La Couronne de Cuivre

L'écureuil demeura bien caché, refusant de répondre aux injonctions de la rôdeuse. Pendant ce temps, Reynald, empourpré, s'était rapproché de la couche.
" C'est entre lui et moi, tu n'as pas à le savoir ! s'exclama-t-il, faussement outré. Et ne te moque pas, maudite, ou il t'en cuira !"
Il mit immédiatement ses menaces à exécution et tira brusquement la couverture, la laissant à son tour parfaitement nue sur leur couche, tandis qu'il s'emmitouflait et filait à l'autre bout de la grotte.

Astrée lui tira la langue, mais ne put que rire de plus belle, incapable de reprendre son sérieux immédiatement.
Elle finit par se lever, réussissant à retrouver son calme malgré encore quelques traces d'amusement dans le regard.
- Pfff... Tout ça c'est juste un prétexte pour que je vienne te supplier...
Elle s'avança doucement vers lui, sans la moindre pudeur.
- Voyons, toi, un clerc... tu ne va pas me laisser mourir de froid quand même ? Est-ce qu'il faut, peut-être, que je te supplie à genoux pour avoir un petit bout de couverture ?, ajouta-t-elle commençant à joindre le geste à la parole.

" Quelle horreur, non !" fit-il en la relevant aussitôt et l'enveloppant dans sa couverture.
Il la serra tout contre lui, lui communiquant sa chaleur tout juste retrouvée, eut un sourire à l'instant où son désir le trahit, mais retrouva une expression plus sereine, plus sérieuse aussi.
" Tu as l'air fatiguée, ma mie. Radieuse mais fatiguée. Je suis en train de te voler un sommeil nécessaire..."

- Oh, tu peux bien me voler tout le sommeil que tu veux... murmura Astrée en se blottissant contre lui. C'est si agréable... Je me rattraperai demain matin, ou un autre jour, je n'en suis plus à ça près...
Mais il avait raison, elle se ressentait de la fatigue du voyage, des émotions des jours précédents, du manque de sommeil.
Elle étouffa un bâillement.
- Je crois qu'aucune berceuse ne sera nécessaire pour m'endormir ce soir... Mais j'ai adoré celle d'hier soir. D'où vient-elle ? questionna-t-elle en l'entrainant avec douceur vers leur lit de fortune.

Ils se réinstallèrent, arrangèrent la couverture pour qu'elle les couvre au mieux et il prit sa position favorite, appuyé sur un coude.
" C'est une chanson en sylvestre que m'a enseignée autrefois un barde du nom de Burrhus. Elle parle de la beauté de la nature et du monde qui nous entoure, de la nécessaire présence de chaque être vivant, de la puce à l'ogre. Je ne parle pas bien cette langue, mais la mélodie me plaisait... et elle a des allures de berceuse, oui, même si ce n'est pas son objectif premier... Veux-tu que je te la chante à nouveau ?"
Le feu déclinait doucement, rougeoyant désormais dans la caverne, tandis que le tonnerre roulait, plus proche.

Astrée lui sourit.
- Oui, j'adorerais. La mélodie est très belle, son message l'est également... Et les sonorités aussi... Je ne savais pas que tu connaissais cette langue.
Elle plongea ses yeux dans son regard clair, et tendit la main pour lui caresser la joue dans un élan de tendresse.
C'était incroyable tout ce qu'il connaissait. Toute une vie sur les routes...
Elle ferma les yeux et se blottit contre lui. Tellement bien...

Il chanta à nouveau, à mi-voix, juste pour elle, mots murmurés dans le creux de son oreille, l'entraînant dans la pénombre des sous-bois, jusqu'à la cime des grands arbres, sur la piste du chevreuil et le long d'un ruisseau au lit moussu. Et comme la veille, elle glissa dans le sommeil, sans en prendre conscience, portée par la mélodie délicate de la chanson, l'accent étrange du sylvestre, qu'elle pouvait imaginer dans la bouche des dryades et des farfadets, des mille créatures étranges de la forêt lointaine... Et ses rêves furent verts et vivants, odorants et sauvages...

" Astrée..."
Il faisait complètement noir. Elle n'y voyait rien, nulle part, sentait juste la main de Reynald sur son épaule. L'entrée de la caverne était à peine plus claire que l'univers uniformément sombre autour d'elle.
" Ecoute..."
Il avait raison. Il y avait un bruit au dehors. La pluie tombait, légère, le vent soufflait, l'orage s'était tu, mais on entendait quelque chose qui farfouillait à l'extérieur, quelque chose de gros ou de nombreux, quelque chose qui se rapprochait petit à petit...

Quête : Equité

Elle était bien, au fin fond d'un rêve paisible, dans une forêt accueillante, vibrante de myriades de vies petites ou grandes, du petit coléoptère sur la feuille du chêne jusqu'au cerf bondissant. A mille lieux de la grotte où elle dormait si profondément. Elle entendait encore la mélodie résonner en elle, si belle. Il lui fallut du temps pour émerger...
Elle se redressa lentement, sans bruit, lorsqu'elle comprit qu'il y avait quelque chose au-dehors. Sa première pensée, totalement stérile, fut qu'elle était pas très maligne de s'être endormie nue dans un environnement inconnu. Mais il était trop tard pour y remédier. Elle s'efforça juste de rester couverte un minimum, par réflexe. La main de Reynald sur son épaule la rassurait, quelque part, lui donnait confiance. Elle posa à son tour la main sur la sienne pour la presser doucement, signe qu'elle avait compris. Puis elle fit la première chose qui lui venait naturellement à l'esprit : se concentrer pour essayer de percevoir qui était l'être vivant inconnu qui se rapprochait. Un animal, sans doute, de grande taille. Ou plusieurs.

Quête : Equité

Mais elle ne parvint pas à isoler l'esprit de la créature. Non... Elle frôla des esprits effrayés, d'oiseaux, de petits mammifères, qui filaient dans tous les sens.
" Je sens, je sens...
— Mmmm... Pour mmmmanger...
— A moi ! A moi !
— La femme pour moi, j'aime mieux les femmes, c'est plus juteux.
— Chhhhhhhhhhhht... Vous allez les réveiller.
— A moi !"
Il y eut un choc, puis un gémissement.
" On te dit chut.
— Oui, mais aïe."
Reynald s'était levé, doucement, mais les ténèbres étaient totales, les laissant bien démunis pour affronter ce qui était en train de s'approcher.

Quête : Equité

Astrée blêmit. Ce n'était pas un animal. C'étaient des êtres vivants de grande taille dotés de parole... et surtout désireux de les dévorer. Peu importe leur nature, finalement, peut-être des ogres ?
Elle se serait sentie nettement moins démunie et désarmée si elle avait au moins revêtu une tunique, mais elle chassa résolument cette pensée irrationnelle de son esprit. Ce n'était pas d'une tunique dont elle avait besoin, mais d'une arme. Encore que dans l'obscurité absolue qui les entourait, elle doutait d'avoir la moindre chance de s'en servir efficacement. Ils n'y voyaient goutte, alors que ça ne semblait pas vraiment gêner leurs adversaires. Elle recula néanmoins lentement dans la direction approximative où ils avaient laissé leurs affaires, tâtonnant à la recherche de son bâton. Peut-être que Reynald pourrait faire quelque chose de plus efficace qu'elle. Certainement, même...

Quête : Equité

Reynald l'attrapa maladroitement par le bras comme elle arrivait à sa hauteur.
" Je vais devoir générer de la lumière, souffla-t-il, sinon nous allons passer un mauvais quart d'heure...
— T'as entendu ?
— J'ai entendu !"
Il se mit aussitôt à incanter à voix basse, enchaînant les paroles obscures d'une petite ritournelle aussi vite que possible. Une seconde plus tard, une lumière intense jaillissait entre ses doigts, englobant... une botte. Malgré la situation, Astrée le vit sourire. Il attrapa ensuite la botte lumineuse et la lança vers l'entrée de la caverne, où apparurent, se protégeant les yeux, trois silhouettes ventrues et parfaitement nues. Imparfaitement humanoïdes, elles avaient de longs bras et jambes terminées par deux grosses griffes noires et une petite tête pourvue de huit yeux brillants, surplombant des mandibules, un peu à la manière d'une araignée.
" Ils sont réveillés ! Ils sont réveillés !
— Mmmmmanger !
— Toile ! Toile !"
Reynald poussa un juron et se remit à incanter aussitôt.

Quête : Equité

Elle s'était attendue à ce que Reynald fasse de la lumière, comme Tybert l'autre jour, et se contenta d'acquiescer silencieusement, oubliant qu'il ne la voyait pas. Elle continua à reculer vers leurs affaires tandis qu'il incantait, et, dès que la lumière apparut entre ses doigts - sous l'étrange forme d'une botte-, elle bondit vers ses armes enfin visibles.
Elle jeta un regard, un bref instant, sur leurs adversaires, écarquilla brièvement les yeux de stupeur devant cette étrange apparition, et se saisit de son arc et d'une flèche. Elle avait peut-être le temps de tirer une fois, profitant de l'effet de surprise.
Elle se décala légèrement pour ne pas risquer de blesser Reynald, et ne prit qu'un instant pour bander l'arc et viser la cible la plus proche, à l'endroit le plus facile à atteindre : le ventre.

La flèche partit en même temps que la créature attaquait, crachant un étrange filament blanc. Si la rôdeuse eut le soulagement de voir son trait faire mouche, s'enfonçant dans la peau grisâtre de son adversaire, elle fut aussitôt touchée par la substance que l'humanoïde avait sécrétée et se retrouva emberlificotée dans une soie visqueuse, réplique gigantesque de la toile d'une araignée. Elle se retrouva aussitôt incapable d'effectuer le moindre mouvement, son arc inutile plaqué contre le corps. La sensation était pour le moins désagréable.
Reynald avait terminé son incantation et un rayon de lumière aveuglante s'échappa de sa paume pour aller frapper la seconde créature de plein fouet, la réduisant en cendres dans l'instant. Le clerc parut lui-même surprit de l'efficacité de son sortilège. La bête qu'Astrée avait touchée rampait encore, tentant d'arracher la flèche qu'elle avait dans la panse. La troisième poussa un cri de guerre incompréhensible puis chargea le clerc. Elle fut cependant surprise par une brusque ruade, sortie de nulle part, qui l'envoya voler à l'extérieur de la grotte, tandis que Prince reprenait apparence équine.

Astrée sentit l'espèce de filament gluant s'enrouler autour d'elle, la laissant incapable d'effectuer le moindre mouvement. Réduite à l'impuissance, elle sentit la panique monter en elle un instant, avant de constater avec soulagement l'efficacité du sort de Reynald.
Elle eût une peur bleue en voyant la troisième créature charger le clerc, et un soulagement tout aussi intense devant l'intervention de Prince.
Assomme la plus proche de toi si tu peux, l'exhorta-t-elle mentalement. Elle ignorait à quelle distance avait été projetée la troisième créature et supposait que la cible la plus facile à atteindre était probablement celle qui était à terre. Elle espérait que le répit serait suffisant pour permettre à Reynald d'incanter à nouveau.
Quant à elle, elle ne pouvait strictement rien faire...

Mais Prince demeura, piaffant, dans l'entrée de la grotte, comme défiant toute créature d'oser l'approcher. Reynald regarda une seconde celui qui était encore vivant puis se planta devant Astrée et lui sourit, mutin.
" Belle captive, je t'embrasserais bien si tu n'étais pas recouverte de ce... mucus..."
Puis il glissa les doigts entre les mailles et se mit à tirer.
" C'est le moment de sortir de ta chrysalide..."
La méthode était barbare mais le résultat suivit : leurs efforts conjugués permirent au clerc et à la rôdeuse de déchirer la toile.

Quête : Equité

Bon, le troisième ne revenait pas. Et Reynald ne semblait pas s'inquiéter le moins du monde de la créature encore vivante qui rampait à terre. Mais comment diable faisait-il arriver à plaisanter ? Elle-même était rétrospectivement malade de peur : si jamais elle avait été seule, qu'aurait-elle fait ? Même avec l'aide de Prince...
Elle aurait voulu sourire, mais ne parvint qu'à grimacer. Elle fit de son mieux pour l'aider à ôter l'étrange toile d'araignée, mais même une fois libérée, elle ne put se débarrasser de la sensation d'être recouverte de quelque chose de visqueux.
- Beurk... C'est là que je rêve d'un torrent glacé pour me nettoyer de tout ça...
Machinalement, elle remua les bras, les jambes, soulagée de retrouver la maîtrise de ses gestes.
- Merci..., murmura-t-elle en réussissant enfin à sourire, avant de s'inquiéter à nouveau. Tu crois que l'autre risque de revenir ? Et qu'est-ce qu'on va faire de celle-ci ?

Reynald eut un sourire désolé puis alla fouiner dans ses affaires et en sortit un paquet allongé, entouré de toile, qu'Astrée identifia aisément comme étant une arme plutôt longue, sans doute une épée d'une sorte quelconque. Il se battit un moment avec les noeuds puis renonça avec un juron.
" Il faut la tuer. Et il faut aller à la poursuite de l'autre, sinon elle reviendra. A mon avis, elle est sonnée dans un buisson, cela dit. Ton étalon a du tonus dans les postérieurs, si je puis me permettre."
Il jeta un regard circulaire autour de lui.
" Bon, il y avait un couteau de cuisine quelque part, non ?"

Astrée grimaça.
- Il devrait être par là, fit-elle d'une voix blanche en désignant vaguement l'endroit où ils avaient laissé sécher la vaisselle. Elle était bien incapable de dire où. Mais surtout, elle avait du mal à se dire froidement quelle devait tuer ces étranges créatures maintenant qu'elles ne la menaçaient plus.
Pour se donner une contenance, ou peut-être un peu d'assurance, elle attrapa sa tunique et l'enfila. Peut-être était-ce juste pour retrouver un peu de chaleur finalement. Elle avait un peu de mal à reprendre ses esprits.

Elle s'obligea à regarder la créature qu'elle avait blessée. De toute façon, elle souffrait. Il fallait donc l'achever.
Elle prit le paquet que le clerc avait abandonné, et entreprit de dénouer les noeuds, malgré ses gestes rendus malhabiles par le contre-coup du choc. Ce serait tout de même plus facile avec une épée.
- Reynald... Qu'est-ce que c'est, ces créatures ? questionna-t-elle cependant.
L'idée de tuer un être doté de parole et donc d'intelligence la répugnait. Elle dut se répéter encore une fois que vu sa blessure, l'achever était plus miséricordieux que la laisser souffrir.

Dès qu'elle eut terminé de libérer l'arme, Reynald s'en saisit. C'était une rapière élégante et il la soupesa un moment, comme s'il devait se réhabituer à son poids.
" Ce sont des ettercaps. Ils sont mauvais et friands de chair humaine. D'habitude, on n'en rencontre pas aussi loin dans le sud, je ne sais pas ce qu'ils font par ici, mais ils doivent avoir froid."
Il baissa les yeux sur la rôdeuse et perçut alors son malaise.
" Je sais qu'ils parlent, Astrée, et que celui-ci est hors de combat, mais... tu ne voudrais quand même pas que je le soigne, si ? Si nous le laissons filer, il pourrait revenir. Ou aller manger un gosse ailleurs. Ce n'est pas comme si on pouvait le sermonner et lui conseiller de se mettre aux légumes."

Astrée hocha la tête avec une grimace.
- Tu as raison, je le sais bien... Mais ce n'est pas forcément facile pour autant.
C'était presque plus difficile que si elle avait été seule, sans possibilité aucune de soigner la créature, donc n'ayant pas d'autre choix que de l'achever. Là, elle avait le choix. Enfin, presque. Elle savait très bien que Reynald avait raison. S'ils ne tuaient pas l'ettercap, il reviendrait, peut-être avec d'autres, ou peut-être attaquerait d'autres humains. C'était un peu étrange de se retrouver un moment dans la peau du gibier susceptible d'être chassé et mangé, et de devoir tuer pour ne pas risquer d'être soi-même dévoré plus tard. Etrange... et très déstabilisant.
Elle soupira, et n'ajouta rien, laissant Reynald agir sans vraiment réussir à se départir de cette sensation de malaise. De lâcheté. Peut-être était-ce lâche de le laisser faire ça seul, elle aurait dû faire sa part. Peut-être aussi était-ce lâche de tuer un adversaire sans défense et aurait-elle dû refuser. Mais ils risquaient de revenir... Elle avait confiance dans le jugement de Reynald : ils ne pouvaient pas prendre ce risque.

Le clerc avança vers la créature à terre. L'ettercap tenta de se hisser sur les bras puis de le mordre, mais Reynald le contourna prudemment jusqu'à arriver derrière lui et lui planta sa lame d'un coup sec dans la nuque. Il sourit ensuite, contrit, à Astrée, puis attrapa la botte lumineuse et la glissa sous son bras. Il s'approcha de la sortie, emportant la lumière, et gratifia Prince d'une caresse sur l'encolure. Le cheval le poussa du museau mais ne le suivit pas à l'extérieur. La pénombre reprit ses droits sur la grotte comme Reynald s'éloignait et l'étalon vint vers sa maîtresse, les oreilles dressées, et posa sa grosse tête contre son épaule.

Astrée s'interdit la moindre réaction lorsque Reynald tua l'ettercap. Un peu hésitante, elle le regarda s'avancer vers la sortie, puis se secoua mentalement. Elle n'allait tout de même pas le laisser prendre tous les risques seul. Ça, pour le coup, ce serait de la lâcheté. Il pouvait très bien y avoir d'autres créatures dangereuses à proximité.
Elle gratifia Prince d'une caresse puis se précipita à son tour vers la sortie.
- Je viens avec toi ! C'est trop dangereux d'y aller seul !
Ecoutant de toutes ses oreilles les bruits environnants, à l’affût d'un danger éventuel, elle s'avança en direction de la botte lumineuse.

" Tu viens me réchauffer, comme c'est gentil..." fit Reynald en l'attrapant d'un bras quand elle déboula à sa suite.
Contrairement à la jeune femme, il n'avait pas eu l'opportunité de se rhabiller et arpentait la campagne détrempée dans le plus simple appareil. Astrée sentit immédiatement qu'il avait froid.
" Il me semble que ton cheval l'a balancé par ici, mais il a pu ramper plus loin... Et généralement, ils se baladent avec des araignées, alors ce serait mieux d'être certains qu'elles ne sont pas planquées dans les broussailles... Je parle ici de grrrrrandes araignées, bien sûr..."
La source lumineuse avait le désavantage d'obscurcir tout ce qui ne se trouvait pas dans son rayon de clarté, vaste au demeurant. Astrée finit par trouver des traces de passage menant le long de la colline puis grimpant dans les hauteurs.

Elle lui frictionna légèrement le dos, pour le réchauffer un peu, tout en répliquant.
- Brrrr... Je n'ai pas franchement envie d'en rencontrer. Je n'y ai eu affaire qu'une fois, il y a une éternité, et heureusement je n'ai eu quasiment qu'à observer le combat...
C'était à l'époque lointaine où elle vivait avec son mentor, Jo. Il avait l'expérience de ce genre de choses...
Elle suivit précautionneusement les traces qui montaient sur la colline.
- L'inconvénient de ta lumière c'est qu'elle annonce notre arrivée de très loin... mais on ne va quand même pas leur laisser l'avantage de l'obscurité...
Elle s'immobilisa un instant.
- Je peux essayer de percevoir si je sens quelque chose un peu plus loin. Des araignées. Ou des bestioles paniquées. Pour mieux savoir à quoi s'attendre...
Elle se concentra de son mieux.

La nuit fourmillait de créatures diverses, insectes et oiseaux, petits mammifères en quête de nourriture, leurs prédateurs sur les talons. Astrée n'avait jamais sondé l'âme d'un ettercap auparavant et elle ne parvint pas à l'identifier. Peut-être était-il loin, peut-être était-il mort, peut-être était-il tapi dans un buisson. Elle repéra des herbes couchées, un peu de sang noir sur une pierre ronde, mais la piste filait de l'autre côté de la colline et elle dépendait de la botte. Reynald était resté en contrebas.
" Redescends ! s'exclama-t-il. Je protègerai la grotte pour que nous passions une fin de nuit tranquille et nous verrons si on peut le retrouver demain. Avec le coup de sabot qu'il s'est prit, il doit avoir quelques côtes cassées..."

Aucun danger immédiat ne semblait les menacer. Pas de bêtes paniquées. Peut-être pas d'araignées, ou alors elles étaient plus loin, ou bien elle ne les avait pas détectées. Et de toute façon ils y verraient plus clair demain...
- D'accord, fit-elle en redescendant vers la source de lumière.
Et puis, cela lui éviterait d'avoir à achever froidement un adversaire qui ne représentait plus de danger...
Elle sourit à Reynald.
- Si tu peux faire quelque chose pour sécuriser la grotte, c'est parfait. C'est quand même pratique d'avoir un clerc avec soi...

" En échange, je ne serais pas contre un petit feu, juste histoire de me réchauffer autrement qu'en te frigorifiant..." fit-il en lui prenant le bras et en posant un baiser sur son front.
Ils repartirent en direction de la caverne.
" J'ai toujours besoin d'un objet à investir de lumière, dit-il en lui refilant la botte. J'ai pris ce qui m'est tombé sous la main. Je dois dire que c'est assez esthétique... Je tiens peut-être un concept ! "
Au moment ils atteignaient l'entrée, Prince lâcha un hennissement rauque et Reynald s'immobilisa. Astrée perçut la crainte d'un mulot, la fuite d'une couleuvre, la surprise d'une hulotte perchée dans un buisson. Il y avait du mouvement sur leur gauche et le clerc lâcha la jeune femme pour se tourner vers la source du bruit.

Astrée plissa les yeux, essayant de percer l'obscurité. Il y avait quelque chose là-bas. Peut-être l'ettercap, revenu par un chemin détourné. Peut-être un autre. Peut-être une araignée.
Elle avait pris son arc et son carquois avant de rejoindre Reynald, mais elle ne pourrait l'utiliser : elle n'y voyait goutte. Il lui fallut quelques instants pour réaliser qu'elle tenait en main la solution de ce problème...
Elle essaya d'évaluer au mieux l'endroit où se trouvait le danger, et y lança la botte lumineuse, saisissant aussitôt son arc.

La botte se prit dans un buisson d'aubépine et révéla immédiatement ses environs et l'ettercap qui s'y trouvait. La créature, éblouie, poussa un cri de rage et chargea aussitôt, découvrant ses crocs. Mais la rôdeuse avait attrapé sa flèche et bandé son arc. Le trait partit et traversa la tête du monstre de part en part, le propulsant en arrière où il retomba aussitôt, mort. Dans la pénombre, Astrée vit le regard stupéfait de Reynald se tourner vers elle.
" Et bien... ça... vaut au moins une chanson, ça... murmura-t-il, clairement impressionné. Rappelle-moi de ne jamais me disputer avec toi."
Il s'en fut ensuite récupérer la botte, veillant à bien contourner le cadavre foudroyé de l'ettercap.

Quête : Equité

Elle avait tiré à l'instinct, sans vraiment avoir de temps pour viser soigneusement, et s'estimait chanceuse que le trait ait fait mouche si efficacement.
- J'ai surtout eu de la chance, je crois, marmonna Astrée, un peu confuse devant l'admiration du clerc. Et puis, sans ta botte magique je n'aurais rien pu faire... A chacun ses talents...
Elle lui sourit.
- Un bon feu ne sera pas du luxe, tu es frigorifié. Et ne va pas me raconter que Milil te soignera demain matin, c'est tout de suite que tu as besoin de chaleur. Moi aussi, d'ailleurs...

La Couronne de Cuivre

[Quête] Dans les contreforts des Pics des Orcs