La Couronne de Cuivre

Le grimoire de Benny s’était ouvert à une page fort utile : Charme Anti-Grimlins. Bon, ok, ce n’était pas utile pour tout de suite, ni peut-être pour plus tard, mais dans une aventure prochaine, pourquoi pas. Fort heureusement, Bellatrix l’aida à passer par la fenêtre et, tous deux purent quitter la maisonnette. Peu après, la marmite se mit à déborder. Elle tremblait furieusement alors qu’à l’intérieur, des étincelles jaillissaient. La boule de cristal était sur le point d’être détruite et, visiblement, cela n’allait pas être sans conséquences. L’air de rien, le défunt rouquin s’avançait vers la chaise de sa démarche vacillante.

Derrières les deux enfants, la maisonnette disparaissait entre les arbres. Avant que ce ne soit totalement le cas, il y eut une explosion, un flash flamboyant supplantée peu après par une lueur mauve et diabolique. On entendit, derrière la déflagration, la marmite qui se renversait et aussi quelque chose qui se brisait, volait en éclats. Ce devait être la boule de cristal ou les vitres de la petite bâtisse. Quoi qu’il en soit, c’était là un coup porté à la sorcière. Elle ne pouvait le tolérer !

Emergeant du noir de la nuit, voilà la vieille dans sa robe informe. Elle se manifesta si soudainement que le duo ne put l’éviter et lui rentra dedans. Ils eurent un peu l’impression de heurter un mur. La sorcière était solide, ça c’était sûr. Les voilà au sol et elle qui les fixait.
« Vandales ! Ma cuisine, mon repas, ma boule de cristal ! Ha, de mon temps, il y avait plus de respect pour les anciens ! Je vais vous apprendre le respect, moi, vous allez voir ! Allez, debout et plus vite que ça ! Ho, j’oubliais, toi, la demi-fille, si tu remues les lèvres, je te coupes la langue. Et si tu touches à ton bouquin, je te le fais bouffer ! Et toi qui aime tant l’horreur, toi qui par deux fois tu as tenté de me tromper alors que je t’offrais une chance de devenir une vraie sorcière, tente quoi que ce soit et je vais te montrer ce que c’est que l’horreur, la vraie ! »
La vieille croisa les bras.
« Juste une dernière chose idiote. Le rouquin, ça n’a jamais été un vrai enfant, juste une de mes créations. Pauvre idiote. Si on trouvait des enfants si facilement dans la forêt, ça se serait ! »

Bellatrix était encore en colère. Certes, le rouquin n'était pas un vrai enfant mais ce n'était pas non plus un mannequin en mousse. Et puis, il y avait Benny qu'elle voulait protéger. Elle ne voulait pas que la sorcière lui fasse du mal, ça non. Elle n'avait pas intérêt. Même pas en rêve ! La main dans une poche touchait le croquis. Elle espérait pouvoir l'animer par la simple force de la pensée. On ne savait jamais. Après tout, certains cassaient des briques ou volaient.

Elle porta sur la vieille un regard noir de colère. Oui, elle la défiait.

"Vous devriez faire attention parce que j'ai un grand pouvoir. Vous savez, ce n'est pas pour rien si mon papa met des robes. Et il se débrouille très bien avec un balai, si vous voyez ce que je veux dire."

« De mieux en mieux. Et bien, si tu as des pouvoirs, montre-les ! En attendant, j’ai dis debout ! »
La sorcière tendit la main et ce fut les branches des arbres qui en se penchant relevèrent les enfants non sans les griffer au passage. Juste après, il y eut, non pas une, mais deux surprises pour la vieille.

Tout d’abord, la petite feuille de papier s’échappa de la poche de Bellatrix et tomba au sol. Là, en un instant, l’espèce d’affreux épouvantail qui y était illustré prit corps. Bien plus grand que sa créatrice, il s’était placée devant elle, comme pour la protéger. Et, à en juger par sa sinistre apparence, il en était tout à fait capable. Ensuite, Benoît se volatilisa.

Pour Benoît : « Bien. Très bien. C’est entre nous deux alors. Tu es plus sorcière que je ne m’y attendais. Voyons voir comment tu t’en sors dans un duel de magie. »
Oui, la vieille avait été surprise mais pas impressionnée et c’était un peu inquiétant. De sa voix chevrotante, elle déclama une formule aux sombres intonations tout en se reculant de quelques pas. L’instant d’après, une araignée gigantesque sortit du sol en le faisant trembler, un vrai monstre d’horreur.

Pour Bellatrix : « En garde, petite ! »

Bellatrix était encore très en colère et ce fut tout bêtement cela qui l'empêcha d'avoir peur. Et si elle fut surprise d'avoir invoqué l'épouvantail, elle ne le montra pas. Les effets spéciaux dans les films d'horreur, elle les connaissait par cœur. Pire que ça, elle les appréciait. De magie, elle n'en avait pas. A part le prétendu pouvoir que lui avait donné la vieille. Celui de transformer quelqu'un. Peut-être que si elle y croyait très fort, mais alors, vraiment très fort, peut-être que ce pouvoir existerait-il en vrai.

"Vilaine sorcière. Je te transforme en pierre."

Elle pointa son doigt sur la vieille.

"Pas en Piotr, mais bien en pierre."

Elle espéra aussi que son ami l'épouvantail allait les protéger. Absorbée par le duel de magie, elle ne s'était pas rendu compte de la disparition de Benny. Sans quoi, elle aurait perdu toutes ses forces.

Malheureusement, la tentative de la fillette ne provoqua qu’une grimace de dédain chez la sorcière.
« Ho non, il en faudra plus que ça, j’en ai bien peur. Par contre... »
Elle tendit son doigt noueux vers l’épouvantail et un éclair mauve le frappa, provoquant à l’impact un nuage de fumée. Peu à peu, il se dissipa. Alors Bellatrix constata que son redoutable gardien avait été changé en petite souris blanche. Le fragile animal était toujours disposé à protéger sa maîtresse mais que pouvait-il faire au juste face à une arègnée géante et aux maléfices de la vieille ?
« Moi, j’y arrive. C’est triste. Tu m’étais sympathique. Pas de niaiserie, une volonté certaine, un vrai potentiel... tu aurais pu devenir une sorcière digne de ce nom. »
L’araignée s’avança, la souris prise d’un courage suicidaire la chargea et...

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