La Couronne de Cuivre

RP : Retour à l'abri

Kasumi eut à peine le temps de s'exécuter avant que la rôdeuse ne lui mette d'autorité la salade dans la bouche. Le mélange de saveur rehaussé par les lardons salés était d'une simplicité exquise et Kasumi se fendit à nouveau d'un compliment avant s'en réclamer encore. Astrée se prêta au jeu jusqu'à ce qu'il demande grâce et consente à se servir par lui-même. Somme toute, ces petits jeux et cette complicité qui s'affirmait entre eux le comblaient de joie.

RP: Retour à l'abri

Le repas se déroula sans incident. Leur seul visiteur fut une pie chapardeuse qui tenta de dévaliser leurs fontes pendant qu'ils déjeunaient. Kasumi, malgré sa cécité, parvenait à manger à peu près normalement, même si certains aliments, épris de liberté sans doute, sautaient malencontreusement de sa fourchette avant d'atteindre sa bouche.
Astrée prit un malin plaisir à déposer quelques légers baisers sur la commissure de ses lèvres, prétextant que les restes qui s'y trouvaient le nécessitaient amplement.

Ombrage et Prince des Frelons, quant à eux, s'étaient éloignés un peu en direction de la mare. L'eau y était trop boueuse pour qu'ils y remplissent leurs gourdes, mais les cours d'eau ne manquaient pas dans les montagnes, et ils avaient avaient de l'eau à boire à profusion.

Avant de repartir, elle enterra soigneusement les restes de leur feu, et transféra leurs bagages sur le dos de Prince pour qu'Ombrage n'ait que le poids du rôdeur à porter. Par acquis de conscience, elle badigeonna encore une fois sa cheville et son genou d'onguent.
- Tu es prêt à repartir ? Ce n'est pas que je n'aimerais pas m'éterniser pas dans ce coin paradisiaque, mais... On a encore quelques heures de marches avant d'atteindre le lac auprès duquel nous avions dormi, et ensuite autant pour redescendre sur le village. On arrivera sans doute après la tombée de la nuit, à moins qu'on ne soit obligés de s'arrêter avant...

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Kasumi n'hésita qu'un instant avant d'acquiescer. en temps normal, il aurait sans doute réclamé un ou deux baisers pour "se donner de l'énergie pour la route" mais cette fois, il ne parvenait pas à se départir d'un sentiment d'urgence. Il avait hâte d'atteindre Haute Roche et d'être enfin fixé sur son sort. Espoir et doutes se mêlaient alternativement et cette confusion lui portait sur les nerfs. Il demanda ensuite à Ombrage de suivre Prince des Frelons. Fort heureusement, conscient de l'état d'esprit de son cavalier, le cheval ne fit pas de difficultés.

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Astrée jetait de fréquents coup d'oeil en arrière, inquiète pour Kasumi. Mais Ombrage semblait avoir compris la consigne et suivait calmement Prince des Frelons. Il ne boitait pas, même si, en tendant son esprit vers lui, elle devinait qu'il se ressentait encore de sa chute.
Elle mit sa monture au trot, aussitôt imitée par Ombrage. Le chemin était à cet endroit assez large et peu rocailleux, et la progression facile. Il fallait en profiter pour gagner du temps.

Ils chevauchèrent ainsi pendant une heure et demie avant d'atteindre la partie la plus escarpée de l'itinéraire. La paroi rocheuse se dressait maintenant devant eux, et le large chemin devenait simple sentier s'élevant en lacet le long de la pente. Astrée s'arrêta, laissant Ombrage parvenir à sa hauteur, et informa Kasumi de la situation. Elle ajouta :
- Ombrage a l'air de bien tenir le coup pour l'instant. Mais on va continuer au pas vu la configuration du terrain. Et d'ici quelques temps, je vais sans doute devoir mettre pied à terre et le guider par la longe. Dès que tu sens qu'il fatigue, tu me préviens, et tu passeras sur Prince.
Elle sourit et tendit le bras pour poser sa main sur la sienne, crispée sur le pommeau de la selle.
- Et toi, ça va ? Pas trop fatigué de devoir te maintenir en équilibre sans pouvoir tout anticiper ?

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Les muscles du demi-elfe étaient crispés et cette halte lui était salutaire. Alors que ses crampes l'élançaient dans les avant-bras et dans les jambes, il sourit tout de même bravement pour rassurer Astrée.

- Je devrais pouvoir tenir le coup encore quelques heures. Je n'ai jamais connu Ombrage aussi calme. D'ordinaire il n'hésite pas à jouer les montures récalcitrantes. Peut être est-ce là la technique des bons cavaliers : faire croire à leur cheval qu'ils sont aveugles pour qu'il les prenne en pitié ?

Il s'étira lentement et massa quelques uns des muscles les plus douloureux avant de reprendre sur un ton plein d'espoir :

- Savoir que tu me réserves un massage une fois que nous serons arrivés m'aide à tenir le coup.

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- Promis, tu auras ton massage ce soir ! Tu en as bien besoin il me semble... Pour l'instant, on va monter tranquillement...

Ils reprirent la route plus lentement. Astrée dut rapidement mettre pied à terre : le chemin devenait trop escarpé et elle craignait qu'Ombrage ne fasse un faux pas. Certes, c'était très improbable, mais mieux valait être prudent. Le vide à leur droite devenait impressionnant.

Elle guida donc le hongre par la longe sur plus d'une demi-lieue encore. Le rythme lent était nettement moins fatigant, aussi bien pour la monture que pour le cavalier qui n'avait plus besoin de coordonner ses gestes avec ceux de sa monture et pouvait laisser pendre tranquillement ses jambes.
Mais elle devinait qu'Ombrage commençait à fatiguer. Il avait recommencé à boiter légèrement et ralentissait anormalement le rythme.
- Je crois qu'il est temps que tu chages de monture. Je vais mettre les bagages sur le dos d'Ombrage, ce sera moins lourd pour lui.

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Kasumi fut soulagé de pouvoir s'accorder une pause, même courte. Le rythme plus lent était moins douloureux pour ses muscles mais le terrain semblait parfois escarpé, exacerbalnt ses peurs. La tension nerveuse de ne pas pouvoir voir où Ombrage l'emmenait, associé à la sensation de vide lui donnait des vertiges. Curieusement, le fait de ne pas pouvoir fermer les yeux renforçait son impression de vulnérabilité. Il descendit prudemment d'Ombrage, comme s'il craignait de ne trouver que le vide sous ses pieds et il s'accrocha un peu plus longtemps que nécessaire au flanc de l'animal, sans un mot. Il sentait que son visage était blême et ne trouvait plus les ressources pour sourire et rassurer Astrée.

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Astrée, sans mot dire, passa son bras autour de la taille de son compagnon et l'attira contre elle. Elle le sentait tellement vulnérable, tellement dépendant d'elle - et sans doute quelque peu gêné de devoir ainsi s'en remettre à elle et à sa monture pour avancer. Elle le serra fort dans ses bras, tentant de lui transmettre un peu de courage, de confiance.
- Ne t'en fais pas... Tout va bien se passer. On a encore une bonne trotte avant le col, mais tu vas monter Prince, il a le pied sûr. Il suffit que tu lui fasses confiance, que tu t'en remettes à lui. Je vais le guider par la longe, il ne peut rien arriver de fâcheux. Tiens, bois un peu d'eau, ça te fera du bien, ajouta-t-elle en lui tendant une gourde.

Ils en avaient sans doute pour trois heures de marche encore, avant d'atteindre le col où ils avaient dormi quelques nuits auparavant. Mais elle préféra taire cette information.Elle devinait Kasumi épuisé et inquiet, et cette information ne pouvait que le décourager. Sans compter qu'il faudrait ensuite redescendre de l'autre côté, pendant aussi longtemps sans doute. Elle appréhendait la descente nettement plus que la montée. Le risque de faire rouler une pierre et de mal se rattrapper était réel, pour elle comme pour les montures. Elle devrait redoubler de vigilance...

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Kasumi était touché qu'Astrée le comprenne aussi bien et fasse preuve de sollicitude. Si cela avait été toute autre personne, il se serait reproché de se montrer aussi transparent et vulnérable mais venant d'elle, il se réjouissait de la complicité qui prenait chaque jour un peu plus d'ampleur entre eux deux. Il avait appris à se reposer sur elle dans les moments difficiles, une leçon étrange qu'il n'aurait jamais cru être capable d'assumer. Il ne trouvait pas les mots pour exprimer ce qu'il ressentait alors, pour toute manifestation extérieure de ses réflexions, il lui adressa un sourire reconnaissant avant de se laisser conduire jusqu'à Prince des Frelons.

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Astrée aida Kasumi à monter sur sa monture, guidant sa main sur le pommeau de la selle, son pied sur l'étrier. Ces gestes mainte fois répétés devenaient un automatisme.
Puis la marche reprit, interminable. Astréemarchait d'un bon pas, guidant Prince des Frelons par la longe. Habituée aux longues marches avec lui dans la montagne, elle savait pouvoir lui faire confiance, et relâchait plus facilement sa vigilance qu'avec Ombrage. Celui-ci suivait, paisiblement. Elle se sentait le coeur léger de marcher ainsi, échangeant de temps à autre quelques mots avec son compagnon. Elle était dans son élément.

Le ciel commençait à se voiler, et Astrée observait avec inquiétude l'avancée des nuages. Un orage en montagne survient si vite, et peut être parfois tellement violent... Le vent se levait, et elle vit son compagnon frissonner. Elle lui tendit avec sollicitude son manteau:
- Tiens, enfile ça, le temps fraîchit. J'ai bien peur que nous ayons bientôt de l'orage... J'espère que cela ne se produira pas pendant qu'on sera sur la ligne de crête. Mais on a encore une heure ou deux devant nous, si ça se trouve il sera passé....

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Kasumi sourit une fois de plus mais s'empara tout de même du manteau que lui tendait Astrée. Il répliqua avec sa verve retrouvée :

- J'espère que tu as pensé toi aussi à te couvrir ma douce. Je m'en voudrais si tu attrapais froid alors que je ne peux pas te réchauffer. Enfin, pas avant que nous fassions halte en tous cas. Moi aussi je sens venir un grain et le vent se lever, penses-tu que nous parviendrons à l'éviter ou préfères-tu chercher un abri, quitte à n'arriver que demain matin au village ? Cela ne me dérange pas d'attendre un jour de plus si tu penses que c'est plus prudent. Enfin, continuons et nous verrons bien où cela nous mène.

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Astrée observa un moment le ciel avant de répondre.
- On a encore un peu de temps devant nous avant l'orage. On va continuer. Si l'orage est violent, ou s'il se déclenche alors qu'on approche de la crête, on fera una halte. Je ne veux pas prendre de risque. Et avec un peu de chance... il passera à côté. Et je pense qu'il ne durera pas, les nuages sont arrivés tellement soudainement...
Ils reprirent la route, Astrée gardant les yeux de plus en plus sovent rivés vers les cieux au-dessus d'eux.

Les nuages s'amoncelaient toujours. Lorsqu'ils atteignirent le col, le vent avait forci. Devant eux s'étalait une vaste étendue herbeuse. Un peu plus loin se trouvait le lac où ils avaient fait ces étranges rêves.
- Kasumi... Si l'orage éclate, il ne faut surtout pas qu'on reste exposés, ou on va prendre la foudre. L'idéal serait de s'abriter maintenant, dans une grotte, mais je n'en ai pas vu depuis près d'une heure... Donc je pense que le plus sage est que je monte Ombrage, malgré sa blessure, et qu'on traverse ces pâturages au pas de course. Mais si jamais ça éclate, on met pied à terre et on s'applatit immédiatement au sol. Et on attend que ça passe. Une fois sur la pente descendante, le risque sera moins grand, on pourra reprendre une allure tranquille.... Mais j'espère qu'on trouvera une grotte. Tu te sens capable de tenir une vingtaine de minutes au galop ? Ou tu préfères qu'on rebrousse chemin ?

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Kasumi sentit la nervosité de sa compagne et fit un effort pour analyser calmement la situation et lui répondre sur un ton serein.

- Nous devrions poursuivre. Ombrage peut tenir le coup, il en a vu bien d'autres. il me le fera payer mais de cela aussi j'ai l'habitude. Allons-y ! Non, attends...

Le rôdeur se figea et sa tête se tourna soudainement en direction du lac. Une image s'était imposé à son esprit à un moment, à tel point qu'il avait cru recouvré la vue. Mais cette impression avait été si fugace qu'il pouvait aussi bien l'avoir rêvée. D'autant que ce qu'il avait vu était à peine croyable. Un instant il avait cru apercevoir une cité sous les eaux translucides du lac. Une cité et autre chose aussi, il en avait l'intime conviction. Et pourtant il aurait du se méfier...

- Par ici ! Je suis sûr qu'il y a un abri derrière cette formation rocheuse là-bas.

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Astrée se tourna vers lui, incrédule. Tellement abasourdie qu'elle ne répondit pas immédiatement.
- Mais... Comment peux-tu le savoir ?

A ce moment, un coup de vent plus violent, suivi d'un calme inquiétant, fit taire ses hésitations. L'orage allait éclater d'une minute à l'autre.
- Si tu en es certain... On y va... Mais il faut faire vite, ça va craquer très bientôt ! Suis-moi, ajouta-t-elle inutilement en sautant d'un bond sur le dos d'Ombrage et en le guidant vers l'endroit qu'avait indiqué son compagnon, Prince sur les talons.

- Mais je ne vois vraiment pas comment tu peux savoir qu'il y a une formation rocheuse là-bas...

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Kasumi marqua une hésitation malgré l'urgence de la situation et la tempête qui couvait. Il avait un sombre pressentiment et l'impression dérangeante de se faire manipuler. Il se laissé cependant entraîner dans la direction qu'il avait indiqué. Il parla à voix haute pour couvrir le bruit du vent qui forcissait de minute en minute :

- Il y a une ancienne caverne ici, ou peut être un passage, je ne sais pas. Je sais que ça paraît ridicule mais j'ai eu une vision pendant un bref instant.

Il ne put pas voir la réaction d'Astrée mais il s'avéra qu'il ne s'était pas trompé. Au milieu d'un amoncellement de rochers couchés, la rôdeuse put se frayer un passage jusqu'à une paroi. Kasumi la surprit encore une fois en reprenant ses consignes:

- C'est ici, juste devant nous.

Et en effet, après avoir écarté un buisson de ronces qui la masquait, Astrée découvrit une anfractuosité de bonne taille ménagée dans la roche.

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Il n'était plus temps de se poser des questions sur le pourquoi de la vision de Kasumi. Les premières gouttes commençaient à tomber, énormes, éparses. Astrée sentit l'électricité envahir l'atmosphère au moment même où elle entraînait Kasumi et leurs montures en direction de la cavité. A peine étaient-ils à l'abri qu'un éclair illumina le ciel juste derrière eux, alors qu'un coup de tonnerre assourdissant résonnait sur les roches.

- Il était temps, fit simplement Astrée. On va attendre ici que ça se calme, on est à l'abri. Mais c'est quand même... bizarre... que tu aies eu une vision...

Tout en parlant, elle regardait autour d'elle, intriguée, et méfiante. Apparemment, on tentait délibérément de les attirer ici. Ou peut-être était-ce une réminiscence de l'étrange rêve que Kasumi disait avoir fait au bord du lac ?

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Kasumi était tout aussi incrédule qu'Astrée maintenant que l'urgence de la situation ne restreignait plus sa faculté à réfléchir. Méfiant, les sens aux aguets, il tenta d'expliquer ce qui s'était passé, faisant visiblement un effort pour comprendre lui même de quoi il retournait :

- Je ne sais pas, j'ai eu comme une impression de déjà vu, comme si j'avais déjà vu cet endroit. Mais ce n'était pas un souvenir ou une pensée, c'était comme si je "voyais" cette caverne. Aussi étrange que cela paraisse, je crois que des elfes vivaient ici autrefois, comme le montre les statues à l'entrée.

Mais Astrée n'avait vu aucune statue en entrant dans la grotte, seulement un amas de roche peut être un peu trop lisses parfois. Toujours était-il qu'elle n'avait guère eu le loisir de s'y attarder.

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Astrée ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes. Machinalement, elle se retourna versl'entrée de la caverne, où elle était bien certaine de n'avoir vu aucune statue. Elle haussa un sourcil et se tourna à nouveau vers Kasumi, l'aidant à descendre de sa monture.

- Mais... Il n'y a aucune statue à l'entrée, finit-elle par lui dire, d'un ton presque penaud, comme gênée de le contredire ainsi. Je t'assure.... Ca devait être dans ton rêve, l'autre nuit... C'est sûrement pour ça que tu as l'impression de l'avoir déjà vue, cette grotte.

Son esprit rationnel avait déjà trouvé une explication plausible à l'étrange vision de son compagnon. Pourtant, sourcils froncés, elle profitait des flashs des éclairs pour tenter de percer l'obscurité de la grotte, craignant-contre toute logique - que celle-ci ne recèle un piège.

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Sans même s'en rendre compte, Kasumi se rapprocha d'Astrée, sachant instinctivement où elle se tenait. Il était visiblement nerveux et tendait ses sens pour anticiper la catastrophe qui ne manquerait pas d'arriver. Au bout d'une minute silencieuse qui lui parut durer une heure, il se risqua à parler à voix basse, faisant état de ses propres questionnements :

- Crois-tu que la grotte dans la montagne soit liée à cet endroit ? Que le fait d'avoir été aveuglé puisse me faire voir ce qu'était cet endroit à cette époque. Je commence à craindre de n'avoir pas été touché par un sort normal. Si c'était le cas, qui sait ce qui pourrait arriver...

Au travers de son ton pointait toute son angoisse sur l'incertitude de son sort et l'angoisse de ne jamais recouvrer la vue.

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Astrée prit la main de Kasumi dans la sienne et la serra fort. Elle le sentait tellement anxieux...
- Je ne sais pas, fit-elle, songeuse. Je n'ai jamais entendu parler d'un tel sort, je ne sais pas si cela existe. Mais il est vrai que je n'y connais pas grand-chose en magie...

Elle soupira et continua à réfléchir à voix haute.
- Quoi qu'il en soit, cela me parait peu probable. Je ne vois pas comment ce serait possible. Je penche plutôt pour une partie de ton rêve étrange, que tu aurais oubliée, et qui te revient en mémoire... D'ailleurs... Tu ne m'as jamais raconté ton rêve en entier. Je sais juste qu'on y voit une magnifique princesse elfe, nue. Et qu'ils cherchaient un roi opour leur donner un héritier...
Dehors, l'orage faisait rage et elle était finalement heureuse d'avoir trouvé un abri in extremis. Même si les circonstances étaient étranges...

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Kasumi s'était détendu mais se crispa légèrement à nouveau, ce qui se traduisit par une pression un peu plus forte de sa main dans celle d'Astrée. Ainsi, elle profitait de cet instant entre tous pour tenter d'en apprendre davantage. Il était à la fois amusé et mortifié de constater qu'elle savait tirer avantage de toute situation où il était en difficulté. Et pourtant il aurait parié qu'elle ne cherchait qu'à le détourner de ses craintes à propos de sa cécité. Il répondit donc d'un ton un peu trop hésitant à son goût :

- Je pensais t'avoir tout raconté ce dont je me souvenais pourtant. C'est encore un peu embrouillé dans mon esprit. Mais ce dont je me souviens très bien c'est que la princesse n'était pas si magnifique que ça. En tous cas, si je la compare à toi.

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Le ton hésitant de Kasumi trahissait tellement sa gêne à l'idée de parler de son rêve qu'Astrée éclata de rire.
- Tu insistes tellement là-dessus que ça ressemble à une excuse.... Tu as parfaitement le droit de rêver à une elfe nue. Je sais bien qu'on ne maîtrise pas ses rêves. Et puis, d'après ce que tu m'as dit, celui-ci n'était pas ordinaire puisque tu as retrouvé un coquillage dans tes mains... et que l'elfe en question ressemble étrangement à la statue qu'on a vue hier.

Elle haussa les épaules, et enlaça tendrement son compagnon, à la fois pour le rassurer sur son amour et pour le réconforter.
- Mais si tu te souviens aussi peu du contenu de ton rêve... Il est probable que cette grotte en faisait partie, alors, et que tu l'aies oublié. Il n'y a donc finalement rien d'étrange à ce que tu aies reconnu l'endroit. Tout est lié à ton rêve bizarre... Tu m'a dit que tu avais l'impression qu'on t'avait transmis un appel au secours, que ce n'était pas un rêve ordinaire....
Elle soupira, et secoua la tête.
- Toi seul peut y voir clair là-dedans. Moi, je n'ai pas vécu ton rêve...

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Kasumi s'efforça de réunir les souvenirs brumeux de son rêve et de se rappeler d'un détail utile mais il n'avait aucun souvenir de cette grotte. A peine se souvenait-il vaguement que les elfes avaient mentionné un tunnel qui leur servait d'accès vers les rives du lac. Mais à chaque fois qu'il tentait de saisir ces réminiscences qu'elles s'échappaient comme de la fumée entre les doigts. Il abandonna vite l'idée de trouver quelque chose d'utile dans ses rêves, et, au lieu de cela, il répondit en rosissant légèrement :

- Tu ne vis peut être pas mes rêves mais j'avoue sans honte que tu t'y trouves très souvent depuis quelques mois.

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Astrée rougit à son tour. Depuis quelques mois... cela signifiait donc qu'il avait pensé à elle durant l'hiver, qu'il avait rêvé d'elle...
Elle chassa ses pensées qui menaçaient d'endormir sa vigilance. Elle devait restée attentive, les circonstances qui les avaient conduits ici étaient trop étranges.

Pourtant, rien ne semblait devoir les menacer. Pas pour le moment en tout cas. L'orage était impressionnant, illuminant régulièrement l'intérieur de la grotte d'éclairs de lumière blafarde. Il faisait si sombre qu'on se serait cru au crépuscule. Et le bruit du tonnerre se répercutait dans tout le massif rocheux.

- Je vais allumer une lanterne, annonça-t-elle, bien inutilement : Kasumi n'y verrait rien de toute manière. Mais dans la semi-obscurité ambiante, cela devenait indispensable pour elle.
Sa lanterne à la main, elle scruta un peu mieux l'intérieur de la grotte, à l'affut d'un éventuel danger.

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Kasumi cherchait constamment à distinguer les sons rassurants de la présence d'Astrée par-dessus le bruit du tonnerre et du vent. Bien que la lumière ne lui soit d'aucune aide, savoir que la rôdeuse s'affairait à illuminer la caverne contribuait étrangement à l'apaiser. Cela défiait sa logique mais il ne pouvait s'empêcher de préférer que la jeune femme y voit et puisse ainsi l'avertir de tout danger. En échos à ses réflexions inconscientes, il brisa le silence qui s'était installé. Dans son monde de ténèbres, il éprouvait el besoin d'entendre des voix familières :

- Est-ce que tu vois quelque chose ? En toute logique, il devrait y avoir un passage au fond de la grotte, ou une trappe, à moins qu'un effondrement ne l'ai obstrué.

Le rôdeur avait manifestement vu juste sur ce dernier point ou la cavité dans laquelle ils avaient trouvé refuge n'était pas un tunnel. Quoiqu'il en soit, le fond de l'abri était composa d'un amas stable de rochers usés par le temps.

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Astrée balaya la paroi de la lumière de sa torche, mais ne trouva rien qui soit digne d'être signalé.
- Non, il n'y a pas de passage. Et depuis très longtemps apparemment. Les rochers ont l'air d'être là depuis toujours...

Elle revint vers son compagnon, et l'enlaça tendrement, avant de le guider vers un rocher sur lequel elle le fit asseoir, s'installant tout contre lui.
- Il ne reste plus qu'à attendre tranquillement que l'orage passe. Je pense qu'il ne durera pas très longtemps:il a été très soudain, on n'a pas eu tellement de nuages amoncelés. C'est l'affaire d'une demi-heure, une heure au maximum.... Veux-tu que j'en profite pour te faire un bon massage ? Tes muscles ont l'air tellement tendus....

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Pour toute réponse, le rôdeur se laissa aller dans l'étreinte de la jeune femme, l'invitant à poser ses mains sur ses épaules. Lorsqu'elle entama son massage, il poussa un soupir d'aise en sentant toute la tension qui l'habitait refluer peu à peu. Au bout d'un moment, il se sentait suffisamment détendu pour reprendre la conversation sur un ton alangui :

- C'est vraiment divin. je ne sais vraiment pas comment j'ai pu survivre toutes ces années sans toi.

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Astrée sourit. Elle adorait ces petits compliments qu'il lui faisait sans cesse. Et se demandait parfois confusément s'il en serait toujours ainsi, s'il n'allait pas se lasser.
Mais elle décida, cette fois-ci, de ne pas le prendre trop au sérieux. Juste pour le plaisir de l'entendre le répéter.

-Oh, je suis sûre que tu ne manquais pas de jeunes et jolies jeunes filles à masser, et que certaines d'entre elles se faisaient une joie de te rendre la pareille, lorsque tu vivais dans ta communauté de rôdeurs....

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Kasumi laissa éclater un rire joyeux et musical à la boutade de sa compagne. Il avait bien senti qu'elle désirait une réponse aussi s'empressa-t-il de ne pas la décevoir tout en détournant la question par une plaisanterie :

- Eh bien, en réalité, il y a bien eu cette fois où une ourse y a vraiment mis du cœur. Tu peux être certaine que j'ai senti la caresse de ses pattes puissantes et que mes os s'en souviennent parfois par temps froid et humide. Mais je t'assure que je préfère de loin tes attentions aux siennes.

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Astrée éclata de rire à son tour.
- J'espère bien être mille fois plus douce qu'une ourse.... Mais je retiens que tu as depuis lors quelques rhumatismes qu'il me faudra veiller à soigner si je veux pouvoir moi aussi bénéficier longtemps de tes massages.

Mutine, elle se pencha pour déposer un baiser dans le cou de son compagnon. Puis un deuxième. puis, l'attirant dans ses bras, elle se pencha pour atteindre sa bouche.
- Je t'aime.... fit-elle simplement

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