La Couronne de Cuivre

Chandara esquissa un sourire amusé après cette précision : elle avait parfaitement compris qu'il ne s'agissait que d'une invitation pour le petit-déjeuner mais le fait que Séverin prenne la peine de le souligner était soit une attention charmante soit une légère espièglerie - difficile de faire la part des choses - soit même les deux à la fois. La proposition reçut dans tous les cas un très bon accueil : la jeune-femme était touchée que le paladin l'invite à partager ce moment réservé.

- J'ai déjà mangé mais j'accepte tout de même votre invitation avec joie : je vous attend dehors.

Le paladin sourit.
" Très bien. Il y a une table en pierre non loin d'une statue de deux nymphes rieuses. C'est là que nous vous retrouverons. Soyez patiente, cependant. Un Sunite aux bains prend toujours son temps."
Il la gratifia d'un clin d'oeil malicieux et s'inclina, avant de sortir à la suite de ses collègues.

Elle faillit répliquer sur le même ton qu'elle était curieuse d'entendre pourquoi mais elle avait appris à savoir quand il valait mieux rendre les armes d'autant qu'elle ne voulait pas retarder le moment de détente bien mérité de son interlocuteur. Elle se contenta donc de répondre d'un ton courtois :

- Aussi impatiente que je puisse être, je ferai un effort : prenez tout le temps qui vous est nécessaire !

Dès qu'il se serait éloigné, elle gagnerait à nouveau les jardins et se mettrait en quête de l'endroit décrit par Séverin, se demandant si des prêtres et prêtresse se joindraient ou non à eux d'aussi bon matin. Et l'attente serait une bonne occasion de chercher des réponses à certaines des questions que les paladins ne manqueraient certainement pas de lui poser, et auxquelles elle se sentait présentement bien incapable de répondre rationnellement.

Les paladins ne survinrent qu'une bonne demi-heure plus tard. Il n'y avait toujours pas la trace du moindre clerc dans le parc, et les fenêtres que la jeune femme pouvait apercevoir demeuraient closes et voilées. Ils arrivèrent tous les quatre en même temps, avec des plateaux de petit déjeuner, lesquels comportaient du pain, des céréales et des fruits, ainsi que du lait et du jus. Ils étaient frais et reposés, et une nouvelle odeur florale flottait dans l'air. Ils s'installèrent autour de Chandara, se servant aussitôt sur les plateaux.
" Les Lathandrites vous ont poussée hors du lit ?" demanda Aphrodite.

Pour Chandara, cette entrée en matière était clairement destinée à la mettre à l'aise par son côté anodin et elle répondit avec spontanéité et sincérité :

- Oui et non : je suis clairement une victime consentante car c'est moi qui le leur ai demandé. Il me semble important de respecter les traditions de ce qui m'hébergent gracieusement. Et même si je n'aurais pas tenu plus d'une veille à ce rythme, ce n'est pas un très gros sacrifice que de se lever pour la cérémonie de l'aube.

" Sans doute, non." dit Aphrodite avec un léger haussement d'épaules.
L'autre jeune femme croisa les bras.
" Je suis surprise que les paladins de l'Aster vous hébergent de la sorte. Même les conjoints des paladins n'ont pas le droit d'y passer la nuit.
— Chandara vient de loin, proposa Séverin. Ils ne peuvent pas y être complètement insensibles.
— Quand même... avec leur vie cloîtrée... Je suis surprise que ça ne cause pas davantage de remous."

Chandara haussa les épaules à son tour comme pour bien montrer qu'elle n'avait elle-même pas vraiment d'explications à fournir pour l'accueil exceptionnel dont elle avait été l'objet. Elle se risqua tout de même à quelques hypothèses pour entretenir la conversation :

- Ils m'ont accueillis avec beaucoup de bienveillance en tous cas : j'ai conscience de le devoir au moins en partie à Arthur... Et peut-être qu'ils ont été sensibles au fait que je leur ramène un vieux compagnon de la guerre qu'ils pensaient perdus. Ou alors que c'est lié au fait que je me cherche en tant qu'ancienne paladine. Franchement, je ne sais pas trop et j'espère que ça ne créera aucun problème.

La jeune femme aux cheveux noirs et le jeune homme châtain échangèrent un regard entendu mais ne dirent rien. Séverin avait l'air aussi désinvolte que Chandara et il haussa les épaules.
" Vous avez raison, parfois, il vaut mieux ne pas trop se poser de questions, et profiter sans arrières-pensées des bienfaits que nous apporte la vie..."
Disant cela, il lui servit un verre de jus de fruits. C'était un mélange léger, estival, qui conviendrait parfaitement à cette radieuse journée.
" Mais malgré l'accueil des Lathandrites, c'est à nouveau chez les Sunites que vous déambulez..."

Elle avait bu une gorgée du breuvage sans hésiter et ne put qu'être agréablement surprise du mélange à la fois sucré et doux, rafraîchissant et savoureux. Elle y plongea à nouveau les lèvres, juste pour le plaisir de confirmer sa première impression avant de répondre d'un ton léger en regardant Sire Séverin d'un œil amusé :

- Cela semble vous étonner : je ne vois franchement pas pourquoi ! Je n'ai aucune raison de me plaindre de leur accueil mais vos jus de fruits sont bien meilleurs, vos œuvres d'art sont grandioses là où ils privilégient la sobriété. Et je n'ai pas parlé de vos techniques hypnotiques de combat : je n'avais jamais vu de paladins manier d'armes aussi légères. Mais peut-être aussi que ma présence ne s'explique pas plus rationnellement que mon hébergement dans une commanderie Lathandrite...

" Vous nous flattez, dit Aphrodite en levant légèrement les yeux au ciel.
— Soren a au moins deux pièces dans la commanderie lathandrite, remarqua le jeune homme. Mais je ne sais pas si elles sont faciles à trouver.
— C'est purement hédoniste, dans le fond."

Chandara interpréta cette dernière remarque comme un signe que sa réponse un peu trop légère et évasive ait pu méprendre les paladins. Elle chercha donc à corriger le tir, quitte à se livrer peut-être un peu plus :

- Mais pour être tout à fait honnête avec vous, si je viens aussi souvent ici ces derniers jours, c'est que c'est d'après moi la meilleure façon d'en apprendre un peu sur votre religion. J'ai cru que je pouvais être attiré par celle des Lathandrites mais j'ai tout de même de sérieux doutes. Même si leur philosophie est séduisante par bien des aspects et que je respecte tout ce qu'ils font, je dois bien reconnaître n'avoir pas vraiment senti d'attirance particulière en allant prier à leur temple chaque matin depuis mon arrivée. Et je crois que c'est différent ici. Je n'en suis pas certaine bien sûr et tout semble tellement éloigné de ce que je connaissais auparavant que c'en est intimidant...

" Je crois que c'est avant tout aux principes de la déesse que vous devriez vous attacher... Plutôt qu'à son Temple ou à ceux qui la servent.
— On la trouve quand même plus aisément en ces lieux...
— Oui et non. Elle est déjà... transformée...
— Vous vous êtes promenée dans Luménis, déjà... Avez-vu eu le regard attiré par certaines choses ?"

Elle était consciente qu'une partie de l'échange entre les paladins lui échappait mais elle n'y prêta pas vraiment attention, préférant de loin répondre sincèrement à la question qui lui était posée. Elle ferma les yeux quelques secondes pour se remémorer ses premiers jours dans la capitale helonnienne avant de livrer le fond de sa pensée :

- C'est difficile à dire car il y a de nombreuses choses qui ont retenu mon attention en dehors de votre temple dans votre ville : depuis le marché animé du port où j'aime me promener pour faire mes achats aux beaux quartiers avec ses jardins fleuris. La Grande Bibliothèque aussi mais j'ai toujours eu une certaine sensibilité pour les lieux de culture comme celui-ci. Oh, et j'ai particulièrement aimé le parc et notamment le belvédère et ses jolies statues. Mais vous évoquiez les principes de la déesse : de quoi voulez-vous parler précisément ? Et désolée si ma question peut vous apparaître profane...

" Avez-vous regardé les gens ? demanda Séverin, sans répondre parfaitement à sa question. Sunie est beauté et amour, mais pas seulement des choses... Les jardins, les statues, les couleurs du marché... Ce sont des attraits secondaires. Ce que Sunie aime, ce que Sunie veut, c'est reconnaître et préserver le plus beau des sentiments. Vous le vivez en ce moment, et c'est merveilleux. Mais avez-vous encore assez... de coeur... ou d'énergie... pour regarder les autres ?"
Ses trois compagnons s'étaient tu, attendant sa réponse.

La jeune femme but une gorgée de son jus de fruit avant de relever les yeux vers Sire Séverin, oubliant quelques instants la présence des autres paladins tandis qu'elle répondait sans concession :

- Oui.

Sa réponse était sans détour mais elle avait bien conscience de devoir l'expliciter un peu et elle ajouta d'un ton assuré, s'étonnant elle-même de ne pas sentir le besoin de baisser les yeux ni même de rougir :

- Je crois être suffisamment assurée des sentiments que je partage avec Arthur pour me l'avouer à moi-même : Luménis a bien des attraits en la matière et j'aurais bien tort de fermer les yeux ou détourner le regard. C'est en partie pour cela que j'ai eu envie de revenir ici, au temple, même s'il y a aussi de belles personnes parmi les lathandrites ou dans la rue... Mais il est difficile de ne pas voir les Sunites qui ressortent parmi eux...

Elle marqua une pause et but une nouvelle gorgée comme pour se donner du courage avant de poursuivre :

- Et certains d'entre eux ont attiré mon regard encore plus que les autres, je ne peux pas le nier.

Les Sunites sourirent sans malice.
" C'est à nouveau très... flatteur. Mais vous me comprenez mal, Chandara. Les clercs et les paladins de Sunie sont certainement... attirants ou fascinants... mais ce n'est pas nous qui avons besoin de votre regard. Pour l'instant, je vous sens attirée par Sunie, mais davantage comme une fidèle que comme quelqu'un qui pourrait vouloir se vouer à la déesse. Oui, il est bienvenu d'être touché par la beauté... et quand nos pairs sont beaux, inutile de le nier... Mais nous n'avons pas besoin d'aide ou de soutien. Ce sont les gens de la rue qui doivent être l'objet de nos attentions... La beauté dans la boue... et l'amour dans la routine... C'est à eux que je me demandais si vous aviez fait attention."

Cette fois, l'ancienne helmite ne sut pas bien quoi répondre au paladin : si elle avait bien sûr regardé avec une certaine envie les couples se promenant dans le parc ou les personnes soignant leur mise qui déambulait dans la rue, elle ne s'était pas montré particulièrement été attentive. Elle baissa les yeux quelques instants mais elle devait une réponse franche à son interlocuteur aussi lui adressa-t-elle un sourire contrit :

- Je ne suis pas certaine de comprendre : comment s'y prend-on ? Pour aider les gens qui ne se manifestent pas. A quoi faut-il être attentif, au juste ? A ceux qui n'osent pas manifester leur beauté ? Ou déclarer leurs sentiments ?

" Il n'y a pas de recette. C'est une question... d'observation et de sensibilité. L'amour, c'est souvent être tourné vers soi-même, et Sunie sait que les clercs et les paladins de son obédience s'aiment avant tout. Mais ensuite, il faut se tourner vers l'extérieur. Ouvrir les yeux et les oreilles. Percevoir. Sentir. Soutenir. Avez-vous déjà aidé des amis, ou des proches, à s'épanouir dans une relation ? Une fois qu'on porte l'aube ou l'armure, cela devient plus simple, bien sûr, car les gens viennent spontanément vers nous, quand ils sont dans le besoin.
— Pas tous.
— Pas tous, c'est vrai, et nous devons continuer à observer et deviner. Mais se faire chantre de la beauté et de l'amour, c'est parvenir à les dénicher où ils se trouvent et ensuite les préserver de toutes ses forces."

Cela paraissait si simple dans le fond quand Sire Séverin en parlait. La jeune-femme se sentit un peu plus assurée et elle répondit cette fois sans attendre :

- Je suis indubitablement novice en la matière mais je crois avoir déjà aidé un de mes proches à s'épanouir davantage, oui. Enfin, j'espère de tout cœur que mes conseils lui permettront, à lui et l'élue de son cœur de mieux vivre leur relation. Il s'agit de mon frère, je ne sais pas si ça compte. Et c'est sa compagne qui s'est ouverte à moi : je crois qu'elle vit mal qu'il préfère garder leur relation secrète par crainte de la réaction de notre famille. Je lui ai dit que c'était stupide parce que tous accueilleraient cette merveilleuse nouvelle avec joie, moi la première !

" C'est un bon début, dit le paladin avec un sourire amical. Mais à présent, posez-vous la question... Pensez-vous que vous pourrez surprendre l'étincelle chez un parfait inconnu ? Pensez-vous que vous pourrez accompagner son amour sans vous montrer indiscrète ou pressante ? Pensez-vous, aussi, que l'amour est la valeur première, qui doit primer sur la raison, en toute occasion ? Avez-vous cette liberté de penser ? Mieux... Ressentez-vous cet appel, cette vibration, au fond de vous ?"

Cette série de questions étaient embarrassantes mais le paladin se montrait tout de même attentionné à son égard aussi fit-elle l'effort de se plonger dans ses pensées en fermant les yeux pour s'aider à se concentrer. Que ressentait-elle, au fond d'elle même ?

Pour l'aider à y voir plus clair, elle se repencha sur les derniers mois qui avait vu son existence basculer. Sur le temps qui était passé depuis sa rencontre merveilleuse avec un étranger quelle intimidait visiblement.

Elle n'était pas parvenue à trouver le sommeil lors de leur première nuit et n'avait réussi à le faire qu'après lui avoir parlé et écouté ses bons conseils. Elle n'avait alors eu de cesse d'attirer son attention jusqu'à ce qu'il réponde enfin à ses attentes. Elle l'avait suivi quitte à affronter ses peurs les plus intimes et les plus ancrées alors qu'elle s'en serait senti totalement incapable. Et quand il avait disparu et qu'elle avait frôlé la mort, elle n'avait pas hésité un seul instant à tenter de le retrouver au mépris du danger et même de son devoir. Elle avait cru le perdre, encore, mais elle l'avait retrouvé à Manost pour une des plus belles journées de sa vie : elle avait assisté à une horrible pièce, avait couru au travers la moitié de la ville après des empoisonneurs, avait été blessée mais elle avait passé ces moments avec Arthur et il l'avait soignée avant de l'inviter à le rejoindre à Luménis. Elle n'avait pas hésité à défier la raison en s'embarquant sur le premier navire qu'elle avait pu trouver à son retour de Cojum pour le rejoindre dans un pays qui lui était parfaitement inconnu. Et elle ne regrettait pas un seul instant de l'avoir fait pour les beaux moments qu'ils avaient déjà passé tous les deux et les perspectives que ça leur offrait pour l'avenir.

Il avait dû s'écouler un long moment avant qu'elle ne réponde même si elle s'était senti sourire à l'évocation de tous ces souvenirs :

- Bien sûr que l'amour est la valeur primordiale : je n'y aurais pas cru si on m'en avait fait part sans que je puisse l'expérimenter mais j'en suis maintenant bien consciente. Je n'ai jamais senti de plus puissante motivation que celle-ci. Et même si elle m'a amené à faire des choses que je serais bien en peine d'expliquer rationnellement, je ne doute pas d'avoir agi pour le mieux. Je ne sais pas si j'aurai la sagesse de voir ce que le monde recèle de plus beau mais je ne demanderais pas mieux qu'à savoir ouvrir les yeux et apprendre ce que je peux.

" Eh bien, c'est un beau défi, dit le paladin. Vous avez une ville entière à votre disposition pour en faire l'expérience."
Aphrodite pinça les lèvres, manifestement hésitante, mais elle ne dit rien.
" Ensuite, vous reviendrez nous raconter ce que vous avez vu, si vous vous en sentez le coeur."

Un défi... C'est bien ce dont il s'agissait de son point de vue. Il semblait que Sire Séverin l'incite à se lancer seule dans le grand bain mais elle se sentait soudain un peu perdue. Elle n'était pas bien certaine d'avoir compris ses instructions et elle ne pouvait s'empêcher de penser que ses réponses avaient pu décevoir le paladin. Elle finit de boire le contenu de son verre avant de répondre :

- Très bien. Je m'efforcerai donc d'ouvrir les yeux. Mais vous n'auriez pas un dernier conseil à me prodiguer avant que je ne commence ?

Le paladin parut songeur, puis se tourna vers ses collègues.
" Ouvrir les yeux, les oreilles, le coeur, les mains.
— Prendre le temps. Etre patiente. Offrir, toujours.
— Trouver la fleur au milieu du fumier. Cela demande du discernement.
— Ne pas souffrir. S'il y a souffrance, c'est que ce n'est pas la bonne voie."

Ces conseils prendraient du temps à faire sens - la jeune-femme en était consciente - mais ils n'étaient pas si éloignés de certains des principes qu'elle avait déjà expérimentés : tout paladin se devait d'être compatissant et tourné vers les autres. Prendre son temps et se montrer patiente serait peut être un peu plus difficile : elle avait un peu trop tendance à foncer tête baissée. Mais c'était trop important pour qu'elle prenne des risques aussi ferait-elle des efforts. Il fallait déjà commencer par s'ouvrir au monde et c'était peut-être là le pas le plus ardu à franchir. Elle se sentait tout à la fois impatience et terriblement angoissée à l'idée de se jeter à l'eau mais retarder l'échéance n'arrangerait rien aussi se leva-t-elle en adressant un sourire aux quatre paladins.

- Merci pour vos conseils et votre accueil : c'était vraiment très gentil. Je vais prendre congé mais j'espère que nous aurons bientôt l'occasion de parler à nouveau.

" Je n'en doute pas le moins du monde." dit Séverin en la saluant.
La jeune femme aux cheveux noirs et le demie-elfe en firent de même, tandis qu'Aphrodite se levait.
" Je vais vous raccompagner jusqu'à la sortie." fit-elle avec un sourire.
Et elle l'entraîna sur la piste de sable blond, entre les massifs de fleurs.

Il ne fallait pas être grand clerc pour comprendre qu'Aphrodite escomptait lui parler plus en privé ce qui mettait en perspective la mimique que l'ancienne paladine avait surprise durant la conversation avec Sire Séverin. Restait à savoir quel était le sujet que la magnifique blonde n'avait pas souhaité aborder devant ses coreligionnaires. Avait-elle commis un impair par maladresse ? Soudain un peu anxieuse, elle préféra tout de même lui laisser l'initiative de débuter la conversation au cas où elle se serait simplement méprise sur les intentions de la Sunite...

Elles avaient presque atteint la sortie du parc quand Aphrodite se tourna vers elle et la prit par les mains.
" Chandara. Vous venez de découvrir l'amour. Vous avez envie de le vivre, je le vois, je le sens, vous avez envie d'en profiter pleinement, et sans arrières pensées... Croyez-vous que le moment soit bien choisi pour vous mettre au service de l'amour des autres ? Car le vôtre deviendra immanquablement secondaire... et ce serait tellement dommage..."

La jeune-femme ne s'était certainement pas attendu à cela et elle cligna des yeux de surprise mais elle ne chercha pas pour autant à récupérer ses mains. Bien au contraire. Et un petit sourire se dessina sur ses lèvres - un brin nostalgique peut-être - alors qu'elle répondait avec sincérité :

- Bien sûr que j'ai envie de le vivre : aimer et être aimé en retour est une sensation si merveilleuse ! Et c'est bien pour cela que je sens qu'il est de mon devoir de servir cette grande cause. Parce que je pense qu'il est toujours plus important de donner que de recevoir. Arthur est paladin : il vit pour ce credo. Je l'étais moi aussi autrefois. Et ça ne peut pas être complètement étranger à ce que nous ressentons l'un pour l'autre. Alors je crois que notre amour pourra prospérer malgré les compromis que nous imposeront nos choix.

Son regard s'était mit à briller et elle ressentait au plus profond d'elle-même qu'elle avait raison : une vie de service ne signifiait pas pour autant renoncer aux plaisirs : c'était dans l'accomplissement de son sacerdoce qu'elle pouvait puiser une énergie qui magnifierait tout ce qu'elle pourrait vivre par ailleurs. Ce n'était pas la voix la plus simple ou la plus évidente mais cela ne signifiait pas pour autant renoncer.

Aphrodite sourit et lui lâcha les mains.
" Je comprends ce que vous voulez dire. Alors allez-y. Livrez-vous à Sunie. J'espère que vous entendrez l'appel."
Elle avait l'air sincère.
" Votre beauté et votre énergie méritent de trouver un lieu béni où s'exprimer."

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Temple de Sunie