La Couronne de Cuivre

Comme il s'en était douté, les cibles isolées se firent rares et sans intérêt pour ses plans : de simples esclaves sans réelle valeur ou des mercenaires à l'allégeance incertaine. Il parvint néanmoins, au cours des deux jours suivants, à exécuter trois elfes de plus - deux femelles et un mâle - respectivement à même le parvis du temple de LLoth, dans une chambre et dans une étude. Désormais, la mort frappait au cœur même de l'intimité des drows.

Et la rumeur commença à se répandre en ville. Encore sous la forme de murmures incertains et soufflés dans la crainte : la maison dirigeante avait trouvé une rivale lui portant préjudice. D'aucuns commençaient même à avancer qu'elle avait déplu à la déesse et que des sacrifices avaient été ordonnés. C'était un mauvais présage pour les pauvres de la ville.

Et Alchem, sous ses traits d’esclave, savourait en silence et la tête basse, tout en vidant une bière infecte. Il tenait enfin sa vengeance ! La petite voix le lui susurrait. Il n’allait plus contre ses conseils. Sa haine le guidait, froide et méthodique, aussi calculatrice que celle de ses ennemis jurés. Persuadé que rechercher l’antidote lui prendrait plus de temps, persuadé qu’il agissait selon les préceptes de Baravar, il ne doutait pas être sur la bonne voie, encore que ce ne soit pas l’avis de Dalius. Non, comment pouvait-il s’égarer ? Sa recherche incessante de cible lui offrait l’occasion de visiter bien des lieux. Si la chance lui souriait, il pourrait tomber sur ce qu’il avait cessé de chercher activement, l’antidote à la maladie. Il allait offrir à Ornegemme une paix durable en faisant se consumer de l’intérieur cette ignoble cité ! Une chose était certaine, il allait continuer. Frapper, encore et toujours, là où on ne l’attendait pas. Et toujours, il brouillait les pistes. Si jamais il poignardait quelqu’un dans une pièce, il prenait soin d’ouvrir la fenêtre ou de crocheter la porte pour laisser croire qu’il était passé par là. Bientôt on allait chercher à le piéger. Il faudrait se méfier des cibles trop faciles. Il faudrait piéger en retour, user d’illusions, tuer ceux à sa recherche. Il devait tenir jusqu’à ce que la maison dirigeante entame des représailles aveugles envers ses rivaux. Et il allait tenir !

Les meurtres se poursuivirent encore quelques temps à un rythme effréné. La rumeur prit de l'ampleur, se fit de plus souvent entendre, se mua en marée implacable. Les murmures se transformèrent en invectives de prophètes autoproclamés. Les traits de ses victimes choisies trahissaient maintenant une inquiétude jusque-là étrangère à cette race hermétique à la menace.

Cela devenait en tous cas presque facile de déterminer qui était lié à la maison dirigeante. Et la matrone de cette dernière n'était certainement pas assez stupide pour avoir compris que sa maison était ciblée, qu'on avait juré sa perte. Il fut bientôt plus difficile de trouver des drows s'aventurant seuls. D'aucuns se déplaçaient même sous bonne escorte au sein même de leurs murs.

Mais toujours Alchem trouvait une faille dans le dispositif. Et ce soir n'était pas bien différent. Il suivait une jeune elfe dans les couloirs du temple. Son visage d'ébène lui était presque familier, comme si un lien l'unissait à une certaine prêtresse dont il avait juré la perte des années plus tôt. C'était sans doute un effet de son imagination, de son désir insatiable de vengeance. Mais la jeune femme était bien là, entourée d'un seul garde qu'il serait très aisé de neutraliser. Et le couple s'engageait dans une chapelle privée, le lieu idéal pour commettre un nouveau forfait et envoyer un message à la déesse araignée et à ses suppôts.

Alchem avait pris ses marques. Il ne laissait rien au hasard. Toujours dans le plan éthéré, il fit le tour de la chapelle, vérifia s’il n’y avait pas d’autres gardes, d’autres prêtresses dans les parages. Il vérifia les voies d’accès, détermina à l’avance celles qu’il devait emprunter si cela se passait mal, celles qu’il allait laisser ouvertes si cela se passait bien. Puis il observa ces cibles. D’abord l’homme, après la femme. Il allait les tuer dans cet ordre. Et puisqu’il allait commencer par le garde, il se trouva à proximité la cachette idéale, tout simplement l’arrière d’une colonne. Ce fut là qu’il réintégra le plan matériel, arborant désormais les traits de ce gnome des roches terrifiant de placidité et de détermination. Silencieux, mortel, il sortit de derrière la colonne, bondit sur le garde, frappa de sa dague au défaut de l’armure. Si tout allait bien, d’ici cinq secondes, au grand maximum, il y aurait dans cette chapelle deux cadavres. Deux victimes de plus à son actif. Il savait approcher du but mais ne s’emballait pas pour autant. La tête froide, toujours. Peut-être s’autoriserait-il un sourire lorsqu’il verrait la matrone chuter, oui, un large sourire, mais pas avant.

Fut-ce une négligence commise par excès de confiance ou un piège délibérément tendu à son encontre ? Alchem fut bien en peine de le déterminer d'autant que les événements qui suivirent aussitôt se déroulèrent dans une grande confusion et une vitesse qui le prit en grande partie de court.

La lame s'enfonça comme prévu dans l'anfractuosité de l'armure du garde mais elle y resta bloquée. Quant à sa victime, elle resta fermement debout et se tourna même vers lui pour le saisir dans une étreinte puissante. Alchem vit du coin de l'œil, la jeune drow disparaître dans un éclat de lumière tandis que le "garde" lui adressait une forme de sourire de mauvais augure. Alors que le svirfneblin était presque parvenu à échapper à sa poigne, le garde activa un objet à son poignet et... explosa.

Soufflé par la déflagration, Alchem fut aveuglé et se retrouva projeté au sol avec une grande violence. Il ne dut qu'à sa souplesse et sa résistance naturelles de ne pas être assommé - ou pire - sur le coup.

Un garde qui explose ? Était-ce un golem ou une véritable action suicide ? Chaque chose en temps utile. D’abord se tirer de ce mauvais pas, ensuite les questions. Il savait que, tôt ou tard, il y aurait un imprévu. Voilà pourquoi il avait toujours un plan B, plan qu’il mit sur le champ à exécution. Dopé par l’adrénaline, il se releva, vérifia d’un rapide regard s’il était encore en un seul morceau, puis il s’enfuit droit vers le trajet prévu à cet effet. S’il y avait une petite chance pour qu’il disparaissent sans faire usage de magie, il devait la saisir. Tout ce qui lui fallait, c’était n’être vu de personne l’espace de quelques secondes. La prêtresse devait être invisible, ce qui forcément ne facilitait pas cet objectif. Néanmoins, il espérait pouvoir l’entendre si elle se mettait à inquanter ou si elle se déplaçait. Les sons devaient aussi lui indiquer s’il y aurait sous peu des renforts. Bref, il s’attendait à devoir aviser à chaque seconde. Pour l’instant, il courait...

Des bruits de course se firent aussitôt entendre depuis deux directions différentes : les premiers venaient depuis derrière le couple qu'il avait agressé pour leur prêter main forte tandis que les seconds - bien plus gênant pour ses plans d'évasion - venaient à sa rencontre depuis le couloir. Aux sons de bottes, il devina qu'il serait très vite submergé s'il choisissait le combat plutôt que la fuite. De toute évidence, on lui avait tendu un piège et il s'en était fallu de peu qu'il puisse le déjouer. Si tel était bien le cas. Sur son trajet, il avait repéré une petite salle latérale ainsi qu'une étroite fenêtre mais il n'était pas impossible qu'elles soient toutes les deux surveillées.

Bien. Il devenait trop dangereux de se priver de son plus grand atout : la magie. Et puis après tout, cela ne réduisait pas à néant ses plans. Il avait l’apparence d’un esclave d’une maison rivale et même s’il était étonnant qu’un tel individu puisse recourir aux arcanes, ce n’était pas incompatible avec les plans tordus des elfes noirs. Quoi qu’il en soit, il ne perdit pas une seconde de plus et inquanta.

Alchem > Emprise sur la pierre > Alchem

Les portes, les fenêtres étaient surveiller, oui, peut-être. Mais les murs, eux, l’étaient-ils ? Et le sol ? Et le plafond ? Les drow avaient-ils prévu que l’assassin puisse être tout d’un coup capable de traverser la pierre ? La stratégie de fuite devenait donc simple. S’il concrétisait son sortilège, il allait passer là où les autres ne pouvaient passer, pénétrant s’il le fallait dans le sous-sol rocheux de la caverne. Puis il referait surface loin du temple, se rendrait invisible ou changerait d’apparence, bref, il aurait tout le loisir de se reposer à l’auberge et de recommencer son plan.

Ce sortilège prit au dépourvu les poursuivants d’Alchem dont les premiers membres apparurent dans son champ de vision au moment où il s’enfonçait dans un mur latéral. Il était probable que les premiers gardes l’aient vu recourir à la magie mais aucun n’était assez prêt pour intervenir. Le svirfneblin s’était fait peur et avait subi quelques blessures dues au souffle de l’explosion mais il put s’éloigner du temple après avoir échappé à toute poursuite visible.

On l’avait vu utiliser la magie. Il serait inconscient de parier le contraire. Cela allait rendre la suite plus difficile, mais Alchem allait persister. Il allait s’adapter. Dès qu’il se serait reposé, il repartirait en chasse et cette fois, il ne s’en prendrait pas à une cible isolée. Non, il allait intercepter une cible qui se pensait protégé avec des gardes du corps. Il sortirait toujours hors de vue du plan éthéré, arborerait toujours les traits de ce sinistre gnome des roches, mais au lieu d’ouvrir les hostilité par un coup de dague, il lancerait une boule de feu dans le tas. Oui, il allait tout faire brûler ! Il finirait rapidement les survivants, puis s’évaderait en traversant la pierre. Toujours surprendre, une règle d’or. Il avait été discret jusqu’à présent, maintenant ce serait plus frontal. La fois suivante, ce serait encore différent. Il utiliserait ses illusions pour leurrer les gardes du corps, puis en profiterait pour assassiner sa cible dans la confusion. Et la fois d'après, il tuerait en étant invisible. Il pouvait aussi tuer directement par des cauchemars plus vrais que nature. Ho... oui... la maison dirigeante était très loin d’être sortie d’affaire ! Viendrait normalement un moment où plus personne ne pourrait se considérer en sécurité. La petite voix approuvait ! La petite voix jubilait !

HRP : en résumé, mon personnage emploie désormais des tactiques différentes à chaque fois. Il va de soi que s’il détecte une trop grande menace durant ses repérages, il va voir ailleurs. Tant que rien ne l’arrête, il poursuit en boucle. Alchem ayant une amulette d’anti-détection, il est difficile de le localiser via divination, ce qui complique pas mal la tâche des Drow.

Au cours des trois jours suivants, les victimes d’Alchem s’accumulèrent selon le plan qu’il avait conçu. La diversité de ses attaques rendaient extrêmement compliqué de mettre en place des contremesures efficaces et le svirfneblin pouvait retrouver confiance en son effet de surprise. Pour le conforter encore davantage, il surprit de plus en plus de rumeurs évoquant des meurtres en ville. Pas uniquement les siens : deux autres familles semblaient maintenant visées par les agressions violentes. Une preuve indubitable que – faute de parvenir à piéger l’assassin qui sévissait contre les siens – la maison dirigeante avait décidé de passer à l’offensive contre ses rivales. Et demain verrait un nouveau coup d’éclat : une rumeur faisait état du retour d’un groupe de dignitaires drows appartenant à la maison dirigeante. Une occasion en or de lui porter un sévère préjudice.

Et bien demain, il n’irait surtout pas voir ce fameux groupe de dignitaires. Non, car c’était là qu’on l’attendait, là qu’il avait le plus de chance de se faire avoir. Pourquoi tout gâcher alors que son plan était en train de se concrétiser ? Les représailles débutaient, la tension montait. Alchem devait continuer d’affaiblir la maison dirigeante. Peut-être y aurait-il sous peu une insurrection, une tentative de coup d’état. Bref, il allait frapper ailleurs, là où on ne l’attendait pas, encore une fois. Et pour marquer le coup, il allait emporter de quoi incendier le bâtiment où il s’introduirait. Il lui était si simple de voler avec ses illusions et son adresse. Voilà notamment pourquoi il n’avait aucun problème à se procurer argent et nourriture au quotidien. Il n’aurait qu’à subtiliser des flasques d’huile. Un trait de feu et hop, des flammes partout ! Détruire avait toujours été plus aisé que de construire, le gnome ne pouvait que mieux le réaliser maintenant qu’il avait endossé ce rôle de fléau.

Outre les quartiers privés dont jouissait la maison dirigeante au sein des deux principales institutions de la ville qu’étaient le Grand Temple et l’Académie de magie, son domaine s’étendait en un ensemble de trois stalagmites et trois stalactites d’une taille impressionnante. Alchem n’eut aucun mal à se procurer le matériel qu’il avait en tête sans attirer l’attention sur lui mais il lui restait à décider où frapper : la stalagmite centrale abritait les quartiers d’habitation de la matrone et de sa famille proche. Celle qui la jouxtait à droite abritait principalement une caserne affiliée à la maison et les quartiers de vie de ses guerriers. La troisième stalagmite comportait les différentes commodités dont la famille avait l’usage. Enfin, les deux stalactites abritait les esclaves et les réserves de la maison.

Il choisit la stalagmite centrale. Un vrai gros coup d’éclat ne pouvait que servir ses objectifs. Il estimait de plus les risques raisonnables puisqu’il pouvait au préalable visiter les lieux en restant dans le plan éthéré. Il pouvait ainsi noter la position des gardes, évaluer les protections en place, tout du moins celles qu’il était capable de percevoir. Tuer n’étant pas une absolue nécessité, même si cela lui ferait mal au cœur de partir sans laisser de victime, il pouvait intégrer le plan matériel en un lieu désert et commencer tranquillement à vider ses flasques d’huile. Ensuite il mettrait le feu et, peut-être, resterait-il invisible au lieu de fuir. Jamais encore il n’était resté sur place après avoir frappé. N’était-il pas temps d’innover encore une fois ? Ô plan machiavélique ! Il le voyait se dessiner, il le voyait prendre forme, c’était sa voix qui le lui susurrait. Il allait mettre le feu, oui, puis se faire oublier, attendre environs une heure, attendre que des gens soient là, des gens qui ne le chercheraient pas puisqu’il était sensé être partie, puis il attaquerait, une bonne boule de feu dans le tas, un ou deux coups de poignard et traits de feu aussi. Seulement après, il fuirait en traversant la pierre. Cela pouvait faire un carnage ! Et peut-être, qui sait, aurait-il l’occasion de finir ce qu’il avait débuté, des années plus tôt... Ce serait grandiose !

HRP : navré, j'ai posté avec Manfred juste avant.

Alchem put s’isoler dans une pièce servant visiblement de salle de réception à en juger par sa grande table et ses nombreux tapis et tentures de grand luxe. Ce n’était peut-être pas un endroit stratégique mais il était tout de même symbolique et présentement désert.
Alors qu’il était affairé à ses préparatifs, le svirfneblin fut interrompu par l’ouverture d’une porte latérale. Il eut le temps de se dissimuler pour voir sans être vu : une jeune et belle drow entra dans la pièce sans se douter de ce qui se tramait. Sa robe diaphane hors de prix, ses bijoux ornementés en métaux rares, sa démarche altière, tout la désignait comme une membre importante de la famille. Elle ne semblait pas armée et il semblait si facile de la surprendre. La petite voix soufflait à alchem qu’il se devait de l’éliminer, de l’égorger. Sinon elle risquait de dévoiler son projet avant qu’il n’ait fini de répandre son huile. Il devait agir vite. Il devait sévir pour nettoyer l’Ombreterre de la présence de ses maudits ennemis.

Alchem se glissa, telle une ombre, vers cette cible providentielle. Sa dague déjà en main, il tendit l’oreille, surveilla la porte. Si la Drow semblait bien seule, alors il déposerait la flasque d’huile qu’il tenait dans l’autre main et passerait à l’action. Ce serait un agréable bonus dans son plan. Si par contre il décelait d’autres personnes à proximité, alors il jetterait la flasque sur la Drow, tirerait un trait de feu pour l’embraser, tirerait un second trait de feu pour enflammer l’huile déjà répandue au niveau des tentures puis aviserait.

Aucun son ne lui parvint depuis l’endroit d’où était venue la drow et celle-ci s’avança dans la pièce comme pour permettre à son bourreau de passer à son aise dans son dos. La flasque fut déposée au sol sans un bruit tandis que le regard de l’elfe noire était attiré par une flaque d’huile. Elle se raidit, se doutant manifestement d’un piège. Mais Alchem était prêt et avait choisi cet instant pour frapper.
La lame, maniée avec une habileté chirurgicale fendit l’air, visant le cou de la femelle honnie. Mais elle ne trouva que le vide. La femelle avait fait un brusque pas de côté alors qu’elle n’aurait même pas dû voir l’attaque. Puis, dans un bruit de gargouillis écœurant, les traits et la silhouette de la superbe drow se déformèrent et semblèrent se liquéfier jusqu’à se stabiliser en une créature aux doigts griffus et ne présentant quasiment plus de visage.

Un dopelganger ? Peut-être. Alchem bondit en arrière. Il ne devait pas oublier qu’il était loin d’être aussi habile au corps à corps qu’avant. Néanmoins vivace, il inquanta rapidement.

Alchem > Invisibilité suprême > Alchem

[]S’il parvenait à concrétiser ce sort, il ne devrait pas avoir trop de mal à suivre son plan. L’alerte allait être donnée mais il n’y pouvait rien et ce n’était pas le moment d’enrager. Non, il fallait s’adapter, encore et toujours. Il n’en était plus à une difficulté près.[/i]

Alchem parvint à bondir contre le mur pour se mettre suffisamment hors de portée et se laisser le temps d’incanter son sortilège. Mais la créature - ne semblant pas décidée à le laisser fuir aussi facilement – révéla une capacité que le svirfneblin ne s’était pas attendu à trouver chez un doppelganger :

Créature -> Toile d’araignée -> Vers Alchem

Le svirfneblin se retrouva aussitôt en mauvaise posture et recouvert d’une épaisse et collante couche de toiles d’araignées par ailleurs ancrée au mur derrière lui.

HRP : tu peux faire un jet pour reconnaître le monstre auquel tu as affaire.

Ça ne se passait pas bien, mais Alchem n’était pas du genre à perdre son calme. Sa réaction fut immédiate :

Alchem > Assassin imaginaire > Créature

Que ce monstre se fasse un peu tourmenté par ses pires peurs, histoire de le laisser tranquille. Pendant ce temps, le gnome, qui était redevenu visible car il ne pouvait se concentrer que sur un seul sortilège à la fois, allait tâcher de se libérer. Il pouvait s’aider de sa dague et de sa souplesse, de sa force aussi, elle n’était pas ridicule. Et puisqu’il devait aller le plus vite possible, tant pis s’il déchirait ou même abandonnait dans la manœuvre la plupart de ses frusques, ce n’était pas comme s’ils avaient la moindre valeur. Avec cette méthode, il devrait mine de rien pas mal se faciliter la vie puisque la toile était colée majoritairement à ce qu’elle avait touchée, donc ses habits.

HRP : 11

Cela ne se passait pas bien, non. Le sort d’assassin imaginaire aurait dû paralyser l’effroyable créature mais celle-ci sembla à peine accuser le coup avant de s’écarter brusquement et de grimper sur l’amas de toile puis de se suspendre au plafond de la salle. Elle laissait un cours répit qu’Alchem pouvait tenter de mettre à profit pour se dégager mais le svirfneblin eut une illumination : il avait affaire à un fiélon des plus mortels et dévoué à la sombre et cruelle déesse des drows. Le yochlol était un puissant métamorphe et un lanceur de sorts qui pouvaient subjuguer ses proies avant de les dévorer.

Cette constatation faite, Alchem poursuivit ce qu’il était en train de faire. Il devait se dégager de l’amas de toile au plus vite. Chaque seconde comptait. S’il y parvenait, il plongerait sous la table pour ne plus être visible du démon. Là il pourrait tirer un trait de feu sur l’huile déjà versée, puis s’enfuir grâce à l’emprise sur la pierre. Il ne pouvait pas combattre cette créature, il lui semblait qu’elle résistait à la magie. Il manquait de temps pour invoquer un élémentaire et ne pouvait pas l’attaquer seulement avec une dague. Non, vraiment, il devait se dégager à tout prix ou il était fichu.

Se dégager de la toile avait tout d’une épreuve de force et le temps que le svirfneblin se dégage un bras, le yochlol avait eu le temps de se positionner pour passer à l’offensive. La créature entama une danse effroyable destinée à le subjuguer et Alchem devait mobiliser toute sa volonté pour continuer à tenter de se dégager un peu plus pour tenter de jeter un sort ou d’exécuter sa manœuvre de repli. Et chaque seconde de perdue accroissait également le risque que des renforts ne surviennent et rendent encore plus précaire sa situation…

Cette toile était décidément plus coriace qu’il ne s’y attendait. Il avait tout faut depuis quelques secondes et le démon ne lui facilitait pas la vie. Perturbé, il ne savait plus très bien si cet amas de soie gluante était magique ou non, mais il n’avait plus le temps pour se poser de question. Il lança un sort :

Alchem > Dissipation de la magie

Il visa l’endroit où il se trouvait. Tant pis si cela dissipait sa modification d’apparence par la même occasion. Mais de toute façon, n’avait-elle pas déjà pris fin ? Fichtre, il n’était pas dans son assiette ! Mais le plan restait simple : faire disparaître la toile, plonger sous la table, mettre le feu, se tirer.

Le sort fit tomber les effets qui le dissimulaient encore mais le libéra du même coup des liens qui l’entravaient. Alchem put glisser sous le lourd meuble en employant à bon escient ce qui lui restait de ses réflexes d’autrefois.

Ne s’étant pas attendu à cette manœuvre, le fiélon ne put pas l’empêcher de lancer son trait de feu qui enflamma la moitié de la pièce. La créature poussa un cri perçant de colère plus que de douleur. En effet, en se tenant toujours au plafond, elle échappait au gros des flammes et le reste ne semblait pas vraiment la blesser.

Alchem ne put pas vraiment s’étendre sur ce constat que les deux autres portes de la salle de réception s’ouvraient avec fracas sur toute une escouade de drows en armes au premier rang duquel se tenait un mage en riches atours.

Alchem était là, sous la table, encore visible de personne en cet instant précis. Il y avait ce mage qui venait d’entrer. Et derrière lui, des gardes, plein de gardes. Il y avait du bruit dans la pièce, de quoi probablement couvrir le son d’une incantation. La tentation fut trop forte.

Alchem > boule de feu (augmentée au niveau 5) > le groupe du mage

La boule de feu allait surgir de sous la table. Difficile de prévoir ce genre d’attaque. Le gnome espérait bien faire un carnage. La petite voix dans sa tête hurlait : QU’ILS CREVENT !!! Et après, il n’aurait qu’à s’enfuir en traversant le sol.

Il était difficile de bien viser depuis sa position retranchée mais la boule de feu partit néanmoins dans la bonne direction et explosa en provoquant force hurlements et une lumière aveuglante. Alchem n’avait aucun doute sur le fait que son attaque avait provoqué de considérables dégâts. Mais il était à présent grand temps de s’enfuir : les gardes entrés par l’autre côté de la pièce étaient trop loin pour avoir été affectés par l’explosion et il avait désormais révélé sa position.

Alors qu’il s’apprêtait à lancer son sortilège pour échapper par le sol, le svirfneblin ressentit une migraine violente. Son pied droit bougea contre sa volonté. Puis son pied gauche : il était en train de quitter l’abri de la table. Du coin de l’œil, Alchem vit le fiélon qui s’était glissé lui aussi sous le meuble et le fixait de son regard délétère. Encore un pas, puis deux, il serait bientôt visible de tous les survivants. Il n’était même plus invisible.

Invisible, il ne l’était plus depuis qu’il avait lancé son sort d’assassin imaginaire. Et à bien y réfléchir, sa modification d’apparence avait pris fin depuis qu’il avait lancé le sort d’invisibilité. Alchem se rendait compte, en cet instant critique, que quelques détails subtiles de ses pouvoirs récemment modifiés lui échappaient. Dans le cas présent, ce n’avait plus vraiment d’importance. Il devait être sous l’influence d’un maléfice de domination. Il fallait le briser. Il vit le démon, il vit ses yeux. Sa réaction fut instinctive. Il tenta de lui lancer sa dague, visant les yeux. S’il lui en crevait un, nul doute que la concentration du fiélon serait brisée. Et le gnome, libéré, pourrait s’enfuir à la dernière seconde. Sinon, et bien, ce serait trop tard... Peut-être qu’il aurait dû retourner la dague contre lui-même. Tant pis, il avait tenté le tout pour le tout.

HRP : assassin imaginaire, invisibilité et modification d'apparence sont tous les trois avec concentration. Impossible de les cumuler. Je n'y avais pas fait tout de suite attention. Je pense que je vais éditer ma fiche, juste pour indiquer les sorts avec concentration, ça me facilitera la vie. Je pense aussi judicieux de faire ça lors d'une partie sur table car c'est très loin d'être un détail.

Mais Alchem constata que la main qui avait saisi la dague ne lui obéissait pas plus que ses pieds qui venaient de le mener sous le couvert de la table. L'arme qu'il destinait à l'œil de la créature tomba avec fracas au sol quand sa main s'ouvrit. Des bruits de pas précipités parvinrent ensuite de tous côtés et une vive douleur à la tête fut la dernière sensation que le svirfneblin perçut avant que tout ne s'assombrisse.

***

Il se réveilla avec un mal de crâne lancinant. Ses poignets et ses chevilles étaient fermement et douloureusement serrées et il ne vit que le noir le plus total lorsqu'il se risqua à ouvrir les paupières.

Il avait merdé...
Il le savait. C’était la boule de feu, il n’aurait pas dû la lancer...
Il aurait eu le temps de s’enfuir, l’occasion de lancer bien d’autres boules de feu, de faire bien plus de dégâts. Déjà tant de choses accomplies, tant de morts... Mais ce n’était pas assez, ce ne serait jamais assez...
Maintenant, il était pris. Mine de rien, durant toute ses missions, toutes ses aventures, il n’avait été pris que deux fois, celle-ci incluse. La première, c’était avec le Despote. Deux fois en peu de temps en somme. Il n’était pas en forme. à moins qu’il ne s’y prenait plus convenablement. Avait-il fait une erreur face à la liche ? Il ne savait plus, ses souvenirs étaient flous en ce qui concernait cet événement. Et maintenant, il n’y avait plus rien à faire, sauf si on lui en laissait l’occasion, ce dont il doutait.
Il avait mal à la tête. Il était pieds et poings liés. Il était dans le noir. Le noir, vraiment ? Il pouvait voir dans le noir, alors voyait-il quelque chose ? Ou alors il était aveugle, ou avait un bandeau sur les yeux, quelque chose du genre. Pouvait-il déduire d’avantage ? Était-il allongé ou debout ? Était-il contre quelque chose, un mur, un sol, une paillasse ? Que pouvait-il entendre ? Portait-il encore ses loques d’esclave ? L’instant était aux constats.

La Couronne de Cuivre

Ornegemme, cité svirfnebline