La Couronne de Cuivre

HRP : la magie dont il est investi comprend "protection contre le feu", mais s'il ne pense pas à l'utiliser, ma foi...

La bourrasque emporta tout sur son passage en cercles concentriques, écartant les cultistes et leurs invocations, projetant les uns dans le feu, les autres contre les bâtiments voisins, les derniers dans le ciel. Taliesin parvint à échapper au grand vent en se cramponnant in extremis à un pilier de soutènement et pendant quelques minutes, il ne put faire rien d'autre que flotter dans la tempête, bien accroché, et espérer qu'elle se calmerait avant qu'il ne lâche.
Ce qu'elle fit.
La voie était à présent dégagée : les cultistes étaient éparpillés ici et là, sonnés ou morts, mais le vent de Wilmarin avait attisé l'incendie par endroits et l'avait éteint à d'autres. Les portes restaient inaccessibles.

HRP : Avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités, ou quelque chose comme ça !

Sur les dix cultistes que Taliesin avait surpris au départ, il en restait sept dans les environs immédiats. Quatre gisaient non loin du bâtiment, morts ou presque. Deux avaient été projetés dans le brasier et il était impossible d'atteindre leurs corps tant que le feu ferait rage. Un dernier avait été projeté contre une construction voisine et gémissait sur le sol, le dos manifestement brisé. Les trois derniers avaient été emportés plus loin et il faudrait les chercher pour s'assurer de leur sort. Wilmarin et Maric s'étaient approchés.
" Nous y sommes presque, remarqua l'elfe en comptant les corps. Il ne doit pas en rester plus de deux ou trois.
— Est-ce qu'on soigne ceux-ci ?" demanda Maric, manifestement mal à l'aise.

HRP : ça devrait être interdit de faire stresser les joueurs comme ça !

-Je n'aime pas les souffrances inutiles et, au-delà de ça, s'il est possible d'en sauver quelques-uns, ce serait mieux : cela permettrait de connaître le fin mot de l'histoire mais aussi de mettre en place un procès, répondit le barde. Toutefois, il faut impérativement commencer par nous occuper des captives toujours prisonnières de cet édifice. Avez-vous des moyens d'éteindre l'incendie ou de ménager une brèche pour leur permettre de sortir ?
L'absence de cris provenant de l'intérieur était presque inquiétante.

" Je doute qu'il reste grand monde à l'intérieur, dit Wilmarin. Mais nous pouvons aller voir... Reculez."
Maric et Taliesin battirent donc en retraite tandis que l'elfe levait à nouveau une tempête, bien plus soutenue encore que la précédente. Pendant un instant, il sembla qu'elle allait attiser le brasier jusqu'à embraser le bâtiment tout entier, mais finalement, sa violence souffla les flammes comme un homme fatigué sa chandelle. Les portes s'effondrèrent dans un déluge d'étincelles. Maric se tourna vers l'un des hommes à terre.
" Je vais soigner ceux qui sont encore récupérables...
— Ne gaspillez pas vos sortilèges, nous n'avons pas terminé. Attachez-les bien et n'oubliez pas de les bâillonner."
Le prêtre acquiesça. Wilmarin se tourna vers Taliesin.
" Entrons, si vous le voulez."

Il acquiesça et se mit en marche.
Il croisait mentalement les doigts pour qu'ils ne découvrent pas un amoncellement de cadavres sans vie, pour que les captives aient pu se réfugier quelque part, à l'abri, ce qui contribuerait à expliquer l'absence de cri.
Car si elles étaient mortes..
Mieux valait ne pas y penser.
-Restons sur nos gardes : les cultistes ont dit que trois des leurs étaient à l'intérieur. Ils semblaient penser qu'ils avaient déjà trouvé la mort mais... On ne sait jamais.

" Les prêtres sont entrés par l'extérieur, comme nous l'avions planifié, dit Wilmarin. Je craignais que les cultistes ne viennent à la rescousse des gardiens, mais en boutant le feu au bâtiment, ils ont privé les leurs de renforts bien utiles."
Il entra derrière Taliesin. Il faisait encore extrêmement chaud mais l'ermite les gratifia d'une brise fraîche pour les en protéger. La première pièce avait intégralement brûlé et on ne distinguait que les restes de quelques meubles calcinés. Aucun corps en vue.
" Ils ont voulu nous empêcher de les sauver sans penser que c'était peut-être déjà fait."
La seconde pièce n'avait pas brûlé mais elle était emplie d'une fumée nauséabonde. Il n'y avait pas davantage de corps.
" Avec un peu de chance, le comportement rustre et incompréhensible des cultistes aura aidé à convaincre les femmes de fuir avec les autres prêtres."

Le vieux sage avait dû recevoir des nouvelles de l'autre groupe, ce qui n'était pas son cas : il s'était donc inquiété pour rien. Mais mieux valait cela que de voir ses craintes confirmées...
-Je l'espère, répondit-il.
S'il était confirmé que les prisonnières s'en étaient tirées, l'affaire serait presque réglée.
Presque, car elle ne le serait véritablement que lorsqu'il n'y aurait plus de cultiste libre... ou en vie.
-Et Rodolphe ? osa-t-il finalement demander.

" Nous l'avons laissé aux portes. Il a voulu rattraper ses errements et... ce n'était pas une bonne idée."
Il haussa les sourcils.
" Mais le prêtre l'a soigné. J'ai juste peur qu'il ne lui reste plus d'énergie curative quand nous en aurons vraiment besoin. Jusqu'ici, nous n'avons croisé que des... freluquets."
Ils entrèrent dans une troisième pièce, intacte elle aussi, où gisait le corps d'un cultiste. Un escalier partait vers les hauteurs, un couloir s'ouvrait sur la gauche. Il sembla à Taliesin qu'il entendait quelqu'un marcher au-dessus d'eux, mais c'était peut-être juste les craquements de la charpente malmenée.

Le pas au-dessus d'eux se fit moins discret, plus erratique. Wilmarin le suivait du regard, comme s'il pouvait voir à travers les planches. La structure du bâtiment était fragilisée cependant et la personne qui déambulait poussa un cri de surprise quand une planche céda sous son poids. Les deux elfes eurent le temps de voir apparaître le talon d'une botte. Mais ce ne fut pas dans la chaussure qu'ils identifièrent le maraudeur : le cri avait été indubitablement féminin.
" Il est probable que toutes les femmes ne se soient pas laissées convaincre. Certaines doivent croire en ces mensonges depuis des décennies." murmura Wilmarin.
Les pas avaient repris leur progression en direction des escaliers.

-Si les prêtres n'ont pas réussi à leur ouvrir les yeux, je doute que nous ayons les moyens d'y parvenir. Mais peut-être n'y a-t-il plus urgence en la matière, dans la mesure où nous avons éliminé la plupart des cultistes et où nous nous apprêtons à faire de même avec ceux qui restent...
Expression pensive.
-Mais sans doute vaudrait-il mieux prévenir Maric : les plus fanatisées pourraient être tentées de l'attaquer ou de libérer nos prisonniers.

" Je pense que c'est nous qui devrions nous en inquiéter les premiers." remarqua le sage, sans paraître particulièrement troublé.
Il désigna l'escalier du menton et Taliesin vit une une ombre s'y dessiner puis dévaler les dernières marches à toute vitesse. Une femme d'un certain âge, échevelée, un grand couteau de cuisine à la main, surgit brusquement de la pénombre et se rua sur le barde en vociférant.
" Sacrilège ! Vermine !"
Son couteau luisait d'une lueur qui indiquait qu'il était probablement enchanté... Ces femmes étaient, après tout, des prêtresses elles aussi...

Elle se débattit comme une diablesse, gratifiant Taliesin de coups de pied, tentant de le griffer et de le mordre, tout en l'agonissant d'injures imagées, mais il eut aisément le dessus. Elle était épuisée, en réalité, passablement déboussolée, et n'avait aucune compétence en lutte... Le barde s'en sortit donc avec une estafilade sur la joue, une déchirure dans sa cape et un bleu sur le tibia gauche.
Wilmarin observa la scène sans broncher.
" Voulez-vous aller vérifier que tout est en ordre de l'autre côté de l'enceinte ou pouvons-nous retourner vers l'intérieur ? Je crains que notre ennemi ne profite du répit pour renflouer les rangs de ses alliés... à l'aide d'un portail ou l'autre."

-Ah, hum...
Il se frotta le menton, songeur.
-Vu sous cet angle, je me dis qu'il vaut mieux faire confiance à nous compagnons et aller nous occuper du gros morceau sans plus tarder.
Wilmarin était puissant et lui-même renforcé par une bonne dose de magie élémentaire mais si un portail menant vers un autre plan était subitement grand ouvert, pas sûr qu'ils fassent le poids...

Wilmarin lui adressa un sourire tranquille, puis ils regagnèrent l'extérieur où se trouvait Maric. Il avait manifestement réussi à sauver trois de leurs adversaires qui gisaient désormais dans la poussière, attachés. L'elfe ne fit aucun commentaire mais à son expression, Taliesin devina qu'il estimait sans doute que c'était du gâchis.
" Nous allons les laisser à la garde du soldat. Je pense qu'il sera capable de s'en acquitter. Quant à nous, notre adversaire nous attend dans l'abbaye, probablement au coeur de son temple maudit.
— Devons-nous vraiment l'affronter ? demanda Maric. Nous pourrions faire effondrer le bâtiment sur sa tête."

-Il n'est pas dit que cela suffise à l'éliminer : il pourrait simplement et temporairement se retrouver bloqué. Bien sûr, il pourrait également trépasser durant l'effondrement, mais... Nous n'en aurions pas la certitude.
Le barde soupira.
-Par conséquent, même si cette perspective ne m'enchante guère, je pense qu'il est préférable d'aller le terrasser nous-mêmes. Une fois le mal définitivement éliminé, la Vallée fertile pourra repartir sur de bonnes bases.

" Notre ami a raison, renchérit le mage elfe. D'autant que nous ne savons pas exactement qui se trouve encore à l'intérieur... Une poignée d'êtres veules, certainement, mais je gage que si vous parvenez à sauver la princesse elfe, Maric, les elfes de la Lorien pourraient considérer les manquements des humains en ces lieux avec davantage d'indulgence."
Le vieux prêtre grimaça puis acquiesça.
" Va pour l'attaque frontale." dit-il en rebroussant chemin vers les portes qu'ils avaient franchies plus tôt.

Rodolphe les attendait près des portes, qui avaient sauté de leurs gonds et gisaient, en esquilles de bois gigantesques, en travers du chemin. Il s'était assis et se redressa, un peu pâle, lorsqu'ils approchèrent.
" Rien n'est sorti du bâtiment." annonça-t-il.
Wilmarin se contenta d'acquiescer sans rien dire et retourna dans la cour de l'abbaye. Le sol était éventré, retourné comme par un soc géant, mais il n'y avait plus trace de ce qui avait pu faire un tel carnage.

[color=#FFFFF66]-Bigre, il a dû y avoir un sacré spectacle, ici. Un spectacle que je ne suis pas fâché d'avoir manqué.[/color]
Il sourit à l'officier.
-Sinon, nous avons des prisonniers à vous remettre : trois cultistes et une femme fanatisée. Peut-être en reste-t-il plusieurs du même acabit dans les parages, si bien qu'il faudra ouvrir l’œil. Mais la plupart des prisonnières ont été sauvées par l'autre groupe, ce qui est une excellente nouvelle.

Rodolphe acquiesça, l'air incertain, mais Maric vint en renforts de Taliesin. Wilmarin était déjà au milieu de l'esplanade, lorgnant le ciel comme s'il y cherchait quelque chose.
" Je pense que j'ai fait de bons noeuds, dit le prêtre. Vous voudrez peut-être les contrôler... mais deux des trois cultistes sont encore dans les limbes... Je n'ai pas voulu épuiser toute mon énergie curative.
— Ils ne vont pas mourir ?
— Non, non, ne vous en faites pas. De toute façon, je pense que les prêtres du cercle extérieur devraient venir vous renforcer. Je vais les prévenir que l'enceinte des femmes est à nous."

-Et bientôt, toute l'abbaye le sera. Ne nous reste plus qu'à aller affronter celui qui a perverti la communauté. Avec le magie de la source, où nous avons réussi à puiser grâce à votre protection, Rodolphe, nous avons de bonnes chances d'en triompher. Et ensuite... Un nouveau jour se lèvera.
Il lui tapa cordialement sur l'épaule.
-J'espère bien vider une chope en votre compagnie, quand nous en serons là.

Le soldat parut tout à fait pris au dépourvu par la déclaration du barde et acquiesça lentement.
" Mais la bière venait de l'abbaye..." murmura-t-il.
Maric sourit.
" Du bon côté de l'abbaye. Et nous en avons encore des stocks. Simplement, ils ne serviront plus à enrichir ceux-ci."
Son expression se fit plus sévère.
" Hâtons-nous. Maître Wilmarin nous attend."
L'elfe paraissait en effet sur le point d'entrer sans eux...