Le Cimetière

[Le Façonneur]

Après un rapide examen de ses possessions, Asmodeus constata qu’il n’avait rien pour s’éclairer. Il devrait donc se contenter de ce monde gris. La fresque ne lui apprit rien de plus. Ce fut autre chose qui attira son attention : un bruit lointain. C’était le premier son qui ne provenait pas de lui. Il semblait venir du passage sous l’arche.

[Asmodeus]

Asmodeus savait que la moindre erreur pouvait lui coûter très cher et il n'avait rien moins l'intention que de se laisser surprendre. L'avantage, quand on était dans son état, était qu'on n'avait pas à se soucier de retenir son souffle pour étendre son acuité. C'est donc ce qu'il se décida à faire, tentant d'identifier la nature du bruit - quitte à s'approcher un peu - avant de s'engager sous l'arche.

[Le Façonneur]

En s’approchant de l’arche, aussi silencieux que possible, Asmodeus découvrit un large couloir dont les murs de pierre ne portaient plus ni peinture, ni gravure. Cependant, à distance régulière, une colonne encastré dans le roc se laissait contempler. Le couloir en devenait plus esthétique, bien que cela reste très sobre. Quoi qu’il en soit, le passage était trop long pour que le mort-vivant puisse en voir le bout. En tendant l’oreille, il fut à peut près certain de percevoir des pas au loin. Quelqu’un montait semblait-il un escalier. Le bruit s’éloignait.

[Asmodeus]

L'envie d'interpeler ce qui s'éloignait - quoique ce fût - était très forte. Le besoin d'exiger des réponses pour comprendre ce qui s'était produit dans le couloir de la tour était prégnant. Mais ça aurait été de la dernière bêtise que de révéler sa présence à un être potentiellement hostile. C'est donc silencieux qu'il poursuivit son périple dans le couloir au luxe sobre. Il ne tentait pas forcément de rattraper celui qui le précédait : les morts avaient tout leur temps, ne se fatiguaient jamais.

[Le Façonneur]

La relative lenteur avec laquelle Asmodeus s’engagea dans le couloir lui fut salvatrice. Il sentit une dalle s’enfoncer sous son pied, émettant un sinistre déclique. L’instant d’après, une lame émergeait d’une discrète rainure du plafond et tomba à la manière d’une guillotine. Elle frôla la momie et heurta le sol avec un bruit sec qui fut repris en échos dans les ténèbres de ce lieu inconnu. Le bruit estompé, le mort-vivant constata qu’il n’entendait plus les pas au loin. S’étaient-ils trop éloignés ? Ou leur propriétaires avait-il entendu le piège ? Cette dernière hypothèse semblait plus plausible.

[Asmodeus]

Asmodeus se maudit intérieurement de sa distraction. Certes, la lame ne l'aurait certainement pas tué sur le coup mais il avait tout de même échappé de justesse à de bien pénible désagrément. Et aussi révélé sa présence à ne plus en douter. Décidant de laisser là les faux semblants, il interpela ce qui le précédait pour lui faire comprendre qu'il ne craignait pas une rencontre, qu'il n'était pas un de ces aventuriers terrorisés explorant un lieu interdit.

- Amusant ce piège... Il y en a d'autres ?

[Le Façonneur]

Presque aussitôt, les pas se refirent entendre. Cette fois, il descendaient les marches, ils s’approchaient, avant d’à nouveau se stopper. Ils étaient encore assez loin, sans doute bien plus que le couloir. Le silence retomba. Il semblait un peu plus lourd qu’avant. Le temps, comme en suspend, paraissait attendre quelque chose. Encore un peu et la momie crut percevoir, derrière elle cette fois, un murmure. La salle qu’elle avait quittée pouvait renfermer n’importe quoi. Le mort-vivant n’en avait aperçu qu’une partie.

[Asmodeus]

Asmodeus se sentait terriblement exposé entre toutes ces inconnues. La prudence lui dictait de retourner dans la salle : il ne savait pas ce qui s'y trouvait mais il n'y avait pas été attaqué lorsqu'il s'y était trouvé. Mais la momie ne voulait pas reculer - par prétention peut-être mais aussi parce qu'il ne fallait pas montrer de signe de faiblesse. Il choisit donc d'avancer dans le couloir mais en testant chaque dalle de son bâton. Le résultat n'était peut-être pas très digne mais il affichait une allure déterminée et souveraine. Une défense comme une autre.

HRP : 1000 posts !

[Le Façonneur]

HRP : félicitation !

Peu après qu’Asmodeus se soit remit en mouvement, il réentendit les pas en faire de même. Ils s’approchaient, sans hâte, mais avec une égale assurance. Après quelques mètres, la momie déclencha un nouveau piège. Elle se recula juste à temps pour éviter des piques jaillissant du sol. Pendant ce temps, les pas continuaient de venir. Ils se trouvaient maintenant juste en face, probablement dans le même couloir. Ils se ralentirent, sans s’arrêter. Asmodeus ne voyait toujours pas à qui ou à quoi il avait affaire, mais ce ne serait tarder.

[Asmodeus]

Asmodeus était sur le point de se protéger d’un sort de sanctuaire mais se ravisa aussitôt en se souvenant qu’il ne disposait plus d’aucun sortilège. Il se sentit alors désagréablement exposé – et ce même si son corps était entièrement couvert de bandelettes. Pour se donner un peu de contenance, ne plus progresser de façon ridicule ni risquer de déclencher un autre piège, il s’adressa d’une voix autoritaire à ce qui approchait dans l’ombre :

- Ce petit jeu n’est pas vraiment amusant : montrez-vous, qui que vous soyez !

Il tenait fermement son bâton, la dernière défense qu’il possédait. Bien dérisoire s’il avait affaire au maître des lieux ou à l’un des membres du groupe d’aventuriers.

[Le Façonneur]

Les pas recommencèrent. Peu après, quelqu’un entrait dans le champ de vision grisâtre de la momie. Il s’agissait d’une femme en robe sombre, avec de long cheveux qui flottaient sous l’effet d’un courant d’air et qui portait un masque glacial. Dame Irélia... La liche tenait dans ses mains son bâton de nécromancienne. Il semblait fort qu’elle s’en serve d’arme improvisée comme Asmodeus.
« Ha, c’est vous. Je me disais aussi que... »
Il y eut un déclique. Dame Irélia se recula juste à temps pour éviter une lame tombant du plafond. Elle poussa un juron, enjamba la lame et retrouva son attitude fière.
« Qu’est-ce que je disais déjà ? Il serait bon que vous ne parliez pas si fort. Je ne suis plus certaine que nous soyons en Gisombre. »

[Asmodeus]

Bon, s'il y avait un semblant de logique dans tout cet embrouillamini, il y avait un grand risque que le reste de la joyeuse troupe ayant participé à la bataille ne soit pas très loin de la liche et lui. Certes, ils avaient opéré une retraite ensemble mais le phénomène semblait bien trop important pour se limiter à les emporter seulement tous les deux. Et Velsharoon seul savait où par dessus le marché. Dans un moment d'humeur, il répondit un peu sèchement :

- Vous comprenez un peu ce qui se passe où ce n'est qu'une supposition ? Il y a une salle étrange par ici et votre aide pourrait s'avérer précieuse pour l'explorer.

Surtout si, contrairement à lui, elle avait conservé un peu de magie en elle. Mais hors de question de lui révéler cette faiblesse.

[Le Façonneur]

« Oui, j’ai ma petite idée sur ce qui s’est passé. La tour de ce fantôme dément était une construction transdimensionnelle. Quelque chose a fait s’effondrer cette construction. Je ne serais pas surprise si la tour elle-même, sa représentation physique en Gisombre, se soit également effondrée. J’ignore ce qui a provoqué ça. J’ignore également si mon sort de téléportation a pu fonctionner, même partiellement. Ce que je peux supposer, en revanche, c’est que nous ne nous trouvons plus dans la tour et peut-être avons-nous également quitté la Gisombre. Tant que nous n’aurons pas découvert sur quel plan nous nous trouvons, je vous invite à la plus grande des prudences. »
Dame Irélia observa un instant de silence avant de reprendre :
« Montrez-moi cette salle. Elle pourrait nous éclairer. »

[Asmodeus]

Asmodeus répugnait à laisser l’initiative à la liche mais il devait bien reconnaître qu’elle semblait mieux informée que lui et plus à même de comprendre le phénomène auquel ils avaient été soumis. Sachant cela, il décida de ne pas contester frontalement l’autorité qu’elle cherchait à imposer. Mais il ne voulait pas pour autant lui laisser prendre l’ascendant : le souvenir de la manière dont elle l’avait baladé lors de leur arrivée en Gisombre n’était pas prêt de s’estomper.

- C’est par ici. Il y a notamment une fresque intéressante mais la salle a l’air très vaste.

[Le Façonneur]

Dame Irélia suivit Asmodeus jusqu’à la vaste pièce à la fresque. Elle observa cette dernière attentivement, l’efflora même de ses doigts squelettiques, avant de se tourner vers les piliers et de s’avancer vers eux. La momie entendit de nouveau comme un murmure. La liche poursuivit sa route avec une prudence manifeste, quoi que plus ou moins dissimulée par son attitude fière, passa entre les colonnes et s’immobilisa devant ce qui occupait le centre de la salle. Il s’agissait d’un piédestal sur lequel était posée une boule en métal, de la taille d’une boule de cristal. Dame Irélia la fixa un instant avant de demander, l’air de rien :
« Vous n’avez rien ressenti de particulier au moment de vous retrouver ici ? Pas de perturbation magique par exemple ? »

[Asmodeus]

La momie progressait dans le sillage de la liche, ce qui lui permettait de garder une attitude altière car il n'avait plus de crainte de déclencher un quelconque piège après le passage de Dame Irélia. Asmodeus contempla la boule de métal et tenta de déterminer sa fonction mais c'était avant tout une stratégie pour préparer une réponse à la question embarrassante soulevée par la magicienne :

- Asmodeus suppose que cette chose a pu absorbé ses sortilèges.

[Le Façonneur]

L’observation de la momie ne donna rien. Dame Irélia soupira.
« Ha... Il va vraiment falloir qu’on fasse profil bas jusqu’à ce qu’on sache où on a atterrit. J’espère que ce ne sera pas trop long. »
Elle approcha doucement sa main de la sphère en métal. Les murmures s’amplifièrent brusquement. La liche préféra se reculer sans la toucher. Elle fit ensuite face à la momie.
« Nous devrions sortir d’ici. J’ai trouvé un escalier au bout du couloir. Et... »
Elle commença à se déplacer dans la salle pour apercevoir ses murs.
« ...et... il ne semble pas y avoir d’autre passage. »

[Asmodeus]

Ce soudain revirement était suspect sinon inquiétant et Asmodeus se demandait pourquoi la liche avait soudain renoncer à en apprendre davantage sur la sphère. En tous cas, il pensait avoir obtenu la confirmation qu’elle aussi avait perdu les sortilèges en sa possession. C’était à demi rassurant – car il ne devrait pas composer avec une Dame Irélia sûre de sa supériorité mais ils allaient effectivement devoir redoubler de prudence. C’est pourquoi il hésita à s’approcher lui-même de la sphère mais tenta de comprendre le sens des murmures avant de faire mine de suivre l’autre mort-vivant. Encore une fois, il avait la désagréable impression qu'elle ne lui disait pas tout.

[Le Façonneur]

En se concentrant sur les murmures, Asmodeus crut reconnaître une langue ancienne et impie, le genre de langage employé dans les livres de magies noires, le genre de mot qui faisait frémir l’âme. Cette sphère de métal éveilla alors en lui une crainte instinctive. Cet objet était dangereux, mieux valait ne pas y toucher, surtout pas sans l’appui de sortilèges appropriés. La liche, suivie de la momie, retourna dans le couloir, puis atteignit un escalier en spiral qui montait en cercle de plus en plus large. Les pas raisonnaient sur les marches usées, soulignant la vastitude de cette architecture. Tout était de pierre, tout était froid... quoi que l’air semblait vouloir se réchauffer à mesure que le duo progressait. L’ascension durait depuis maintenant plusieurs minutes et elle se poursuivait. Dame Irélia rompit enfin le silence.
« Tout est de la faute de cet abruti de chevalier ! Ni vous ni moi n’avions quoi que ce soit à gagner dans cette maudite tour ! Et il a fallut qu’elle s’effondre pile au mauvais moment ! Ha... quelle guigne ! Quelle perte de temps ! J’ose espérer que ce détour nous sera profitable d’une façon ou d’une autre. »

[Asmodeus]

Un peu plus pessimiste - ou moins opportuniste peut-être - Asmodeus avait déjà en tête que ce contretemps n'ait pas de fâcheuses conséquences. Le fait qu'il ait perdu son lien avec la magie et tous les indices inquiétants qui s'accumulaient ne manquaient pas de l'inquiéter. Et de le rendre plus que jamais vigilant. Pour l'heure, néanmoins, la meilleure chose qu'il avait à faire était de suivre la liche dans son ascension, prêt à réagir si la menace se précisait même s'il ignorait encore quelles seraient ses armes.

[Le Façonneur]

Les deux morts-vivants parvinrent enfin en haut des marches. Une telle ascension aurait facilement essoufflé un homme bien portant. Le dernier cercle tracé par l’escalier était d’un diamètre dépassant une centaine de mètres, d’après les estimations de la momie. L’air s’était attiédit mais le silence continuait d’être aussi complet. Un couloir se présenta. La momie ralentit le pas.
« Ce doit être encore truffé de piège... » soupira-t-elle en testant les dalles avec son bâton.
Deux statues entrèrent dans le champ de vision d’Asmodeus. Elle était postée de part et d’autre du couloir et représentaient des cerbères grands comme des ours.

[Asmodeus]

Etant donné le dénuement presque total de ces lieux, la momie soupçonna aussitôt que ces statuts n’avaient pas un but purement décoratif. Cela tranchait bien trop avec tout ce qu’il avait vu jusque-là à l’exception de la fresque. Il s’en ouvrit aussitôt à la liche :

- Attention, ces choses pourraient bien s’avérer être des gardiens chargés d’empêcher quiconque d’entrer dans la salle suivante. Avez-vous un moyen de détecter s’ils recèlent de la magie. Ou s’il y a des déclencheurs sur le chemin ?

Lui-même s’attelait déjà à déceler la moindre anomalie sur les murs du couloir mais peut-être sa question lui permettrait au moins de confirmer si la liche était aussi démunie magiquement que lui. A défaut de donner un autre résultat probant.

[Le Façonneur]

« Pas vraiment, hélas. »
La liche, qui s’était immobilisée, tendit tout de même la main vers les deux statues et sembla se concentrer. Au bout de quelques secondes, elle rabaissa son bras.
« Si ses choses sont là pour empêcher d’entrer, ça tombe bien puisque nous, nous sommes en train de sortir. Quoi qu’il en soit, il va falloir... »
Elle se tut car quelque chose venait de crever le silence : une porte qui s’ouvrait en grinçant, quelque part plus loin, à une bonne distance. Il y eut ensuite des pas, des voix... plusieurs personnes venaient. Ces gens ne parlaient pas en commun, c’était certain et ce ne devaient pas être des humains, le timbre était trop grave, trop guttural, trop effroyable. Plusieurs des individus en approche produisaient en se déplaçant des sons pesants, suggérant un poids plus que conséquent et une taille qui devait aller de paire. Pour finir, du métal cliquetait. Peut-être des armes, des armures ou des chaines.
« On ferait mieux de se cacher », suggéra Dame Irélia, sans perdre son aplomb.
Le problème, c’était qu’il n’y avait pas vraiment de cachette ici, à moins de tirer profit des statues de cerbères potentiellement dangereuses.

HRP : penses-tu pouvoir me fournir la liste des langues que connait Asmodeus en v5 ? J’en aurais besoin mais je peux aussi faire sans.

[Asmodeus]

Voilà qui confirmait que Dame Irélia ne serait pas plus utile – et peut-être moins – que lui-même au combat. Surtout contre les choses massives et manifestement armées qui approchaient de leur position. Dans ces conditions, il n’y avait malheureusement pas à tergiverser entre un danger potentiel et un danger avéré. Se cacher derrière les statues semblait être la solution la moins risquée sinon la meilleure pour éviter de se faire repérer. Il y avait deux statues mais il semblait plus prudent de rester du même côté du couloir si leur taille le permettait : ainsi, le risque d’être trouvé serait diminué et les chances de se défendre plus grandes s’ils étaient découverts.

[Le Façonneur]

Les deux morts-vivants s’approchèrent des cerbères de pierre et, fort heureusement, ceux-ci demeurèrent inertes. Chaque statue était également assez grande pour se cacher à deux derrières. Cela dit, pareille cachette était loin d’être idéales. Il faudrait un peu de chance pour ne pas être découvert. Pendant ce temps, les individus s’approchaient toujours d’avantage. Leurs voix se faisant plus distinctes, Asmodeus put déterminer que la conversation était en infernal. Deux individus discutaient, mais il y en avait plus qui marchaient.

« Je suis persuadé, seigneur, que tout ceci trouvera très vite une explication.
- J’y compte bien.
- Mais je ne pense pas que nous devions craindre un coup de votre frère. Le phénomène à l’air général.
- Je ne veux négliger aucune piste, surtout pas celle de mon frère.
- Oui, bien sûr, bien sûr, je donnerais des ordres. Ce lieu sera de nouveau correctement protégé en moins de temps qu’il en faut pour le dire. »

Au bout du couloir, une lueur naissait et, avec elle, les couleurs. Le groupe avait des torches et il ne pouvait définitivement pas s’agir d’humains. Ces choses étaient des monstres et bientôt elles seraient visibles...

[Asmodeus]

Voilà qui donnait au moins de premiers éléments de réponse mais leur utilité était encore à démontrer pour se tirer de ce mauvais pas. Le premier réflexe d’Asmodeus quand il reconnut les propos échangés fut un regard en direction de son acolyte pour déterminer si elle aussi comprenait la langue des enfers.

Pour le reste, il ne comptait pas chercher de quitter sa cachette pour le moment car le groupe ne manquerait pas de les apercevoir dans le couloir à découvert. Et la course n’était absolument pas son fort. Non, il fallait trouver un moyen de tirer parti du jeu des factions que révélait la bribe de conversation entendue. Il lui fallait espérer que le groupe prononcerait un nom reconnaissable pour savoir à quel seigneur ils avaient affaire. Et se prétendre de son camp : il était toujours possible de négocier avec les infernaux du moment qu’on démontrait son utilité.

[Le Façonneur]

Asmodeus eut la quasi certitude que Dame Irélia comprenait aussi bien que lui l’infernal. Et, tout comme lui, elle restait cachée derrière la statue de cerbères. La lumière, au bout du couloir, allait croissante. Bientôt, d’imposantes ombres se dessinèrent sur les murs de pierre, puis il fut possible à la momie de voir à qui elle avait à faire : des diables. Ils étaient cinq en tout. Deux devaient facilement mesurer plus de deux mètres, avaient des cornes impressionnantes et étaient armés de long tridents. Leurs queues fourchues balayaient l’air derrière eux et leurs ailes membraneuses repliées devaient leur donner une effrayante envergure en vol. Deux autres diables, ceux qui conversaient, allaient en tête. Ils avaient une apparence presque humaine. L’un portait une armure sombre et une épée à deux mains dans son dos. L’autre avait un peu la mise d’un vizir. La troisième créature avait des courbes féminine. Elle marchait avec une grande grâce, dans sa robe pourpre, accrochée au bras de l’individu en armure. La conversation, animée, virulente, faisait mention d’un phénomène étrange survenu depuis peu. Mis à part cela, Asmodeus n’en tira rien de plus. Le groupe arriva au niveau des cerbères. Le diable en armure posa sa main gantée sur une des têtes et grogna :
« Même ceux-là ne fonctionnent plus ! C’est intolérable ! »
Le groupe poursuivit, passant tout près des morts-vivants. Il sembla ne pas les remarquer.

[Asmodeus]

Asmodeus était soulagé que la rencontre ait pu être évitée pour le moment avec ce groupe qui n’aurait eu aucun mal à les détruire ou à les capturer étant donné leur état. Ils avaient en outre glané quelques précieuses informations au passage : le phénomène qui les avait affectés dans la tour du mage avait aussi touché directement ce lieu - quel qu’il soit – et l’absence de magie était plus généralisée que ce qu’il avait d’abord craint. Toutefois, un phénomène capable d’affecter toute une zone aussi vaste dépassait presque l’entendement et il devenait urgent de réunir des indices sur cette anomalie. Tout en évitant de se retrouver à la merci d’un groupe aussi important que celui qu’ils venaient d’éviter. Il convenait donc d’avancer pour s’éloigner de la patrouille, ne serait-ce que pour trouver une meilleure cachette.

[Le Façonneur]

Dame Irélia avait vraisemblablement la même idée puisque sitôt les bruits de pas suffisamment éloignés, elle mit un terme à son immobilité. Les deux morts-vivants progressèrent dans le couloir alors que le groupe de diable s’enfonçaient dans les profondeurs en direction de l’étrange sphère de métal murmurante. Après un virage à angle droit et la fin du couloir, le duo trouva un escalier montant puis une porte close à la robuste apparence, le genre de porte qu’il ne fallait pas espérer ouvrir sans la clé. Elle n’était peut-être pas verrouillée cependant.
« À vous l’honneur », murmura la liche à la momie.
La température avait sensiblement augmentée et Asmodeus était à peu près certain que derrière cette porte des feux crépitaient. Peut-être même y avait-il un bruit de pas... quelque chose de léger...

[Asmodeus]

Cette chaleur, ces bruits laissaient à penser que les lieux ne seraient probablement pas aussi abandonnés que les salles précédentes. Par nature, les milieux chauds mettaient la momie mal à l’aise et conscience de sa vulnérabilité mais, même sans cela, Asmodeus se serait déjà montré prudent : il commença donc par écouter au travers de la porte en s’en approchant le plus possible. S’il pouvait avoir une petite idée de l’intensité de ces pas, de leur nombre et de leur direction. Voire de surprendre telle ou telle conversation, ce serait autant d’éléments à prendre en compte avant de se décider à tenter de pousser la porte voire d’y frapper si elle était verrouillée. Après tout, il n’y avait pas d’autre voie possible pour tenter de quitter cet endroit.