s'enquirent de leurs intentions, de l'endroit où ils comptaient loger et leur rappelèrent de se signaler s'ils décidaient de rester plus de dix jours. Ensuite, ils les laissèrent passer. Nauru était très différente de la première fois où Astrée l'avait vue : en hiver, toute sa luxuriance était réduite à des conifères et des branchages. Mais les bâtiments n'en paraissaient que plus lovés autour de leurs troncs.
" Tu connais une bonne adresse ?" demanda Dimitri.
La nuit était sur le point de tomber et la température était déjà franchement piquante.

[Voyageuse]

" C'est une ville bizarre, dans mon souvenir. C'était difficile de reconnaître une auberge, ou une boutique. Je dois pouvoir retrouver l'auberge où j'avais dormi, cependant. Une histoire de Prince... je ne sais plus. Ce n'est pas loin d'ici, dans mon souvenir. Je me rappelle qu'il fallait laisser les armes à l'auberge... et j'avais regretté de ne pas avoir le temps de visiter la ville, parce qu'elle semblait très paisible. Je sens que ce n'est pas près d'arriver, malheureusement."
Elle haussa les épaules. Elle avait mis pied à terre, Prince suivant sagement, et elle prit brièvement la main du mercenaire pour l'entraîner avec elle, avant de se souvenir qu'il n'aimait guère ce genre de contact et de le lâcher.