[Lieu] Une cité perdue

[Taliesin]

Ceux-ci trouvèrent le mécanisme en moins de cinq minutes - exactement le genre d'exploit dont il fallait espérer qu'il ne parvienne jamais aux oreilles d'un certain barde - puis le suivirent hors de la pièce.
Les éclaireurs vinrent bientôt faire un premier rapport : ils avaient noté des traces de passage récent dans l'édifice. Elles ne dataient sans doute pas du jour même mais remontaient tout au plus à l'avant veille...
Et puisqu'il ne s'agissait pas des empreintes erratiques de morts-vivants en maraude, une seule conclusion : les Ithiliens avaient visité les lieux.

[Hubert de Maleval]

Hubert espéra qu'ils n'avaient pas trouvé ce qu'ils cherchaient eux-mêmes. Pourtant, les chances étaient élevées qu'ils aient disposé, parmi leurs hommes, de personnes capables de fouiller ces ruines qu'ils convoitaient. Il fallait compter sur Tymora et sur les protections célestes que les Anciens n'auraient pas manqué d'ériger. Cela dit, il n'y en avait pas eu pour protéger les artefacts sunites et lathandrites.
" Soyons sur nos gardes. Les Ithiliens peuvent avoir placé des glyphes ou des sorts d'alarme, ou je ne sais quoi encore... Si quelqu'un peut détecter la magie ou repérer les signes de ce genre de sortilèges... C'est le moment. On reste groupés. En cas d'alerte, repli immédiat dans la salle de téléportation."

[Taliesin]

Il lui apparut rapidement que les recherches ne seraient pas aussi rondement menées qu'au temple.
D'abord, compte tenu des traces repérées, il fallait se déplacer avec prudence, faire preuve d'une vigilance accrue.
Ensuite, l'édifice était beaucoup plus grand, comportait deux étages, et ils n'avaient pas encore la moindre idée de l'endroit où débuter les recherches.
Pour autant, les Tymorans étaient loin d'être découragés ou effrayés par l'ampleur de la tâche : ils demandèrent simplement à visiter l'entièreté des lieux, préambule qui leur semblait indispensable;

[Hubert de Maleval]

Ils étaient leurs spécialistes, aussi Hubert organisa-t-il leur progression en fonction de leurs souhaits. Quand il s'en souvenait, il tâcha de leur dire ce qu'ils avaient trouvé où... Après tout, ils avaient déjà ramené armes et armures de cet endroit. Sans doute les Ithiliens avaient-il pris le reste... Ils avaient en tout cas dû réaliser que quelqu'un était passé avant eux...
De son côté, il demeura vigilant, les sens aux aguets, pendant tout le temps que durait leur travail. Si la nuit les rattrapait, il leur faudrait rentrer et poursuivre le lendemain... Avec le téléporteur, la chose devenait nettement plus aisée.

[Taliesin]

Ainsi arpentèrent-ils la caserne de long en large, des caves au deuxième étage.
Frida et ses éclaireurs scrutaient chaque couloir avec attention, épaulés par les clercs en quête du moindre signe indiquant la présence d'un sort laissé derrière eux par les Ithiliens. Mais pas seulement : mine et papier à la main, ils dessinaient le plan des lieux. Ils tenaient d'ailleurs à voir l'intérieur de chaque pièce, pour les reporter sur leurs esquisses.
Cela finirait sans nul doute par porter ses fruits. Pour l'instant, cependant, cela prenait du temps.
La visite permis néanmoins à Hubert de constater que les Ithiliens n'avaient pas cause de désordre dans l'édifice. Et s'ils avaient pris quoi que ce soit, ce n'était vraiment pas grand chose.

[Hubert de Maleval]

Hubert devinait que les Tymorans cherchaient à repérer un endroit où il y aurait une pièce cachée, un volume non ouvert, et qu'ils concentreraient leurs efforts à cet endroit. Ce n'était pas une mauvaise technique, bien sûr, mais il fallait avoir l'oeil et la patience... et espérer que l'éventuelle salle secrète n'était pas au sous-sol ou sur l'extérieur du bâtiment, dont ils ne connaissaient pas la forme exacte. Mais le paladin avait foi en leurs investigations, et même si elles s'avéraient vaines, au moins auraient-ils fait tout ce qu'ils pouvaient.
De son côté, avec les soldats ordinaires, il se sentait un peu inutile... mais leur présence était une sécurité en cas d'imprévu...

[Taliesin]

Sans nul doute. Mais... Son sentiment d'inutilité ne fit que croître, de même probablement que celui de ses compagnons.
Ils purent toutefois admirer - pour certains à nouveau - la splendeur de l'édifice pour lequel le terme de "caserne" paraissait presque insultant. Certes, son rôle militaire était flagrant, de même que le primat accordé à l'utilitarisme dans son organisation générale. Pour autant, il ne manquait ni de majesté, ni de beauté et aurait pu constituer une commanderie dont bien des ordres auraient été jaloux...
La lumière commençait à décliner, signe que l'après-midi touchait à sa fin, lorsque les Tymorans demandèrent la permission d'observer le bâtiment depuis l'extérieur.

[Hubert de Maleval]

Hubert hésita puis décida de consulter Frida sur cette question, tout en conviant Tara au conciliabule.
" La nuit tombe et j'imagine que si nous voulons être vraiment prudents, effectuer cette reconnaissance nous prendra plus d'une heure... Je serais d'avis de reporter ça à demain. Nous avons déjà bien progressé et revenir ici ne prendra que quelques secondes, après tout... Mais c'est mon opinion... et je suis prêt à entendre la vôtre."

[Taliesin]

Frida adopta la même position que lui. Tara, qui aurait été pour finir le travail en une fois, ne protesta pas : ce qu'ils avaient vu et dessiné serait déjà largement suffisant pour qu'ils puissent émettre des hypothèses solides qui seraient aisément vérifiable le lendemain matin.
Le petit groupe se reforma donc - non sans un bref soupir de Tibère, qui regrettait évidemment qu'on rentre déjà au bercail - puis sans tarder et sans encombre, rejoignit la sécurité du palais.

[Hubert de Maleval]

Hubert était satisfait de leur expédition et il remercia chacun et leur donna rendez-vous au même endroit dès le lendemain matin pour terminer ce qu'ils avaient commencé. Il repartit ensuite, en leur compagnie, vers les zones plus habitées de la communauté. Il avait envie de profiter des thermes, peut-être d'une passe d'armes ou deux avant de passer à table, en fonction de l'heure qu'il était. Mais globalement, la journée avait été bien remplie, et il se sentait plutôt serein.

[Taliesin]

Même s'il était probable qu'ils soient plus - voire beaucoup plus - fréquentés qu'auparavant les thermes étaient suffisamment vastes pour qu'il s'y trouve une place à coup sûr. Quant à la salle d'entraînement, il lui suffit de passer devant pour constater qu'elle n'était pas vide, loin s'en fallait.

***

Des heures plut tôt, Albérich s'était fixé comme programme de discuter avec Étienne, avec Alaric et avec Marthe. Le premier ne serait pas difficile à trouver : il avait dû se renfermer dans sa chambre. Le second, un sortilège lancé dans les souterrains suffirait à le contacter. La troisième, en revanche... Il penierait à la trouver, si elle n'avait pas envie qu'on la trouve.

[Galathée]

Il décida de procéder du plus simple au plus complexe et alla, pour la troisième fois, déjà, se planter devant la porte du chevalier. Prenant une profonde inspiration, il frappa.
" Etienne ? Est-ce que je peux entrer ?"
Il n'espérait pas que le jeune homme accepte, mais... qui ne tente rien, n'a rien.

[Taliesin]

Il entendit un soupir. Pas un soupir désespéré : un soupir agacé.
-Non seulement tu ne renonces pas facilement mais en plus, tu redoubles d'efforts à la moindre occasion... lâcha le chevalier.
Silence.
-Je sais qu'il est inutile de résister aux gens têtus comme des mules, à moins d'être prêt à y consacrer toute son énergie. Alors entre, va, et ainsi soit-il.

[Galathée]

Albérich resta stupéfait : il ne s'était pas attendu à ce qu'Etienne accepte... et il était très embarrassé de s'être montré aussi importun. Mais puisqu'il avait obtenu le sésame tant attendu, il ne pouvait faire autrement et il entra, penaud et ravi à la fois.

[Taliesin]

Le chevalier était tel qu'il l'avait entrevu à l'assemblée : beaucoup plus pâle qu'à l'ordinaire, beaucoup plus maigre aussi, avec une barbe lui mangeant le visage - quoi qu'on l'eut légèrement taillée pour la rendre présentable - et des yeux rougis entourés de cernes sombres. Il portait les mêmes vêtements que lors de sa libération, usés mais... propres, indéniablement.
Dans le petit salon qu'on lui avait choisi pour chambre, une couche était aménagée. Elle comportait une couverture neuve en plus d'une ancienne, signe que quelqu'un... l'avait obligé à accepter le lot Commun de la Communauté, à savoir de profiter de ce qu'avait rapporter la colonne.
-Que veux-tu ? s'enquit Étienne.

[Galathée]

Albérich n'osa pas pénétrer plus avant dans la pièce, demeurant près de la porte.
" Je voulais juste... te remercier pour ton intervention tout à l'heure. Je sais que ça n'a pas dû être facile... et que tu partages sans doute le point de vue de Marthe a bien des égards... mais votre soutien à tous deux... le tien, surtout... signifie beaucoup pour moi. Et je voulais juste te dire que... j'espère que nous pourrons... réussir, simplement."
Il fit un pas en arrière.
" Mais je ne veux pas te déranger davantage. Sache juste que... le jour où tu voudras sortir... Je serai là au besoin."
Il s'apprêta ensuite à sortir. Sa prochaine étape était le couloir des caves, puis les souterrains et Alaric.

[Taliesin]

Mais Étienne reprit la parole avant qu'il n'ait pu ne serait-ce que poser la main sur la poignée de la porte.
-Je n'ai fait que mon devoir, tu sais. C'est à cause de moi que sont nées ces idées idiotes de... nouvelle société, de cité idéale. C'est à cause de moi, aussi, que le retour à la réalité est... si brutal. Dès lors, il était normal que je soutienne les plus sages d'entre nous, les plus courageux, aussi, donc les plus à mêmes de sauver ce qui peut encore l'être, à commencer par les vies de ceux que j'ai embarquée dans cette expédition stupide.
Il soupira.
-Je vous fais entière confiance pour y parvenir. Je vous crois même capables de réussir à bâtir quelque chose ensuite. Quelque chose de moins utopique que ce que j'avais imaginé, peut-être, mais quelque chose, surtout, de beaucoup plus ancré dans la réalité, donc de beaucoup plus viable. Car où que l'on aille, la réalité nous rattrape toujours : mieux vaut être préparé si on ne veut pas choir de trop haut.

[Galathée]

Albérich pensa le détromper, mais n'en fit rien. Il avait souvent songé au moment où la réalité rattraperait le rêve et désormais, il était navré d'avoir vu juste. Cependant, Etienne avait tort sur un point...
" Ce qui s'est produit n'a pas grand chose à voir avec l'essence de ton projet, Etienne. Ce sont les richesses de Clairétoile qui attirent les convoitises... Elles l'auraient fait même si nous avions été gardés et méfiants. Ceux qui nous menacent auraient simplement... attaqué plus durement."
Il était gêné de cette expression de confiance, car elle était l'aveu d'un renoncement qu'il trouvait terriblement triste.
" Nous allons gérer la situation au jour le jour et quand la lumière reviendra... Nous prendrons le temps. C'est le plus important. Prendre le temps de faire au mieux."

[Taliesin]

-J'espère que vous l'aurez, ce temps... Mais je suis sûr que vous ferez au mieux. D'ici là... Quand je serai un peu moins... hum, incapable, disons, je ferai mon possible pour vous aider et, ce faisant, tenter de réparer ce qu'a causé mon égarement.
Il secoua la tête.
-Bon courage pour le reste de ton programme de la journée, Albérich.

[Galathée]

Albérich pinça les lèvres, hocha la tête et ouvrit la porte.
" Je sais que c'est mission impossible mais... ne sois pas trop dur avec toi-même. Je reviendrai... un autre jour, promis."
Puis il sortit et descendit vers les caves pour mener son contact avec Luménis.

[Taliesin]

Les souterrains ne lui réservèrent aucune mauvaise surprise : les Ithiliens n'avaient pas encore décidé de les assiéger.
Quant à Alaric, il ne fut pas difficile à contacter.
Albérich, dit-il simplement en manière de salut.

[Galathée]

Le Luménien ne savait pas exactement par quel bout prendre cette communication. Il l'avait promise à l'aubemestre luménien, cependant.
Tardivement à nouveau. Entrevoyons pistes vers solution. Situation demeure précaire.

[Taliesin]

Silence.
Courage. Antelucas passe vitesse supérieure : manœuvres navales, convocation noblesse, consul Ithilion témoin de cela, fera remonter Prince.

[Galathée]

C'était une chance... et une malchance à la fois.
Merci. Avons libéré Etienne de Fontbrune. Espérons menaces suffisantes.

[Taliesin]

Irons crescendo si nécessaire. Possibilité vous envoyer renforts si besoin.

[Galathée]

Albérich se demanda s'il était déjà allé trop loin, si l'ingérence que tout le monde craignait n'était pas déjà en marche et impossible à freiner.
Compris. Prématuré pour l'heure mais qui sait. Contact après-demain. Merci.
Il avait épuisé ses mots sans pouvoir lui dire convenablement au revoir. Il espéra que l'aubemestre comprendrait.

[Taliesin]

Au revoir, fit l'aubemestre d'un ton tout sauf offusqué.
Puis la communication fut rompue.

[Galathée]

Troisième étape, Marthe.
Albérich avait l'intention de la chercher sérieusement, en demandant rapidement de l'aide : il interrogerait les gens qu'il croisait, espérant que quelqu'un pourrait le guider. Peut-être Giovanni, Roxane ou les instituteurs... Il comprenait son trouble mais il avait besoin d'elle. Et malgré tout ce qu'elle disait, il avait l'impression qu'elle avait plus que jamais besoin d'eux.

[Taliesin]

On avait vu les instituteurs monter au premier.
C'est donc là qu'il se dirigea et qu'il finit par trouver, dans une vaste pièce aux allures de bibliothèque, l'Académie au grand complet - Giovanni y compris mais lui-même excepté. Tout le monde leva les yeux à son entrée et il vit des expression embarrassée, fermées mais... pas d'hostilité franche.
-Albérich ? s'enquit Agathe. On peut faire quelque chose pour toi ?

[Galathée]

Pour moi, rien, pour la communauté, beaucoup, songea-t-il, mais il était conscient de les déranger et il regrettait suffisamment cette tension pour ne pas envenimer les choses.
Il comprenait leur déception mais pas cette froideur : même si ce n'était pas ce qu'il attendait de leur part, il aurait trouvé un peu de reconnaissance et de soutien beaucoup plus adaptés à la situation.
" Marthe, je voulais te parler. Si tu as cinq minutes..."
Ils allaient l'envoyer sur les roses, il le sentait. Arguer que la juge avait besoin de temps, d'espace, de digérer sa déconvenue. Il se prépara déjà à la colère que cela allait susciter en lui. Le tout était de la garder bien sagement à l'intérieur. Ils ne comprendraient pas.