La Couronne de Cuivre

" Peut-être que j'aurais dû essayer sur toi, mais tu as un trop gros... c - fessier.
— C'est joli, ce chapeau." dit Blanche, qui passait dans l'embrasure de la porte.
Le halfelin lui fit une grimace après qu'elle soit partie.
" Bon. Je vais reposer mon chef d'oeuvre ici. Je suis extrêmement susceptible, tu n'as pas idée. Je tiens à ma dignité."
Il sourit au barde.
" Mais vraiment, je te souhaite le meilleur, Taliesin. Vous êtes entre de bonnes mains, et je suis impatient de faire connaissance avec Galathin et Taliesée. Ne me demande pas comment j'ai deviné. Une illumination."
Ils entendirent les voix de gens qui revenaient dans leur direction.

-Mince, j'ai oublié de lui demander si je pouvais révéler les prénoms...
Il hésita, songea à tout le mal que s'était donné son ami ce jour-là...
-Ce sera Tristan et Héloïse. Mais motus et bouche cousue.
Il jeta un regard inquiet vers la porte, revint au halfelin.
-Merci pour tout, Guéric. On vous fera prévenir dès qu'ils seront arrivés. Puis nous organiserons de mémorables réjouissances... Puis nous prendrons tous ensemble le chemin du retour.

" On fera exactement ça, mon ami, dit le halfelin en lui serrant la main. Fais leur un bisou de ma part en attendant. Et je ne dirai rien de rien... Jolis choix."
Judicaël arriva dans la pièce, suivi par le restant de la petite troupe, enfants y compris.
" Fini les messes-basses. On y va."
Guéric acquiesça, adressa un clin d'oeil à Taliesin, et rejoignit le Mystran.
" Puisse la magie demeurer dans vos coeurs, dit ce dernier cérémonieusement, avant de quitter la pièce.
— C'était un peu pompeux, ça." remarqua Guéric, en le suivant aussitôt.
Galathée s'assit près du barde avec un soupir, tandis qu'une équipe cuisine s'organisait.

Taliesin soupira. Décidément, il avait beaucoup de mal avec les séparations, même provisoires. Le contrecoup des événements des derniers jours et des derniers mois, assurément. Mais ça finirait par passer.
-Tu vois, la marmaille a complètement oublié la visite à la cabane, souffla-t-il à l'oreille de la jeune femme. Retenons bien cette méthode, elle nous sera utile maintes fois : quand les mômes demandent quelque chose, il suffit de les faire patienter un moment, et bientôt, ils n'y songent plus.
Voilà au moins un paragraphe qu'il pourrait écrire dans le livre - aux pages entièrement blanches - sur l'éducation que lui avait procuré le pipeau.
Sauf qu'il était perdu, ledit livre.
Bah, ce n'était pas grave. Il n'en revenait déjà pas d'avoir retrouvé le renard...

Hippolyte et Gurvan resurgirent avec les assiettes qu'ils commencèrent à disposer sur la table, Prudence suivit avec les couverts, tandis que Blanche dirigeait l'équipe. Perceval, Helen et Baptiste semblaient avoir été avalés par les cuisines. Blanche resservit un verre de vin à Taliesin tandis que Galathée quémandait un sirop de "quelque chose, n'importe quoi".
Helen reparut un peu plus tard et proposa à Galathée d'aller l'examiner avant le repas, la jeune femme obtempéra en échange de la promesse de pouvoir revenir manger avec le groupe, qu'elle parvint à arracher à la prêtresse après une âpre négociation. De bonnes odeurs commencèrent à s'échapper de la cuisine, remontant le couloir pour venir leur titiller les narines. Taliesin était désormais le seul oisif mais quand il voulut se lever, on le lui interdit, sous prétexte qu'il avait suffisamment travaillé pendant la journée, alors que tous les autres se détendaient dans l'herbe.
La soupe fut servie avant le retour de Galathée, mais elle ne tarda pas à revenir. Helen avait l'air à la fois soulagée et inquiète et elle glissa quelques mots à l'oreille de Blanche. Les deux femmes décochèrent ensuite, à leur insu sans doute, un sourire qu'elles voulaient apaisant en direction du barde. Il ne fallait pas être devin pour savoir ce que cela voulait dire.

Plutôt que de l'apaiser, ces sourires le rendirent nerveux. Certes, il savait que tout finirait bien : c'était forcé. Néanmoins, accoucher de jumeaux ne serait pas une mince affaire pour la rôdeuse. Et ensuite, leurs existences ne seraient plus jamais les mêmes...
-Est-ce aussi imminent que ça en a l'air où aurons-nous droit à une ultime nuit paisible avant... longtemps ? demanda-t-il à Galathée, d'un ton détaché.
Il grimaça.
-Enfin, paisible... Désolé, je sais que tu dors mal...

" Difficile à dire, dit la rôdeuse avec un sourire un peu nerveux. Mais si tu veux être certain de pouvoir te reposer, tu fais peut-être mieux d'aller te coucher dès la fin du repas. Tu devrais pouvoir profiter de quelques heures. Tu peux aussi décider d'aller dormir ailleurs cette nuit... et d'avoir une surprise demain matin. Ou pas. Selon tes envies..."
Elle lui pressa la main et prit une profonde inspiration. Son regard se fit vague une seconde et elle s'appuya contre lui, tandis que Perceval lui versait un bol de soupe. Les enfants planifiaient leurs aventures du lendemain, aveugles à l'événement qui était sur le point de se produire. Les adultes étaient un peu plus tendus, même s'ils devisaient tranquillement, donnant l'image de la plus parfaite sérénité.

A nouveau, le barde lui avait pris la main.
-Je ne vais pas aller dormir ailleurs... Moi, j'ai la part belle, dans tout ça, alors si en plus je te laisse tomber... Non, je reste avec toi, ne serait-ce que pour te distraire.
Il la dévisagea un instant.
-Est-ce que tu as réfléchi à... ma présence pendant l'accouchement ? Est-ce que tu en as discuté avec Helen ?

Elle acquiesça, entrecroisant ses doigts avec les siens sous la table.
" Oui. Elle a dit que tu pouvais rester. Mais que si tu devenais trop nerveux, elle te mettrait dehors. Il faudra que tu acceptes qu'elle est le chef et que nous nous plions tous à ses directives, même si elles nous semblent ridicules. Blanche et Zora l'assisteront, tu ne devras rien faire. Sauf si tu en as besoin, auquel cas elle t'impliquera. Elle dit que cela s'improvisera dans l'instant, que ce n'est pas grave si tu ne décides pas maintenant. Elle dit aussi que tu dois te sentir libre de rester dehors si tel est... ton instinct. Qu'un accouchement mal vécu est une mauvaise chose, pour la mère comme le père."

Il hocha la tête.
-Nerveux, je le serai forcément. Je n'ai jamais assisté au moindre accouchement, et puisque là, il s'agira de toi, de nos enfants... Je ne sais pas comment je réagirai. J'ai envie d'être là, c'est certain. J'aimerais pouvoir te soutenir... Mais après, je pense que je partirai de moi-même si je sens que je suis plus un sujet d'inquiétude ou une gêne qu'autre chose. Bref, nous verrons bien.
Il grimaça.
-J'aurais dû demander à Guéric de rester. Parce que si je dois attendre à l'extérieur, sans savoir comment ça se passe... Hum, ce sera rude, un ami que je connais bien n'aurais pas été de trop...
Sa grimace se fit plus marquée.
-Bon sang, quel égoïste je fais. C'est toi qui vas faire tout le travail, tu seras entourée de prêtresses bienveillantes mais que tu as rencontrées depuis peu, et je trouve quand même moyen de ma plaindre. Pardonne-moi.

Galathée lui sourit doucement.
" Bah... Ce n'est pas exactement comme si j'avais un ami proche en tête auquel j'aurais pu demander d'être là... Mon seul vrai ami, c'est toi."
Elle pinça les lèvres.
" Je veux que tu saches que, de ma part, il n'y a pas de pression. Fais comme tu le sens. De toute façon, Helen m'a dit que je me souviendrais de tout l'épisode de manière très floue... Tu pourras me prétendre que tu es resté jusqu'au bout même si tu as filé..."

-Tu penses vraiment que j'oserais te mentir ? Ce n'est pourtant pas mon genre. Si je dois finalement battre en retraite, je serai honnête et ne t'en cacherai rien. Je n'ai pas honte de mes faiblesses. J'essaie, du moins.
Il soupira.
-Enfin, inutile de nous mettre martel en tête avant l'heure. L'instinct nous guidera, le moment venu. Nos hôtes aussi, si nous... si j'erre trop. Et bientôt, nous tiendrons les jumeaux dans nos bras.

Elle acquiesça. Blanche et Perceval apportèrent la suite du repas, poulets aux fèves et aux oignons jeunes, galettes de blé et sauce à la crème. Les enfants poussèrent des cris de joie après les soupers poisson des derniers jours et ils eurent la permission de manger "comme des pirates", le pilon de poulet fermement serré dans la paume. Très vite, ils furent gras du front aux coudes, et Blanche leur promit des ablutions avant l'extinction des feux. Le mot "lessive terrible" fut prononcé à mi-voix quelque part. Ils mangèrent dans la bonne humeur, moins fatigués que la veille. Les garçons demandèrent la permission de montrer leur cabane à Taliesin, mais l'aventure fut repoussée au lendemain, malgré les risques. Perceval accepta ensuite d'embarquer toute l'équipe vers la salle d'eau, pour autant que le barde vienne leur raconter une histoire ensuite, pour les guider dans la nuit.

A nouveau, le repas s'était écoulé sans qu'il prenne guère la parole. A présent que la nervosité s'était installée en lui, elle ne le quitterait plus jusqu'à ce que les bébés les aient rejoints. Jusqu'à ce qu'il soit assuré que leur mère comme eux allaient bien. Car, évidemment, il ne pouvait plus s'ôter de la tête ce qu'avait dit Galathée à propos des sortilèges qu'on lui avait lancés...
Il promit néanmoins aux enfants de leur raconter une histoire. Certes, il n'avait pas trop l'esprit à cela, se demandait si l'inspiration viendrait. Bah, il se débrouillerait. En attendant, il resterait aux côtés de la rôdeuse... et la rejoindrait sitôt son récit terminé.

Le repas se termina, Perceval entraîna les enfants gluants vers la salle d'eau, avec Zora en renfort, tandis qu'Helen demandait à Taliesin de ramener la rôdeuse jusqu'à sa chambre. Galathée s'appuya sur son bras pour se relever, un peu grimaçante, et il vit plusieurs fois son visage se tendre, presque imperceptiblement, au niveau des tempes et des mâchoires. Ils gagnèrent lentement la chambre, la jeune femme enjoignant le barde de lui raconter des choses triviales pour lui changer les idées. Quand le barde gagna la pièce, il vit qu'une table chargée de linges et d'un bassin avait fait son apparition là où s'était trouvé le lit de Baptiste la veille. Il vit les langes et les vêtements empilés, un seau d'eau, une petite rangée de fioles alignées sur l'appui de fenêtre. Le lit avait été changé, doublé de draps épais. Galathée s'y installa avec un soupir et il lui sembla qu'elle ne se relèverait plus de sitôt.
Helen surgit et tendit un bol d'infusion à Taliesin.
" Il faut qu'elle le boive. Cela va apaiser les premières douleurs."
Puis elle les laissa seuls, avec un sourire tranquille.

Prenant soin de ne plus regarder tout ce que les prêtresses avaient apporté en vue de l'accouchement - il fallait qu'il reste calme afin de pouvoir tranquilliser sa compagne -, il s'assit également sur le lit et lui tendit l'infusion.
-Bon... Si nous en profitions pour discuter des parrains et des marraines ? Tu as des idées ? Oh, mais il faut que je t'explique quelles sont les traditions luméniennes en ce domaine...
Et de lui répéter ce que Guéric lui avait appris.

" Mon dieu, ça nous donne une certaine marge..."
Elle eut un petit sourire.
" Mais comme je te l'ai dit... Je ne connais pas grand monde... Hélonna, c'est mon île d'adoption... Alors il y a bien Guilhem et Matthieu, et puis Valaellyn, je suppose... Mais au-delà de ça... Je connais à peine les gens d'ici. Ton ami Guéric me semble incontournable. Les autres... sont juste de passage dans nos vies. Et je me vois mal aller demander à Morvan de DouceChute."

-C'est dommage, oui, parce qu'il l'aurait mérité. Malheureusement, compte tenu de la situation, de sa nationalité...
Il soupira.
-Après, je ne connais pas beaucoup plus de monde que toi : tu es la seule personne qu'il me reste de mon ancienne vie. Mais si nous retenons Guilhem, Mathieu, Val et Guéric... Reste deux noms à trouver, parmi les gens que les jumeaux pourront voir régulièrement... Kerun, je ne sais pas comment il le prendrait si nous le lui propositions : sans doute accepterait-il, mais il ne veut pas avoir trop d'attaches, ce qui est compréhensible vu sa profession... A réfléchir. Ensuite... Hum... Perceval ? Il y a aussi Lena, que tu ne connais pas encore... Toutefois, je ne l'ai pas revue depuis qu'elle a été libérée...

" Kerun, c'est une mauvaise idée, dit la jeune femme. Vu ce qui t'attend sur Hélonna... et vu qu'il t'est favorable... Le lier à notre famille serait jeter le discrédit sur son opinion. Non, il faut qu'il reste à distance, pour pouvoir continuer à t'aider. Je suis désolée si cela parait un peu pragmatique, mais... mais je pense que c'est nécessaire. Et je sais que t'aider lui tient à coeur."
Elle pinça les lèvres.
" Et parmi les gens que tu as rencontrés sur cette île aux pirates ? Je ne sais pas s'il y avait des personnes sympathiques... Il nous est aussi possible d'attendre, je suppose... De toute façon, nous n'annoncerons pas la bonne nouvelle aux Merlus avant de les rejoindre, alors... ça nous laisse un certain temps avant d'avoir à décider."

-Kerun fera bien parvenir un message à la ferme sitôt après la naissance... Ah, mais tu parlais peut-être du parrainage... Oui, c'est sûr que nous avons du temps.
Il réfléchit.
-Sur Mersant, je me suis lié à un jeune homme d'origine mélandienne. Les Luméniens voulaient l'envoyer dans un lieu où ils gardent déjà quelques-uns de ses compatriotes, plus suspects que jamais en temps de guerre. Néanmoins, j'ai réussi à biaiser, à ce qu'il aille s'installer à la ferme... Ferme dont il a disparu dès qu'il a su que nous allions bien. Dommage, j'aurais aimé le revoir. D'un autre côté, vu sa profession, vu son origine, le choisir comme parrain aurait fait jaser... Quoi que je me fiche complètement du qu'en-dira-t-'on. Hum, d'accord, j'aurais le droit de m'en ficher après le procès.

Elle lui sourit doucement.
" Tout ira bien." murmura-t-elle.
Elle leva les doigts pour les poser sur sa joue.
" Ne nous pressons pas. C'est une décision importante. Nous verrons bien... ce qu'ils nous inspirent."
Son ventre se contracta à nouveau, lui coupant le souffle. Elle attrapa le bol d'infusion qu'elle avait déposé un instant et y but une petite gorgée.
" Et Guéric... Est-il un parrain de coeur, de corps ou d'esprit ?"

-Alors là... Peut-être faudrait-il demander à l'un de nos hôtes quel sens exact ont ces trois fonctions : je saisis globalement le principe, mais quelques précisions ne seraient pas de refus. Après, peut-être Guéric se sentira-t-il plus à l'aise dans l'un ou l'autre domaine... Quoi qu'il en soit, il a très envie d'être parrain... et je pense qu'il le mérite. Je... Nous lui devons beaucoup. En plus, avec Kerun dans une bien moindre mesure, c'est le seul de nos actuels compagnons à connaître Victor. Hum, d'ailleurs, il faudra que je lui fasse jurer de ne pas te raconter certains épisodes mersantais avant que je n'aie pu moi-même te les révéler...
Il réfléchit à nouveau.
-Il y aurait aussi Constance Lamalice, capitaine de la Liberté, grâce à qui nous avons pu arriver jusqu'ici... Argh, non, encore un marin, les jumeaux partiraient à son bord trop rapidement... On exclura aussi le paladin que nous avons sauvé à Melandis... Déjà, Baptiste n'a pas trop envie de revoir de paladin. Et je crains qu'on puisse encore moins sortir de la Commanderie que d'un temple...

" Ne te mets pas martel en tête, dit la rôdeuse en riant doucement. Quant à Baptiste, il devra faire la paix avec son histoire, tôt ou tard. Comme nous tous. Même si les paladins ne sont pas légion, il en croisera fatalement à Luménis, et ce serait dommage qu'il développe une sorte de terreur envers sa cité natale. De surcroît, certains paladins ont survécu à la dictature... Pas beaucoup, sans doute, mais... Je pense que retourner à la commanderie fera immanquablement partie de son parcours... comme Victor a réinvesti sa maison natale. Peut-être cela sera-t-il pour s'en détourner à jamais ensuite, mais... je crois que c'est nécessaire."
Elle sourit.
" Ah, tu m'as forcée à parler de choses sérieuses ! Mais ça m'a changé les idées. Ne t'inquiète pas des parrains. Garde une place pour l'avocat qui va te défendre, par exemple."

-Le procès n'est pas pour tout de suite, et il aura sans doute fallu choisir avant. Mais nous aurons des tas et des tas d'autres enfants. Et puis...
Il fronça les sourcils.
-Bon, les parents adoptifs, ça existe. Mais qu'en est-il des parrains adoptifs ? Ceux de Victor et de Baptistes sont sans doute tous morts...Ça ferait des places en plus, s'ils sont d'accord pour qu'on leur en trouve à nouveau !

" Comme tu y vas ! s'exclama Galathée. Ces gamins sont orphelins et tu vas aller les interroger sur l'identité de leurs parrains pour pouvoir les remplacer ? Diable, j'espère que c'est le stress qui parle, c'est d'une... froideur !"
Elle écarquilla les yeux.
" Ils ont peut-être encore des parrains et des marraines. Ou peut-être plus. Mais même si c'est le cas, on ne remplace pas les gens comme ça. Tu ne peux pas sincèrement vouloir oblitérer toute trace de leur passé..."

Il grimaça.
-C'était une boutade, Gal. Profondément idiote, je l'admets, mais une boutade tout de même. Tu sais...
Il soupira.
-Je ne veux sûrement pas oblitérer leur passé. Ni remplacer qui que ce soit. A tel point que... Tu vois, je ne parle jamais de Victor comme étant mon fils. Je dis "mon garçon". Et je ne me présente jamais comme étant son père. Non parce que ça n'est pas le cas légalement mais parce que... Je respecte les disparus, et parce que je me sens assez illégitime, sinon indigne de prendre une telle place. Alors voilà, il n'y a vraiment aucun risque pour que je tente d'effacer les traces de ce qui fut jadis.

" Pardon, je suis fatiguée, je prends les choses au premier degré..."
Elle sourit doucement.
" Tu es tout à fait digne d'être son père, Taliesin. Et pour moi, tu l'es. Et pour lui, je suis certaine que les choses sont compliquées, parce que c'est lui qui vit avec cette lutte de loyauté dans son coeur... Baptiste est plus enclin à s'attacher, peut-être, parce qu'il n'a jamais eu de père. Et parce qu'il est ambivalent envers sa mère, d'après ce que j'ai compris. Mais Victor... Victor a perdu ses parents, simplement. Je pense que tu peux l'appeler ton fils. Je pense que cela lui ferait plaisir. Et si tu crains quelque chose, pose-lui la question. Il est suffisamment grand pour comprendre et décider, aujourd'hui."

Il hocha la tête.
-Bah, au fond, je ne me pose pas de grandes questions. J'essaie de faire les choses naturellement... Mais tu as raison, parfois, en discuter, même si ça n'est que pour des histoires de mots... Enfin, les mots ont un sens, évidemment. Surtout ceux-là.
Soupir.
-Mais chaque chose en son temps. Déjà, nous retrouver tous les cinq. Tous les six, pardon. Ensuite, l'essentiel est que nous soyons bien ensemble. Le reste, on verra en temps opportun.

" Voilà la bonne attitude." dit-elle en l'embrassant.
On frappa alors doucement à la porte.
" Taliesin, si tu as encore le courage, on réclame une histoire dans la chambre des enfants, annonça Perceval à travers le bois.
— Ultime épreuve avant le dénouement..." dit Galathée avec un clin d'oeil.

-J'arrive ! lança l'elfe.
Il fit la moue, reprit à voix basse :
-D'habitude, j'adore raconter des histoires. Mais là, je crains de narrer comme un pied, avec ce que j'ai en tête. Et puis, ça m'embête de te laisser comme ça toute seule... Tu veux que je demande à Helen de venir ?

La Couronne de Cuivre

[Quête] Le Domaine des Crocus