La Couronne de Cuivre

Hubert ne comprenait pas très bien ce qui était en train de se jouer. En même temps, Agathe était l'une des institutrices, elle avait donc les enfants en charge, et Ignace leur avait proposé de les récupérer, donc... Ils ne risquaient pas grand chose à aller la rejoindre. Sans se départir de sa mine meurtrière, il répondit donc à l'injonction de la jeune femme, tout en continuant à soutenir Albérich. Il n'était pas certain que ce soit très prudent, cependant. Si Ignace ne bluffait pas, il savait probablement ce qui se tramait auprès d'Alban et de Ruth.

L'expression de l'institutrice, déjà inquiète, se fit franchement tendue quand elle remarqua leurs mines.
-Il y a donc bel et bien quelque chose qui cloche... murmura-t-elle.
Elle soupira.
-Agnès est venue chercher tes écuyers il y a quelques minutes, arguant que tu avais besoin d'eux. J'ai trouvé ça gonflé et un peu bizarre, parce que je t'imaginais plutôt te déplacer toi-même, quitte à affronter ton ire. Mais j'ai quand même obtempéré et sans doute ne serai-je venu t'en parler qu'une fois les cours terminés si, en partant, Ruth ne s'était pas tournée vers moi, si elle n'avait pas agité les lèvres en silence et... si ce n'était pas ton nom que j'avais cru y lire.

" Agnès aussi." souffla Hubert malgré lui.
Ils savaient se défendre. Il le leur avait appris. Il les avait prévenus. Ils avaient leurs objets magiques. Ils ne se laisseraient pas surprendre, d'autant que Ruth avait compris. Il frissonna. Que pouvait-il faire ? Où les avait-elle emmenés ? Quelle était sa latitude, compte tenu de ce qu'avait dit Ignace ?
" Par où sont-ils allés ?" demanda-t-il d'une voix qu'il espérait égale.
Albérich était juste dans son sillage.
" Allez chercher Barthélémy, toi et Giovanni. Dépêchez-vous."
Etait-il encore possible d'éviter un massacre ? Hubert avait eu l'intention d'essayer de rejoindre Clairétoile par l'extérieur. Avec un barde et un clerc d'expérience, ils survivraient dans la tourmente. Mais si Ignace avait menti...

-Je n'ai pas osé les suivre, mais on m'a dit qu'elle les menait vers les escaliers montant à la tour sud-est...
-Ah, vous voilà......
Barthélemy s'approcha de son pas claudiquant. Il s'appuyait lourdement sur sa faux et la lame de celle-ci comme sa soutane étaient éclaboussées de sang.
-Il faut les éliminer... j'ai procédé à une divination... J'ai vu que les choses ne se passeraient pas comme ils vous le permettraient... C'est pour cela que je ne me suis pas laissé faire...
Agathe, jusqu'ici stupéfaite, se ressaisit tout à coup.
-Bon, on va s'occuper de cette salope ? Je n'aime pas qu'on s'en prenne à mes élèves.

Hubert hésita.
" Allons-y. Albérich... reste ici avec Barthélémy. Il ne faut pas qu'Ignace prenne la tangente."
Les gosses avaient des ressources, mais s'ils se chargeaient d'Ignace avant de neutraliser Agnès, il n'était pas impossible qu'ils puissent communiquer et précipiter l'irréparable.
" Gaspard et Edgar sont sûrs, dit alors le Luménien, émergeant de sa torpeur. Et Guillermo, même si certains de ses hommes ne le sont pas.
— Merci."
Puis le paladin partit en direction de la tour. S'il croisait un de ses alliés en route, il avait bien l'intention de l'envoyer vers l'intendance.

Ils ne croisèrent ni officier, ni soldat, pas même en passant près de la salle qui servait désormais de dortoir à l'escouade de Gaspard : sans doute celle-ci était elle descendue dans la nef, pour s'entraîner...
Ils gravirent les escaliers, atteignirent le rez de chaussée de la tour sud-est, désert.
Des sons inquiétants leur parvinrent alors de ce qui était le troisième étage avant que le plafond du second ne s'effondre.
La fin d'une incantation.
Le feulement de douleur - d'agonie - d'un fauve.
Un claquement. de fouet, peut-être.
Un hurlement strident.

" Dépêchons-nous." dit le paladin.
Le paladin prit la tête du trio dans l'escalier, l'arme à la main. Il n'avait pas son bouclier et seulement peu de marge de manoeuvre face à un clerc mauvais, mais il faudrait faire avec. Il comptait surtout sur l'appui du barde pour avoir le dessus, ainsi que sur la résilience des deux enfants.
" Agathe, ne vous exposez pas. Giovanni et moi-même pouvons régler ceci."
Et rapidement, du moins l'espérait-il.

Ils débouchèrent sur le pallier de l'étage supérieur. D'emblée, ils notèrent que des sentinelles se tenaient dans l'embrasure des portes, armes en main mais trop secouées pour intervenir. Et secoué, il y avait de quoi l'être.
Agnès se tenait au centre de la pièce. D'une main, elle tenait un ignoble fouet barbelé ; dans l'autre, elle brandissait ce qui devait être un symbole sacré. A ses pieds, encore agité de soubresauts, était étendu le corps d'un tigre. Plus loin, Ruth était recroquevillée sur elle-même, à côté d'un Alban tremblant comme une feuille, la manche de sa tunique déchirée et ensanglantée. Selon toute vraisemblance, la prêtresse lui avait fait lâcher le sceptre qui, désormais, gisait à bonne distance de lui.
-Tels écuyers, tel maître... cracha la jeune femme. Pourquoi ne pouvez-vous vous contenter d'obéir aux consignes ? Pourquoi vous faut-il toujours jouer aux imbéciles ? Voyez ce qu'a amené votre bêtise crasse !

Une Loviate. C'était logique, pour une Ilmate, somme toute. Leurs dogmes n'étaient séparés que par l'horreur.
Voir les enfants dans une telle situation, Alban blessé, Ruth inerte — peut-être pire — termina de mettre Hubert dans une rage noire qui avait besoin de s'exprimer. Il ne perdit pas son temps à parler à la démente qui lui faisait face. Il tergiversait depuis des jours, et voilà le résultat. Bien sûr, il était conscient de la puissance potentielle d'une prêtresse de son expérience, mais Giovanni était dans son ombre, et Hubert avait foi dans leur capacité à vaincre ensemble. Peut-être les sentinelles se reprendraient-elles, aussi...
De toute façon, il devait aller au contact, au plus vite, c'était sa meilleure chance de la vaincre. Il la chargea donc sans la moindre hésitation.

La prêtresse brandit son symbole sacré, qui luisit d'une lueur malsaine.
Une vague d'énergie sombre fondit sur le paladin, le traversant sans lui causer le moindre mal. Mais il entendit, derrière lui, Giovanni poussa un cri de douleur.
L'instant suivant, il la percutait, l'envoyant rouler au sol.
Elle se redressa promptement, évita l'assaut suivant avec souplesse.
Plus résistante, plus habile qu'on ne l'aurait imaginé.
Mais elle semblait stupéfaite.
-Tu es plus puissant que je ne l'aurais cru... souffla-t-elle. Trop pour moi, peut-être. Mais qu'importe : je ne partirai pas seule.
Évitant de justesse une nouvelle attaque, eElle leva son symbole, projetant un éclair d'énergie noire, crépitante.
Alban hurla.

Il aurait dû la tuer tout de suite. Il avait voulu la prendre vivante, pour la faire avouer, pour savoir qui ils étaient, âmes ténébreuses en leur sein, et il avait commis une grave erreur. Or un paladin ne tergiverse pas, un paladin pourfend le mal, et il était puni — terriblement puni — pour l'avoir à nouveau oublié.
Il ne voulait plus faillir, et pourtant, il était tellement faillible...
Il fallait en finir avant qu'elle ne fasse d'autres victimes.

Hubert -> Châtiment du Mal -> Agnès

Son épée s'abattit.
La Loviate tenta de l'esquiver, à nouveau.
En vain.
La lame déchira le tissu de son aube, s'enfonça dans la chair, trancha os et organes sans presque rencontrer de résistance.
Les yeux de la prêtresse s'écarquillèrent, un gargouillis horrible monta de sa gorge.
Puis elle s'abattit face contre terre, éclaboussant de sang Hubert et les dalles de l'étage.

Le paladin lâcha son épée et courut vers les enfants. Il n'avait aucune idée de s'ils étaient vivants, mais il fallait qu'ils le soient, absolument, sans quoi il ne savait pas exactement ce qu'il adviendrait de lui-même, il ne parvenait même pas à se représenter la minute qui suivrait. Il s'agenouilla sur le sol, posa une main sur chacun d'eux, et invoqua son énergie curative avant même de savoir ce qu'il en était.
Car ils étaient vivants. Ils devaient être vivants.

Et ils l'étaient.
L'énergie bienfaisante enveloppa leurs corps meurtris, peut-être agonisants, et s'y insinua.
Ils furent parcourus d'un léger tremblement.
Puis ils soupirèrent de concert, et leurs poitrines recommencèrent à se soulever à un rythme normal.
-On est arrivés... juste à temps, haleta Giovanni, derrière lui.

Hubert fut pris d'un tremblement et resta muet un moment. Il garda une main sur chaque enfant, contenant la rage qui enflait à nouveau en lui. Giovanni avait raison : ils étaient passés si près... L'évoquer lui donna la nausée.
" Giovanni... reste avec Agathe... Nous ne savons pas combien ils sont. Il faut protéger les enfants."
Il se releva, s'arrachant difficilement au contact de ses écuyers. Les gosses les plus braves qu'il ait jamais rencontrés. Il les retrouverait plus tard.
" Je dois aller m'occuper d'Ignace."
Dès qu'il aurait récupéré son épée, il retournerait à l'intendance et cette ordure allait regretter d'avoir osé s'en prendre à ceux qu'il aimait.

-Sois tranquille, nous veillerons sur eux.
-Nous ne bougerons pas d'ici jusqu'à ce que tu reviennes.
-Et j''expliquerai à l'officier responsable des sentinelles que celles-ci ne doivent pas quitter leur poste. Il faut continuer à surveiller les cannibales et éviter que la panique ne se répande dans nos rangs.
Hubert rebroussa chemin, gagnant le rez-de-chaussée de la tour puis les sous-sol. Peu après, il retrouvait Albérich et Barthélemy là où il les avait laissés.
-Ignace n'a pas bougé de l'intendance, fit ce dernier.

Hubert répugnait à renvoyer Albérich, car cela confirmerait les dires d'Ignace, mais c'était nécessaire. Et malgré la puissance qu'il devinait chez l'intendant, il ne voulait pas exposer Barthélémy, un homme bien trop précieux à présent qu'Agnès était morte et Gabriel à Clairétoile.
" Les gosses sont vivants et Agnès est morte. J'ai laissé Giovanni là-bas pour veiller sur eux. Barthélémy, votre divination vous a-t-elle donné la moindre indication sur le nombre de personnes que nous avons en face de nous ?"
Albérich soupira de soulagement mais à sa mine, Hubert devina qu'il n'était pas prêt d'émerger de sa grisaille. Il n'avait pas le temps de s'en soucier dans l'immédiat.

Le clerc grimaça.
-Je n'ai pu voir que ceux impliqués dans les événements du jour. Les deux membres de l'intendance venus me chercher, Agnès et Ignace. S'il y en a d'autres, je n'en sais rien. Pour le moment, du moins...
Il dévisagea Hubert.
-Soyez prudent. Ignace est plus qu'il ne le semble. Beaucoup plus. Je ne sais quelle est exactement sa nature mais... je redoute le pire.

" Je sais. Albérich, je voudrais que tu ailles me chercher Edgar et Guillermo. Expose-leur la situation très brièvement et dis-leur de me rejoindre. Ensuite préviens Ezéchiel. C'est le dernier membre du conseil, il doit être averti au plus vite. Barthélémy, allez remplacer Giovanni et envoyez-le moi. Dites-lui de prendre un mage avec lui, le meilleur. Ensuite, restez tous les deux à distance. La communauté va commencer à comprendre que quelque chose ne va pas : j'ai besoin de vous pour tempérer les inquiétudes."
Dès que les deux hommes auraient obtempéré, il irait dans l'intendance. Pas pour se battre, mais pour gagner du temps. Il fallait s'assurer qu'Ignace ne file pas. Or, il savait certainement qu'Agnès était tombée.

Albérich et Barthélemy s'éloignèrent.
Hubert gagna l'intendance.
Le maître des lieux s'y trouvait toujours.
Il avait l'air contrarié.
-Décidément, tu es incapable de respecter un accord... soupira-t-il. C'est dommage, car j'aurais respecté ma part du marché. Enfin soit... Hum, juste par curiosité, à cause de qui est-ce que tout cela à capoté ? A cause de toi ou de tes écuyers ?

Juste avant d'entrer dans l'intendance, Hubert s'immobilisa et incanta pour se protéger contre le mal qui régnait dans la pièce. Il n'avait qu'une dizaine de minutes devant lui, mais il espérait que cela suffirait pour que les autres arrivent.
Entendant les paroles mécontentes d'Ignace, il sourit malgré lui.
" A cause de mes écuyers, je le crains. Agnès aurait dû savoir qu'on ne doit jamais s'attaquer à plus petit que soi... et encore moins sous-estimer plus petit que soi."
Il fit tourner son épée dans sa main, songea qu'il aurait dû penser à mieux s'équiper. L'urgence ne l'avait pas permis. Mais il se sentait étonnamment bien. Il jouait son rôle, enfin.
" A présent, je crains que tu n'aies plus vraiment de moyen de pression sur moi. Si tu me disais ce que tu es venu faire, avec ta copine loviate, dans la communauté..."

Il rit de bon cœur.
-Agnès ? Tu sais, quand elle a rejoint la Communauté, elle était tout ce qu'il y a de plus Ilmate. Me lier à elle, puis me servir de ses doutes, de ses craintes, de ses blessures pour la pervertir a été un jeu aussi long que passionnant. Un jeu que j'ai gagné, comme je gagnerai celui actuellement en cours.
Il se fit plus sérieux.
-Mais donc, ces maudits gamins sont en vie ? Ils le seraient restés s'ils s'étaient contentés d'obéir plutôt que de vouloir jouer au preux chevalier. Mais puisqu'ils ont agi stupidement, il me faudra les punir. J'irai les voir quand j'en aurai fini avec toi. Je ne les tuerai pas, non, ce ne serait pas assez drôle. Non, je les pervertirai, jusqu'à ce qu'il ne reste plus une once de lumière en leur âme dérisoire...

Hubert ne se laissa pas démonter. Evidemment, Ignace avait sans doute de bonnes raisons d'être sûr de lui. Il n'était peut-être pas vraiment humain. Il lui avait parlé directement dans son esprit, sans même incanter. Le paladin réfléchit. L'étude des créatures de l'ombre faisait partie de son apprentissage, mais cela remontait à si longtemps... C'était probablement une sorte de démon... la plupart étaient télépathes. La partie allait être très serrée, s'ils parvenaient seulement à la remporter.
Ne te laisse pas impressionner. Tu n'as pas le choix, de toute façon.
" Ainsi c'est juste ça... Une envie de moucher la lumière... Avoue que ce n'est pas très original. Ou bien y-a-t'il à Clairétoile des choses dignes d'attirer la convoitise d'êtres dans ton genre ?"

Il eut une moue méprisante.
-Crois-tu que j'aurais travaillé avec autant d'acharnement à l'organisation et à la survie de la Communauté si je n'étais préoccupé que de broutilles comme pervertir les âmes ? Non, j'ai intérêt à ce que son projet réussisse. Grand intérêt, même. Agnès... C'était un petit à-côté. Il faut bien aussi s'amuser, dans la vie.
Il eut un sourire mauvais.
-Mais si nous passions aux choses sérieuses ? Les grands méchants qui expliquent leur plan en long, en large et en travers en laissant ainsi le temps au beaux et lumineux héros de tout ruiner ou d'attendre les renforts, on ne voit ça que dans les histoires des bardes... En plus, cela fait longtemps que je n'ai pas abattu de gentil petit paladin. Cela commençait à me manquer...
Il se leva.

" Je ne suis pas un gentil petit paladin, dit Hubert. Je suis un paladin très en colère."
Bon, il avait gagné quelques minutes, sa protection contre le mal était encore active. Une fois encore, sa seule chance était le corps à corps : à distance, il serait à la merci des sortilèges que l'intendant ne manquerait pas de lui lancer. A bout portant, il pouvait l'empêcher de se concentrer... s'il avait seulement besoin d'articuler quoi que ce soit, ce qui lui semblait très peu probable... Il prit une profonde inspiration, en appela à Lathandre, et ne laissa pas l'initiative à son adversaire. S'il devait tomber, et les chances n'étaient pas minimes, il espérait que quelqu'un, n'importe qui, pourrait terminer le travail...

Hubert -> Châtiment du Mal -> Ignace

L'intendant s'écarta avec prestesse. Pas assez, cependant, pour éviter tout à fait le coup, qui fut plus qu'érafler son flanc.
-Un assaut sans sommation contre un adversaire désarmé ? Très, très chevaleresque, gloussa-t-il.
L'instant suivant, il se métamorphosait.
En lieu et place d'Ignace se tenait à présent un être haut et imposant, à la peau d'un rouge luisant, au visage bestial et grimaçant, au front cornu et proéminent. Dans son dos se déployait deux grandes ailes noires, et à son flanc pendait une impressionnante épée qui s'enflamma comme il la brandissait en un éclair.
L'assaut suivant, il le para de sa lame incandescente.
-Tu es plus qu'un paladin, en réalité. Et tu le sais, gronda-t-il. Ce qui ne rendra ta mort que plus savoureuse...

" Ah misère..." lâcha Hubert, bien qu'il ne soit pas réellement surpris.
Bon, son épée ne s'était pas brisée d'emblée, c'était déjà ça de pris. Un instant, il réfléchit pour tenter d'identifier ce à quoi il était confronté. Le suivant il renonça : cela ne ferait que le démoraliser davantage. Ces créatures étaient résistantes à presque tout et c'était un miracle qu'il ait pu ne fût-ce que l'effleurer. Il ne fallait plus penser, il fallait se battre : Hubert cessa de se torturer les méninges pour se concentrer, tout entier, dans la lutte qu'il devait mener.

Ils se livrèrent à de furieuses passes d'armes qui devaient retentir dans une bonne partie des sous-sols.
Il parvint à nouveau à toucher son adversaire. Puis ce fut au tour de ce dernier : il le blessa une première, une deuxième fois, brûlant ses chairs, enflammant ses vêtements, l'emplissant de douleur...
Il s'apprêtait à porter un autre coup, sans nul doute dévastateur, quand il se produisit quelque chose d'inattendu.
La main libre du paladin s'agita sans qu'il en eut réellement conscience, traçant brièvement un signe dans l'air surchauffé.
Ses lèvres s'agitèrent de la même manière, produisant des mots qu'il ne comprit pas.
Cela ne dura qu'un instant.

Hubert --> Châtiment sacré --> Diable

Puis, d'entre ses doigts, jaillit un rayonnement doré qui emplit bientôt tout l'espace devant lui, englobant l'être diabolique, le faisant chanceler, lui arrachant un hurlement de souffrance.
-Alors tu es... ?! grogna-t-il, reculant d'un pas. Je... Je comprends mieux la puissance de ton aura...

Hubert, de son côté, ne comprenait absolument pas. Il ne savait pas d'où lui était venue cette énergie subite, ni ce savoir qu'il n'avait pas quelques secondes plus tôt. Mais il s'était produit quelque chose qui avait blessé le démon et c'était tout ce qui comptait, aussi repartit-il aussitôt à l'attaque, sans chercher à s'expliquer ce prodige. Peut-être était-ce Lathandre qui avait décidé de se porter à leur secours... Peu importait : il fallait en profiter. Il se sentait épuisé, meurtri, il ne tiendrait plus longtemps... et il chargea à nouveau, rassemblant le peu d'énergie qui lui restait.

La créature tenta de parer mais elle fut trop lente.
L'étrange vague d'énergie ne l'avait pas que légèrement blessée : elle l'avait terriblement amoindrie.
L'épée magique qu'Hubert avait choisie parmi les merveilles du trésor arraché à la liche frôla la lame incandescente, fondit sur le torse de son adversaire, le traversa de part en part.
Le diable hurla, un hurlement qui vrilla ses tympans.
Puis le corps du diable fut parcouru de violents soubresauts, s'embrasa tout entier, en une flamme aveuglante qui monta jusqu'au plafond...
...et se volatilisé en un instant, ne laissant derrière elle qu'un tas de braises rougeoyantes.
Derrière lui, quelqu'un réclamait de l'eau à grands cris.
Autour de lui, l'intendance était une fournaise : la table, les bancs, les piles de documents, tout flambait.
Et ses vêtements brûlaient, eux aussi, meurtrissant de plus en plus ses chairs...

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une route oubliée