La Couronne de Cuivre

Mathieu ouvrit la bouche, la referma, la rouvrit encore, puis secoua la tête et eut un léger sourire, se pencha sur son assiette, releva les yeux, la dévisagea avec une moue amusée, puis poussa un bref soupir.
" Vous devriez vivre dans l'instant présent, et aussi dans le futur. C'est l'esprit d'Hélonna. Ce qui est arrivé hier est arrivé hier, et nous n'y changerons rien, vous et moi. Vous morigéner parce que vous auriez dû... vous auriez pu... ou ne pas, justement... C'est douloureux et inutile."
Il posa le menton dans ses paumes.
" Vous êtes de Dorrandin, m'avez-vous dit. De Manost ? C'est pour ça que vous souffrez tant d'enfreindre les règles, même quand elles sont mauvaises ?"

Astrée secoua la tête.
" Non, je ne suis pas de Manost. Je suis d'un village sur la côte, plutôt sous influence mélandienne... influence que j'ai rejetée de toute mon âme. Bref, je n'ai aucune excuse de ce genre."
Elle soupira.
" Je n'aime pas mentir, c'est tout. Je sais mal jouer la comédie, je suis franche de nature. Et ce n'est pas une question de respecter à tout prix des règles... mais ce sont des règles qui ont sûrement une raison valable d'être, du point de vue des elfes. Il me semble que les respecter, c'est respecter nos hôtes. Après, n'étant pas elfe, je ne sais pas l'importance qu'elles ont réellement, ni si c'est grave, pour eux, de les enfreindre. En particulier, j'aurais voulu comprendre pourquoi ils interdisent l'accès aux hommes, et l'importance que cette règle peut avoir aux yeux des elfes, avant de décider de ne pas la suivre."

" Vous n'avez toujours pas compris, avec toutes leurs allusions ? demanda Mathieu, interloqué. C'est parce que les mâles humains sont des violeurs, évidemment, incapables de gérer leurs pulsions et leurs désirs, des prédateurs en puissance qui mettent les femmes elfes en danger. C'est sans doute ce qui s'est produit à l'époque de la guerre, et à présent, nous sommes tous dans le même sac. Sans doute n'est-ce pas seulement lié à une probable violence sexuelle... sans doute est-ce lié au rôle plus général des hommes dans les massacres et les destructions qu'ont connus ces lieux, alors que les femmes humaines de l'époque se contentaient de nourrir et de vêtir leurs soldats de maris."

Astrée haussa les épaules.
" Sans doute est-ce ça, oui. Seulement une réminiscence de ce passé violent. Même si après toutes ces années... leurs a-priori auraient pu évoluer."
Elle aurait voulu savoir si les hommes étaient véritablement considérés comme tel, encore maintenant, si leur simple présence était quasiment un crime, ou si c'était juste une précaution liée à l'histoire mais à laquelle on n'accordait plus tant de valeur. Et cela, seul un elfe aurait pu le lui dire.... et peut-être y avait-il autant de réponses que d'elfes.
" Et donc, puisque vous ne vous considérez pas comme un violeur en puissance ni un meurtrier d'elfe, vous jugez que cette règle ne doit pas s'appliquer à vous. Ce qui peut se comprendre... de votre point de vue à vous. Sans doute pas de celui du capitaine. Remarquez, même la présence de femmes lui pèse."
Elle haussa les épaules.
" Enfin, de toute façon, ce qui est fait est fait."

" Effectivement, je trouve leur attitude... raciste... et sexiste. Et je décide donc de ne pas m'y conformer. Vous auriez pu être refoulée des rives d'Hélonna pour exactement la même raison : vous êtes mélandienne. Pourtant, vous avez eu le bénéfice du doute, parce que c'est ce que font les gens, sur cette île, en théorie."
Il enfourna une bouchée de poisson et sourit.
" Mais puisque vous venez de là-bas, de Mélandis... ou d'une région sous influence mélandienne... Vous avez dû en voir... en vivre... des lois pourries. Et vous les respectiez, alors ? Au nom de la précieuse culture mélandienne ?"

Astrée grimaça
" J'étais jeune. Je me contentais de survivre sans m'attirer d'ennuis, tout en essayant de ne pas trahir mes propres convictions. Comme beaucoup de gens, sans doute... Quand les puissants sont maléfiques et cruels, c'est un peu la seule solution qui restent à ceux qui ne veulent pas l'être. Essayer de suivre sa propre voie de façon discrète. C'est sans doute plus facile quand on vit loin de la capitale. Puis une fois adulte, ou presque, j'ai quitté le secteur. Et je n'apprécie pas la culture mélandienne, vous vous en doutez, sinon je ne serais pas ici. Après... il s'agit de liberté de conscience, en fait. Je respecte le droit de chaque population à avoir ses convictions, donc ses lois, dans la limite où ils ne les imposent pas à tous, et n'oppriment pas d'autre peuples. C'est rarement le cas des puissances maléfiques. Heureusement, les mélandiens sont souvent trop occupés par leurs rivalités internes pour représenter un grand danger."
Elle haussa les épaules.
" Mais en l'occurrence, cette loi qui semble raciste et sexiste, elle est liée à un passé récent et douloureux. Ça va évoluer, au fil du temps. Il est juste trop tôt. Le seul souci, il me semble, c'est qu'en agissant comme vous le faites, si vous êtes découvert, cela renforce l'image des humains menteurs, tricheurs, pas fiables. On a déjà suffisamment mauvaise réputation... j'ai donc tendance à vouloir être irréprochable sur ce plan-là pour compenser. D'autant que la situation pourrait devenir tendue avec la route barrée, et l'intolérance monter."

" Les Mélandiens n'imposent pas leur loi hors de leurs frontières... et n'oppressent pas d'autres peuples... Leur culture nous apparait malfaisante, mais ils y voient leur propre mode de vie, leur propre mode de pensée, et estiment le nôtre risible, faible et détestable." dit Mathieu.
Il croisa les bras.
" Vous parlez de dangerosité, mais les guerres mélando-luméniennes n'ont pas cinquante ans. Morféa Nwalk était mélandien. Et il y a quelques années, nous étions en guerre contre eux, sur Dorrandin, pour le compte des Manostiens. Des milliers de gens sont morts, des dizaines de milliers, même. Ne s'agit-il pas, là aussi, d'un passé récent et douloureux ?"
Il secoua la tête.
" Les humains sont ce qu'ils sont. Ils ne seront jamais à la hauteur de ce que veulent les elfes. Et il y aura toujours des hommes guidés par leur entrejambe qui tenteront de séduire la petite elfe au coin du bois. Et d'autres qui n'y songeraient même pas."

" Sans doute. J'espère pour vous que vous faites partie de la seconde catégorie."
Elle sourit pour adoucir ses paroles. Elle ne croyait pas sérieusement qu'il puisse en être autrement. Enfin, elle l'espérait.
" Je pense qu'on ne peut pas comparer une guerre entre humains à une guerre entre différentes races. Les méfiances, les incompréhensions, les haines sont plus profondes dans le second cas. Et effectivement, on ne sera jamais à la hauteur de ce que veulent les elfes... mais on peut essayer de s'en approcher."
Elle ne voulait pas avoir un comportement reflétant justement les défauts caricaturaux de leur race. Mais elle n'insista pas davantage, et se contenta d'enfourner une bouchée de plus. Mathieu, de toute façon, voudrait toujours avoir le dernier mot. Elle pouvait bien le lui laisser, juste pour maintenir la paix entre eux.

Astrée ne se trompait pas sur le compte de son interlocuteur.
" Je pense qu'il y a plus de différences entre..."
Il ne termina pas car un brusque coup retentit sur la coque, juste à côté de lui et il sursauta dans un cri. Ensuite, il rit.
" Les dieux elfes m'incitent à la fermer, alors je m'incline. Mais merci pour le poisson, vraiment."
Et il reprit son repas.

Astrée avait sursauté également. Mais contrairement à Mathieu, elle ne put pas en rire immédiatement. Elle s'inquiéta plutôt de ce qui pouvait bien avoir provoqué un tel choc. Mais après tout, ça n'était pas forcément inquiétant : un objet à la dérive, probablement...

Elle se remit à manger à son tour, en silence. Il était appréciable de pouvoir avoir une conversation apaisée avec Mathieu, mais ce n'était pas de tout repos. Bon, il fallait simplement accepter qu'il était impossible de le convaincre de quoi que ce soit. Mais il avait parfaitement le droit d'avoir ses opinions, après tout.

" Je peux vous poser une question... peut-être indiscrète?", questionna-t-elle au bout de quelques minutes.

Il leva les yeux.
" Ça dépend à quel point, dit-il. Si vous me laissez le droit de ne pas y répondre, bien sûr, allez-y !"
Il déposa ses couverts et lui sourit, sans animosité.

Astrée sourit. Mais elle dut chercher ses mots tant la question qu'elle avait en tête était, en réalité, floue et indéterminée.
" Oh, ce n'est pas forcément si indiscret que ça, je n'en sais rien. Je songeais juste.... à votre réaction, l'autre jour, au mémorial. Je me demandais.... Peut-être que cela a réveillé une blessure récente.... pour que vous soyez sensible à ce point aux souffrances de la guerre."

" Ah... non. Je ne sais pas. C'était... les lieux en eux-mêmes. Ça a touché quelque chose, indéniablement. Comme je vous l'ai dit, c'est la première fois que je viens par ici. Je me suis renseigné avant de partir, parce que je voulais savoir ce qu'il en était. On m'avait prévenu que les émotions étaient encore vives chez les elfes, mais c'était resté très... abstrait, je suppose. Les elfes que je connais n'en parlent jamais... mais ils ne sont pas de la région, je pense, je ne leur ai jamais posé la question. Alors ce champ de bataille... Je ne sais pas. Je n'ai pas fait la guerre. La dernière, je veux dire. Et je n'étais pas né pour la précédente... Bien sûr, vu la situation de mon village, nous avons connu des raids à l'époque, mais ce sont des histoires que racontent les vieux autour du feu... Ça reste... quelque chose qui est arrivé aux autres."
Il eut un sourire contraint, puis qui s'élargit.
" J'ai été touché et puis voilà, j'arrive ici, et malgré tout ça, je refuse de me plier à leurs foutues émotions vives !"

" C'est... un peu contradictoire... en ressentant si fortement ces émotions... que vous cherchiez à les ignorer tout de même."
Astrée haussa les épaules.
" Mais peu importe, vous faites bien comme vous le sentez. C'est juste rare d'être touché aussi fortement par des images, des statues. En fait.... vous êtes quelqu'un de très sensible."
Elle eut un sourire, un brin taquin, mais sans méchanceté.

" Non, je ne crois pas qu'on puisse dire ça." dit-il, songeur.
Puis il haussa les épaules.
" Je pense que je respecte leur souffrance. Mais chacun a ses souffrances. C'est normal de se garder... mais c'est aussi... dommage. Ce n'est pas le bon mot. Je ne dis pas que je ne comprends pas, mais au final, en me travestissant de la sorte, je ne les blesse en rien."
Il y eut un nouveau choc contre la coque, plus éloigné.

" Sans doute. Tant qu'ils ne savent rien."
Elle devait mentir pour protéger son mensonge à lui, pour éviter que les elfes n'en soient blessés... C'était un peu paradoxal. Mais de toute façon, c'était trop tard pour revenir en arrière.
Et quoiqu'il en dise... il devait être particulièrement sensible. Aux émotions du mémorial, comme aux émotions des autres. Ce qui expliquait qu'il devine si bien son ressentiment et son agacement.
Elle n'avait rien à ajouter, et se contenta donc de finir son assiette en silence, tout en se demandant vaguement où ils se trouvaient. Sans doute à proximité d'un village elfe.

Mathieu ne reprit pas davantage la parole et ils terminèrent leur repas sans piper mot. Après quelques minutes d'un silence relatif, troublé par le bruit des couverts sur les assiettes, ils entendirent à nouveau un coup frappé sur la coque. Ou plutôt trois de suite, comme si quelqu'un frappait à la porte pour demander d'entrer, cette fois sur le flanc opposé de la barge, à hauteur de la coquerie, indéniablement sous l'eau.

Astrée observa la paroi de bois avec une grimace.
" Hum.... Ça, c'est peut-être la guenaude, fit-elle. Je ne vois que ça..."
Il n'y avait pas là de quoi s'inquiéter. La créature ne pouvait pas entrer dans la barge. Elle n'allait tout de même pas traverser la coque. Enfin... il fallait espérer qu'elle ne le puisse pas.
" Ou alors c'est un pur hasard qui fait cogner des objets," termina-t-elle avec un haussement d'épaules.

" La guenaude... ? Qu'est-ce que c'est, une guenaude ?"
Comme pour marquer le coup, il y eut deux nouveaux coups frappés sur la coque... sous leurs pieds.
" Ça va rythmer la soirée, ça c'est sûr."

" La guenaude, c'est la créature qui m'a piégée tout à l'heure, qui a failli me faire tomber à l'eau pour me noyer... ce qui fait que je dois la vie à l'intervention des elfes. C'est ce qui vous a réveillé d'ailleurs, je crois."
Elle fouilla dans sa mémoire pour retrouver le nom que Mathieu avait prononcé tout à l'heure... Nremyn.
" Apparemment, c'est un genre de créature magique qui aime la chair humaine. Mais ça n'est pas forcément elle. Nremyn disait qu'il y en avait d'autres."

" Ah. Je me demandais bien ce qui vous avait décidée à aller piquer une tête dans la rivière."
Il eut un léger sourire, assorti d'une grimace.
" Donc il y a une sorte de monstre dans la flotte qui va jouer avec nos nerfs... Formidable. J'irais bien lui asséner un coup de rame sur la tête."
Une dizaine de petits coups, frappés en rythme, suivirent cette déclaration.
" Ne me faites pas la morale, je vais rester bien sagement sous le pont. Et ce n'est pas ce genre de choses qui va m'empêcher de dormir."

" Ça, c'est pas sûr. Ça a l'air bruyant, ce genre de chose. Mais peut-être qu'elle finira par dormir, elle aussi... Ou par comprendre qu'on est inaccessibles. Même si apparemment, c'est une créature tenace."
Quoiqu'il arrive, quoi qu'il se passe, elle n'irait pas sur le pont. Certes, si vraiment il y avait quelque chose d'anormal... Bah, elle enverrait Prince en reconnaissance.

S'ensuivit une série de petits coups frappés, tantôt juste sous leurs pieds, tantôt sur les côtés de la coque, parfois très rapides, parfois plus forts, parfois plus doux. Ils finirent par s'éloigner et ils les entendirent résonner tout le long de la coque, puis revenir, comme les pas sonores de quelqu'un qui aurait tapé des talons en circulant sur un plancher. Revenus à leur niveau, les coups s'arrêtèrent un moment juste sous la chaise de Mathieu, puis allèrent sous Astrée et y demeurèrent plus longtemps.
" Elle vous a à la bonne, remarqua Mathieu avec un sourire. C'est pas évident, je suppose, de gérer sa frustration, quand on est un monstre de la rivière."
Il se permit de donner trois petits coups de pied sur le sol, auquel répondirent trois coups frappés plus fort.
" Percussions sylvestres. C'est fête ce soir !"

Astrée sourit, amusée. A demi seulement : se savoir la cible prioritaire de la créature n'était pas forcément très gai. Elle devait avoir reconnu sa voix. Ou préférer la chair féminine.
" J'espère qu'elle a le sens de l'humour... et qu'elle ne va pas se vexer davantage. "
Ils ne risquaient rien.
Du moins tant que la créature n'avait pas l'idée de détacher la barge, songea-t-elle subitement. Une idée qu'elle se garda bien de formuler à voix haute : la créature avait l'ouïe fine.
Un peu inquiète tout de même, elle tenta d'écouter le bruit de l'eau pour savoir s'il s'était modifié.

Mais le bruit de l'eau n'avait pas changé et hormis un léger tangage, la barge semblait parfaitement immobile. Les coups frappés sur la coque se répétèrent, traçant un chemin de bruits secs sous leurs pieds puis sur les parois de bois.
" Vous êtes sûre que vous ne voulez pas aller prendre un bain de minuit ? Non ? Bon. Tant pis, alors. Vous voulez jouer aux cartes ? Sinon, j'ai de la cire et du coton pour les oreilles. Très efficace."

" Peut-être... Pour la cire et le coton. Mais je ne sais pas si je vais les utiliser, ou alors très tard dans la nuit. J'aime bien entendre ce qui se passe. Déjà qu'on ne voit rien..."
Elle haussa les épaules.
" Et les cartes, j'ai dû jouer deux ou trois fois il y a une éternité, donc je ne serai certainement pas une adversaire intéressante.
Elle caressa l'idée d'envoyer Prince au-dehors. Mais c'était absurde : le phénomène se passait sous l'eau. Puis il ferait bientôt nuit... si ce n'était déjà le cas.

" Vous devez faire confiance à la magie des elfes. Ce n'est sûrement pas la première... guenaude qu'ils croisent... Cela dit, je compte sur vous pour me réveiller en cas d'urgence."
Il sourit. Une série de coups vint retentir sur le haut des murs, puis s'éloigna à nouveau. Astrée crut entendre les bribes d'une chanson, puis plus rien.
" Allez, je fais la vaisselle, vous l'avez bien mérité."
Il se leva et rassembla leurs assiettes vides puis se dirigea vers le bassin appuyé à la paroi. Des coups frappés dans le bois le suivirent, mais il n'y prêta guère attention.

" Merci. Bonne vaisselle."
Il avait raison, il ne fallait sans doute pas s'inquiéter : si les elfes laissaient la barge sans surveillance, c'était qu'ils ne risquaient rien.
Astrée le laissa à sa vaisselle. Gaëlin avait parlé d'une salle d'eau vers l'avant du bateau, et elle comptait la trouver.
Puis il ne lui resterait qu'à s'installer dans son hamac pour la nuit, en espérant que la guenaude se lasse une fois que la barge serait plongée dans le silence.

La salle d'eau n'était en fait qu'un endroit où se soulager. Les coups frappés sur la coque la suivirent jusque là et dansèrent tout autour d'elle tandis qu'elle y demeurait. Gaelin avait parlé du lendemain pour se laver... et Astrée devrait donc s'en contenter.
Dans la coquerie, Mathieu avait à nouveau étalé ses papiers sur sa demi-table et paraissait concentré. Il ne restait plus à la jeune femme qu'à aller se coucher... et tenter de s'endormir malgré le tintamarre.

Au pire, il y avait de l'eau dans la coquerie, et elle avait un bout de savon dans son sac : faire un petit brin de toilette au petit jour était envisageable, si elle en ressentait le besoin. Sinon elle attendrait l'endroit dont avait parlé Gaelin... même s'il était hors de question qu'elle se lave avec Mathieu dans les parages. Mais elle verrait bien comment les choses se présentaient.

Laissant Mathieu à son travail, elle prit sa couverture dans son sac, ôta bottes et chausses et se glissa dans son hamac. La nuit dernière avait été courte, et elle finirait bien par s'endormir, malgré le bruit.

Elle se surprit, à nouveau, à se demander comment elle pourrait gagner le droit de rester sur la barge au-delà d'Anarion. Nul doute que Mathieu se posait la même question. Elle aurait préféré pouvoir rester à bord sans lui, mais il était certainement plus habile à se faire accepter : s'il y avait la moindre possibilité, il l'exploiterait plus efficacement qu'elle. Et elle aurait bien de la chance s'il y avait de la place pour deux.
Elle finit par soupirer : ces interrogations étaient vaines. Il faudrait un sacré coup de pouce de Tymora pour qu'une occasion se présente. La fin du voyage serait certainement par la route.
Mieux valait tenter de dormir.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] La Traversée de la Lorien