La Couronne de Cuivre

Elzen était proprement épuisé, et s'il était parvenu à creuser presque jusqu'au bout, il n'aurait pas su dire où il en avait trouvé l'énergie. Il s'était éloigné lorsqu'elle avait glissé le corps en terre, la laissant se recueillir, et en profitant pour rassembler quelques forces. Il était ensuite venu aider de quelques pelletés de terres à recouvrir le corps, mais n'avait pas eu la force de continuer jusqu'au bout. Aussi était-il revenu vers la maison quelques instants avant la manostienne. S'était approché de Chance, et s'était assis auprès d'elle, sans un mot, son regard se perdant quelque peu dans les flammes.

Les lèvres de la tieffeline étaient encore anormalement pâles et pourtant cette dernière semblait aller mieux, ou alors faisait-elle preuve d'une maîtrise d'elle-même insoupçonnée jusque là. Le ballet des flammes avait l'air de la captiver ; c'était, semblait-il, une distraction suffisante pour lui faire oublier tout ce qui ce passait autour d'elle. Ses tremblements avaient fini par s'espacer puis par devenir de simples spasmes épisodiques, et seuls ses mains crispées sur ses genoux trahissaient l'effort que cela lui demandait. Elle s'arracha à la contemplation de l'âtre pour adresser un sourire compatissant au tieffelin fourbu venu la rejoindre, puis son attention se dirigea vers la porte, cherchant la manostienne des yeux.

La manostienne ne revint pas. Chance entendit les bribes d'un chant ou peut-être d'une prière dans le noir. Autour d'eux, la famille se taisait, chacun montrant des signes de fatigue. La mère alla mettre le plus petit au lit. Lorsqu'elle revint, les plus jeunes allèrent se coucher d'eux-mêmes. Ne restèrent qu'elle et l'adolescent le plus âgé. Elle se tourna vers ses deux invités.

"Je crois qu'elle ne pourra pas rester ici. Nous ne sommes pas en sécurité à cause d'elle. Si Mélandis apprend que nous l'avons hébergée, nous risquons d'avoir des problèmes."

Elle n'avait pas besoin de l'apprendre, mais héberger un déserteur n'était sans doute pas mieux. Ni une cambrioleuse dont, lui semblait-il se souvenir, la tête avait été mise à prix en ville. Peut-être était-ce d'ailleurs là la raison pour laquelle elle avait fini par quitter la ville ? Bah, qu'importe, à présent.

« C'est manifestement une combattante aguerrie, ce qu'aucun de vous ne semble être. Si quelqu'un s'intéresse à vous pour cela, vous n'aurez sans doute aucune difficulté à prétendre qu'elle vous a contraint. »

Un mensonge pouvait parfois sauver des vies… en tout cas, puisque le sujet était abordé…

« En ce qui nous concerne, je pense que nous ne vous dérangerons pas tellement plus longtemps. Mais, bien sûr, cela dépendra de l'état de santé de Chance. »

Dans un sens ou dans l'autre. La demoiselle n'avait sans doute pas envie de partager sa crise de manque avec beaucoup d'autres gens.

Si ça ne tenait qu'à elle, elle serait déjà partie. D'ailleurs, qu'est-ce qui la retenait ici ? Elle avait suffisamment dormi, suffisamment mangé, et elle n'avait pas peur du noir -enfin pas qu'elle sache. Mais un coup d'oeil à Elzen la dissuada : il n'avait sûrement pas dormi autant qu'elle et avait l'air d'en avoir drôlement besoin.

- Nous partons demain matin.

Avant que ça empire...

Elle n'avait plus qu'une envie : s'isoler.

La dame hocha la tête. Elle n'avait l'air ni triste ni heureuse, ni même soulagée. Peut-être avait-elle l'habitude d'accueillir les gens de passage. Son regard se porta au dehors, sur la nuit environnante.

"Peut-être pourriez-vous l'emmener avec vous. Je ne préfère pas qu'elle reste ici. La guerre n'a pas à venir s'installer chez nous."

« Je… ne sais pas si elle le souhaitera. »

Lui-même préférerait bien sûr largement se trouver seul avec sa compagne ; et il y avait de fortes chances que ce soit le cas de celle-ci également. Néanmoins, s'ils partaient en même temps, prendre volontairement des directions opposées ne serait pas forcément le meilleur choix.

Pour l'heure, Elzen passa un bras réconfortant sur l'épaule de Chance : malgré les efforts qu'elle faisait pour le cacher, il sentait que son état était préoccupant ; et voulait lui signifier qu'il était là, comme promis. Le sentiment qui l'habitait dans l'instant présent, aidé par la fatigue, était essentiellement celui d'une cruelle et terrible impuissance…

Chance également éprouvait des réticences à voyager avec la manostienne, elle n'était pas sûre d'arriver à se débarrasser de l'image de sa sœur, le crâne défoncé et suintant le sang, lorsqu'elle poserait les yeux sur elle ; cette femme était maintenant associée à de mauvaises choses, comme la guerre et la mort, choses auxquelles la tieffeline ne souhaitait pas être confrontée. C'était un tout autre genre d'images, autrement plus agréables, qui lui trottaient dans la tête lorsqu'elle regardait Elzen, et c'est d'ailleurs ce qu'elle fit lorsqu'il passa un bras autour d'elle. Son contact l'électrisait toujours autant, sans qu'elle puisse expliquer pourquoi.

- Je veux bien lui laisser mon lit, en tout cas. D'ailleurs ce n'est même pas le mien...

Elle lui laisserait, oui, mais à regret. La chambre dans laquelle elle avait dormi des jours durant lui semblait être le dernier refuge contre la guerre, les crises de manque, et tout le reste en fait. Ce n'était qu'une illusion bien sûr, mais une illusion plus que bienvenue en ce moment.

"Ne vous en faites pas, je repartirai demain, dans tous les cas."

Il était difficile de dire depuis combien de temps elle était là, et ce qu'elle avait saisi de la conversation. Elle se tourna vers Chance.

"Je vous laisse le lit. De toute façon, je n'arriverai pas à dormir."

Chance non plus n'arriverait pas à dormir, elle en était convaincue, mais elle était soulagée de passer sa dernière nuit dans cette petite pièce qu'elle connaissait maintenant par coeur.

- Comme vous voulez. Excusez-moi mais... je tombe de fatigue. Quel mensonge éhonté. Et une longue route nous attend demain, enfin j'imagine, alors...

Elle se leva rapidement, peut-être un peu trop, et leur adressa un bref signe de tête.

- Bonne nuit !

Bonne nuit ? Elle avait vraiment dit ça ? Elle doutait que qui que ce soit ici passe une bonne nuit, et surtout pas cette femme qui venait d'enterrer sa sœur, là, dans le jardin. Elle maudit son manque de tact et s'enfuit courageusement à l'étage, sans même prendre la peine d'attendre Elzen.

Le tieffelin se leva à son tour. Mais il ne bougea pas. Il avait promis de rejoindre sa belle pour la nuit ; mais le faire ainsi aurait peut-être été quelque peu… inconvenant.

« Vous devriez tâcher de dormir tout de même. Avoir recouvré vos forces sera sans doute préférable. »

En tout cas, lui-même semblait en avoir particulièrement besoin.

La manostienne eut un sourire amer.

"Il y a un fossé entre devoir et pouvoir ... Et encore plus avec vouloir. Sans cela, je ne serais pas ici et ma soeur serait encore en vie. Mais je vous remercie."

Elle alla s'assoir sur une chaise non loin du feu.

Inutile d'en dire plus, sans doute. Après un bref salut, le tieffelin rassembla ses forces pour remonter l'escalier et venir frapper doucement à la porte de la chambre de sa belle. Dormait-elle ? Il attendit un instant avant d'ouvrir la porte, pour lui laisser l'occasion d'ouvrir elle-même si elle le pouvait et le souhaitait.

HRP : si personne ne me retient à l'extérieur et que Chance n'ouvre pas la porte, j'éditerai pour entrer dans la pièce.

Chance ne dormait pas, elle n'avait d'ailleurs jamais paru aussi en forme -ou active plutôt- depuis son réveil, là, au milieu de la chambre, à faire les cent pas. Elle arrêta brièvement son manège lorsqu'Elzen entra dans la pièce puis reprit comme si de rien n'était.

- Ça me détend, se justifia t-elle. Je crois que tu vas être obligé de m'assommer pour que je me tienne tranquille cette nuit. Je n'arriverai pas à dormir. Mais je vais bien.

Il n'avait pas cessé de darder sur elle un regard inquiet lorsqu'ils étaient en bas. Quelle idée aussi, de me mettre à perdre pied comme ça, d'un seul coup. Convaincre Elzen que tout allait bien, c'était se convaincre elle-même.

- Tu devrais dormir, tu as l'air sur le point de t'effondrer...

Oui, voilà, transférer l'attention et l'inquiétude sur lui et non plus sur elle, avec un peu de chance il ne remarquerait pas la manœuvre...

« Eh bien, comme ça, si on part vraiment avec elle, vous serez deux à tomber de sommeil quand moi je serai en pleine forme… »

Pour sa part, il se laissa effectivement tomber sur le lit. Dans l'état dans lequel il se sentait, tant qu'elle n'avait pas spécialement besoin de lui, qu'elle soit agitée ne l'empêcherait sans doute pas de dormir. Néanmoins, cela ne l'empêchait évidemment pas de se faire du soucis pour elle ; mais la fatigue augmentait considérablement son sentiment d'impuissance. Décidément, quel beau couple ils formaient, pour l'instant…

Mais il y avait quelque chose qui pourrait peut-être leur faire du bien à tous les deux. Ouvrant les bras, Elzen adressa à Chance un sourire pathétique, avant de demander d'une petite voix :

« Je peux avoir un câlin ? »

- Un câlin ?

Prise au dépourvu, elle stoppa net. Et il était sérieux, en plus. L'idée n'était pas mauvaise en soi, seulement les circonstances étaient... ce qu'elles étaient. Chance ne lui en aurait même pas voulu s'il avait préféré passer la nuit ailleurs que dans la même pièce qu'elle, étant donné l'état dans lequel elle se trouvait présentement. Et maintenant il lui demandait un câlin ? Elle l'observa sans un mot un moment avant de déclarer :

- Oui, tu peux avoir un câlin...

Doucement, elle se glissa à ses côtés et se blottit contre lui, la tête contre son épaule. Elle avait l'air d'avoir arrêté de respirer pendant quelques instants, puis sa respiration reprit, lente. Elle ferma les yeux et pria pour que cet instant ne soit pas gâché par une autre série de tremblements.

- Tu veux que je te chante une berceuse, aussi ? murmura t-elle avec amusement. Hum... Elle réfléchit. Non, mon répertoire est vide. Je n'ai même pas une petite chanson paillarde en réserve ; ça c'est vraiment la honte par contre...

Il la serra contre lui, s'efforçant de lui communiquer un peu d'apaisement, si la chose était possible. Il avait, semblait-il au moins réussi à l'amuser un peu. Bon. Il semblait avoir quelques facilités à y parvenir, ce qui était plutôt une bonne chose. Le tout était d'espérer qu'elle n'aurait pas besoin de lui alors qu'il sombrerait au pays des songes… mais il n'était plus en état de veiller pour lui tenir compagnie. Et d'ailleurs, elle préférerait peut-être demeurer quelque peu sans avoir à subir son regard… au moins, ainsi, c'était à elle de décider.

« Pas besoin, je suis déjà en train de m'endormir… mais n'hésite pas à me réveiller s'il y a quoi que ce soit… même si ce n'est pas grave… »

Qu'il soit en train de s'endormir, c'était manifeste. Il desserra quelque peu son étreinte, pour lui permettre de retrouver sa liberté sans difficulté quand elle le souhaiterait ; mais la garda tout de même contre lui tant qu'elle le voulait bien. Avant qu'il ne sombre complètement dans le sommeil, il parvint encore à laisser échapper quelques petits mots…

« Je t'aime. »

Puis il ne fut plus vraiment là.

Les derniers mots d'Elzen avait mis une pagaille monstre dans sa tête, elle aurait presque pu lui en vouloir pour cela. Heureusement que le sommeil l'avait emporté aussi vite, sans quoi elle serait encore en train de chercher une réponse appropriée. Enfin, si toutefois ce genre de déclaration attendait une réponse. Elle n'en savait rien, elle ne savait rien de ce genre de chose. Tout ce qu'elle savait, c'est que ça l'avait remué. Beaucoup trop.

Elle n'aurait su dire combien de temps elle était restée immobile contre lui, bercée par sa respiration ; de longues minutes, peut-être même une heure entière. Puis les tremblements avaient repris, alors elle s'était éloignée aussi doucement que possible, avait arpenté la pièce de long en large, s'était recroquevillée dans un coin de la pièce. Même la vision du tieffelin endormi n'arrivait plus à l'apaiser, toutes ses terminaisons nerveuses étaient en feu et la nuit sembla durer une éternité.

Lorsque l'aube pointa le bout de son nez, la tieffeline, n'y tenant plus, s'éclipsa de la chambre en silence et quitta la maisonnée tout aussi furtivement pour ne pas réveiller les occupants encore endormis. Sans cape et sans botte, elle chemina dans la petite clairière, appréciant le contact de l'herbe fraîche sous ses pieds, encore trempée par la rosée du matin. Toute la clairière était d'ailleurs recouvert d'une brume immaculée qui lui mouilla le visage et dans laquelle elle finit par se perdre. Puis elle s'immobilisa et respira à fond, plusieurs fois. Elle avait remarqué que cet exercice l'aidait à mieux gérer les crises. Lorsqu'elle ferma les yeux, tout allait bien mieux.

-Je suis fier de toi. Elle n'eut pas besoin d'ouvrir les yeux pour savoir qu'Augustin était en face d'elle. Je ne t'avais jamais vu faire preuve d'autant de maîtrise.
-Je n'ai pas le choix, ça aide.
-Je suis désolé d'avoir été un peu dur avec toi. Hum, et c'est un euphémisme.
-C'est oublié.
-Tu parles ! Tu m'en veux à mort, oui.
Elle ouvrit un oeil, puis l'autre, et elle se mit à sourire.

"A qui parliez-vous ?"

La voix provenait de derrière elle. La manostienne sortit du couvert des arbres.

"Je suis désolée si je vous ai fait peur. J'étais partie me promener un peu et je vous ai entendu parler ... J'espère que vous ne m'en voulez pas de vous interrompre."

Elle regarda autour d'elle.

"Mais il n'y a personne. Vous avez des hallucinations, vous aussi ?"

Elle avait l'air plutôt amusée.

La gêne masqua très rapidement la peur sur les traits de la tieffeline alors qu'elle se tournait vers la manostienne.

- Oh, euh, non je... bafouilla t-elle en se grattant la tête. Je pensais à voix haute, une mauvaise habitude que j'ai prise. En général je fais ça lorsque je suis seule, ou que je crois l'être, ça évite... qu'on me prenne pour une cinglée. Mais vous ne me dérangez pas, je discuterai avec moi-même une autre fois ; je n'avais rien à me dire de particulièrement passionnant de toute façon.

-Humpf...

Elle dévisagea la jeune femme en se demandant si cette dernière avait, tout comme elle, veillé toute la nuit. Elle avait l'air étonnement en forme si c'était le cas, et un peu moins morne que la nuit dernière. Mais Chance n'osa pas lui demander comment s'était passée la nuit et si elle se sentait mieux.

- Nous partons aujourd'hui, est-ce que vous comptez faire une partie du chemin avec nous ? Enfin, si voyager avec quelqu'un qui parle tout seul ne vous fait pas peur...

La jeune femme eut une sorte de sourire triste.

"Ma petite sœur a des hallucinations. Le plus souvent, c'est un bébé en tenue de juriste qui danse devant elle. Et il n'est pas le seul. Enfin ... Non, je n'aurai pas peur si je fais un bout de chemin avec vous."

Son regard glissa quelques instants sur la tombe de sa sœur.

"Je ne crois pas que j'arriverai à retrouver mes autres sœurs avant la fin de la guerre ... Au fait, je m'appelle Arthémis. Et vous ?"

- Eh bien, il semblerait que tu aies une sérieuse rivale en matière de maladie mentale...

En effet, et la tieffeline commença à prendre du recul sur ses propres "hallucinations" ; Augustin n'était pas si mal après tout, enfin il était toujours moins effrayant qu'un bébé qui danse en tenue de juriste.

- Chance, je m'appelle Chance.

C'était drôle de se présenter sous ce nom alors qu'elle l'ignorait encore deux jours plus tôt. Si Elzen ou Augustin n'avaient pas été là pour le lui rappeler elle aurait été obligée de s'en trouver un autre.

- Où sont-elles ?

Quelque chose passa dans les yeux d'Arthemis. De l'inquiétude, peut-être du regret, un peu d'espoir.

"Louison est restée à Manost, elle étudie le droit. Les autres sont parties à la guerre. Comme vous le savez, Andréa est morte. Quant aux autres, nous avons été séparées sur le champ de bataille lors d'un assaut. J'aimerais au moins savoir si elles vont bien."

Elle se ferma, comme si elle prenait soudain conscience d'avoir trop parlé.

La tieffeline se dandina d'un pied sur l'autre, mal à l'aise. Elle ne savait pas trop quoi répondre, elle ignorait tout ce par quoi était passé la jeune femme et pouvait difficilement imaginer ce que l'on ressentait lorsqu'on enterrait sa propre soeur. Elle se demanda si elle avait passé sa vie à se sentir aussi gauche ou si ce n'était qu'un effet regrettable de l'amnésie.

- Peut-être... peut-être que vous devriez rejoindre votre soeur à Manost ? hasarda t-elle.

C'est ce qu'elle ferait, à sa place. Elle ne perdrait pas une seule seconde de sa vie au milieu de cette guerre si elle savait que quelqu'un l'attendait quelque part. Mais, cela aussi, ça devait être lié à son amnésie.

- Enfin, pas que je vous encourage à déserter, ajouta t-elle précipitamment, prenant conscience de ce qu'elle venait de dire. Mais après un moment de silence, elle laissa échapper : Si, en fait si.

"Vous avez peut-être raison. Je déserterais ... Mais l'issue de la guerre est incertaine et ..."

Son visage se ferma.

"Louison n'a que nous. Je ne sais pas ce que sont devenues les autres. Je pourrais au moins rentrer, moi ..."

Elle hésitait visiblement.

"Et vous, vers où iriez-vous ?"

La tieffeline hocha la tête, visiblement en accord avec le choix que semblait prendre la manostienne. Il était bon de voir que celle-ci ne se perdait pas dans quelques idées de vengeance, des idées qui semblaient irréalisables, alors qu'une de ses soeurs attendait quelque part.

- Moi ? Oh, je crois que ce n'est pas à moi qu'il faut poser la question...

Son regard se perdit vers la maison. Elle avait simplement décidé de suivre Elzen, peu importe où il irait. Ainsi elle n'avait pas à prendre de décision elle-même, chose dont elle se sentait encore incapable. Elle errait... simplement.

Arthemis hocha la tête comme si elle avait compris et resta silencieuse. Peut-être était-elle à court de mots, tout simplement. Puis elle finit par dire.

"Je vous souhaite d'arriver à bon port quelle que soit votre route."

Et elle regagna la maison sans rien ajouter d'autre.

Chance ne tarda pas non plus à rejoindre la maison. Elle monta les marches quatre à quatre, sur la pointe des pieds, et entra en silence dans la chambre pour ne pas réveiller le tieffelin encore endormi. Malgré le sommeil de plomb dans lequel il semblait plongé, elle prit soin de se glisser à ses côtés le plus doucement possible ; s'il n'avait pas ouvert les yeux entre temps, sans doute croirait-il qu'elle n'avait jamais quitté la chambre, ni même le lit de la nuit.

La tête posée dans le creux de sa main, elle le regarda dormir de longues minutes, puis, contre toute attente, finit par le rejoindre dans le royaume des songes alors que le soleil commençait doucement à poindre à l'horizon.

Ledit tieffelin finit par se réveiller ; mais compte tenu de la fatigue accumulée la veille, ce ne fut que quelques heures plus tard, alors que le soleil avait pleinement prit possession des cieux.

La première chose qu'Elzen constata à son réveil fut la présence de Chance à ses côtés. Elle était restée, et avait semble-t-il même fini par s'endormir. Comment décrire ce sentiment qu'il ressentit alors ? Celle qu'il avait espéré, attendu pendant tout ce temps, désormais à ses côtés. Cela aurait suffit à lui donner de l'énergie à revendre… mais pour l'heure, il n'en avait nul besoin. Il restait simplement là, près d'elle, à la regarder dormir à son tour.

Combien de temps s'écoula avant qu'elle ne se réveille ? Peu importait.

Comme si la chaleur de son regard avait suffi à la réveiller, Chance ouvrit les yeux à son tour et cilla de surprise ; dans son esprit encore embrumé, c'était Elzen qui dormait et elle qui le regardait dormir, à quel moment avaient-ils changé les rôles ? Un sourire courba néanmoins ses lèvres et elle se mit à rouler paresseusement sur le lit avant s'étirer comme un chat. Elle enroula ensuite l'un de ses bras autour de la taille du tieffelin avant de nicher sa tête dans le cou de ce dernier. Le soleil était déjà bien haut dans le ciel mais elle s'en moquait éperdument, cela ne signifiait qu'une chose : une nouvelle journée commençait et le calvaire qu'elle avait vécu la nuit dernière était oublié, comme un mauvais rêve. Seule la présence d'Elzen à ses côtés, son aura apaisante, était bien réelle. Il l'enivrait, et elle avait fini par renoncer à chercher des explications rationnelles quant au pourquoi du comment...

La Couronne de Cuivre

[RP] Guerre des Plaines Brûlantes - armée mélandienne