La Couronne de Cuivre

Cette fois, la vision se focalisa sur l'être roux.
Au beau milieu d'un joyeux banquet, il festoyait, buvait à pleines coupes, dansait, devisait joyeusement avec les convives.
Ce n'est que plusieurs minutes plus tard qu'Hubert aperçut l'être ailé, qui paraissait s'ennuyer ferme dans son coin.
Tellement s'ennuyer, même, qu'il finit par aller arracher son compère aux réjouissances et, après l'avoir sermonné, par l'entraîner à l'extérieur de la salle.

" Je ne suis pas certain que ce bouquin ait le moindre intérêt, dit Hubert avec une grimace. Il se focalise sur ce gai luron de planaire elfique...
— Une sorte d'eladrin, sans doute.
— Mais honnêtement, je ne vois pas l'intérêt pratique de l'affaire..."
Albérich croisa les bras.
" Toutes ces visions remontent à avant la catastrophe... mais après la première fermeture du sceau... Ce duo... le solaire et l'eladrin, disons, ont confié la protection des lieux aux gens... mais dans ces visions, la ville parait déjà construite ?
— J'ai vu la forteresse... et le palais... donc oui, je dirais que la ville était déjà construite. Une partie, en tout cas.
— Je vais devoir retourner dans les bouquins de légendes pour en faire sens... mais c'est quand même dommage que nous n'ayons pas trouvé un simple... livre d'histoire."
Il haussa les épaules.
" Tu veux faire une ultime tentative ?
— Pas vraiment. Ça me fatigue, mine de rien.
— Ça te gêne de faire un détour par la salle aux symboles, avant de... changer d'activité ?
— Non, non, bien sûr, allons jeter un oeil."
Ils partirent dans le couloir, puis vers les escaliers.
" Qu'as-tu en tête ?
— Je me demande si la caserne de l'autre jour pourrait se trouver sur l'un des symboles... L'armure et l'épée que tu as vues doivent fatalement être liées au téléporteur... comme l'école de la magie. Si nous pouvions placer l'école, déjà... peut-être la caserne... Nous finirions bien par identifier tous les points de chute... et ça faciliterait nos prochains mouvements."

Les symboles ayant disparu, il fallut à Hubert toucher le mécanisme pour les faire reparaître.
Mais même alors que le dessin familier se mit à briller sur leurs yeux, ils ne furent pas beaucoup plus avancés. Ils savaient quels signes correspondaient à la forteresse, aux forts et, désormais, au temple du soleil. Mais pour les autres... On pouvait subodorer que celui situé dans le quartier sud du cercle central était l'école de magie ; on pouvait, aussi, imaginer que celui figurant dans le quartier ouest du même cercle était la caserne... Mais pour en avoir la certitude, un seul moyen : s'y transporter.

Albérich verbalisa ces observations, Hubert acquiesça.
" Nous testerons demain. Pour la caserne. Tant que nous n'avons personne pour dénicher les passages, c'est inutile. Mais c'est plausible, et donc prometteur."
Ils marchèrent un moment dans le couloir, lentement, peu pressés de regagner le rez de chaussée et leurs devoirs respectifs. Plutôt que de s'engager dans l'escalier, ils poursuivirent d'ailleurs dans le couloir, sans but particulier. Hubert reprit finalement la parole le premier.
« Albérich... Est-ce que... ça va ? Tu es un peu bizarre, depuis que nous avons trouvé ce temple…
— Je sais. C’était… un endroit particulier. Comme un reflet du temple de Luménis… Etrange. Cela m’a replongé dans d’anciens souvenirs. Je n’ai pas vu le temps passer.
— Manifestement.
— Et ça m’a fait penser au futur. »
Il pinça les lèvres, dévisagea son compagnon.
« As-tu réfléchi récemment à ce que nous ferons ensuite ? Je veux dire… pas dans deux mois… Je sais que nous descendrons vers Lunaros, puis nous irons à Maleval… Mais ensuite. Que ferons-nous ensuite ?
— Je ne sais pas… J’ai pensé que tu voudrais retourner à Luménis. »
Albérich eut un rire bref.
« A Luménis ? Pour quoi faire ? Je ne pourrai pas retourner au Temple. J’ai été aubemestre, ma présence poserait problème… et je ne voudrais pas, d’ailleurs, y retourner. Vu la manière dont… j’ai fui… Non. Je suis marqué. Et de toute façon… Je n’ai nulle envie d’aller dans un endroit où tu ne peux pas être, Hubert. »
Le paladin acquiesça, embarrassé.
« Nous ne sommes pas les bienvenus à Solarcis, l’aubemestre d’Eredhun me déteste, il n’y a pas de commanderie à Antelucas, ni à Togoria, ne parlons même pas de la Trouée… Il reste Lunaros. Mais nous y serons reçu comme des étrangers. Tu devras intégrer une hiérarchie en place, ils t’enverront pacifier les Landes avec des collègues… Je serai accueilli au Temple, sans doute avec les honneurs, mais… au-delà de ça, toi et moi vivrons dans des organisations rodées, où nous serons des rouages, et… nous… nous ne pourrons pas…
— Vivre ensemble. »
Il se sentit rougir mais hocha la tête.
« Voilà. Et je suis peut-être vieux jeu, avec mon chien, et mon jardinet, et mon jour de repos les dixièmes jours de veille, mais… j’imaginais que… un jour ou l’autre… nous disposerions d’un peu d’intimité de manière… plus établie. »
Hubert souriait mais il ne dit rien.
« Alors pourquoi ne pas rester ici, dans ce cas ? Ce Temple… c’est la possibilité pour moi d’être clerc…
— Aubemestre.
— … peut-être, je n’en sais rien, mais à un endroit où je ne dérangerais personne. Où je pourrais célébrer Lathandre comme il se doit, chaque matin, dans un endroit magnifique. Où je pourrais recréer une dynamique, définir les priorités, transmettre mon savoir, développer quelque chose de formidable… Et où je pourrais vivre avec toi. »
Le sourire d’Hubert s’était élargi et il s'immobilisa pour l’embrasser avec tendresse.
« Je te suivrai jusqu’au bout du monde, Albérich. Je suis ton garde du corps, tu te souviens…
— Hubert…
— Mais j’aimerais ça, moi aussi... M’endormir chaque soir près de toi et contempler le miracle de ta présence chaque matin, à l’aube… Louer Lathandre dans ton ombre… Aider à reconstruire Clairétoile… Créer un ordre de paladins qui veillerait sur le sceau… Si nous parvenons à le refermer et à chasser les Ithiliens. »
Albérich soupira.
" Oui. Une chose après l'autre, je sais, tu as raison."
Ils avaient retrouvé l'escalier et s'y engagèrent.
" Mais j'ai dit oui." lui glissa Hubert, malicieux, avant qu'ils ne se séparent au bas des marches.

La nuit était tombée, les colons avaient allumé des torches et, dans la salle à manger, nombreux étaient déjà ceux à être attablés.
Avec les longues heures passées au temple de l'amour et plus encore au temple de l'aube, sans compter la séance d'entraînement et les diverses activités qui s'en étaient suivies, la journée était passée extraordinairement vite.
Peut-être Frida et la colonne étaient-ils déjà arrivés au fort...

Albérich rejoignit Marthe pour manger. La conversation qu'il venait d'avoir avec Hubert l'avait quelque peu ébranlé même si, il en était bien conscient, ils tiraient des plans sur la comète. Mais c'était le propre des Lathandrites : dessiner le futur avec enthousiasme, espérer, et se battre pour que les lendemains soient à la hauteur. Il se sentait donc à la fois exalté et combattif, mais aussi, encore et toujours, d'excellente humeur.
" Tu as progressé dans tes lectures ?" demanda-t-il à la juge après s'être assis.

Elle secoua la tête.
-Pas en termes de recueil d'informations utiles : toujours des allusions, toujours des pistes... Mais au moins, j'ai pu écarter plusieurs ouvrages de ma pile des "à lire". De surcroit, les instituteurs, lassés de chercher en vain des symboles dans le palais, ont recommencé à trier tous nos livres et à en dresser la liste : cela pourrait faciliter les choses pour la suite... Et de ton côté ?

" Je n'ai rien lu aujourd'hui, malheureusement... mais j'ai soutenu Hubert pendant qu'il parcourait les livres célestes... Inutilement, en fait, car il n'a rien vu de choquant aujourd'hui. Il a eu la confirmation que les célestes — au nombre de deux, apparemment — avaient confié des objets de pouvoir aux habitants de Clairétoile. On peut imaginer que ceux-ci devaient leur servir soit à protéger le sceau, soit à défaire ce qui en sortirait s'il était rompu... Ce sont des suppositions, cependant... Ces objets ne sont peut-être pas prévus pour cet usage, mais ils ont sûrement un pouvoir important. Bref, nous avons pu en déduire que nous en avons la moitié en notre possession, et nous savons probablement où se trouve la deuxième moitié. Mais il nous manque vraiment quelqu'un d'efficace pour découvrir les leviers et les portes dérobées. J'espère vraiment que Frida aura ce genre de merveilles dans sa colonne... Je pense aller les attendre... ou les retrouver... dès que j'ai fini de manger."

Elle acquiesça.
-Du moment que tu ne me demandes pas de rester ici pendant que tu vas là-bas, ça me convient. Pour le reste, durant les communications que nous avons eues tandis que je traversais le landes, il me semble bien que Barthélémy m'a dit qu'il y avait des clercs dans la colonne, dont un Tymoran... J'imagine que vous aviez noté tout cela, mais que les notes ont été perdues au moment de l'invasion...

" Tu es bien sûr la bienvenue ! s'exclama Albérich. Et je ne me souvenais pas, pour le Tymoran... Je me savais qu'il y avait des clercs, oui... Trop de choses à penser, ces derniers jours. Mais c'est une bonne nouvelle. Déjà, je dois dire que j'ai cru que cette colonne n'existait pas vraiment, que c'était une invention de Louis, alors... Je suis juste heureux qu'ils soient sur le point d'arriver."
Il sourit, se rembrunit légèrement.
" En as-tu parlé à Etienne ? L'as-tu vu aujourd'hui ?"

Elle secoua de nouveau la tête.
-Non. Mais j'ai discuté avec Varamyr : son lynx l'a repéré observant la salle commune, cette nuit. J'y vois un signe positif : même si l'essentiel de ses pensées restent tourné vers les captifs, il s'intéresse malgré tout à ceux qui sont ici...
Elle esquissa une ombre de sourire.
-Peut-être va-t-il s'enhardir davantage. Je l'espère, en tout cas.

" Je voudrais pouvoir l'aider, lui parler, mais dans le même temps... Je respecte son besoin de son solitude."
Il pinça les lèvres.
" Lui annoncer que trois cents personnes de plus sont arrivées n'est peut-être pas la chose à faire, même s'il l'apprendra tôt ou tard."
Il soupira, songea brusquement à son échange avec Louis, à ce que le chevalier avait dit... et surtout à ce qu'il n'avait pas eu le temps d'ajouter. Mais il s'était promis de ne rien en dire, et il se replongea dans sa pitance.
" Je persiste à penser qu'il a encore un rôle à jouer... malgré son désespoir."

-Je le pense aussi. Mais pour cela, il faudra qu'il réussisse à se remettre et... ce ne sera pas simple.
Elle soupira.
-Il savait qu'il y aurait des risques. Il a tout fait d'une part pour que les autres le sachent aussi, d'autre part pour s'en prémunir. Mais il ne pouvait pas s'attendre à un tel coup du sort, avec de telles conséquences... Pourtant, je crois qu'il aurait pu surmonter ce drame s'il n'y avait pas eu, de surcroit, la trahison de Louis. Être poignardé dans le dos par l'un de ses proches, peut-on imaginer chose plus affreuse, plus destructrice ?

" Non... Et je ne m'explique toujours pas ce qui a pu passer par la tête de Louis... Du peu que j'en sais, il a l'air de croire qu'il peut encore convertir Etienne à son point de vue... et de toujours chérir ce qu'il y avait entre eux... Comment... peut-on si mal connaître un ami, de croire qu'on peut renverser son rêve et s'en tirer à bon compte ?"
Sans doute croyait-il leur amour invulnérable... Peut-être un côté sunite dévoyé... Même Thibault riait de ce genre d'absurdités.
Il soupira.
" J'essaierai de lui parler demain. Même s'il a besoin de temps et de solitude, c'est important qu'il sache que nous ne l'abandonnons pas à sa douleur. Ce n'est pas pour ça qu'il m'ouvrira la porte, mais je sais que ça a son importance."
Je suis passé par là., songea-t-il.

Marthe opina du chef.
-Je me fie à ton jugement. Et je suis convaincue que tu es le mieux placé pour l'aider, ne serait-ce que par ta vocation. Thibault le pourrait peut-être aussi mais... Étienne le connaît beaucoup moins.
Elle soupira.
-Il faudrait que les gens le voient... ajouta-t-elle, embarrassée. Ils sont compréhensifs, bienveillants, personne ne lui reproche quoi que ce soit, bien au contraire. Mais justement : en demeurant invisible, il va finir par les inquiéter. Enfin, l'arrivée de nos nouveaux compagnons fera sans doute diversion un moment, lui laissant le temps dont il a besoin.

" Prétendre que tout va bien, quand tout va mal, c'est... vraiment compliqué, dit le Luménien. Je ne crois pas, malgré l'inquiétude que ressentent les gens, qu'on puisse exiger autant d'Etienne. Il est très affecté, c'est normal qu'il le soit, et je crois que... les gens doivent pouvoir transférer leur foi sur toi, ou Hubert, ou moi... le temps nécessaire à sa guérison."
Il hésita, n'avait pas envie de ramener la chose à lui, et finit par renoncer à mentionner son expérience du Temple luménien, au lendemain de son calvaire. Mais ce que vivait Etienne était somme toute similaire : la pression d'un rôle à jouer, les espoirs à porter, l'attente des autres, ses ouailles, persuadés qu'il se relèverait.
Albérich, lui, ne s'était relevé qu'un an plus tard, loin de tout ça.
" Je ne suis pas certain, en fait, que je suis le mieux placé. Peut-être même suis-je le moins bien placé. Je suis enclin à lui laisser la latitude de se replier sur lui-même tant qu'il en a besoin, d'abandonner, même, si c'est ce qu'il désire, alors que la communauté exige qu'il soit fort."
Et peut-être Etienne était-il fort, peut-être serait-il capable de balayer son désespoir en quelques jours, ou de faire illusion.
Leurs situations étaient différentes et malgré le reflet de lui-même qu'Albérich devinait chez le chevalier, il devait admettre qu'ils n'étaient pas la même personne, qu'ils n'avaient pas la même histoire, qu'ils ne partageaient pas les mêmes traits de caractère ni même les mêmes élans.
Est-ce que perdre son dieu équivalait à perdre son amour ?
Est-ce que voir son rêve balayé était aussi destructeur que la torture ?
Oui, Albérich le comprenait, mais dans le même temps, il ne savait rien. Prédire le destin du chevalier était hors de sa portée. Il ne pouvait qu'être là et veiller.

-La Communauté n'exige et n'exigera rien de lui : elle s'inquiète de son état, c'est tout. Mais lui refusera de partir : tu as bien vu qu'il a fallu l'arracher à sa geôle... Mais quitte à rester, autant que cela n'achève pas de le détruire, autant qu'il puisse se relancer et se rendre utile : c'est sans doute ce dont il a besoin. C'est ce qu'il voulait, même, sauf qu'il n'envisageait son utilité qu'en partageant d'une certaine manière le sort des prisonniers...
Elle poussa un nouveau soupir.
-Le souci, c'est que s'il n'arrive pas à se ressaisir seul tout en tenant à tout crin à demeurer avec nous, il faudra quelqu'un pour l'aider. Et si ce n'est pas toi... Qui d'autre ? Pas moi : j'ai déjà assez de mal comme ça à garder le cap et je ne suis pas convaincu ni d'être de bon conseil, ni d'être la meilleure confidente qui soit. Mais qui, alors ?

" Je n'ai pas dit que je n'irais pas le voir. Je le ferai demain. Mai j'ai l'intention de l'écouter, pas de le convaincre de quoi que ce soit. Il doit prendre la mesure de sa perte. C'est quelque chose qui peut prendre du temps."
Il soupira.
" Dans le même temps, j'entends ce que tu dis, Marthe. Mais je pense que nous n'avons pas à présumer de ce qui est bon pour lui. Nous n'en savons rien. Si je vais le voir, je ne lui imposerai rien. Rien n'est plus insupportable, quand on est dans le trou, que les gens qui pensent comprendre alors qu'ils ne comprennent rien."

Elle hocha la tête.
-C'est vrai. Mais il y a des gens au fond du trou qui ont besoin d'aide, qui n'en ont pas conscience, et si personne n'en prend conscience pour eux et ne les soutient de gré ou de force, ils continuent à sombrer jusqu'à ce que ce soit irrémédiable. Tout le monde n'a pas la force de se remettre seul.
Elle secoua la tête.
-Mais je n'ai aucune expertise en la matière, alors je m'en remets à toi. Je ne suis pas du genre à imposer quoi que ce soit à autrui, de toute façon.

" De toute façon, je crois que l'idéal, c'est que nous y allions un peu tous. Etienne prendra ce qu'il voudra dans ce que nous lui offrons... mais il n'a pas besoin de formules magiques ou de conseils miracles, il a besoin avant tout de notre amitié. Et c'est ce que nous pouvons tous lui apporter, même si nous sommes maladroits, mal à l'aise ou incertains... Tant pis si certains se contentent de l'étreindre tandis que d'autres le secouent pour qu'il se relève. Je crois que... nous devons faire ce que nous pouvons... et c'est comme ça que nous l'aiderons. En étant authentiques."
Il sourit à la juge.
" Ne nous posons pas trop de questions. J'irai demain. Je te dirai comment ça s'est passé. Et nous progresserons au jour le jour. Etienne mérite la lumière. Il la retrouvera, avec ou sans nous, ici ou ailleurs, demain ou dans dix ans. Mais avoir foi en cela, c'est suffisant."

-Tu ne m'en voudras pas... je vais quand même croiser les doigts pour que cela se produise avant dix ans. Une décennie de ténèbres représenterait le tiers de son existence... Une éternité, en somme.
Elle esquissa un sourire.
-Allez, mais je vais m'efforcer d'être Lathandrite. Au moins un peu.

" C'est une philosophie qui gagne à être connue." dit le Luménien avec un sourire, tout en s'inquiétant du fait que la juge n'avait finalement retenu que l'élément le plus noir de son discours.
Il termina son assiette.
" Bon, allons à la rencontre des valeureux qui ont traversé les Landes. Je vais dénicher Hubert pour nous ouvrir le chemin... Peut-être que je resterai en arrière... Il n'est sans doute pas prudent que nous y allions tous les trois en même temps, et Hubert est nécessaire. J'irai leur dire bonjour quand tu reviendras."
Il alla ensuite chercher le paladin puis ils prirent la direction de la salle de téléportation.

Marthe les fit s'immobiliser en cours de route.
-Attendez...
Elle prit un air concentré.
-Nous n'avons même pas décidé si nous leur demanderions de rester là-bas pour cette nuit ou... si nous les conduirions immédiatement ici, en ne laissant au fort que le matériel, les chevaux et une petite garnison.

" Je pense que l'idéal serait qu'ils passent une première nuit là-bas, dit Albérich. Quitte à ce que Frida nous rejoigne pour un conseil... Nous avions parlé de laisser une équipe de surveillance au fort... Ce sera peut-être un peu compliqué à organiser s'ils viennent de débarquer...
— On peut peut-être aviser sur place, proposa Hubert. Vous aviez de toute façon déjà réfléchi au moyen de les accueillir : les salles ont été sélectionnées et préparées par les gars de l'intendance. Voyons avec Frida et ceux qui seront sans doute devenus ses conseillers par la force des choses."
Un pli barra son front une seconde.
" Vous savez que je vais vouloir les sonder... Introduire des étrangers dans notre refuge est... pour le moins risqué.
— Mais j'ai glyphé l'entrée de la salle, de toute façon. Si une âme mauvaise la traverse, elle aura une surprise désagréable."

Marthe acquiesça et se remit en marche.
Ils gagnèrent la salle des symboles, lesquels furent réactivés par Hubert.
L'un après l'autre, ils marchèrent sur celui amenant au fort déjà exploré.
L'un après l'autre, ils réapparurent dans la petite pièce dépouillée.
L'endroit n'était pas du tout aussi silencieux que lors de la précédente visite du paladin.
Il y avait des bruits de bottes dans les couloirs, le son caractéristiques des mailles, l'écho d'ordres qu'on distribue...

Hubert sourit à la juge, ravi.
" Ils sont là." dit-il, avant de quitter la petite pièce pour aller à la rencontre de leurs alliés.
Hormis Frida et les quelques hommes qui l'avaient accompagnée, il ne connaissait personne, et très objectivement, le débarquement de trois cents personnes supplémentaires n'était peut-être pas une si heureuse nouvelle. Mais en même temps, c'était comme un signe que rien n'était perdu, qu'ils pouvaient encore se battre pour faire exister la communauté : tous ces gens y avaient cru, après tout !
Il décida de se présenter à la première personne qu'il croiserait pour se faire conduire auprès de la rôdeuse.

Il fut repéré par trois hommes d'armes qui, surpris de voir un étranger surgir brusquement, posèrent par réflexe la main sur le pommeau de leur épée. Néanmoins, on avait dû les prévenir qu'ils auraient de la visite, si bien qu'ils permirent à Hubert de se présenter et, quand se fut chose faite, se mirent en devoir de le conduire auprès de la conseillère.
Il gagna ensuite la cour. On y avait déjà dressé une vaste tente pour y installer les écuries ; sur les remparts, des hommes patrouillaient.
Et au milieu de cela, Frida, qui se dirigea vers lui sitôt qu'elle l'aperçut.
-Contente de te revoir,fit-elle en lui tendant la main.
[/I]

Hubert négligea complètement la main tendue et donna l'accolade à Frida, avant de la relâcher.
" Je suis heureux de te voir, moi aussi. De vous voir tous, en fait."
Il recula ensuite d'un pas, pour laisser Marthe saluer la rôdeuse à son tour.

Elle se saluèrent amicalement mais sans effusions. L'une comme l'autre étant du genre réservé, ce n'était pas très étonnant.
-Nous sommes arrivés il y a presque deux heures, expliqua la rôdeuse, entrant d'emblée dans le vif du sujet. Nous avons quasiment achevé de prendre nos quartiers. Je n'avais pas pu en discuter avec vous auparavant mais il m'a semblé peu réaliste d'installer tout le monde au palais dès ce soir. De surcroit, ce qui plane au-dessus de la cité n'est guère engageant...

" Non... mais nous savons que le palais est protégé... Nous n'avons pas de certitudes pour cet endroit. Ça ira sans doute pour cette nuit, cependant. Nous aviserons ensuite."
Il sourit à nouveau. Il s'était bien entendu avec la rôdeuse pendant la première partie du voyage... La retrouver au conseil serait agréable.
" Tu devras nous raconter... qui tu nous amènes... et nous parler de ce que tes compagnons pensent de la situation... Nous sommes un peu démunis, pour l'instant. Nous travaillons à une solution... mais nous ne l'avons pas encore trouvée. Marthe disait que tu avais un adepte de Tymora parmi tes recrues ?"

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une cité perdue