La Couronne de Cuivre

Quête : les chemins de Luménis

L'homme ne se retourna pas, n'imaginant visiblement pas un seul instant qu'il puisse y avoir quelqu'un dans la pièce dont il venait de dépasser la porte.
Il s'arrêta devant l'autre porte, tourna la poignée, entra, et disparut à la vue de la rôdeuse.

Elle entendit le bruit du sac qu'il posait au sol, des bruits d'objets qu'on déplace, des bruits de vêtements qu'on froisse. Le grincement du lit - il venait probablement de s'y asseoir. L'homme ne se souciait pas de discrétion, certain sans doute d'être seul.
Puis il n'y eut plus de bruit du tout, à part sans doute celui de sa respiration, qu'elle ne percevait pas.

Quête: Les chemins de Luménis

Eldrina se sentait de plus en plus perdue. L’homme était venu ici pour dormir ? Que pouvait-il bien avoir en tête, pour dormir chez le prêtre comme si de rien n’était ?

Soudain, elle se remémora une des premières phrases que Lucia avait prononcées. Lorsqu’elle avait frappé à sa porte, Lucia avait paru interloquée et l’avait prise pour Aïdan. Ensuite elle avait ajouté… « C'est vrai qu'il ne rentre que demain, normalement ». Se pourrait-il que… ?

Mais cela lui parut un peu tiré par les cheveux, et elle décida que la meilleure façon de savoir était d’aller vérifier par elle-même. Elle s’approcha de la porte, l’ouvrit lentement et en silence, puis contempla le dormeur. Elle s’éclaircit la gorge, afin de ne pas le réveiller en sursaut, au cas où ce soit vraiment lui.

« Hmm… Je pourrais savoir qui vous êtes ? »

Quête : les chemins de Luménis

L'inconnu s'était déshabillé et dormait paisiblement sous les couvertures. Il sursauta en l'entendant et se dressa d'un bond, attrapant le bâton posé près de son lit, en un geste de réflexe. Il était beaucoup plus grand qu'elle et sa carrure le faisait paraître encore plus menaçant. Mais malheureusement pour lui, il avait éteint sa bougie, et n'y voyait guère malgré le clair de lune filtrant par la fenêtre.

Ahuri, il fixait la jeune femme - ou du moins la vague silhouette féminine qu'il devait deviner, et lança d'un ton grondant, indigné.
- C'est plutôt à moi de vous poser la question ! Qui êtes-vous et que faites-vous chez moi ?

Quête: Les chemins de Luménis

La rôdeuse se mordit les lèvres, gênée. C’était donc bien le prêtre ! Et elle qui s’apprêtait à devoir se battre…

« Vous… vous êtes Aïdan, alors ? » questionna-t-elle d’un ton contrit.
« Je …enfin… c’est Lucia qui m’a accueillie, et vous n’étiez pas là, et je croyais que vous étiez un voleur, et… euh… »
Elle rougit, embarrassée autant par son attitude précédemment que par sa phrase qui laissait à désirer.

Quête : les chemins de Luménis.

- Moi, un voleur ?
Le ton était indigné. L'homme grommela quelque chose d'incompréhensible, bougonnant apparemment au sujet des jeunes filles écervelées... Puis son ton se radoucit...un tout petit peu.
- Bon, admettons... J'imagine qu'elle vous a installée dans la chambre d'à côté, c'est bien ça ? Et vous auriez pas pu attendre demain matin pour venir m'enquiquiner ? Je dormais, moi ! On a pas idée de réveiller les gens comme ça... Me dites pas que mes ronflements vous empêchaient de dormir, quand même !
Le clerc semblait d'un naturel bourru, mais une ébauche de sourire passa sur son visage lors de ces derniers mots. Il soupira, secouant la tête, et ajouta avec une calme résignation dans la voix, sans lui laisser le temps de répondre.
- Est-ce qu'au moins vous avez dîné hier soir? Lucia a dû vous indiquer où se trouvait ma réserve ?

Quête: Les chemins de Luménis

Eldrina se sentit encore plus gênée. Les remontrances du prêtre la perturbèrent beaucoup : après tout, elle n’avait pensé qu’à protéger la maison et s’assurer qu’il ne s’y passait rien de louche… Dans une situation pareille, elle aurait préféré qu’on la réveille en sursaut plutôt que de se faire attaquer ou cambrioler.
« Je suppose que ça ne se fait pas de réveiller les gens aussi soudainement », se dit-elle, songeuse. Voilà quelque chose qu’elle aurait appris.

Mais Aïdan ne semblait pas lui en vouloir outre mesure, et elle se détendit légèrement ; elle lui sourit même.
« Ne vous faites pas de souci, je n’ai pas touché à votre réserve, Lucia m’a invitée à manger chez elle. »
Elle se tortilla un peu. « Euh…et je suis désolée, je ne voulais pas vous déranger. C’est juste, enfin… Bref.»

Quête : Les chemins de Luménis

- Je sais bien que vous ne vouliez pas me déranger, mais vous l'avez fait... répliqua-t-il d'un ton bourru. Mais bon, vos intentions n'étaient pas mauvaises, et il est normal que vous ayez préféré me prévenir de votre présence... Ce n'était pas tout à fait l'explication de la rôdeuse... Mais après tout, oui, cela avait permis de l'avertir qu'elle dormait chez lui. C'est juste que je suis sur les routes depuis plusieurs jours, que j'ai été retardé... et que j'ai vraiment besoin de sommeil !

Il finit par lui sourire.
- Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, nous ferons plus ample connaissance au petit déjeuner. N'hésitez pas à piocher dans ma réserve si d'aventure vous avez un petit creux en pleine nuit... Mais connaissant Lucia, vous n'avez sans doute manqué de rien. Elle est un peu obtuse parfois, mais elle a bon coeur lorsqu'il s'agit de remplir un estomac affamé.
Il la congédia d'un geste.
- A moins que vous n'ayez une demande ou une information urgente dont vous devriez me faire part...je propose que nous poursuivions cette discussion demain.

Quête: Les chemins de Luménis

La jeune femme était heureuse qu’Aïdan ne lui en veuille pas trop, et elle passa outre l’interprétation très libre qu’il avait fait de son intervention.

Elle sourit lorsque le prêtre lui proposa de s’alimenter. « Entre lui et Lucia, qu’est-ce qu’ils ont tous à vouloir me nourrir comme ça ? » se dit-elle, plutôt amusée.
Elle réfléchit un instant, et songea que finalement, que ce soit avec Lucia ou avec Aïdan, elle avait réussi à s’en tirer relativement bien, malgré des débuts difficiles. Elle se sentit rassurée, et adressa un sourire à son hôte.

« Oui, d’accord, je vous laisse. Bonne nuit, et, encore un fois, désolé ! »

Eldrina réprima un bâillement, et quitta la pièce pour rejoindre son lit et terminer sa nuit.

Quête : Les chemins de Luménis

La nuit s'acheva sans autre incident. La journée de marche avait été longue, et son corps avait besoin de sommeil, aussi ne se réveilla-t-elle pas avant l'aube. Et sans doute aurait-elle pu dormir davantage si la voix du clerc ne l'avait pas réveillée. Il chantait, dans la nef au-dessous, un hymne célébrant le retour du soleil. Quelques voix dissonnantes se mêlaient discrètement à la sienne. Apparemment, les fidèles avaient vite appris que leur prêtre était de retour.

Lorsqu'elle descendit dans la petite pièce commune où elle avait rencontré les deux femmes la veille, elle vit qu'un solide petit déjeuner l'attendait sur la table: pain, beurre, oeufs, jambon, confiture, lait, thé... il avait vraiment pensé à tout. Deux couverts attendaient sur la table, et le clerc n'avait visiblement avalé qu'un bol de thé au lait.
Par une porte entrouverte, elle l'apercevait en train de célébrer la cérémonie de l'aube devant une poignée de fidèles, parmi lesquels elle reconnut la mère de Lucia - dont elle réalisa ignorer le nom, personne ne l'ayant appelé devant elle autrement que mamie, maman ou belle-maman.

Quête: Les chemins de Luménis

Son estomac émit un gargouillis extrêmement bruyant, et sans plus attendre Eldrina se mit à table. Il y avait de tout, et en quantité satisfaisantes, et elle eut vite fait de se rassasier ; De temps en temps, elle jetait un coup d’œil discret à la cérémonie, intriguée. Elle n’avait pas assisté à un rite religieux depuis des années, et il faut dire qu’à l’époque elle n’y était guère attentive !

Mais elle n’éprouvait nullement l’envie d’aller voir de plus près, d’abord parce qu’elle ne souhaitait pas déranger, mais aussi parce que les rituels de Lathandre ne l’inspiraient guère. En revanche, la mère de Lucia l’intriguait, car elle s’était aperçue que, de cette femme discrète mais sympathique, elle ne savait presque rien ; en effet, elle s’était focalisée sur Lucia, plus exubérante.

La rôdeuse s’étira longuement, et resta un instant immobile à observer la pièce dans laquelle elle se trouvait. Tant d’années passées dans la forêt lui avaient fait perdre ses repères dans les habitations traditionnelles. Quant à l’édifice religieux, le peu qu’elle en voyait lui était totalement inconnu, et elle en contempla l’architecture avec étonnement.

Quête : Les chemins de Luménis

La cérémonie du matin n'était pas très longue - même si elle le paraissait sans doute bien assez aux non-croyants - et peu après qu'Eldrina ait fini son déjeuner, elle devina, à l'intensité du chant, qu'il s'agissait du dernier. D'ailleurs tous lesfidèles s'éclipsèrent aussitôt, retournant sans doute à leurs champs ou à leurs troupeaux. Seule la mère de Lucia resta, s'approchant de prêtre avec qui elle se mit à discuter longuement.

D'où elle était, Eldrina ne pouvait entendre leur conversation, mais l'expression de la grand-mère était soucieuse, sombre. Le prêtre acquiesçait, fronçait les sourcils, secouait la tête, lui aussi inquiet. Lentement, ils se rapprochaient tous deux de la pièce où elle se tenait. Elle finit par entendre des bribes de conversation.
- ... d'autres malades ?
- Non, .... cache quelque chose....

La grand-mère eut un pauvre sourire en apercevant finalement la rôdeuse. De plus près, son visage exprimait une inquiétude encore plus grande. Elle sembla hésiter à poursuivre ses explications, et finit par s'adresse à Eldrina, l'air... perdue.
- On a un petit souci à la maison... Peut-être rien de grave... Je pense qu'Aïdan saura quoi faire...
Le prêtre n'en avait pas l'air si certain. Sans un mot, il dévorait quelques tartines, n'ayant pas pris le temps de se sustenter suffisamment avant l'office.

Quête: Les chemins de Luménis

La grand-mère avait l’air si anxieuse, et Aïdan si sombre, que la rôdeuse se sentit mal. Que pouvait-il bien se passer ? Le peu qu’elle avait pu saisir de leur conversation l’inquiétait, et leur manque d’entrain encore plus. Quoi que puisse dire la grand-mère, ce n’était pas anodin ; et ils avaient été si accueillants avec elle qu’elle ne pouvait pas rester passive.

Elle s’éclaircit la gorge.« Est-ce que… puis-je vous demander de quoi il s’agit ? Je pourrais peut-être vous être utile… »

S’il s’agissait d’une maladie, elle s’y connaissait quelque peu en plantes et pensait pouvoir éventuellement aider le prêtre dans ce domaine.

Quête : Les chemins de Luménis.

La grand-mère hésita un instant, puis acquiesça de la tête.
- Oui, vous pouvez sans doute nous accompagner. C'est assez compliqué en fait... Asna, l'aînée des filles, est venue me réveiller bien avant l'aube pour nous dire que Sania et Lana étaient malades. Elles sont toutes les deux enflées de la tête aux pieds, elles ont du mal à respirer, je ne sais pas ce qu'elles ont...
- Vous êtes sûre qu'elles n'ont rien mangé d'étrange, un champignon par exemple?
- Elles disent que non... Enfin, elles le disent par signe. On dirait que Sania ne peut plus parler, elle non plus...Et j'ai la sensation qu'elles nous cachent quelque chose, elles étaient sur le point de parler quand leur mère est venue et elles ont changé de sujet...
- Le mieux, c'est que nous allions les voir... Voulez-vous nous accompagner ?
- Peut-être que vous aurez une idée à laquelle on n'a pas pensé...

Quête: Les chemins de Luménis

Elles étaient bien tombées malades. Eldrina réfléchit, tâchant de voir si elle pourrait trouver quelque chose qui conviendrait à ces symptômes ; malheureusement, ses connaissances en guérison n’étaient pas très étendues. Le mieux était encore d’aller les voir ; et peut-être réussiraient-ils à faire parler les enfants, s’ils éloignaient Lucia.

Mais de toute façon, elle ferait tout ce qui était en son pouvoir pour aider les filles.
« Bien sûr, je vous suis », dit-elle. « Je ferai de mon mieux pour vous aider… »

Quête : les chemins de Luménis

Jolan les attendait à la ferme, les traits tirés. Il semblait moins paniqué que sa belle-mère. Néanmoins, il ne perdit pas de temps en salutations.
- Lathandre soit loué, vous voilà, fit-il à l'adresse du prêtre. Venez, elles sont dans leur chambre.
La grand-mère fit signe à Eldrina de les suivre. Ils traversèrent la pièce principale où elle avait dîné la veille, se dirigeant vers l'une des deux portes à droite. Celle-ci donnait sur une grande chambre avec simplement deux grands lit, que devaient sans doute se partager les cinq filles.
Sania et Lana étaient allongées dans l'un d'eux, et leur petite soeur pleurait à chaudes larmes dans les bras de l'aînée, ressentant l'inquiétude des adultes. Lucia était au chevet des deux filles et leur faisait boire à petites gorgées un peu d'eau. Elles s'étranglaient, s'étouffaient à moitié... mais avalaient tout de même quelques petites gouttes. Maria, la cadette, ne semblait pas savoir quoi faire d'utile et se contentait de regarder, désemparée. Elle se précipita vers les nouveaux venus.
- Oh, vous allez les soigner, dites ? Je suis sûre que vous saurez....

La grand-mère leur avait très bien décrit la situation : les deux jeunes filles étaient toutes boursoufflées, comme si leur corps avait enflé de partout. Le sang qui leur montait aux joues témoignait des efforts qu'elles faisaient pour respirer.
- Un empoisonnement... En tout cas leur corps se défend contre quelque chose qu'il considère comme un poison... Il leur faut un contrepoison mais pas facile de savoir lequel si on ne sais pas ce qu'elles ont avalé.... Je peux donner quelque chose pour calmer un peu la réaction mais s'il s'agit d'un empoisonnement ça ne le guérira pas complètement.
Il jeta un regard interrogateur aux deux filles, qui baissèrent les yeux.
- Elles n'ont rien mangé d'anormal, on a tous mangé la même chose ! intervint Asna, l'aînée. Mais son regard n'était pas franc. La grand-mère avait raison, elles cachaient quelque chose.
Le prêtre consulta Eldrina du regard, espérant peut-être qu'elle avait des connaissances en poisons... ou qu'elle saurait faire parler les filles.

Quête: Les chemins de Luménis

La rôdeuse réfléchit intensément. Elle voyait bien deux ou trois plantes qui pourraient éventuellement faire l’affaire dans un cas d’empoisonnement, elle avait affronté suffisamment de créatures venimeuses pour cela. Mais si elle ne savait pas de quoi il s’agissait exactement, elle risquait au mieux de ne rien changer, et au pire d’aggraver les choses.

Elle promena son regard sur les filles. En temps normal, elle n’aurait envisagé qu’avec difficulté de devoir leur parler ; mais l’urgence de la situation faisait qu’elle s’en sentait parfaitement capable. Peut-être le fait qu’elle soit plus jeune que les autres adultes les inciteraient à lui parler, d’autant plus que n’étant pas de la famille elle n’avait pas la possibilité de les punir si elles avouaient. De plus, vu le naturel bourru d’Aïdan, elle n’était pas certaine qu’il puisse faire mieux qu’elle.

Eldrina se décida finalement pour Asna, l’aînée ; elle parviendrait mieux à communiquer avec une jeune fille de douze ou treize ans qu’avec les plus petites, d’autant plus qu’elle réussirait sans doute plus facilement à la raisonner.

Elle se tourna vers le prêtre. « Aïdan, pourriez-vous rester à leur chevet ? Pendant ce temps, je pourrais peut-être… emmener Asna un moment. Enfin, ajouta-t-elle en regardant la jeune fille, si tu le veux bien. »

Quête : les chemins de Luménis

Hélas, sa suggestion n'eut pas l'effet escompté.
Asna pâlit, et se mit à secouer vigoureusement la tête en regardant alternativement sa jeune soeur et la demi-elfe, apparemment paniquée à l'idée de s'éloigner de sa soeur... ou à l'idée de devoir expliquer certaines choses ?
- Et pourquoi vous voulez l'emmener ? De quoi vous voulez lui parler ? Ma fille n'a aucun secret à cacher !
Lucia dardait un regard suspicieux sur la rôdeuse, et sur Asna qui aurait volontiers disparu sous terre.

Fort heureusement pour elle, Aïdan intervint aussitôt. Il avait sans doute compris son objectif.
- Lucia ? J'aimerais vous parler, ainsi qu'à Jolan... En toute discrétion, ajouta-t-il avec un geste d'excuse à l'adresse des autres occupants de la pièce.
- En ce cas, allons dans la pièce voisine, acquiesça Jolan, conciliant et subitement inquiet.
Lucia hésita, regardant ses filles malades, le coeur déchiré à l'idée de s'éloigner. Ce n'est que lorsque sa mère promit de rester à leur chevet et de l'avertir immédiatement du moindre changement qu'elle accepta de suivre le prêtre et son mari.

Lucia resta seule avec les cinq filles et la grand-mère. Asna baissait les yeux d'un air coupable et malheureux. Maria et ses deux soeurs malades échangeaient des regards peu discrets. Et la petite dernière reniflait contre les jupes de sa grand-mère, qui continuait à tenter de faire boire les deux filles.

Quête: Les chemins de Luménis

Tout était plutôt mal parti. Les filles ne semblaient guère coopératives ; heureusement pour Eldrina, le prêtre avait compris ses intentions, et la présence de la grand-mère ne la stressait pas. Elle s’éclaircit la gorge.
« Hummm… bien… Les filles, j’aimerais que vous m’écoutiez attentivement. Sania et Lana ne vont pas très bien, comme vous le savez. Aïdan va faire de son mieux pour les soigner, et je vais l’aider autant que je peux. Mais il faut absolument que lui et moi sachions ce qu’ont vos sœurs, si nous voulons réussir. »

Elle s’arrêta. Le regard des petites la perturbait, et elle se tourna vers l’aînée pour se raffermir.
« Asna, c’est à toi que je vais m’adresser parce que… Parce que tu es la plus grande et…Enfin… J’ai besoin de toute l’aide possible. Je compte sur toi…et sur vous », ajouta-t-elle en regardant les autres filles.

La rôdeuse se sentait crispée ; elle espérait que les filles accepteraient de lui parler, car sinon il leur faudrait trouver une autre solution.

Quête : Les chemins de Luménis

- J'ai rien fait ! répondit aussitôt Asna, sur la défensive. Rien fait de mal !
- On n'a jamais dit que tu avais fait quoi que ce soit de mal..., tenta d'intervenir la grand-mère.
- Vous leur avez dit... ? interrogea l'adolescente, suspicieuse, regardant alternativement ses soeurs.
- Non, je te jure, on a rien dit!
Les doigts des deux autres s'agitaient dans un langage muet.
Asna se tourna vers sa grand-mère, puis vers la rôdeuse, hésitant visiblement sur la conduite à tenir.
- De toute façon, ça n'a rien à voir avec leur état... marmonna-t-elle entre ses dents.
Elle baissa la tête. Sans doute sur le point de faire un aveu... qui n'arrivait pas à s'exprimer.

Quête: Les chemins de Luménis

Eldrina eut un discret soupir. Au moins, on avançait. Le tout était d’amener les filles à se confier ; il ne fallait donc surtout pas les brusquer.

« Ecoutez, les filles, je ne suis pas là pour gronder qui que ce soit, ou pour vous punir, ou… Tout ce que je veux, c’est trouver comment soigner Sania et Lana. Et pour ça, il faut que je sache absolument tout ce qu’il s’est passé. Même si ça vous paraît inintéressant, ou si vous pensez que ça n’a aucun rapport. »

Elle fixa l’aînée dans les yeux, puisqu’elle paraissait être celle qui parlerait la première, si toutefois elle parlait.
« Parce que…eh bien… Si jamais nous essayons un remède, et qu’il y a un élément que nous ne connaissons pas… Nous risquerions de faire une erreur. »

La rôdeuse hésita à ajouter quelque chose, ouvrit la bouche, puis la referma. Mieux valait s’arrêter là avant de dire des bêtises.

Quête : Les chemins de Luménis

- C'est juste... un accident..., commença Maria.
- Vous direz rien à maman, hein ?, intervint Asna, visiblement la plus inquiète du groupe. Elle hésitait, mais semblait prête à accorder sa confiance à Eldrina : en tant que personne extérieure à la famille, elle n'avait aucune raison de trahir un secret...

- Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire à votre mère ?, intervint la grand-mère.
Les filles s'entreregardèrent, indécises. La grand-mère soupira.
- Je ne peux rien vous promettre, moi, c'est votre mère quand même... Ca va dépendre de ce que vous tentez de cacher...
Les quatre filles échangèrent des regards inquiets. Seule la benjamine semblait dans l'ignorance de ce qui se passait. Ou du moins incapable d'en comprendre la portée.

- Ce qui les a rendues malades, c'est une potion magique... qu'on a voulu fabriquer nous-mêmes. On peut vous dire toutes les herbes qu'on a mises, si vous voulez, et y'avait aussi un champignon. Mais on peut pas... y'a rien d'autre à savoir !
Asna avait débité l'explication d'un trait et croisait maintenant les bras, résolue apparemment à ne pas en dire davantage. Elle craignait visiblement que sa grand-mère ne répète tout à sa mère et s'en tenait au strict minimum.

Quête: Les chemins de Luménis

La rôdeuse eut un grand sourire. Normalement, elle devrait pouvoir soigner les filles avec la liste complète des ingrédients de la « potion ». Elle espérait simplement qu’Asna ne cachait rien d’autre, ce qui réduirait tous ses efforts à néant. Cependant, la jeune fille semblait avoir parfaitement saisi ce qui se passait et Eldrina doutait qu’elle puisse encore dissimuler quelque chose…du moins quelque chose d’important pour soigner ses sœurs.

« Eh bien, donnez-moi donc la liste complète des plantes que vous avez utilisées, et ça devrait aller. Et je ne dirai rien à votre mère au sujet de votre potion. »

Elle avait déjà prévu de donne une version différente à Lucia, puisque les filles lui faisaient confiance là-dessus. Néanmoins, elle comptait bien leur rappeler d’éviter de consommer n’importe quoi, vu que leur mère ne pourrait pas le faire.

Elle jeta un regard à la grand-mère, dont elle ignorait d’ailleurs toujours le nom.
« Du moins, je ne dirai rien si votre grand-mère n’y voit pas d’inconvénient. »

HRP: désolée du retard; quelques soucis m'ont un peu trop occupée ces temps-ci.

Quête :Les chemins de Luménis

La grand-mère fixait Asna d'un regard intense. L'adolescente baissa les yeux, mal à l'aise. La grand-mère engloba les cinq filles dans un même regard.
- Je ne vois pas pourquoi vous voulez tant cacher ça à votre mère... Bien sûr, vous aurez un sermon pour avoir voulu fabriquer vous-mêmes une potion, mais tout de même... ça ne justifie pas un mensonge...
Elle soupira.
- Je ne dirai rien à ma fille, mais je ne pense pas que tu t'en tireras aussi facilement, Asna. Elle va vouloir savoir ce que vous avez mangé... et pourquoi.
- Et bien... Je lui dirai presque la vérité, qu'on a mangé des champignons probablement vénéneux....
- Oh, ce n'est pas ça que je veux dire, et tu le sais bien... Elle va se demander, tout comme moi, pourquoi avoir fait tant d'histoire avant de le dire...
L'adolescente la suppliait du regard.
- Mais n'aies crainte, je ne dirai rien.... Donne-nous donc ta liste d'ingrédients !
Asna s'exécuta, décrivant à Eldrina les champignons qu'elles avaient mis, lui citant plusieurs noms d'herbes, Absinthe, Ginseng, chanvre indien, passiflore, et même de la mandragore... Cette dernière, mal dosée ou mal préparée, était bien connue pour sa toxicité... tout comme le champignon décrit.

HRP: Pas de problème, je n'ai pas été très présente non plus ces derniers jours.

Quête: les chemins de Luménis

Eldrina siffla de surprise. Eh bien, avec ce qu’elles étaient allées ramasser, les filles avaient bien de la chance de ne pas être tombées sur des plantes mortelles ! Au moins, elle connaissait le remède à ce genre de plantes ; elle visualisait très bien ce qu’il fallait faire, et les ingrédients nécessaires. Elle ne se souvenait cependant plus de leur nom, mais ce n’était pas l’essentiel.

Elle regarda Asna, et lui sourit.
« Je devrais pouvoir soigner tes sœurs, avec ça. Mais il faut que vous fassiez plus attention avec les plantes que vous ne connaissez pas. On trouve de tout dans la nature, mais on trouve surtout des herbes sauvages et vénéneuses. »

Elle hésita légèrement. « Je ne veux pas…te faire un sermon, ou… ou te gronder, ou n’importe quoi ; mais avant de toucher à une plante que vous ne connaissez pas, il faut être sûres qu’elle est inoffensive. Demandez à Aïdan, ou à votre mère, ou n’importe qui ; mais ne faites pas n’importe quoi. »

La rôdeuse espérait que les filles auraient compris la leçon, mais elle n’ajouta rien de peur d’en faire trop et de se montrer désagréable.

Quête : les chemins de luménis.

- Mais on a demandé à....
L'exclamation avait jailli de la bouche de Maria avant qu'un regard de sa soeur aînée ne l'arrête net.
- A qui ?, demanda la grand-mère.
- Oh, personne... ca n'a pas d'importance de toute façon. Asna foudroya une nouvelle fois sa soeur du regard.
- C'est vrai, vous allez pouvoir les soigner ?, enchaîna celle-ci, désireuse de changer de sujet.
-Je vais aller prévenir votre mère de cette bonne nouvelle, fit la grand-mère avec un soupir en quittant la pièce, signifiant indirectement qu'elle ne chercherait pas à les questionner davantage.

Peut-être ce départ précipité était-il un moyen de laisser quelques minutes les filles seules avec la rôdeuse, dans l'espoir qu'elles en révèlent davantage.
Les doigts des deux soeurs alitées commençèrent à s'agiter à toute vitesse. Leur regard était interrogateur. Asna secoua la tête, l'air subitement sombre et découragé, mais n'en dit pas davantage. Sania semblait prête à pleurer, à moins que cette impression ne soit due qu'à l'enflure généralisée de son visage. Sa respiration se fit encore plus sifflante.

Quête: Les chemins de Luménis

La rôdeuse s’adossa au mur et contempla les filles quelques instants, pensive. Y aurait-il quelqu’un d’autre d’impliqué dans l’histoire, quelqu’un que les filles protègeraient ? Le comportement de ces dernières, Asna en tête, était plus que troublant ; cependant, elle ne voulait pas les harceler de questions, tout comme leur grand-mère.
Mais le fait que les enfants, au lieu de se réjouir de leur guérison proche, semblent encore plus abattues était inquiétant. Eldrina se racla la gorge.
« Hum. Euh… est-ce que… est-ce que ça va ? Vous… vos sœurs seront bien vite guéries, ne vous faites pas de souci. Ou peut-être que..enfin…si vous avez besoin de quelque chose… »
Elle leur sourit gentiment, un peu embarrassée malgré tout.

Quête : les chemins de Luménis

Les filles échangèrent des regards en silence. Maria baissait la tête, et Sania était au bord des larmes.
- Non, elles ne seront pas guéries, souffla Asna. Pas complètement... Sania va rester muette.
- La potion ça les a juste fait gonfler de partout... C'est pas ça qui l'empêche de parler.
- En fait... on avait voulu fabriquer cette potion pour la guérir, qu'elle puisse reparler avant que maman s'aperçoive de quelque chose... Mais en fait la potion a tout aggravé. Et en plus Lana a voulu en boire aussi...
Sania pleurait silencieusement.
- Maman va vite voir que Sania est aussi muette que Lana, quand vous les aurez guéries... Oh là là, comment on va faire pour lui expliquer...?
- Comment TU vas faire, surtout....
Cette fois-ci, l'aînée ne songea même pas à rappelr sa cadette à l'ordre.
Des bruits de voix se firent entendre dans la pièce voisine. Apparemment, leurs parents, leur grand-mère et le prêtre seraient là d'ici quelques instants.

HRP: Un peu de retard, j'étais plus occupée que je ne le pensais ce week-end. Désolée!

Quête: Les chemins de Luménis

Eldrina resta bouche bée. Les filles n’avaient même pas songé à leur signaler ça ! Cela changeait tout; même Aïdan et la grand-mère n'avaient pas prévu cela. Elle se mit à parler vite, avant que les autres n’arrivent.

« Comment ça ? Sania ne parle plus ? Mais…enfin…depuis quand … »
Elle s'arrêta un instant et prit une inspiration, le temps d’organiser ses idées.
« Quand est-ce arrivé ? Qu’est-ce qui s’est passé exactement ? »

Elle ne prit même pas le temps de se montrer diplomate ; elle était trop pressée.

Pas grave...commetu vois j'ai été pas mal débordée aussi, mais ça s'arrange enfin...

Quête : les chemins de Luménis

- Depuis hier après-midi... -Effectivement, en y réfléchissant, l'enfant n'avait pas prononcé un mot de toute la soirée.- On était avec des amis...
- Des amis que maman ne doit pas connaître ! Si jamais elle savait... Elle aime pas ceux du Peuple Libre... Pourtant, Enzo est adorable....
- Oui, il est zentil... intervint la benjamine, essuyant ses larmes.
- On a trouvé un trésor, en fait...
Sania leva une main tremblante et retroussa un peu sa manche. Elle portait un bracelet de métal argenté, finement ouvragé, inscruté de pierres semi-précieuses, gravé de runes elfiques.
- Elle peut plus parler depuis qu'elle porte ce bracelet, je crois... Et elle ne peut plus l'enlever.

Le clerc, et les parents de Lucia choisit ce moment pour entrer dans la pièce, et Sania enfouit précipitamment sa main sous le drap, cachant l'objet. Une violente quinte de toux la secoua.
- Alors, vous avez trouvé comment sauver mes filles, c'est vrai ? je suis sûre qu'elles ont mangé quelque chose d'empoisonné... Sania, ça va ? Tu as l'air pâle... respire, ma puce, je sais que c'est pas facile avec tes poumons enflés, mais respire... Oh, faites vite, donnez-lui vite un antidote, et à Lana aussi... elles respirent si mal...

Quête: Les chemins de Luménis

Ainsi elles avaient des amis du Peuple Libre ! Pas étonnant qu’Asna n’ait pas voulu parler ! Ce bracelet était alarmant et la rôdeuse se demanda s’il ne leur faudrait pas aller en parler directement aux habitants de la forêt.

Pour ne pas attirer des ennuis aux filles, Eldrina sourit à Lucia, malgré l’inquiétude qui l’étreignait, et tenta de la rassurer :
« Ne vous faites pas de souci, nous soignerons vos filles. »
C’était laconique, mais elle ne se sentait pas la force de faire mieux en restant crédible. Elle se tourna vers Aïdan et lui effleura le bras pour attirer son attention.
« Hmm. Euh… Est-ce que je pourrais vous expliquer tout ça seule à seul ? » lui murmura-t-elle.

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[Lieu] Respelm

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