La Couronne de Cuivre

Thibault le dévisagea un moment.
-C'est gentil de t'inquiéter pour lui, mais n'oublie pas que, Sunite ou non, on ne se comporte pas avec ses amis comme on le fait en public. Giovanni a connu des refus, des échecs, des expériences malheureuses, et il n'a jamais envoyé paître personne. C'est tant mieux, d'ailleurs, parce que si d'aucuns aiment les artistes vindicatifs, ce n'est pas le cas de la majorité, surtout au sein de la bonne société. Sinon, oui, être d'une nature égale est plus reposant que connaître des émotions fortes, mais... Qui oscille entre affres et sommets à l'avantage de connaître ces derniers qui, souvent, compensent les premiers... Enfin, encore une fois, Sunite ou non, je ne connais personne qui soit ravi quand tombe à l'eau un projet qui tenait fort à cœur...
Il grimaça.
-Et voilà que nous sommes à nouveau terriblement sérieux... Décidément, cette soirée n'a pas pris le tour prévu... Mais donc, ne t'en fais pas pour lui, va. J'ai quand même bon espoir que l'Assemblée aille dans son sens. Le contraire serait surprenant et décevant.

Albérich opina du chef.
" Ah, chacun est arrivé avec ses envies et ses rêves, je suppose... C'est plus facile quand, comme moi, on n'attendait rien de l'expédition, sinon le désastre... A présent, je peux pleinement profiter de la lumière. Je suis à l'aube d'une aventure formidable, dans un endroit plein de promesses, je suis retourné à mon dieu, je suis entouré des gens qui me sont chers, je me découvre de nouveaux élans, de nouveaux amis, j'ai retrouvé une utilité au quotidien... Je suis heureux, c'est tout. Et j'ai trop bu, accessoirement."

-C'est ce que je disais : une seule coupe... Bon, allez, deux... Et ce bon vieux Alby ne tient plus debout. Mais là encore, rassure-toi, si tu n'es pas en état de marcher, je te soutiendrai jusqu'à ta chambre.
Le Sunite redevint sérieux.
-Et je suis ravi que tu te sentes bien. Crois m'en, je prie pour que rien ne vienne entacher ton bonheur.

Albérich sourit doucement.
" Je ne me leurre pas, même si je suis un peu éméché, je dois l'admettre. Je sais que nous ne sommes pas au bout de nos peines et qu'il viendra d'autres écueils. Mais pour une fois, je ne veux pas me projeter trop loin dans le futur. On peut espérer des lendemains roses, mais il faut pouvoir jouir de l'instant présent. J'ai connu mon content de ténèbres, ces derniers mois... J'ai droit à quelques jours... peut-être quelques veilles... sans accablement."
Il réalisa subitement que les deux paladins étaient toujours présents et il se sentit rougir d'embarras. Il était peut-être temps qu'il aille se coucher, lui aussi, avant de raconter trop de bêtises.

Mais les deux hommes, conscients du tour intime que prenait leur conversation, s'étaient mis à deviser entre eux, à mi-voix, et ne semblaient leur prêter aucune attention.
-Bien sûr que tu y a droit, murmura le Sunite. Et comment.
Il lui serra doucement l'épaule.
-Regagnons-nous nos chambres ? Je m'en voudrais de te faire coucher tard alors que tu dois être debout et en forme à l'aube...

Albérich acquiesça et se releva.
" Je n'ai aucune notion de l'heure qu'il est, je dois dire, et je pense que la journée de demain sera chargée... comme les mille qui suivront. Mais nous avons du temps devant nous, et nous aurons d'autres opportunités pour deviser et nous détendre. Tu dois être absolument épuisé, de ton côté... Vu l'heure à laquelle vous êtes arrivés, vous avez dû vous lever aux aurores..."

-Bah, je savais à quoi m'en tenir en venant : la Communauté n'est pas exactement un lieu propice aux grasses matinées. Mais en même temps, elles ne se justifient guère, puisqu'il n'y a pas non plus vraiment l'occasion de bambocher jusqu'à pas d'heure...
Il se leva. Les paladins en firent de même et proposèrent de ramener plateau et coupes en cuisine et ce qu'il restait de boisson dans ce qu'ils nommèrent, avec un sourire, la "cache". Ainsi laissèrent-ils les deux amis regagner seuls le couloir donnant sur leurs chambres.
-Bon sang, Albérich, j'ai dû te le dire déjà mille fois, mais... Je suis heureux de t'avoir retrouvé, et heureux que tu aies retrouvé la lumière de ton dieu, souffla le Sunite, d'une voix un peu sourde.

Le Luménien sourit.
" Je suis heureux que tu sois là, moi aussi. Quand je pense à toute la misère que j'ai déchargé sur le pas de ta porte, à Eredhun, et puis à tous les ennuis qui nous sont tombés dessus ensuite... Je suis heureux que nous ayons une seconde chance, dans des circonstances plus propices. Que tu puisses me voir comme j'aurais voulu être alors. Moi-même. Et je suis immensément soulagé de voir que tu as retrouvé cette flamme, toi aussi."

-Peut-être n'est-ce pas tout à fait la même. Mais cela n'a pas d'importance, car elle est revenue. Et du moment que l'on surmonte les épreuves, peu importe si elles nous changent un peu : sans doute est-ce pour le mieux. Sans doute est-ce ce qu'on appelle mûrir...
Il eut un sourire un peu rêveur puis, sans crier gare, il étreignit le Luménien avec chaleur, avant de reculer d'un pas.
-Ne regrettons pas ce qui s'est passé hier. Goûtons le moment présent. Et envisageons le futur sans nous voiler la face, mais avec optimisme.

Albérich opina du chef avec un sourire.
" Ça me semble un bon plan..."
Il jeta un oeil en bout de couloir.
" Dors bien. Merci pour l'invitation. Et on se voit au petit déjeuner. Je te souhaite des rêves à la hauteur des lieux... Et encore bienvenue parmi nous."
Il pressa doucement l'épaule de son ami puis se détourna pour regagner sa chambre à pas de loup.

-Merci, murmura Thibault. Bonne nuit à toi aussi, Albérich. Et surtout, surtout, quand tu réfléchiras à ton programme de la journée, demain, n'oublie pas que tu peux compter sur moi pour t'aider : quelle que soit la tâche que tu me confieras, c'est avec joie que je m'en acquitterai. A présent que je suis ici, je compte bien ne pas rester les bras croisés mais, au contraire, faire tout mon possible pour me rendre utile.
Lorsqu'il referma la porte de sa chambre, l'écho des pas discrets du Sunite s'était déjà dissipé. Et des pièces voisines ne provenait pas le moindre bruit.

Un peu joyeux, Albérich se déshabilla en silence avant de se glisser entre ses couvertures. Il eut l'impression d'entendre quelqu'un bouger dans la pièce voisine, mais c'était sans doute simplement Hubert qui se retournait dans son sommeil. Il lorgna un moment le plafond ; la chambre ondulait légèrement autour de lui. Thibault avait raison : il tenait mal l'alcool. Mais c'était surtout parce qu'il avait de réelles raisons d'être heureux. La journée avait été riche en bonnes surprises et l'avenir s'annonçait complexe et stimulant.
Sur un soupir d'aise, il s'emmitoufla plus soigneusement — la température était un peu moins réjouissante — et sombra rapidement dans le sommeil.

Il en fut tiré alors qu'une légère lueur grise avait envahi la chambre. Celle de l'aube, dont il avait infailliblement senti l'appel. Il se sentait reposé, signe qu'il ne s'était pas couché aussi tard qu'il aurait pu le craindre et que ses agapes n'auraient pas de conséquences néfastes. Il perçut des sons ldiscrets provenant des pièces voisines : peut-être Hubert, une fois n'est pas coutume, s'éveillait-il de lui-même, à moins qu'il ne s'agisse de ses écuyers, toujours matinaux. Ailleurs, c'était un profond silence : la majorité de la Communauté dormait encore.

Albérich se leva, empli d'une douce énergie qui, il le savait, serait renforcée par Lathandre dans quelques minutes seulement. Il se sentait excité comme un gosse, à l'idée de cette communion, bien qu'il ait appris au fil des années à tout garder à l'intérieur et à offrir la façade d'un homme serein. C'était plus convenable.
Il se glissa dans la chambre d'Hubert où le paladin paraissait sur le point de s'éveiller. Il se pencha sur lui et le secoua doucement. Hubert se redressa vivement et lui sourit, vaseux.
" Misère." déclara-t-il simplement en s'extirpant de ses couvertures.
Albérich regagna sa propre alcôve pour se changer. Prières puis petit déjeuner puis gosses paludiers. Le programme était tout tracé. Il rejoignit Hubert avant de sortir dans le couloir.
" Est-ce que tu crois que tu vas pouvoir envoyer Thibault en exploration, ce matin ?
— Tu peux m'en reparler après l'aurore ? Mon esprit est encore dans la nuit, là.
— Bien sûr."
Et ils se dirigèrent vers les remparts. Albérich songea cependant que tôt ou tard, il devrait investir la chapelle. Mais ce serait pour un autre jour.

Le début de matinée fut similaire à tous ceux qui s’étaient écoulés depuis qu’ils avaient pris possession de la forteresse. Les deux amis prièrent sur le rempart – sous un ciel couvert, comme la veille -, saluèrent Gabriel quand ils en eurent terminé et prirent de concert la direction de la cantine. En fait, c’est là qu’ils notèrent le seul changement marquant : tous les nouveaux venus arrivés le jour précédent étaient présents, qu’il s’agisse du duo de Paludiers ou, plus étonnamment, du trio de Sunites. Ces derniers, pas encore très réveillés, leur adressèrent malgré tout sourires chaleureux et salutations amicales.

Hubert et Albérich se dirigèrent vers les Sunites et les saluèrent. Tandis que le Luménien s'asseyait, le paladin resta debout : il n'avait manifestement pas l'intention de s'installer avec eux, peut-être dans un souci de ne pas créer un clan de religieux au sein de la communauté.
" Je vais un peu voir comment organiser les groupes d'exploration de ce matin, dit-il. Il y a fort à parier qu'une partie d'entre vous sera sur le pont... et l'autre partie cet après-midi.
— J'ai beaucoup de choses à faire, encore... dit Albérich avec une grimace.
— Débrouille-toi pour l'organiser de manière à pouvoir sortir. Si pas aujourd'hui, demain. Mais vous trois, vous êtes sur la liste."

Les paladins acquiescèrent avec un enthousiasme manifeste, et Thibault ne fut pas en reste : après avoir vigoureusement opiné du chef, tout sourire, il se tourna vers Albérich.
-Je ne sais pas en quoi consistent exactement ces choses que tu as à faire, mais peut-être y a-t-il moyen que je te décharge d'une partie d'entre elles ? Qui sait, si nous nous activons bien ce matin, cela pourrait dégager ton après-midi et donc te permettre de venir t'amuser avec nous...

Le Luménien sourit.
" Ce matin, je m'occupe des gamins paludiers et cet après-midi, de l'intendance, de la constitution, des projets d'apprentissage... Bref. T'expliquer les tenants et les aboutissants de chacun de ces postes me prendrait, déjà, la journée. Mais si je boucle mon histoire d'apprentis cet après-midi, pour le présenter à l'assemblée ce soir, j'aurai plus de temps demain. Cela dit, du coup, Gabriel devrait pouvoir prendre la matinée, lui."
Il haussa les épaules, désolé.
" Laissez-moi encore une journée, d'accord ? Demain, je dégagerai mon après-midi. Mais ça demande un peu d'organisation.
— C'est la dernière limite." dit le paladin.

Thibault se frotta le menton, pensif.
-Il y a une autre solution : je te remplace ce matin auprès des vos petits protégés. Comme c'est surtout Gabriel qui s'en occupe, il pourra m'expliquer ce qu'il faut faire et, de ton côté, sitôt le petit déjeuner terminé, tu auras toute latitude pour te consacrer sur les apprentis, l'intendance, la constitution... Ainsi ton après-midi sera-t-il dégagé, ce qui ne te laissera aucune excuse pour échapper à l'exploration.

" C'est vendu, dit Hubert sans laisser le temps à Albérich de répondre. Thibault et toi sortirez cet après-midi, et Renaud et Roland ce matin. Gabriel attendra demain pour faire sa promenade. Il a déjà été explorateur plus d'une fois, c'est chacun son tour."
Albérich grimaça, pris au dépourvu.
" Mais je... Il mérite sûrement de se chang...
— Bon appétit, je vous retrouve plus tard."
Et le paladin détala. Le Luménien se tourna vers Thibault.
" Je n'ai mémorisé absolument aucun sort utile. Vous auriez pu me prévenir hier !"

Le Sunite le gratifia d'un sourire désarmant.
-Si nous t'avions prévenu hier, non seulement tu n'aurais pas davantage prévu de sorts utiles mais, de surcroit, tu aurais eu tout loisir d'imaginer mille prétextes pour ne pas avoir à mettre les pieds hors de la forteresse. Et oui, Alby, on ne me la fait pas, à moi : je te connais bien !
Il but une gorgée de thé.
-Mais franchement, tu n'as pas à te plaindre, car je t'évite de t'occuper des gosses, abominable activité s'il en est, et te laisse l'opportunité de te jongler autant que tu le souhaites avec des piles et des piles de parchemins, tâche qui, entre toutes, a ta préférence. Alors tu devrais me remercier plutôt que de récriminer !

Le Luménien leva les yeux au ciel.
" Vous êtes deux contre moi, comment puis-je me défendre ? Vous vous inquiétez tous les deux pour ma sécurité, au point que je me demande si vous êtes... je ne sais pas... ma mère, ou quelque chose comme ça, et puis subitement, vous me balancez dans la rue pour affronter les ombres de Clairétoile ! Vous êtes bizarres, tu sais ça ? Bon, d'accord, j'ai retrouvé Lathandre et ça me confère un petit avantage mais bon... Soit. Vous allez finir par croire que je suis un couard. Très bien. J'irai scruter la rocaille cet après-midi, vous avez gagné."

Il secoua la tête.
-Albérich, je ne pense pas que tu sois un couard, et je suis convaincu que Thibault ne le pense pas non plus. Simplement, nous te connaissons, et nous savons donc que tu es... un intellectuel, à savoir que si tu pouvais rester de l'aube au crépuscule le nez plongé dans de vieux papiers, sans exercice physique plus intense que tendre la main pour saisir un antique volume, tu le ferais bien volontiers. Or, se dépenser, c'est important. Fondamental, même ! Tu connais l'adage : "Un esprit sain dans un corps sain". Je crois même que cela fait partie du dogme lathandrite... Quoi qu'il en soit, nous sommes tes amis, nous nous soucions par conséquent de ta santé, de ton équilibre, et voilà pourquoi nous faisons en sorte que tu bouges un peu, fût-ce malgré toi.

" Vous avez une image fausse de moi. Je ne suis pas un intellectuel. Je suis un homme de terrain. Mais je suis du terrain civil, pas du terrain militaire. J'ai toujours beaucoup circulé, beaucoup marché, j'ai toujours été dans les rues, les tavernes, les masures immondes, dans les égouts et sous les ponts... C'est en devenant aubemestre que j'ai commencé à hanter un bureau, à empiler les documents, à gratter le parchemin jusqu'à des heures impossibles. C'était il y a un peu plus d'un an et demi. Avant cela, je n'étais jamais deux heures au même endroit, crois-moi. Simplement, aujourd'hui, j'ai l'impression d'avoir... une tâche à accomplir, un devoir moral envers la communauté, envers Marthe qui est au loin... Si je ne me charge pas de ces questions, qui va le faire ? Je ne dis pas que je ne suis pas heureux de siéger au Conseil, ni que je voudrais abandonner tout travail de fond, mais... Je suis Lathandrite. J'ai toujours été dans l'action, dans le mouvement... dans la rencontre et dans la gestion physique, quotidienne, des difficultés. Même au conseil luménien, je parvenais à conserver ce côté mobile, social finalement... Aujourd'hui... Nous sommes un peu en manque d'intellectuels, justement. Alors je suis sans doute le moins mal placé pour y suppléer. Mais entre la bibliothèque et le champ de bataille, il y a mille autres lieux qui valent la peine d'être arpentés."

-Oui, à commencer par les rues et les édifices de cette merveilleuse cité, afin que les membres de la Communauté, conformément à leur dessein, puissent quitter l'espace restreint de cette forteresse pour s'y établir et y mener une vie de plus en plus normale. Ce qui empêche ce mouvement, c'est une cohorte de morts-vivants hantant les parages, et pour les éliminer, on n'a jamais trouvé mieux que des paladins ou des clercs, qui sont en nombre au moins aussi restreint que les intellectuels...
Il croisa les bras.
-Hum, ça me fait penser... Je me souviens mal de nos classes œcuméniques, à Eredhun, mais je crois qu'on m'y a enseigné que Lathandre déteste les morts-vivants et qu'il enjoint à ses fidèles de les éradiquer sans coup férir...

Albérich opina du chef, embarrassé.
" Oui. Tu as bonne mémoire. Et le pire, c'est qu'en tant que prêtre spécialiste de la magie lathandrite, je suis encore bien plus efficace dans le registre qu'un clerc d'une autre religion. Donc tu peux me lancer des tomates, je les mérite amplement. Mais je dois me réhabituer, aussi... ça fait des mois que tout ça m'était interdit... Je n'y pense plus spontanément. Je suis empli de lumière et je... flotte... peut-être un peu... mais les applications pratiques de mon pouvoir... d'autant qu'à Luménis, je ne me suis jamais chargé de ce genre de choses... La dernière fois que j'ai affronté un mort-vivant, c'était... quelques jours avant mon enlèvement, en fait. Dans le cimetière de Dargyll... où les Sharites sont venus observer ma maîtrise pour mieux me faire tomber."
Son regard se perdit un moment dans le vide avant qu'il ne lâche un soupir.
" Je ferai ma part. Laisse-moi juste mettre les choses en ordre ce matin."

Son ami eut une moue embarrassée.
-Pardonne-moi de t'avoir mené vers de sombres souvenirs. Ce n'était pas mon intention mais j'ai toujours été trop bavard... Je crains malheureusement de n'avoir pas changé, sous cet aspect.
Il soupira puis, le temps d'un battement de cœur, retrouva sa joyeuse expression.
-Allez, vois le bon côté de ce changement de programme. Grâce à lui, tu vas pouvoir être utile non sur un, mais bien sur deux fronts : les travaux intellectuels, pour lesquels tu excelles, et la chasse aux morts-vivants, où tes talents sont irremplaçables. Et ce soir, nous viderons des coupes à tes prouesses, parce que s'il y a une matière en laquelle il te faut progresser, c'est bien la beuverie. Et la concernant, je dois pouvoir t'aider...

Albérich sourit.
" Ah, tu as raison. Je n'ai pas à me plaindre. J'aurais juste préféré... être un peu plus préparé."
Une seconde, il pensa faire à nouveau référence à ce qui lui était arrivé un an plus tôt, au prix de son manque d'anticipation, mais Thibault fuyait le sujet comme une anguille, depuis toujours. Ressasser le passé n'était peut-être pas lathandrite, mais sa laideur n'invitait pas non plus les Sunites à s'y intéresser. Pourtant, le Luménien avait l'impression qu'il ne pouvait pas encore complètement tourner la page. Mais ce n'était pas le moment de s'en inquiéter. La journée ne faisait que commencer et elle était placée sous le signe de la lumière.
" Mais tu délires si tu penses que je vais faire des étincelles. Mon souhait est surtout de ne rien croiser et de pouvoir flâner tranquillement, en contemplant toute cette beauté."

Il croisa les bras.
-Tu peux rêver, mon vieux. Si les morts-vivants ne viennent pas à toi, nous te mènerons à eux, car nous ne serons rassurés quant à ta capacité à assurer ta propre sécurité qu'après t'avoir vu éliminer ton content de zombies, de squelettes, de goules et autres liches. De toute façon, plus tôt nous aurons éradiqué ces créatures, mieux ce sera : leur présence est une insulte à la beauté de cette cité.

" Excuse-moi mais je pourrais te retourner l'argument. Quelle preuve ai-je, moi, que tu vaux quoi que ce soit à la chasse aux morts-vivants ? Ce n'est pas ta spécialité, ni celle de ton dieu, tu as vécu toute ta vie dans la même ville, où les poissons sont nombreux mais les zombies rares... C'est moi qui devrais m'inquiéter de ta survie dans ces rues et moi qui devrais exiger d'avoir la preuve de ta capacité à te défendre ! Pour le reste, tu as raison. Il faudra bien les éliminer de toute façon."

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une cité perdue