La Couronne de Cuivre

" Tout ça concerne les humains, trancha Wilmarin. Nous allons passer par les tunnels. Vous, Taliesin, et moi, et Braen... Tu sais encore te battre ?"
Le cuisinier d'Amrod paraissait peu enchanté par cette perspective.
" Plus ou moins.
— Et j'imagine deux trois humains pour faire bonne mesure.
— Je viens avec." déclara Cordélia d'un ton qui ne laissait aucune marge à la négociation.

Et il ne chercha pas à négocier : il savait que c'était peine perdu et avait eu son lot de tentatives infructueuses de tractations pour un bon moment. Par ailleurs, il comprenait que la jeune femme veuille s'impliquer, compte tenu de ce qui lui était arrivé. Lui-même était partagé : d'un côté, il tenait à aider les habitants du cru à se débarrasser de la menace du culte ; de l'autre, il se disait qu'il avait déjà fait beaucoup et rechignait à trop s'exposer, sachant les tensions que cela risquait de provoquer avec certaines personnes de sa connaissance. Toutefois, il ne se déroberait pas et ferait sa part du travail : il s'y était déjà engagé auprès de Wilmarin.

S'ensuivirent des discussions sur la composition de l'équipe et la manière dont elle communiquerait avec les personnes chargées de mettre les prêtresses en sécurité. Wilmarin parut s'endormir et ce fut Braen qui mena le débat. Amrod ne réussit pas à éviter de devoir accompagner la petite équipe des profondeurs : il était chargé de surveiller que Wilmarin ne pille pas l'abbaye. Tout le monde semblait réaliser que l'arrangement n'était pas idéal, cependant, à la fois parce que le marchand était demi-elfe mais aussi parce qu'il ne faisait de toute façon pas le poids face à l'ermite elfe. Mais personne ne ramena la chose sur le tapis : le temps pressait. Un officier de la garde de Champsdor et un prêtre chauntéen furent finalement désignés pour accompagner Wilmarin et Taliesin via les tunnels. La chose entendue, il ne restait plus qu'à en organiser les aspects pratiques et rejoindre l'entrée de la grotte.

Lui-même n'avait aucun préparatif particulier à faire, puisqu'il disposait de l'entiéreté de son équipement.
Dans l'absolu, il aurait pu faire un crochet par la demeure de maître Amrod pour informer Baptiste de la suite du programme. Mais cela imposerait de le réveiller, risquerait de provoquer de nouvelles complications, sans compter que cela imposerait probablement une perte de temps pour l'ensemble du groupe. Alors à moiins que l'occasion ne se présente, il s'abstiendrait et se rendrait directement au lieu de rendez-vous.

Ils partirent tous ensemble de l'auberge : Wilmarin, Braen et Taliesin pour les elfes, Cordélia, le prêtre et l'officier pour les humains, et Amrod pour ceux qui auraient préféré se trouver à mille lieues de là, à siroter un bon verre de vin sous le soleil.
Ceux qui ne disposaient pas d'équipement adéquat s'en virent proposer par la garde de Champsdor, qui leur fournit également des montures pour gagner les grottes au plus vite. L'officier s'appelait Rodolphe, c'était un homme d'une vingtaine d'années, qui avait apparemment encore joué dans les tunnels peu de temps auparavant avec des compagnons de virée. Le prêtre, Maric, était plus âgé, déjà grisonnant, et sec comme un bâton. Il paraissait prêt à en découdre, une faux d'allure sinistre attachée par une lanière à son épaule.
Wilmarin refusa de monter à cheval et promit de les retrouver sur place, ce qui inquiéta Braen, mais personne n'était en position de discuter avec l'ermite. Les six autres, une fois en selle, prirent le chemin des portes, puis de la campagne, abordant cette fois la butte de Champsdor par le nord, là où elle était la plus escarpée.

Taliesin se promit de garder un œil sur le prêtre, au cas où, et surtout sur Amrod. Certes, celui-ci était peut-être plus expérimenté qu'il ne voulait bien le montrer. Néanmoins, le barde avait une part de responsabilité dans le fait qu'il ait été enrôlé contre son gré dans cette aventure, sans compter qu'il se sentait redevable de l'accueil qu'il leur avait réservé, à lui comme aux enfants. Bref, il refusait l'idée qu'il puisse lui arriver malheur au ours de cette expédition qui s'annonçait des plus périlleuses...

Ils entrèrent dans le bois de sapins qui entourait la butte via un chemin relativement large mais furent forcés de mettre pied à terre pour ne pas être décapités par les branches basses. Ils convinrent de mener les chevaux jusque à la grotte, qui se trouvait une centaine de toises plus loin seulement. Wilmarin ne leur avait pas fait faux bond et les attendait dans l'ouverture immense de la caverne, haute comme cinq hommes, dont les bords déchiquetés rappelaient la gueule d'un grand carnassier.
" Ne vous laissez pas abuser, ça se rétrécit presque tout de suite." dit Rodolphe à Taliesin.
Amrod ne paraissait pas rassuré.
" C'est difficile à manquer, cependant... Je veux dire... quelle est la chance que les cultistes ignorent l'existence de cette entrée ?
— Ils ne l'ignorent pas mais ils ne savent pas qu'elle mène à l'abbaye, dit Braen.
— C'est probable, sans quoi ils l'auraient faite murer depuis longtemps." ajouta le prêtre en sortant des torches de sa besace.

Taliesin acquiesça : les cultistes n'auraient pas pris le risque que des enfants ou des adolescents aventureux déboulent sans prévenir dans leur sanctuaire...
[color=#FFFFF66]-Restez près de moi,[/color] souffla-t-il néanmoins à l'oreille d'Amrod. Je pense que tout ira bien mais si, par malheur, cela devait mal tourner, je vous aiderai à vous replier.

" Nous ne pouvons pas partir tout de suite, dit alors Wilmarin de sa voix rocailleuse. J'ai besoin de quelques heures de préparatifs. Et nous devons attendre le jour."
Braen poussa un soupir phénoménal tandis que le prêtre et l'officier s'entreregardaient, stupéfaits.
" Si j'avais su, je serais rentré chez moi pour faire une sieste, dit Amrod.
— Moi aussi, renchérit Cordélia. Je serais rentrée chez vous.
— Vous pouvez prendre de l'avance, proposa le sage elfe. Je vous rejoindrai en route.
— Ben voyons." railla Braen.

-Si je n'avais craint d'alerter nos ennemis, je vous aurais bien proposé de vous jouer un peu de musique pour patienter... dit-il d'un ton apaisant. Mais puisque ce serait par trop imprudent, nous pouvons effectivement commencer à explorer les grottes : si nous parvenons à trouver l'itinéraire menant à notre objectif, cela sera toujours autant de temps de gagné.
Et cela vaudrait toujours mieux que de rester à ne rien faire.

" Ne risquons-nous pas d'atteindre l'abbaye avant que vous nous rejoigniez ? demanda Cordélia au vieil elfe. Ce n'est pas si loin et vos transes elfes ont beau être courtes, elles durent quand même..."
Elle n'eut pas le temps de terminer sa phrase que Wilmarin se mit à grommeler à mi-voix. Une seconde plus tard, une brume argentée se leva, l'englobant en quelques volutes. Il y eut un bref mouvement au sein du brouillard et un hibou surgit du néant, pour aller se poser lourdement sur l'épaule de Braen, où il enfonça ses serres. Le cuisinier poussa un cri de douleur étouffé puis grimaça.
" Evidemment, lâcha-t-il. Moi qui me croyais infréquentable..."
Wilmarin l'elfe avait disparu. Le hibou, satisfait, ferma les yeux. Les trois humains étaient stupéfaits.
" C'est un pouvoir de druide classique, murmura Amrod, conciliant. Rien de très... hors du commun."
Cordélia secoua la tête.
" Je ne comprends pas... Je croyais qu'il était magicien. Il est druide aussi ?
— C'est une mauvaise question quand on évoque un elfe de son âge."

-Il s'est en effet adonné à bien des disciplines au cours de sa longues existence, confirma le barde. Alors imaginez à quel point son concours sera précieux !
Il dédia un sourire encouragent à Braen - la manière dont Wilmarin se vengeait de lui était somme toute modérée - puis fit un pas en avant.
-Mais que diriez-vous de partir à l'assaut de ces grottes ?

Maric termina de distribuer les torches à Cordélia et Rodolphe, et le petit groupe s'engagea sous l'arche de pierre. L'officier de la garde passa devant, suivi par Cordélia, puis Braen, Amrod dans son ombre. Taliesin et le prêtre prirent les arrières. Les murs de la grotte étaient décorés de dessins qui, Taliesin le devina d'emblée, étaient récents et reflétaient l'humour parfois limité des jeunes de la région. Certains étaient franchement grivois, d'autres maladroits, il y avait de nombreuses déclarations enflammées, parfois révoltées, parfois sentimentales. Les vestiges d'un feu, des tessons de bouteille et des os de poulardes traînaient sur le sol de terre battue et de roche. Quelques mètres plus loin, la caverne prenait fin brusquement en une paroi lisse, couverte de nouvelles imprécations.
" C'est du joli." remarqua le prêtre, manifestement peu impressionné par la créativité de la jeunesse locale.
Tout à gauche du mur démarrait une fissure étroite dans laquelle se glissa Rodolphe. Cordélia l'imita aussitôt, puis les autres, Braen tentant de protéger le hibou qui le mordit en retour. L'espace s'élargissait immédiatement après le passage étroit, et ils débouchèrent dans un couloir qui, bien que bas de plafond, leur permettait d'avancer sans difficultés : seul le prêtre devait légèrement se voûter pour ne pas se cogner. Il y avait encore quelques dessins sur les murs, quelques mots, mais beaucoup moins, et bientôt, il n'y en eut plus du tout. Ils cheminèrent un moment à la lueur des torches, qui permettaient à tous, elfes et humains, d'anticiper les pièges de la roche. Le sol était humide et des stalactites firent leur apparition, les murs se parèrent de formes étranges, de reflets brillants de quartz, de sécrétions difformes et pourtant merveilleuses. Ils étaient sur le parcours d'une ancienne rivière, comme le sol trop lisse le leur apprit bientôt, et chacun dut s'aider de ses mains pour conserver l'équilibre. Rodolphe s'immobilisa une dizaine de minutes plus tard alors qu'un premier conduit quitta le tunnel principal.
" Voilà le premier chemin possible... C'est étroit mais pas impraticable... Mais je ne sais pas combien de temps."

-Il faudrait envoyer un éclaireur pour voir où ce passage aboutit, s'il donne sur de nouveaux ambranchements... commenta-t-il. Par ailleurs, je serais d'avis de laisser des marques à toutes les bifurcations que nous empruntons, afin de pouvoir nous repérer s'il nous faut rebrousser chemin.
L'idéal aurait été de dessiner une carte mais lui-même n'avait pas le nécessaire.
En tout cas, ce qui semblait certain, c'est qu'il leur faudrait un bon moment pour venir à bout de ce dédale. Le délai nécessaire à maître Wilmarin pour se préparer ne serait donc pas préjudiciable, au total.

" J'y vais, mais je vous laisse le hibou." dit Braen.
Il décrocha précautionneusement le volatile endormi de son épaule (celui-ci s'y cramponna un moment avant de lâcher prise) et le tendit à Taliesin.
" Je ne vois que vous. Peut-être que vous pouvez le mettre dans votre cape, comme un poupon."
Avec un sourire goguenard, il se glissa dans l'étroit conduit.
" Qu'est-ce qu'on fait ? On avance ou on l'attend ?" demanda Cordélia.

Avant de répondre, le barde prit le temps d'installer délicatement le hibou sur son épaule - ce serait, à son avis, le plus pratique.
-Je serais partisan de l'attendre. D'abord parce que trop s'éloigner les uns des autres ne me paraît guère prudent, ensuite parce que maître Wilmarin a besoin de plusieurs heures pour se préparer et qu'il est dès lors inutile de se presser.
C'était son point de vue : si les autres préféraient continuer dans le couloir principal, il ne s'y opposerait pas, du moment qu'ils n'allaient pas trop loin.

Les autres se rangèrent globalement à son avis. Seuls Rodolphe et Cordélia poussèrent l'exploration plus avant, mais sans s'éloigner réellement. Amrod les rejoignit bientôt, séduit par la beauté de la grotte, et ils déambulèrent tous trois dans les parages, trahis par la lueur de leur torche. Seul le prêtre resta en arrière avec Taliesin. Il demeura silencieux, prenant sans doute quelque repos, ce qui, à son âge, était probablement une bonne idée. Braen revint une petite demi-heure plus tard. A peine eut-il reparu que le hibou quitta son perchoir pour regagner son épaule, s'y arrimant avec la même douceur que la première fois.
" Je me demande si c'est facile de lui tordre le cou quand il est sous forme d'oiseau, grommela le cuisinier tandis que le reste de la petite troupe se rassemblait. Bref. C'est prometteur. Etroit et humide sur environ cent toises, puis ça grimpe sec pendant quelques minutes, et ça débouche dans un vrai couloir. Plein de poussière et de toiles d'araignée, mais quand même clairement artificiel."

-Ce serait une sacrée chance si ce passage nous conduisait là où nous voulons aller...
Il sourit.
-Ca vaut donc le coup d'aller voir ce que ça donne.
Certes, Wilmarin ne serait peut-être pas prêt tout de suite. Néanmoins, cela leur éviterait de longues pérégrinations.

Ils s'engagèrent donc à la suite de Braen, dont la progression fut fortement ralentie par son souci de ne pas cogner le hibou contre les parois étroites du conduit. L'elfe n'avait pas menti, ils durent d'abord négocier un passage glissant, chose particulièrement difficile pour les humains qui, en plus d'une adresse limitée, devaient transporter leurs torches, puis le chemin se mit à grimper de manière assez sèche. Enfin, ils furent récompensés pour leurs efforts et débouchèrent dans le couloir décrit par le cuisinier. Il ne fallait cependant pas crier victoire trop vite : ils étaient encore bien en dessous du niveau de l'abbaye et l'allure des lieux — abandonnés — suggérait que ce n'étaient pas des humains qui les avaient creusés. De plus, le couloir s'étendait dans deux directions et il leur faudrait à nouveau choisir laquelle emprunter.

Taliesin, qui s'était efforcé de ne pas perdre le nord - au sens propre - depuis leur entrée dans le dédale, chercha à déterminer laquelle des directions les rapprocherait le plus du cœur de l'abbaye. Si cela s'avérait par trop ardu, il proposerait que le groupe se scinde en deux et parte en éclaireur dans chacun des tronçons. Ce sans trop s'éloigner, évidemment : le but était simplement de faire du repérage afin d'éviter, autant que possible, de se fourvoyer.

Le coeur de l'abbaye était probablement quelque part juste au-dessus, mais il était difficile de s'orienter plus précisément et vu la taille de la butte, il n'était pas impossible que les couloirs s'étendent sur des toises et des toises avant de bifurquer ou grimper.
" A mon avis, ça finit toujours par monter, intervint Amrod quand Taliesin eut fait sa proposition. Dans un site de cette taille, il doit y avoir plus d'un escalier, sinon ce ne serait pas fonctionnel... Alors je pense que ça n'a pas d'importance, si on va à gauche ou à droite : on trouvera bien un moyen de progresser vers les étages. Les lieux sont superbement préservés, de surcroît... Beaucoup de poussière mais peu de gravats. Je ne sais pas de quand date le complexe, mais c'est comme si on l'avait simplement remisé...
— Moi je parie que Wilmarin le sait très bien et qu'en plus il connait le chemin, mais que ça l'amuse de nous faire explorer ces fichus couloirs pendant qu'il roupille." dit Braen.
Le hibou ne broncha pas.
" Alors décidons à la tymoranne !" s'exclama Cordélia en sortant une pièce de monnaie de sa poche.
Bien que le prêtre parut déconcerté par la méthode, il ne dit rien, pas plus qu'aucun des autres.
" Pile à droite, face à gauche !"
Elle lança sa pièce. A l'instant où celle-ci atteignit le sommet de sa trajectoire, Taliesin eut l'impression de sentir un léger courant d'air, extrêmement rapide, balayer le couloir. Personne d'autre ne parut s'en rendre compte. La lueur des torches ne sembla pas vaciller. La pièce retomba côté face.

Était-ce une intervention de la déesse invoquée par Cordélia ? S'agissait-il de tout autre chose ?
Il n'aurait su dire, mais sa curiosité était piquée.
Comme elle était piquée par ce lieu au sujet duquel il se posait maintes questions, d'ailleurs. Qui l'avait bâtit ? Les mêmes personnes que celles ayant élevé les ruines qu'à l'origine, Tim l'avait chargé d'étudier ? Qu'avaient-elles laissé ici, dans les tréfonds de la terre ?
Sa mission actuelle l'empêcherait probablement d'enquêter à ce sujet. Mais il ouvrirait l’œil au cours de leur progression, au cas où des indices s'offrent à lui.
Et dans l'immédiat... A gauche, donc !

Et ils partirent donc à gauche, Rodolphe et Braen devant, presque côte à côte, puis Cordélia, ensuite Amrod — qui traînait, fasciné par ce qu'il observait autour de lui — enfin Taliesin et Maric. Comme le barde le supposait, les gravures qui apparaissaient sur le linteau des portes étaient similaires à ce qu'il avait pu découvrir dans les ruines, mais pas complètement : elles étaient plus carrées, plus précises, peut-être simplement en meilleur état. Elles étaient aussi largement incompréhensibles, et même lorsqu'elles lui évoquèrent des notions elfiques, il ne put en faire sens. Il décrypta ainsi des runes qui semblaient vouloir dire "artichaut", "désopilant" et "sucre de limace", ce qui ne paraissait pas complètement réaliste. Le couloir continua un moment, en ligne droite, avant d'atteindre une cage d'escaliers. Des marches partaient vers le haut et le bas et le petit groupe s'engagea vers les hauteurs.
" J'espère qu'il n'y a pas de pièges, remarqua Braen.
— Je pense qu'il n'y a plus rien depuis très longtemps." dit l'humain qui le précédait d'un pas.

-Sans doute. Mais restons néanmoins prudents, au cas où...
Tout en examinant les lieux dans leurs moindres détails, il se prit à s'étonner que pareil complexe soit demeuré totalement secret. Après tout, ils n'avaient pas eu de grandes difficultés à y accéder, et les grottes qui le précédaient étaient régulièrement fréquentés par les jeunes de la ville. N'y en avait-il eu aucun pour pousser plus avant l'exploration, pour s'engager dans l'étroit boyau qu'ils venaient eux-mêmes d'emprunter ? Si Victor, par exemple, avait vécu dans les parages, il était sûr qu'il l'aurait fait. Heureusement, tous les enfants n'étaient pas à ce point téméraires...

Peut-être qu'un interdit religieux avait suffi... Il serait temps de s'en inquiéter plus tard. Ils grimpèrent jusqu'à l'étage suivant, mais l'escalier continuait à monter et ils décidèrent de poursuivre... un étage de plus, et un étage encore...
" C'est d'un frustrant, grommela Amrod lorsqu'ils abandonnèrent un troisième niveau derrière eux. Vous ne pouvez pas me laisser là ? Je vous rejoindrai plus tard, quand vous aurez sécurisé les lieux. Je veux dire... Je ne sais même pas me servir d'un... d'un gourdin.
— Tout le monde sait se servir d'un gourdin, le gronda Cordélia avec un large sourire.
— Tu dois surveiller Wilmarin, dit Braen.
— Allons... On pourrait faire une entorse au protocole, non ? Il va lancer des boules de feu pendant un moment, de toute façon, non ?"

Le barde eut un sourire amusé.
-Je ne sais pas s'il serait très prudent de s'aventurer seul dans ces ruines : elles semblent désertes, mais certaines parties pourraient avoir été piégées pour éviter les intrusions. Il vaut donc mieux que vous continuiez à nous accompagner, quitte à vous tenir en retrait en cas de combat. Pour autant, ne vous en faites pas : vous pourrez explorer cet endroit à votre guise, une fois les cultistes éliminés.
Ce serait, pour Amrod, une belle récompense. Et il n'était pas dit que lui-même ne l'accompagnerait pas au moins un moment.

Amrod ronchonna mais resta dans le rang : sans doute sa tirade n'avait-elle été qu'une manière de manifester sa frustration plutôt que l'expression d'une réelle intention.
" Ah zut..." dit soudain Rodolphe en s'immobilisant au milieu de l'escalier.
Devant lui, dix marches plus haut, la cage d'escaliers était bouchée par une fine barrière d'énergie rose, miroitante, qui semblait légèrement vibrer et dégageait un parfum printanier, d'une fleur sans doute, mais que Taliesin n'était pas capable d'identifier.

Les yeux rivés sur la barrière, il se fronta le menton d'un air songeur.
Qui, des bâtisseurs du complexe ou des cultistes, avait mis en place cette protection ? Quels risques encourraient-on, en la franchissant ?
-A moins que vous ne sachiez de quoi il s'agit et que vous soyez en mesure de faire quelque chose, Maric, je pense qu'il serait plus prudent d'attendre le réveil de Wilmarin avant d'aller plus loin, dit-il finalement.
Lui-même ne pouvait - et ne préférait - rien tenter. Quant à rebrousser chemin, cela lui semblait inutile : sans doute tous les escaliers menant au cœur du sanctuaire était-ils barrés de la sorte.

" On pourrait le réveiller ? proposa Cordélia. Est-ce que c'est un problème, pour un elfe, si on l'interrompt dans son... trucmuche ?
— Si on lançait quelque chose ? On verrait déjà ce qu'on risque, non ? dit Rodolphe, qui semblait peu désireux d'attendre.
— Cela dit, on peut en profiter pour examiner l'étage d'en dessous. Ça nous occuperait..." intervint Amrod.

-L'idée de lancer un objet est bonne, mais en le faisant, je craindrais que nous déclenchions quelque alarme : après tout, nous ne connaissons ni la nature de cette barrière, ni l'identité de ceux qui l'ont installée... Je crois donc plus prudent de ne rien tenter la concernant avant le réveil de Wilarin. Que l'on peut tenter de hâter, éventuellement, même s'il serait plus diplomate d'attendre en nous occupant par un peu d'exploration.
Il faillit proposer, en manière de plaisanterie, de lancer le hibou en direction de la protection magique, arguant que cela le ferait forcément réagir. Toutefois, il ne tenait pas à s'attirer l'ire du vieux sage et préféra donc s'abstenir.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] La Vallée Fertile