La Couronne de Cuivre

Dalius, ici, avec lui... Le vide comblé ! Rien ni personne ne pouvait imiter ce lien mystique. Il ne pouvait qu’être authentique et, à ce titre, le gnome s’y agrippa sans réserve. Déjà fusait en son esprit la joie simple du rat. La petite voix mauvaise, occultée par celle du familier, fut réduite au silence. Les limbes cauchemardesques se déchirèrent. Alchem retrouvait pied dans la réalité. Bien sûr, toute sa souffrance ne disparût pas d’un claquement de doigt. Il se sentait accablé, exténué, fragile, mais au moins n’était-il plus captif de sa propre démence.

Il ouvrit les yeux, serra Dalius entre ses mains fébriles. Une larme perla au coin de ses yeux. Sa vision, un instant flou, s’accommoda. Il reconnut Téâya.
« Mère... »
« Ha enfin ! Tu peux dire que tu m’as fait peur ! »
« Qu’est-ce qui s’est passé ? »
« Plus tard les explications. Tout n’est peut-être pas encore réglé. »
Oui, aucun doute possible, c’était bien sa mère. Énergique, directe, la Grande Mystificatrice observa le pendentif que devait toujours porter Alchem. La gemme était-elle toujours aussi noire ? Alchem, lui, regarda à gauche, à droite, voulant savoir où il était et en quelle compagnie.

Il y avait là tous ceux que Théâya avait emmenés avec elle après s’être séparé de la partie de son groupe comportant les humains et les nains. Cela signifiait la présence de plusieurs prêtres de sa race, d’une partie de l’escorte personnelle de sa mère mais aussi de Dotha qui semblait se ronger les sangs et hésiter à approcher tandis que la Grande Mystificatrice observait son fils en général et son pendentif en particulier.

Ce dernier avait changé de couleur : de noirs, les volutes avaient viré au gris, présents en différentes nuances qui ne cessaient de s’entremêler et se démêler comme si une lutte avait lieu en son sein.

Alchem, constatant qui était là, se garda bien d’extérioriser ses sentiments. Ce n’était pas le moment de se laisser aller. Refouler ses larmes lui demanda quand même un effort non négligeable. Il adressa à Dotha un salut poli et fit de même avec les autres visages connus. En fait, c’était simple, il connaissait tout le monde. Puis, suivant le regard de sa mère, il remarqua le pendentif qu’il portait. Il ne fut pas spécialement surpris, ou plutôt, il ne fut pas surpris d’être surpris. Car il avait totalement perdu le fil des événements. Comment, à sa place, ne pas être déboussolé ? La Grande Mystificatrice dissuada d’un geste l’un des grand prêtre d’apporter des soins au gnome. Elle ne voulait aucune interférence magique tant qu’il portait le pendentif.
« Essaie de le retirer », lui intima Téâya.
La magicienne estimait que c’était le bon moment. Elle avait ramené l’âme de son fils hors de l’objet, plus rien ne devait le lier à ce dernier. Alchem s’exécuta, essaya tout du moins. S’il y parvenait, ce serait déjà un problème de moins.

Il parvint sans peine à ses fins malgré la faiblesse de ses bras et l’engourdissement dans ses doigts. Mais, alors qu’il tenait le pendentif dans sa main, une ombre fit son apparition. Non, pas une ombre : une silhouette floue et presque transparente pouvant appartenir à un elfe d’après ses mensurations mais qui dispensait tout de même de la lumière autour d’elle. Quand elle s’exprima, ce fut sous la forme d’un écho qui paraissait faible et lointain :

- Il appartient au nouveau Gardien de conserver cette pierre. Il a prouvé sa résistance. Accepte-t-il cette mission ?

La question était indubitablement destinée à Alchem.

Sa résistance ? Alchem n’avait-il pas craqué ? Non. Preuve en était qu’il écoutait l’elfe sans déraisonner. Dalius était sa raison en un sens, le fidèle rempart contre une folie née de la guerre.
« Le nouveau gardien », articula-t-il avec lenteur.
Il devait se concentrer pour rassembler ses idées. Il tourna brièvement la tête vers Téâya qui lui expliqua, tout aussi brièvement, que le pendentif qu’il tenait était orné de la gemme du Despote, cette gemme corrompue par lui alors qu’il en avait la charge en tant qu’elfe du soleil. Le mystificateur profane observa la gemme en question dont la noirceur était parcourue de volute grise. Puis il releva les yeux sur l’elfe éthéré.
« Cela signifie-t-il que je prends la place du Despote ? Le Despote est-il mort ? La gemme est-elle débarassée de sa souillure ? »

La réponse de l’elfe éthéré ne se fit pas attendre, directe et concise comme si chaque mot prononcé était une difficulté :

- Non, vous êtes un mortel et vous ne pouvez pas endurer une telle charge. Et le Despote n’est pas détruit : il est contenu, il s’affaiblit et finira par disparaître mais il lutte encore. C’est pour cette raison que nous avons besoin d’un Gardien. Un Gardien qui ne se laissera pas corrompre. Un Gardien tel que vous.

Sans détacher ses yeux de l’apparition, Alchem tenta de se lever. En vain. Ses jambes ne le portaient pas. Il renonça donc et formula une nouvelle question :
« En quoi consistera exactement mon rôle ? À conserver le pendentif ? À le porter ? J’imagine qu’il me faudra éviter qu’il ne tombe entre de mauvaises mains. Or je mène une vie dangereuse. Je chasse le mal. Il est probable qu’un jour prochain ma vocation me conduise au trépas. Êtes-vous certain que je sois le bon candidat ? »
Le gnome savait qu’il ne pouvait refuser cette charge. Mais il tenait à être franc. L’idée qu’il se faisait d’un gardien était celle d’un individu reclus, pas celle d’un aventurier côtoyant le danger.

Sa mère se contenta de poser une main sur son épaule pour le dissuader de faire immédiatement une tentative et Dotha en profita également pour s’approcher, sans doute pour constater par elle-même dans quel état il se trouvait.

Mais l’esprit ne les laissa pas à leurs retrouvailles et répondit à la question du svirfneblin :

- Il n’y a aucun autre candidat. Aucun dont nous puissions être sûr. Votre rôle consistera à conserver ce pendentif jusqu’à ce qu’il soit libéré de sa souillure et que toutes les âmes qu'il contient aient trouvé le repos. Malheureusement, je ne peux pas vous en dire davantage. Votre charge peut prendre une veille, un an ou plusieurs générations.

Alchem hocha la tête. Il comprenait. Et il devait le faire.
« J’accepte », répondit-il simplement.
Depuis la mort de son frère, Théass, il avait cessé de vivre pour lui-même. Il se consacrait aux autres. Il agissait par conviction, par principe. Le Despote devait être anéanti une fois pour toute et pour cela, le gnome devait garder le pendentif. Il n’y avait pas d’alternative. Le devoir avant tout. Le devoir à tout prix.

L’apparition sembla gagner légèrement en intensité et en consistance mais peut-être n’était-ce qu’une impression. En tous cas, elle hocha la tête en signe d’approbation et répondit d’un ton solennel :

- Alors je vous souhaite bonne chance. Au nom de tout mon peuple. Je combattrai le Despote mais je sais désormais que vous saurez prendre le relai si je venais à faillir.

Ces paroles sibyllines pouvaient beaucoup signifier mais le silence reprit brusquement ses droits avec la disparition de l’apparition.

« Heu, qu’est-ce qu’il a voulu dire, le monsieur ? » s’enquit Dalius, qui n’avait pas tout bien compris.
Alchem ne répondit pas. Il fixait le pendentif et ses volutes grises, l’air pensif. L’un des grands prêtres lui administra un sort de guérison qui lui rendit quelques forces. Il parvint à se lever. Toujours un peu vacillant, il s’appuya contre un mur, mais n’en eu bientôt plus besoin. Son attention s’orienta vers les autres gnomes.
« Nous avons les autres gemmes, déclara Téâya. Je vais me renseigner sur ce qu’il convient de faire, puis nous le feront. »
C’était certain, il ne fallait pas être en compagnie de svirfnebelins pour espérer des retrouvailles émouvantes pleines de larmes et de mots doux. Même la Grande Mystificatrice, plus expressive, faisait passer son travail avant. Les Murmures ne se détendraient qu’une fois en sûreté. En attendant, Téâya se concentra sur sa gemme afin d’interroger l’être de lumière. Alchem se tourna vers Dotha :
« Pas déçu de votre périple à travers les plans ? »

Dotha n’était pas une svirfnebline : quand Alchem s’adressa à elle, c’est comme si un barrage venait de sauter et elle s’approcha pour lui faire une accolade chaleureuse sans se soucier de la présence de l’escorte, des grands prêtres ou de la mère du gnome des profondeurs :

- Vous savez que j’étais folle d’inquiétude pour vous ? Du coup, je n’ai pas eu le cœur à profiter de ce voyage ! Il faudra donc que nous remettions ça mais sans liche millénaire, si possible !

***

De son côté, Théäya était parvenue à pénétrer dans le plan de l’être de lumière et elle trouva celui-ci affairé, le regard un peu dans le vide. Elle dut se manifester pour qu’il tourne son attention vers elle.

- Ah, vous revoilà ! Et je constate que votre mission a été couronnée de succès : c'est réellement un prodige !

Alchem, s’il n’avait pas déjà un peu appris à connaître Dotha, l’aurait sans doute repoussé. Ne faisant rien de tel, il se garda toutefois bien de répondre trop favorablement à l’étreinte. Il sentait le regard des autres. Il ne tenait pas à ce que la gnome de la surface leur semble trop bizarre.
« J’ai peur que si j’entreprends un autre voyage dimensionnel, ce soit pour affronter autre chose. Vous avez dû le deviner, j’ai un peu l’habitude de courir après les ennuis. »
« Tout à fait ! On se sent mal si on peut pas faire du mal au mal ! »
« Dalius vient de dire qu’on se sent mal si on peut pas faire du mal au mal. Je pense qu’il a bien résumé la situation. »

***

Téâya s’inclina et répondit avec sa franchise coutumière :
« Un prodige ? Non, je ne pense pas. Le Despote, comme nombre d’être surpuissant, est responsable de sa propre défaite. Je commence à croire que c’est l’ordre naturel des choses. Nous sommes détenteurs de toutes les gemmes. Que désirez-vous que nous fassions d’elles ? »

La réaction de Dotha ne se fit pas attendre : elle éclata de rire ce qui fit se retourner plusieurs svirfneblins tant ce son paraissait incongru après ce qu’ils venaient de rire.

- Faire du mal au mal : c’est un concept intéressant mais pas si original. Y aurait-il des ferments de paladin parmi les gnomes finalement ?

***

L’être de lumière parut songeur durant un moment mais finit par répondre à la question :

- Le Despote voulait réunir nos gemmes car nous sommes tous plus puissants quand c’est le cas. Je crois qu’il serait sage de les séparer tant qu’il n’est pas définitivement détruit : la charge de votre fils ne s’en trouvera qu’allégée.

« Non, je ne crois pas, pas de paladin. La droiture chevaleresque n’a pas vraiment sa place dans les ténèbres de l’Outreterre. Et puis, pour être franc, je ne crois pas que les paladins soient les champions du bien les plus efficaces. »
Alchem, en digne adepte de Baravar, était prêt à employer des moyens très déloyaux contre les monstres. Les menaces devaient être éliminées, peu importait comment, du moment que c’était sans faire de dégâts collatéraux regrettables. À quoi bon jouer le fanfaron sur un fier destrier et charger, lance au poing, lorsque un simple coup de poignard dans le dos suffisait ? Certes, c’était moins joli à raconter, mais le svirfnebelin s’en fichait royalement. La gloire n’était pas un but pour lui.

***

« Je comprends. Ce sera fait ainsi. Avez-vous des lieux à me conseiller ou, au contraire, à me déconseiller ? »
Il s’agissait probablement de la dernière question de Téâya. Après, il serait temps de revenir à Lameroy.

Mais Dotha n'entendait pas lâcher le morceau : comme si elle avait besoin de plaisanter pour décompresser de la situation qu'ils venaient tous de vivre :

- Vous devriez tout de même y songer, Alchem : un paladin Sunite svirfneblin, monté sur son fier poney de guerre serait assurément original et on chanterait vos exploits pour des générations à travers tout Toril !

Son sourire en coin suffisait bien à démontrer qu'elle n'était pas du tout sérieuse...

***

L'être lumineux répondit à nouveau sans détour :

- Non, aucun lieu n'est sûr : fiez-vous davantage à qui vous les confierez. Il faut que ce soit de fervents ennemis des ombres et des mort-vivants. Comme vous et votre fils.

« Dotha, de grâce, épargnez-moi de telles horreurs ! Même les Sunites vous en seront reconnaissants ! En fait, tout Toril préfère éviter une pareille aberration ! »
Alchem plaisantait tout autant, mais surveillait également ses collègues austères. Ceux-ci ne laissaient pas retomber leur vigilance de tous les instants.

***

« Bien. Par chance, je ne manque pas de personnes à qui m’adresser. N’ayez crainte, celui qui voudrait à nouveau rassembler les gemmes n’est pas prêt d’y arriver. »
Téâya allait personnellement s’occuper de cela. L’une des gemmes allait donc rester en possession de son fils, celle du Despote. Elle allait en garder une dans sa tour de lumière, celle qu’elle détenait présentement. Ornegemme, camouflée comme elle l’était, interdisait l’espionnage magique. C’était un endroit particulièrement difficile à trouver. Les autres gemmes allaient être confiées à ses anciennes connaissances. Il était fort possible que l’une d’elle se retrouve dans un plan céleste. Non, vraiment, les rassembler de nouveau n’allait pas être facile.

En attendant la magicienne renvoya son esprit hors de la gemme. De retour vers ses compagnons, elle donna le signal du départ. Dès lors, le groupe se mit en formation. Encore trop faible pour vraiment être utile, Alchem demeura à côté de sa mère, protégé par les autres.

Dotha prit place à ses côtés au sein du cercle protecteur formé par leur escorte, se tenant prête à lui prêter main forte s’il venait à défaillir. Le groupe progressait lentement, autant par prudence que pour ménager Alchem mais ils finirent par atteindre le portail suivant. Après l’avoir franchi, ils retrouvèrent le reste de leur groupe d’expédition attendant patiemment des nouvelles.

Alors que la mère d’Alchem livrait des renseignements laconiques aux humains et aux nains, le svirfneblin sentit son médaillon vibrer légèrement et entendit une voix familière dans sa tête.

Alors, nous voici embarqués ensembles pour un bon bout de temps ? Si tu penses que ce sera si facile de me détruire, tu te fourres le doigts dans l’œil !

HRP : navré pour le retard, je pensais avoir répondu.

Forcément, la voix du Despote surprit désagréablement Alchem. Mais il se reprit vite, d’autant plus qu’entendre des voix sinistres dans sa tête était loin, très loin d’être pour lui une nouveauté.
« Je ne pense rien de tel », se contenta-t-il de murmurer.
« La ferme, méchante voix ! » ajouta Dalius, qui l’avait également entendu.
« Que se passe-t-il, Alchem ? »
« Il semble que le Despote puisse encore communiquer. »
« Ho... C’est ennuyeux. Dis-lui qu’avoir invoquer un Balor, c’était stupide. »
« Un quoi ? »
« Un Balor, il comprendra. »

HRP : vraiment aucun souci !

Le message ne plu certainement pas à l'entité mais celle-ci ne répondit pas - qu'elle ait eu mieux à faire ou qu'elle soit partie bouder... Le groupe put donc reprendre sa lente progression au différent des différents plans qui devaient les ramener vers le fond des mines des nains.

Ils atteignirent - deux heures plus tard environ et sans nouvel incident - le dernier portail que l'escorte de Théâya commença à franchir en premier comme il se devait. Là, ils constatèrent deux choses : la barrière qui perturbait les communications et les déplacements était de l'histoire ancienne. Mais des combats avaient toujours lieu à en juger par le brouhaha qu'ils percevaient à courte distance.

Théoriquement, la source du mal ayant été neutralisée, l’afflue de morts-vivants devraient cesser. Mais ceux restant allaient peut-être demeurer sur place à errer, privé de directive. De plus, il restait aussi les gobelins bien vivants. La prudence, pour ne pas changer, s’imposait. Le groupe de Téâya, ayant récupéré les hommes et les nains, ne put employer une tactique de pure discrétion. Elle adopta donc une formation défensive et s’apprêta à avancer. La magicienne prit toutefois un instant pour étudier l’afflu d’énergie depuis le portail dimensionnel. Qu’en était-il à ce niveau ?

Celui-ci avait cessé et elle ne tarda pas à remarquer des signes que le portail s'effondrait sur lui-même. Sans doute pas un hasard. Ses connaissances en matière planaire lui firent évoquer l'hypothèse que c'était leur départ - ou celui d'autre chose - qui privait le plan qu'il venait tout juste de quitter de son intégrité. Dans un cas comme dans l'autre, il y avait fort à parier qu'il allait disparaître dans quelques minutes sinon secondes. Et ils avaient assurément d'autres chats plus urgents à fouetter : des ordres se firent entendre, ne laissant aucune place au doute quant à leur origine. Il s'agissait indubitablement de soldats nains engagés en combat.

Satisfaite par ses constatations, Téâya donna le signe du départ. Si des nains étaient engagés en combat à proximité, il fallait les rejoindre, leur prêter main forte ce qui offrirait un moyen de se renseigner sur la situation. Savoir, c’était prévoir. Le groupe se mit donc en mouvement en direction des voix.

Il n’y avait pour le moment qu’un seul chemin possible de toute façon et le groupe adopta une formation serrée mais qui couvrait néanmoins toute la largeur du boyau de mine dans lequel ils se trouvaient. L’escarmouche avait lieu à un carrefour et les combattants nains se retrouvaient en face de leur position, luttant pour repousser une horde de gobelins se déversant depuis les deux couloirs latéraux : la configuration était donc idéale pour les prendre à revers et les coincer entre leurs deux groupes. Sans un mot, les soldats de Lameroy qui les accompagnaient formèrent une barrière de boucliers derrière laquelle les lanceurs de sorts pourraient opérer en toute sécurité.

Les lanceurs de sorts ayant déjà généreusement puisés dans leur répertoire, ce ne fut pas un déluge de magie. L’un des prêtres lança au groupe une bénédiction, Téâya créa quelques illusions pour berner les créatures et le reste allait être à la charge de l’acier. La garde de la magicienne, des guerriers expérimentés, ne risquaient en théorie pas grande chose, surtout avec le soutien des nains. La formation avança, lentement, sûrement, avec pour consigne d’écraser l’ennemi méthodiquement. En cas de besoin, un carreau d’arbalète pouvait creuver une cervelle téméraire ou un sort pouvait refroidir une initiative ennuyeuse.

Dotha et Aleka - elles - étaient loin d'avoir épuisé tout son répertoire puisqu'elle s'était tenue à l'écart de la plupart des combats hormis les tous premiers de leur aventure. Elle purent donc s'exprimer et surtout évacuer une bonne part de leur frustration en invoquant pour l'une, une colonne de feu qui souffla une bonne trentaine de peaux vertes en semant la panique chez leurs adversaires survivants et pour l'autre une prière qui rendit plus efficace l'offensive méthodique des svirfneblins. Malgré ce répit qui leur permit d'avancer de deux mètres de plus, il semblait toujours arriver un flot important de candidats au suicide.

Téâya jura fort grossièrement et lança l’un de ses derniers sortilèges d’ampleur afin de régler le problème drastiquement, au moins durant plusieurs minutes. Le conduit par lequel arrivait les peaux vertes se retrouva obstrué par un mur de feu promettant une incinération radicale à ceux qui voulaient le traverser.
« On a assez fait pour aujourd’hui. Les gobelins, c’est de trop ! Et trop c’est trop ! »
Ils devraient avoir le temps de nettoyer la zone puis d’aviser avant que le mur ne s’estompe.

Le mur invoqué fort à propos par Théâya incinéra quelques dizaines de gobelins de plus et il stoppa radicalement l’afflux de nouvelles victimes à la fureur conjuguée des nains, des hommes et des gnomes.

Le couloir étant temporairement dégagé de ses assaillants, – mais non pas d’un monceau de cadavres déchiquetés, transpercés, incinérés et parfois les trois à la fois – le groupe de la Grande Mystificatrice put enfin faire la jonction avec le commando nain : ces derniers les laissèrent passer derrière leur barrière de boucliers avant de la refermer pour bloquer à nouveau le couloir.

Aussitôt, un officier nain s’approcha de leur chef de groupe et s’inclina devant elle :

- Vous nous avez rendu un fier service, Grande Mystificatrice ! Et je pense que le Grand Conseil sera très heureux de pouvoir s’entretenir avec vous.

« Notre tâche, dans ce secteur, est terminée, déclara directement Téâya. Il n’y a plus rien à protéger ou à surveiller. Quelle est la situation plus loin ? À quoi devons-nous nous attendre ? Mon groupe est plutôt éprouvé. J’aimerais éviter de devoir tailler mon chemin à travers une légion gobeline. »
Le Grand Conseil, très heureux de la voir, elle ? Non, assurément pas. Ils voulaient voir son fils, calme et mesuré, pas elle, l’impulsive irrespectueuse des traditions poussiéreuses. Mais Alchem avait besoin de repos. Ce serait donc bien elle qui irait voir le Grand Conseil.

C'était - comme l'avait bien compris la Grande mystificatrice - une formule de politesse et l'officier nain n'était pas dupe de ce que serait la réaction des chef nains en voyant débouler leur encombrante alliée. Mais, loin de toute cette politique, le nain lui fit un rapport concis de la situation : les forces de Lameroy devaient toujours combattre une horde importante de gobelins ayant envahis les mines. Pour l'heure, le passage jusqu'à la surface avait été dégagé mais l'engeance gobelinoïde savait comment se terrer pour réapparaître dès que les soldats avaient le dos tourné.

Il fallait donc rester vigilant et c'est ce qu'ils firent et purent ainsi regagner les faubourgs de la ville souterraine sans avoir eu à affronter de nouvelles peaux vertes. L'heure du repos avait donc sonné. Ou celle de mener un combat - politique - pour certaine.

HRP : si tu veux, on peut se contenter de jouer la partie avec Alchem auquel cas je résumerai ce qu'aura appris Théâya auprès du Grand Conseil.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Lameroy - cité naine ouverte