La Couronne de Cuivre

Kasumi avait maintenant l’intention d’effectuer une dernière ronde autour de la zone de gibier afin de s’assurer que nul danger d’origine impie ou non ne pouvait gêner la venue des loups : il avait bien conscience qu’il lui faudrait obtenir ce résultat dès le lendemain sous peine de ne plus pouvoir empêcher la battue plusieurs fois différée. Cette dernière opération avait donc pour but de lui faire gagner du temps le lendemain mais il avait tout de même l’intention de ne pas s’attarder pour rentrer au village avant la nuit.

Sa dernière ronde ne donna aucun résultat probant. Il y avait les discrètes traces de passage d'humains qu'il avait déjà remarquées la veille, mais nul autre lieu maléfique n'attira son attention.
Il put donc rentrer au village un peu plus tôt que d'habitude, pour le plus grand plaisir de Sylvia qui l'accueillit d'un baiser, tandis que martha se précipitait aux fourneaux : elle n'avait pas anticipé son retour et la soupe n'était pas prête...

Kasumi invita Martha à prendre tout son temps : après tout, rien ne pressait et il ne s'attendait pas forcément à manger dans l'immédiat.

- Je devrais peut-être en profiter pour parler à Bertrand de ce que j'ai déjà découvert : je n'en aurais pas pour longtemps et j'imagine que les villageois doivent être impatients, qu'en pensez-vous ?

La question s'adressait aussi à Sylvia : le laisserait-elle ressortir alors qu'il la voyait si peu dernièrement ?

" A toi de voir, répondit Sylvia, sans se formaliser. J'en déduis que tu comptes repartir très tôt demain ? Autant le voir ce soir dans ce cas...
- Mais il doit être en train de dîner, comme tout le monde, intervint Martha. Il n'y a que nous qui sommes en retard : nous avions pris l'habitude de vous voir arriver tard..."
Il était difficile de déterminer s'il y avait une once de reproche dans cette phrase. C'était sans doute une simple constatation.
" Quoiqu'il en soit, nous dînons dans une demi-heure, ça vous laisse du temps avant... ou sinon, vous irez demain matin et partirez plus tard. Comme vous préférez.
- Tu as du nouveau à leur apprendre ?"

Peut-être pouvait-il en effet attendre le lendemain matin si la tension était un peu retombée au village. En tous cas, ce n’était pas l’envie qui manquait de passer un peu de temps avec Sylvia à ne penser à rien d’autre que de se détendre quelques heures.

- Oui et non : j’ai découvert un autre cercle de pierre – plus modeste que le précédent – mais mes dernières réserves d’eau bénite y sont passées pour le purifier. Et il y avait aussi un petit groupe de non-morts mais je ne pense pas qu’ils y étaient liés directement. En tous cas, il n’est pas impossible que ce soit l’une des raisons pour lesquelles les loups évitaient ce terrain de chasse. En tous cas, première Neige est toujours avec eux et se porte bien.

" C'est une bonne nouvelle.
- Cela veut dire, aussi, que s'il faut en arriver à des méthodes plus... radicales, vous aurez exactement où chercher, fit remarquer Martha, ce qui lui valut un regard sombre de Sylvia.
- Et aussi qu'elle peut nous avertir s'ils préparent quelque choses susceptible de nous nuire, rétorqua la rôdeuse. Ça pourrait être un bon argument.

Kasumi ne répondit pas directement à la remarque de Martha mais si les choses devaient vraiment s’envenimer, il ne risquerait certainement pas d’impliquer Première Neige et lui demanderait – au contraire – de le rejoindre plutôt que de rester avec les loups. Il avait cependant bon espoir de ne pas avoir à mener cette battue et à parvenir à dissuader les villageois de le faire. Il sourit à sa compagne qui soutenait ses efforts et préféra s’attarder sur les implications de son autre découverte :

- Je persiste à penser que le fond du problème – que ce soit pour les loups ou la disparition du bosquet – est lié à la présence de ceux qui maintiennent ces cercles de pierre maudits. Je crois que je vais essayer d’en trouver d’autres ou de guetter si quelqu’un fait mine de revenir vers celui que j’ai nettoyé aujourd’hui. Mais j’y parviendrai d’autant mieux si les villageois m’en laissent le temps.

" Ça risque d'être long, d'attendre ainsi, fit remarquer Sylvia. Celui ou ceux qui créent ces cercles de pierre n'y viennent peut-être pas souvent.
- Je ne sais pas combien de temps vous laisseront les chasseurs avant de s'impatienter..., grimaça Martha.
- En même temps.. que faire d'autre ?"
Sylvia secoua la tête.
" Je suppose que tôt ou tard, ça portera ses fruits, ils reviendront forcément. J'espère juste que ce sera avant la fin du mois. Les jours avancent...

Non, il se rendait compte que cette solution était par trop aléatoire : attendre que ses ennemis se découvrent dans les prochains jours aurait été compter beaucoup trop sur une chance qui lui avait fait défaut jusqu'ici. Sans compter qu'il ne disposait pas d'un temps infini comme venait de le rappeler Martha et Sylvia et que la patience n'avait jamais été son fort.

- Dans l'absolu, je pourrais demander à Première Neige de guetter à ma place mais ce serait cruel et j'ai besoin d'elle près de ses congénères. Peut-être que je vais me contenter de rondes régulières sur place pour voir si les inconnus laissent des traces de leur passage : je ne tomberai probablement pas sur eux mais je pourrai savoir si le lieu est encore en activité.

Sylvia acquiesça.
" Ça te permettra de voir, le cas échéant, si cela vaut la peine d'organiser un véritable guet dans les parages. Sans pour autant te bloquer complètement là-bas...
- Mais vous devriez tout de même en discuter avec les chasseurs. Même si vous n'avez pas solutionné le problème il me semble que vous avez des arguments susceptibles de les convaincre de temporiser..."
Martha se leva.
" Mais je vais voir si la soupe est prête. Il doit vous rester le temps d'un brin de toilette si vous voulez... Et n'hésitez surtout pas à mettre la table !"

Oui, le rôdeur était d'accord : il avait désormais réuni quelques éléments concrets à faire valoir auprès des chasseurs et il dressa la table en réfléchissant à la manière dont il pourrait aborder le sujet dès le lendemain : sans doute que Bertrand saurait l'épauler après qu'il lui ait exposé ses arguments en premier lieu. Quant à faire un brin de toilette, l'idée était effectivement tentante et il se laissa convaincre de se débarbouiller à défaut d'un vrai bain chaud.

Le dîner fut rapidement expédié. Sylvia semblait fatigué, malgré le fait de passer ses journées à ne rien faire, ou peut-être à cause de cela, et le fait de se sentir fatiguée aggravait son agacement. Elle s'efforçait de n'en rien laisser paraître, mais le rôdeur la devinait un peu morose. Elle tenta de donner le change en parlant des recettes de cuisine que Martha lui apprenait -peut-être pour rassurer le rôdeur quand à leurs repas futurs- et des visites qu'ils avaient parfois. En effet, tandis que Kasumi battait les bois, elle parvenait petit à petit, avec le concours de Martha, à se faire un petit réseau de connaissances toutes prêts à venir l'épauler si elle en avait besoin, ou à lui fournir un peu de matériel pour le bébé. Le bébé... c'était le seul sujet qui faisait briller ses yeux malgré sa morosité. Le simple fait de le mentionner lui faisait poser immédiatement une main sur son ventre, et Kasumi la sentait pleinement heureuse de cette naissance qui s'annonçait.
Martha semblait également fatiguée, peu désireuse de prolonger la veillée, même si demain, pour une fois, ils pourraient se lever un peu plus tard.

Kasumi se sentait un peu coupable de courir la forêt chaque jour alors que Sylvia était cloîtrée à l'intérieur et qu'elle aurait eu envie de l'accompagner et qu'elle ne pouvait le voir que deux heures par jour dans le meilleur des cas. Mais la façon dont elle devenait rayonnante à chaque fois qu'elle évoquait leur enfant à venir était communicative. Il joignit sa main à la sienne et sourit de bonheur avant de répondre doucement :

- Tu es si belle quand tu souries ainsi !

Sylvia rosit légèrement et murmura doucement.
" Tu es gentil... Ou est-ce une allusion au fait que je devrais sourire plus souvent !??!", ajouta-t-elle pour le plaisir de le provoquer, tout en l'entraînant vers leur chambre.
Martha achevait de débarrasser la table. La nuit tombait au-dehors, et l'atmosphère était paisible. Par la fenêtre ouverte, on entendait les chants des grillons et d'un rossignol, quelque part dans le lointain. Des éclats de voix joyeux provenaient d'une maison voisine ; des cris d'enfants peu désireux d'aller se coucher éclatèrent quelque part. Un ou deux moustiques, les premiers de la saison, avaient franchi le barrage odorant de citronnelle déposée à leur intention et guettaient l'occasion de se nourrir. L'été s'annonçait déjà.

Kasumi aurait probablement davantage profité de cette perspective et de l'atmosphère paisible si le début de l'été marquait la limite pour planter le gland confié par Celd. Mais l'heure n'était pas aux inquiétudes et le demi-elfe sentait que Sylvia avait besoin de réconfort et de soutien dans l'épreuve qu'elle traversait. Il lui répondit donc avec joie que c'était aussi son rôle de la faire sourire, une invitation à bavarder ou peut-être à un nouveau massage pour la détendre comme la veille, selon ses souhaits.

La rôdeuse l'enlaça tendrement en franchissant le seuil de leur chambre, et il apparut bien vite que malgré sa fatigue, elle était tout à fait disposée à profiter pleinement de la soirée de façon particulièrement câline : pour une fois qu'il rentrait de bonne heure!
Ils s'endormirent donc plutôt tard, mais le corps parfaitement détendu et le coeur heureux. Sylvia s'endormit la première, comme d'habitude, au creux de son épaule. Son ventre commençait, à s'arrondir, c'était indéniable, et le bonheur d'être enceinte faisait briller ses yeux, lui donnant un air épanoui qui ajoutait à son charme naturel. Même endormie elle affichait un sourire heureux.

Comme si son organisme sentait qu'il n'était pas nécessaire de se lever aussi tôt, Kasumi se réveilla un peu après l'aube le lendemain. Presque en même temps que sa compagne qu'il sentait sur le point d'émerger.

Kasumi ouvrit les yeux pour voir le visage souriant de sa compagne et - aussitôt - sentit tous ses soucis s'envoler et grandir une énergie et un enthousiasme sans bornes pour la journée à venir. Il se sentait reposé et enjoué et était prêt à affronter Bertrand pour le convaincre de mettre en suspens la chasse aux loups. Et au besoin, il emmènerait certains des chasseurs du villages pour qu'ils puissent constater eux aussi ses découvertes. Ensuite alors il serait bien temps de rechercher des traces du bosquet.

Il eût le bonheur -partagé- de profiter de la présence de sa fiancée au petit déjeuner, qu'il prit le temps de savourer plus longuement que d'habitude. Martha lui promit qu'un petit en-cas pour midi serait prêt à l'issu de sa discussion avec le bûcheron.

Bertrand était dans son petit bureau de la maison communale. Les villageois vaquaient à leurs occupations -poules, potager, menues réparations- et maints regards se tournèrent vers Kasumi lorsqu'il traversa la place centrale, mais on ne lui adressa pas la parole. Il devinait de la curiosité, parfois une certaine méfiance voire de l'hostilité chez certains. Mais ils n'étaient pas majoritaires.
Le responsable de la communauté se leva à son entrée.
" Bonjour, sieur Kasumi. Heureux que vous veniez enfin me tenir informé de vos avancées..."

Kasumi serra la main tendue, conscient que son attitude des derniers jours aient pu être mal interprétée étant donné ses prises de position en opposition avec celles de la majorité du village.

- Ne croyez pas que je cherchais à éviter cet entretien mais je tenais à obtenir le maximum d'éléments avant de vous les rapporter.

Il laissa le temps au chef du conseil d'acquiescer - ou tout du moins d'accuser réception de cette entrée en matière - avant d'entrer dans le vif du sujet :

- Comme le problème des loups est celui qui préoccupe le plus vos concitoyens, c'est vers eux que j'ai porté l'essentiel de mes efforts des derniers jours. Je suis entré en contact avec la meute et notamment son chef grâce à ma compagne animale. Les loups semblaient vouloir chasser près du village mais je les en ai dissuadé puis je les amené vers une autre zone près de la rivière. Mais leur chef a eu peur de quelque chose dans cette direction. J'ai laissé ma Première Neige pour les surveiller et j'ai donc cherché à en savoir plus et j'y ai trouvé un autre cercle de pierre maudit.

" Ah... un cercle de pierres..."
Le bûcheron semblait chercher dans sa mémoire.
" Ça ne m'évoque pas grand-chose à vrai dire. Vu la réputation de cette forêt, j'imagine qu'il a dû y naître et disparaître de nombreux cultes en tout genre, notamment maléfiques... Et je ne vois pas vraiment en quoi ça nous concerne actuellement..."
Il paraissait avoir un peu de difficultés à trier les informations fournies par le rôdeur, peut-être simplement parce qu'elles touchaient à un domaine qu'il connaissait mal.
" Mais donc... vous insinuez que ces cercles de pierre sont liés à la présence des loups dans les parages ? Il faut le détruire, alors ?"

Le demi-elfe était conscient d'avoir livré un peu trop d'informations - qui plus est décousues - d'un coup aussi reprit-il plus posément :

- J'ai purifié - au moins en grande partie - le cercle de pierres mais j'y effectuerai encore quelques rondes pour m'assurer qu'il n'y a plus de culte actif à cet endroit : nous aviserons ensuite en fonction de ce qu'il convient de faire et peut-être faudra-t-il demander l'aide d'Aïdan quand il passera au village. Quant aux loups, je pense qu'ils ont peur de se diriger vers cette zone alors qu'il y a assez de gibier pour les nourrir et donc éviter qu'ils ne s'approchent du village. J'espère donc parvenir à les convaincre de retourner y chasser ce qui résoudrait notre problème avec eux sans effusion de sang.

" Oui... Peut-être... Au moins provisoirement."
Le bûcheron ne paraissait qu'à demi convaincu.
" Mais admettons que vous parveniez à les convaincre. Qu'est-ce qui vous fait croire qu'ils se contenteront de cette zone de chasse ? Qu'ils ne reviendront plus vers le village ? C'est si tentant, pour eux, une brebis égarée... Enfin, il me semble..."

Il était évident que Bertrand s'attendait à des éléments plus concrets pour accepter de laisser vivre les loups à seulement quelques lieues du village. Le rôdeur continua donc d'un ton conciliant, admettant l'argument avancé par le bûcheron :

- Oui, une brebis sera toujours une proie tentante si elle s'approche trop de la zone de chasse d'un loup. Mais j'espère que la zone de chasse près de la rivière leur paraîtra moins dangereuse. Si je parvenais à ranimer le bosquet, le gibier foisonnerait dans cette direction et les loups ne prendraient plus le risque de s'approcher des habitations humaines. La solution que je propose est de les garder sous surveillance jusqu'à ce que j'aie pu accomplir ma mission principale. C'est pour cela que j'ai permis à ma louve de rester parmi leur meute.

Bertrand paraissait hésitant. Ou peut-être un peu incrédule.
" Votre louve... se charge de les surveiller ? Ça veut dire qu'elle vous préviendra s'ils s'approchent d'ici ? Vous êtes certain de ça ? "
Le bûcheron fronça les sourcils, réfléchissant, se raccrochant à cette avancée concrète.
" Si vraiment elle peut nous prévenir, alors ce serait une bonne chose. On pourrait imaginer un système d'alerte pour prévenir ceux qui se trouveraient en forêt, les bûcherons notamment. Avec des cloches, peut-être. Comme ça, nous pourrions continuer à vaquer à nos occupations, et s'ils s'aventurent par ici, et bien nous nous préparerions à les recevoir."
Il grimaça.
" Mais il y a un hic tout de même. C'est vous qu'elle préviendra. Si vous n'êtes pas là, si vous vadrouillez dans les bois, comment serons-nous prévenus, ici ?"

Kasumi était loin d’avoir imaginé un système aussi complexe mais il fallait bien reconnaître que les bûcherons avaient besoin d’un minimum de garanties pour retourner travailler sereinement dans les bois. Pour sa part, il se voyait mal les accompagner toute la journée et ainsi abandonner sa recherche du bosquet. Ce qui le gênait en outre était qu’il ne saurait pas forcément de façon certaine si les loups s’approchaient des zones de coupe ou des fermes limitrophes avec les bois mais que la responsabilité allait lui incomber immanquablement en cas d’attaque qu’il n’aurait su prévoir ou relayer.

- J’ai bien conscience que c’est un système loin d’être parfait et qu’une solution plus radicale serait certainement plus sécurisante… Mais je peux intervenir moi-même pour intercepter les loups si nécessaire et aussi avertir les vôtres si vous me signalez où vous compter vous rendre chaque matin. Je serai à pied mais je ne compte pas vraiment m’éloigner très loin dans les bois.

Le bûcheron haussa un sourcil.
" Vous croyez vraiment que vous serez assez proches pour arriver ici avant les loups ? C'est qu'ça s'déplace vite, ces bêtes-là..."
Il réfléchit un instant, pesant visiblement le pour et le contre.
" Bah, ça ne coûte rien de tester, d'attendre quelques jours, quelques veilles ainsi... Mais s'il y a la moindre attaque sur le village sans que nous ayons pu nous préparer, alors soyez certains que dès le lendemain, la battue sera lancée. Et je serai le premier à l'encourager !"

C'était risquer beaucoup sur un monceau d'hypothèses toutes plus ou moins probables mais le demi-elfe ne voyait pas comment obtenir de meilleur accord à court terme. Il jouait cependant toute sa crédibilité sur ce pari aléatoire mais il sentait que c'était son devoir vis-à-vis de sa déesse et de la mission qu'elle lui avait confié.

- Cela me parait raisonnable et j'espère que nous n'en viendrons jamais à devoir organiser cette battue. Mais si elle a lieu, je vous prêterai mon concours pour abattre le chef de la meute et sauver les loups qu'il ne sera pas nécessaire d'abattre.

Bertrand eut l'air surpris.
" Parce que vous croyez qu'abattre le chef de meute suffira ? Bon, j'y connais pas grand-chose en loup, mais s'ils sont organisés en meute, y'a sûrement un nouveau chef qui prend la place de l'ancien s'il se fait tuer, non ? Et pourquoi le nouveau chef de meute n'en aurait pas aussi après nos moutons ? Non, moi je crois qu'il faut abattre suffisamment de loups pour que les survivants soient contraints d'aller vivre ailleurs. Pour qu'ils se sentent suffisamment en danger, si vous voulez. Sinon, ils reviendront !"

Le rôdeur ne partageait pas tout à fait cet avis et tenta de le faire valoir d'un ton d'autant plus diplomatique qu'il se savait sur la corde raide et que son interlocuteur avait déjà consenti beaucoup de concessions :

- L'organisation d'une meute est complexe mais c'est l'un des deux dominants qui mène toujours la chasse et choisit donc la zone et le gibier à attaquer. Si un autre loup prend la place du chef de meute, il n'aura pas forcément les mêmes inclinaisons : certains sont bien plus craintifs naturellement des humains que celui actuellement à leur tête.

" Peut-être, peut-être... Ou peut-être pas. Seriez-vous prêt à parier là-dessus ? A parier nos vies ? Moi pas. S'il doit y avoir une nouvelle attaque et que votre louve ne puisse nous prévenir à temps, alors je ferai le nécessaire pour que cela ne se reproduise plus. Et je n'ai pas l'intention d'attendre de voir si le nouveau chef de meute sera plus ou moins craintif que l'ancien. Tenez-le vous pour dit..."
Le ton avait légèrement monté, et Bertrand rougit légèrement en s'apercevant qu'il se laissait emporter. Il conclut d'une voix un peu plus apaisée.
" Mais dans l'immédiat, nous n'en sommes pas là..."

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Peyregorde