La Couronne de Cuivre

Mais que faire ? Telle était la question.
Le village était trop éloigné pour s'y rendre et c'était sans doute aussi le cas des maisons d'Antonin et de Thyll. Il était donc le seul gamin des environs et, ne les connaissant guère, ne connaissant pas d'avantage les activités habituelles de Gérold, il se sentait bien démuni. D'accord, il y avait l'observation des étoiles mais il était encore trop tôt, sans compter que les nuages qu'il avait repérés dans l'après-midi risquaient de rendre la chose impossible...
Que faire ?
Bah, trainer autour de la chaumière, histoire de voir si Valaellyn était dans le coin. Le cas échéant, se rendre utile auprès de la mère du garçon...

Valaellyn n'était pas là, mais les animaux de la maisonnée décidèrent de suivre Gérold dans ses pérégrinations, ce qui le mena finalement à changer la litière de la chèvre, caresser longuement le chat, et vérifier que toutes les poules avaient regagné le poulailler. Cela lui permit aussi de prendre la mesure des lieux : la maison était petite et le terrain défriché peu étendu, mais sa mère avait un joli potager extrêmement bien entretenu dans lequel poussaient, outre des légumes et des fruits, de nombreuses herbes médicinales et aromatiques, soigneusement étiquetées.
A aucun moment, la jeune femme n'essaya de faire rentrer l'enfant à l'intérieur : elle paraissait trouver tout à fait normal qu'il vaque à ses occupations champêtres tandis qu'elle balayait la petite chaumière, préparait le lit et rentrait le bois pour le feu. La nuit était chaude et claire, le vent tiède, les cigales de sortie. En contrebas, le village s'illuminait peu à peu comme le monde glissait dans la nuit.

Bon et bien, s'il voulait continuer à coller à l'attitude normale de Gérold, l'étape suivante était claire : aller observer les étoiles dont les premières commençaient à piqueter le firmament assombri. D'un pas tranquille, il gagna donc le lieu où il était "arrivé" la veille et s'allongea. Il ne savait pas encore s'il dénombrerait les astres - il avait peut-être trop de pensées en tête pour ce faire. Ce qui était certain, en revanche, c'est qu'il essayerait de rentrer moins tard que le jour précédent, histoire d'avoir moins de difficultés à se lever le lendemain...

Les étoiles parurent une à une, poussières lumineuses sur le ciel noir. Les dessins qu'elles formaient étaient familiers aux bardes, mais il lui sembla que certaines étaient plus brillantes, ou dotées de couleurs différentes de son souvenir. Ce n'était pas surprenant : en un siècle, la voûte s'était légèrement modifiée. C'était la nuit de sa propre enfance, tout bien considéré, mais sous un autre angle, sur un autre continent.
Les insectes continuèrent à bruisser et chanter dans les herbes et sur le tronc des arbres, le chat vint s'installer sur le ventre de l'enfant, un hibou ulula, des chauve-souris masquèrent de temps en temps les astres de leur silhouette furtive. Plus loin, un renard glapit, son cri hanté réveillant le chat qui fila dans les hautes herbes.
Il faisait magnifique, il y avait plus d'un million de millions d'étoiles, sûrement, et chacune racontait une histoire, à l'aide de ses voisines...

Il se demanda ce que lui-même - enfin, son autre lui, plus jeune d'un siècle - était en train de faire, par-delà les mers.
Il songea au livre remis par Tim, aux secrets qu'il contenait, à cette étrange magie primordiale, à cette musique des sphères, omniprésente.
Il ne conta pas les astres mais se sentit rapidement dériver.
Alors, craignant de s'endormir, il se releva, s'étira, jeta un regard autour de lui, sur la campagne enténébrée mais paisible, et prit lentement le chemin du retour.

La nuit se déroula comme la précédente et le petit matin ne fut pas différent. La mère de Gérold l'envoya vers le temple, Antonin l'attendait au gué, ils partirent ensemble dans la campagne nimbée de soleil. La journée promettait d'être torride, le ciel était d'un bleu sec, aveuglant, prélude à un orage, peut-être. Bourdons et passereaux voletaient dans l'air déjà chaud. Ils parvinrent au temple, Aymeric les salua et demeura à l'extérieur, signe qu'ils n'étaient pas les derniers. Il y avait embarras du choix en matière de place, cette fois, et ils n'étaient pas du tout obligés de s'installer près de Vallaelyn qui occupait la même chaise que la veille.

S'il s'était écouté, il serait allé s'assoir face à la petite elfe. Mais s'il avait agi ainsi, Antonin n'aurait pas manqué de s'en étonner, voir de se moquer de lui, et il était plus prudent d'éviter ce genre d'esclandre. Il décida donc de calquer son attitude sur celle du garçon, d'aller où il irait. Ensuite, ce seraient les longues heures de cours, puis la pause de midi au cours de laquelle, si cela se présentait, il discuterait avec Thyll de cette histoire de moisson, puis l'excursion dans la nature... Et enfin, la sortie des classes.
Décidément, il était assez déconcertant de devoir revivre une journée d'école, même si son éducation ne s'était pas exactement passée de cette façon.

Et les choses se déroulèrent comme il l'avait prévu, en tout point. Il se retrouva cette fois à table avec ses amis, ils continuèrent leur leçon de géographie hélonienne, puis parlèrent de dieux, de cycles de la nature, mangèrent et sortirent. Valaellyn ne s'approcha pas de lui et il ne s'approcha pas de Valaellyn. Aymeric les entraîna à l'extérieur pour une petite leçon de sciences naturelles et les instruisit du cycle de l'eau. Il faisait terriblement chaud, de plus en plus, et chacun guettait le ciel avec anxiété, craignant d'y voir paraître des nuages noirs. Pour l'heure, il demeurait d'un bleu azur presque surnaturel. Enfin ils se séparèrent et cette fois, Aymeric le laissa fuir sans le questionner. Thyll lui avait appris, plus tôt, que son aide serait vraiment la bienvenue mais qu'il comprendrait qu'il préfère profiter des journées plus légères sur une grosse exploitation, d'autant qu'il était bien conscient de la précarité de ses parents.

Après un bref instant de réflexion, il lui avait répondu qu'il viendrait travailler pour eux. Il ne savait pas si c'est ce qu'aurait fait Gérold mais, spontanément, c'est ce qui lui paraissait le mieux : si la tâche promettait d'être épuisante, au moins serait-elle plus utile que s'il s'était échiné pour des fermiers plus prospères. Et puis, il y avait la proximité de la forêt, la possibilité que Valaellyn s'approche pour l'observer, sans compter qu'il se demandait si le fameux domaine ne correspondait pas à la maison où Galathée, Victor et lui s'étaient installés... ou, plutôt, où ils s'installeraient un siècle plus tard.
Quand vint l'heure de la sortie, il resta avec ses camarades. Selon toute probabilité, ils allaient se chercher un coin d'ombre ou paresser. Vu la canicule, un peu de fraîcheur ferait le plus grand bien.

Ils retournèrent dans le bosquet de la veille. Thyll était ravi que Gérold l'accompagne pour les moissons, Henri et Max déçus, mais ils comprenaient ce qui avait présidé à son choix, et une fois leurs sentiments exprimés, ils passèrent à autre chose. Ils ne purent cependant paresser bien longtemps car un roulement de tonnerre se fit entendre dans le lointain. L'horizon étant masqué par les arbres, ils envoyèrent Henri en éclaireur qui revint avec une mauvaise nouvelle : des nuages noirs s'amoncelaient vers l'est, en silhouettes fantastiques.

Il réprima à grand peine un profond soupir de désappointement. Certes, l'orage allait apporter une fraîcheur appréciable mais, surtout, il allait les obliger à tous regagner leurs pénates. Et une fois chez Gérold, il n'aurait d'autre choix que de poursuivre cette ennuyeuse journée... par une fin d'après-midi et une soirée d'autant plus ennuyeuses qu'il devrait rester cloitré à l'intérieur. Bref, même s'il lui arrivait d'être d'humeur contemplative, il se sentit pour le moins découragé. Ah, ce n'était pas encore aujourd'hui qu'il pourrait avancer sur la mission qui était la sienne...

Taliesin rentra donc chez lui comme le vent soufflait brusquement en bourrasques dans le bosquet, agitant les feuilles et les branches des arbres. Au dehors, le paysage s'assombrissait petit à petit tandis que les étranges nuages boursouflés glissaient dans le lointain. Des éclairs y claquaient, encore distants, mais la brise avait précédé l'orage et couchait les hautes herbes avec fracas. En remontant vers la chaumière, il trouva sa mère sur le pas de la porte, inquiète de le voir rentrer. Dès qu'il fut là, le chat entre les jambes, elle ferma la porte derrière lui. Elle paraissait nerveuse et scruta l'extérieur, fébrile.

Il savait pourquoi. Un violent orage à la veille des récoltes était de nature à ruiner celles-ci, surtout s'il s'accompagnait de grêle. Mais peut-être ne serait-ce pas le cas. Peut-être, aussi, Aymeric aurait-il les moyens de conjurer la catastrophe : c'était dans les attributions d'un clerc de Chauntéa, après tout. Quoi qu'il en soit, lui-même ne pouvait absolument rien faire, sinon passer le temps en observant la tourmente par l'une des fenêtres. Les éclairs fournissaient souvent un beau spectacle : faute d'une plus passionnante occupation, c'était toujours ça de pris.

La jeune femme lorgnait le ciel avec inquiétude.
" J'espère que la foudre ne va pas tomber comme la dernière fois, murmura-t-elle. Gérold, si la maison devait être touchée... Tu cours au village, d'accord ? N'essaie pas de sauver quoi que ce soit... Nous nous débrouillerons."
Elle croisa les mains et Taliesin vit qu'elle priait.

-Tout va bien se passer, maman, dit-il d'un ton rassurant.
Ce faisant, il retrouvait son rôle de barde : réconforter autrui. Mais surtout, il avait envie que les choses se passent bien : Gérold et sa mère ne roulaient déjà pas sur l'or, alors s'ils étaient confrontés à une telle catastrophe... Mieux valait ne pas y penser.
Puis, réfléchissant à ce que le petit garçon aurait fait en pareille situation, espérant également lutter contre le sentiment d'impuissance qui le menaçait, il se mit lui aussi à prier. D'abord Lathandre. Puis Chauntéa, sans doute la plus susceptible d'entendre l'appel, compte tenu des circonstances...

Il ne ressentit absolument rien. Pas le moindre écho dans les ténèbres de ses yeux fermés. Aucune ferveur particulière, aucun élan, pas une once d'énergie. Si Gérold avait été un vrai dévot, et s'il avait déjà entendu l'appel de la déesse, celle-ci était fermée à Taliesin. Il n'entendit que le battement de son propre coeur, la respiration un peu hachée de sa mère, les craquements du feu derrière eux, le vent dehors, puis le roulement du tonnerre de plus en plus sonore, comme l'orage approchait.
Soudain, il fit noir, le bleu du ciel avalé par les ténèbres de la colère de Talos. Des éclairs illuminèrent brièvement la pièce unique de la chaumière, la pluie crépita sur l'herbe et sur le toit, fine et serrée, et quelque chose hulula dans la cheminée.
La mère attrapa la main de son fils et la serra, tout en lui décochant un brave sourire.

Il le lui rendit, serra plus fort sa main, s'efforça de paraître le plus tranquille et assuré possible.
Il n'avait pas peur pour lui, pas un seul instant. Mais il avait peur pour Gérold et pour sa mère. Ils ne vivaient pas dans la misère, s'en tiraient assez bien grâce aux efforts de la jeune femme ; mais leur existence demeurait précaire, et cet orage la menaçait terriblement. Que feraient-ils, sans chaumière, sans plus aucune possession ?
Non, décidément, il ne voulait pas y penser. Il préférait, de loin, se montrer confiant, songer qu'après la pluie viendrait le beau temps, sans casse pour personne.

L'orage les avait ensevelis, secouant leur petite maison, et le délai entre grondement de tonnerre et éclair aveuglant se faisait de plus en plus court, jusqu'à ce que son et lumière se fondent l'un dans l'autre en une explosion quasi-continue. Il n'était plus possible d'échanger quoi que ce soit dans la chaumière. La pluie n'était pourtant pas très forte, mais le ciel prenait des formes fantasmagoriques, comme s'il voulait s'écraser sur la terre en flots tumultueux.
Il y eut soudain un éclair particulièrement gigantesque, suivi d'un craquement tonitruant, et quand les nuages redevinrent noirs, la lumière ne s'estompa pas. Quelque chose avait pris feu dans le village, en contrebas, un bâtiment qui flamboyait désormais dans les ténèbres. Lequel, Taliesin aurait été bien en peine de le dire...

Il garda ses yeux écarquillés rivés sur l'incendie, se demandant quel édifice avait été frappé, craignant qu'il s'agisse de la boulangerie des parents d'Henri, de l'auberge tenue par ceux de Max ou du temple - l'orage était si impressionnant que l'envisager comme une vengeance de Talos envers Chauntéa ne paraissait pas farfelu... Dans tous les cas, que la foudre ait frappé un lieu familier ou non, que le drame ait affecté ses connaissances ou des inconnus, il croisait les doigts pour que les dégâts soient uniquement matériels, pour qu'aucune victime ne soit à déplorer. Malheureusement, il ne pourrait pas être fixé avant le lendemain...

Mais sa mère ne l'entendait pas de ses oreilles.
" Mets ton manteau, ordonna-t-elle. Nous devons aller aider."
Sans attendre sa réponse, elle alla chercher sa propre cape qu'elle enfila prestement. Au dehors, les roulements du tonnerre semblaient déjà s'atténuer, leur méfait accompli. La pluie était moins forte, elle n'éteindrait pas l'incendie à elle toute seule.
" Va chercher les seaux dans la grange."

Il ne se fit pas prier.
-D'accord, répondit-il simplement.
Et, son manteau enfilé, il ouvrit la porte et se rua à l'extérieur, en quête des fameux seaux. Il n'était pas mécontent de pouvoir passer à l'action, d'avoir une opportunité de se rendre utile, de ne pas être condamné à observer de loin le sinistre. Cependant, son inquiétude s'était faite plus forte, son vieux pessimisme s'agitait en lui, et il redoutait ce que la mère de Gérold et lui allaient découvrir, au village...

La jeune femme le déchargea d'un des seaux et ils sortirent sous le ciel noir. La pluie était devenue plus légère, presque agréable, et Taliesin eut l'impression que le les nuages s'éclaircissaient vers l'est. Il glissa dans l'herbe mouillée, sa mère le rattrapa, et ils dévalèrent la colline vers le village. Un bâtiment brûlait avec violence, mais ce n'était ni le temple, ni la boulangerie, ni l'auberge. Par contre, l'incendie était vigoureux et menaçait de se transmettre à la maison voisine. Il ne faudrait pas grand chose pour que le village entier s'embrase. Taliesin distingua des petites silhouettes autour de l'édifice et dans les rues. Une chaîne s'était organisée depuis le lavoir et sa mère s'y rua.
" Va voir près de la maison, pour rapporter les seaux vides."
C'était ce que faisaient déjà d'autres enfants.

Et c'est ce qu'il fit, lui aussi. Avec empressement, car il était réellement heureux de pouvoir rendre service et, plus encore, désirait faire tout son possible pour éviter une catastrophe plus grande encore - il n'osait pas imaginer les conséquences, si le village flambait tout entier. Toutefois, il agit également avec précaution, pour ne déranger aucun des adultes, pour accomplir sa tâche sans accroc. L'enveloppe charnelle qu'il occupait pour l'heure lui imposait des limitations quelque peu frustrantes, mais il lui fallait se comporter en conséquence, sous peine d'être une gêne plus qu'un soutien.

Très vite, l'organisation lui parut claire et il entra dans le mouvement : les adultes faisaient la chaîne avec les seaux pleins, les enfants avec les seaux vides. Il trouva une place entre Henri et une petite fille qu'il ne connaissait pas et entra dans la danse. C'était facile au début, plus rude ensuite, et il sentit bientôt ses bras malingres et ses épaules protester avec véhémence contre ce traitement. Les minutes passèrent et, pour autant qu'il put en juger, le feu ne se réduisait pas. La bonne nouvelle était qu'il ne s'étendait pas non plus. Au-dessus d'eux, le soleil radieux refit son apparition, comme si de rien n'était. Il était bas sur l'horizon, mais il demeurait encore une belle lumière : c'était seulement la fin d'après-midi. Enfin, après plus d'une heure de travail, la tendance commença à s'inverser et le feu à se réduire. L'eau arrivait à un rythme plus lent, les gens étaient fatigués, mais ils continuaient et continuaient sans relâche, jusqu'au moment où le brasier fut réduit à un gros feu, puis quelques flammes, enfin de menues braises, et puis juste un dégagement de fumée. La maison qui avait été touchée par la foudre était pratiquement en ruines, malheureusement, sa structure quasi entièrement faite de bois carbonisée.

Taliesin était désolé pour les propriétaires de la bâtisse. Repartir de l'avant alors qu'ils avaient perdu sinon la totalité, au moins une bonne partie de leurs biens, et jusqu'au toit sous lequel ils s'abritaient, cela promettait d'être une épreuve terrible... Restait à espérer que le communauté villageoise continuerait de faire preuve de solidarité envers les malheureux, qu'elle leur fournirait aide et soutien. Cependant, tout cela était hors de sa portée, et même ses idées étaient confuses : moulu, en nage, il aspirait à se poser et à ne plus bouger avant longtemps, très longtemps.

Henri le mena jusqu'à la boulangerie voisine et ils s'assirent côte à côte devant l'étal. Max et Antonin les rejoignirent bientôt dans la poussière, jusqu'à ce qu'une femme replète — apparemment la mère du premier — vienne leur distribuer des petits pains fourrés de raisins. Ils sentaient tous les trois la fumée et demeurèrent un moment silencieux, mâchonnant.
" Ça aurait pu être pire.
— Sûr.
— C'est quand même moche.
— Je ne sens plus mes mains, en tout cas."

-Moi non plus. Et oui, c'est très moche...
Il ne demanda pas à qui appartenait la maison sinistrée. Gérold le savait forcément, poser la question aurait donc paru complètement incongru.
Il se contenta donc de manger le petit pain au raisins, reconnaissant à la mère d'Henri, se demandant également où se trouvait la sienne... Il lui faudrait un moment pour s'arracher à la torpeur qui le gagnait et pour oser bouger malgré ses muscles douloureux.

Personne ne dérangea les enfants pendant un moment. Les adultes circulaient autour d'eux, devisant en petits groupes, organisant manifestement quelque chose, mais qui ne les concernait pas directement. Taliesin finit par apercevoir la silhouette du clerc, Aymeric, qui parlait avec un homme de grande taille aux épaules larges.
" Argh." dit Max juste à côté de lui.
Une seconde plus tard, l'homme désignait leur petit groupe, assis contre la façade de la boulangerie. Aymeric les aperçut, sourit et vint dans leur direction. Taliesin devina cependant que sous ses dehors détendus, le prêtre était extrêmement nerveux. Il s'accroupit devant eux.
" Bonjour les garçons. On me dit que vous avez travaillé comme des chefs, pendant l'alerte. Je me demandais s'il vous restait un peu d'énergie pour moi."

Au moins pensait-il savoir comment Gérold aurait réagi en pareille circonstance, malgré sa carcasse soumise à la torture et n'aspirant qu'au repos.
Il jeta un regard désolé à ses amis puis refit face au clerc, souriant.
-Bien sûr, dit-il.
Au pire, si les autres lui en voulaient par trop, il leur expliquerait avoir vu là une occasion pour eux de rester réunis plus longtemps que de coutume !

Mais Taliesin s'était inquiété pour rien : les autres gamins se portèrent volontaires, avec un enthousiasme qui paraissait sincère. Aymeric en parut soulagé.
" Je savais que je pouvais compter sur vous."
Il soupira, leur sourit à nouveau.
" Quand la foudre est tombée, je suis sorti pour aider et j'ai laissé Valaellyn toute seule. Je crains que le tumulte ne l'ait effrayée : elle s'est enfuie du Temple. Est-ce que vous seriez prêts à la chercher avec moi ? Je n'ai pas d'idée précise de l'endroit où elle aurait pu aller."
Max et Antonin grimacèrent, mais ne protestèrent pas.
" Oh." lâcha simplement Henri.
Le prêtre semblait parfaitement conscient de l'effort qu'il leur demandait.

La Couronne de Cuivre

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