La Couronne de Cuivre

Thibault prit un air outré.
-Ainsi, tu doutes de mes capacités... Et de l'efficacité de ma déesse concernant cette éradication... Homme de peu de foi ! Sunie protège le beau, les morts-vivants sont moches, donc Sunie est l'ennemie des morts-vivants et ses serviteurs sont tout aussi aptes que les Lathandrites à les faire disparaître de la surface de ce monde. dans le but glorieux que sa splendeur ne soit plus entachée... Enfin, inutile d'essayer de te convaincre, n'est-ce pas ? Tu me verras à l’œuvre... Oh, et ne t'inquiète pas : dans tous les cas, il y aura pléthore de soldats, d'éclaireurs et de paladins dans les parages pour me sauver la mise en cas de pépin. Et il y aura toi !

" Voilà ! C'est mon tour de sauver les gens ! J'ai déjà sauvé Hubert, et tu es le prochain sur la liste. Et tous les morts-vivants ne sont pas laids. On raconte qu'il existe même des dames vampires absolument superbes. Est-ce que celles-là auront droit à ta mansuétude ?"
Il sourit.
" Mais en réalité, je ne pourrai rien pour toi. On nous enverra l'un à droite, l'autre à gauche, et nous ne nous verrons qu'au retour, quand nous pourrons comparer nos tableaux de chasse. Attends de voir ce dont l'énergie de Lathandre est capable !"

Le clerc rit.
-N'inverse pas les rôles, veux-tu ? Moi, je n'ai jamais douté des capacités des Lathandrites. Jamais. C'est toi qui pense que les Sunites sont des êtres vains et inutiles tout juste bons à s'admirer dans des miroirs, à se pouponner, à banqueter et à se livrer aux activités galantes. Mais tu vas découvrir que nos compétences vont bien au-delà de ces seuls domaines...

Albérich sourit.
" Mais je suis tout prêt à réviser mes préjugés !"
Il ne pouvait pas opposer grand chose au Sunite. Il n'avait jamais été proche de cette religion qui — quoi qu'en dise Thibault — faisait de l'esthétique des choses et des gens une valeur fondamentale. C'était quelque chose de très présent chez les Lathandrites également, mais lui-même avait toujours fait partie de la frange "grise" comme disaient les clercs plus flamboyants. Il était vrai que l'aube, et le soleil, avaient quelque chose de visuellement sublime et qu'il n'était pas étonnant que cet aspect trouve son expression dans la foi de certains.
" Je suis sûr que tu es un grand chasseur de morts-vivants. Et je n'ai pas l'esprit compétitif."

-Mon œil ! C'est toi qui, le premier, à parlé de comparer nos tableaux de chasse !
Il reposa sa tasse vide.
-Pour l'heure, ces créatures-là attendront, cependant, car il me faut m'occuper d'un autre type de monstres. Mais les concernant, et contrairement aux morts-vivants, je pense qu'il y a du bon en eux.
Il se leva, serra l'épaule de son ami.
-Je te dis à tout à l'heure !
Et il s'en fut rejoindre Gabriel.

Albérich le suivit du regard tandis qu'il rejoignait son jeune collègue. Ils formeraient un bon duo : ils avaient des tempéraments assortis. Le Luménien ne put s'empêcher de se demander — à nouveau — comment ces personnalités fortes, assertives, bruyantes, parvenaient à cohabiter sans heurts. Généralement, chacune aimait être le roi de la fête et n'appréciait qu'à moitié l'ombre de ses semblables... mais sans doute les Sunites étaient-ils forcés de développer des stratégies pour faire face à ce genre de situations.
Il se leva à son tour et gagna son bureau. L'urgence était d'avoir quelque chose de bien troussé sur la question des apprentis à présenter à l'assemblée. S'il y avait des problèmes d'organisation, on viendrait le trouver.

***

De son côté, Hubert s'était installé près d'Etienne.
" J'ai réfléchi un peu à ces groupes d'exploration, dit le paladin. Je pense que nous devrions nommer un responsable. Toi, moi, Gaspard, n'importe qui. Quelqu'un qui gère les noms, les groupes, les zones... Se reposer la question chaque matin n'est pas fonctionnel."

-Tu n'as qu'à proposer ça à Albérich : il s'en est très bien sorti, et très vite, lorsqu'il a s'agit de mettre sur pied les différents groupes de sentinelles, au fort.
Le jeune chevalier sourit puis redevint sérieux.
-Je plaisante, évidemment : il a déjà assez de travail comme cela, inutile de lui en rajouter. Écoute, je pense que le mieux est que tu choisisses quelqu'un. D'abord parce que tu es le chef de nos forces armées, ensuite parce que c'est une tâche assez pénible mais si c'est toi qui le demande, la personne désignée, quelle qu'elle soit, acceptera volontiers.

Hubert haussa les sourcils.
" Je n'avais pas imaginé que ce soit si pénible... Je vais m'en charger moi-même, dans ce cas. De toute façon, je ne sortirai que la moitié de la journée, j'ai la seconde pour m'en occuper. Les tâches militaires sont extrêmement réduites en ce moment. Et puis j'ai une bonne idée de qui est disponible, qui est capable de quoi..."
Il se carra dans son siège.
" Serais-tu prêt à sortir ce matin ? Avec les deux paladins sunites et Guillermo, sans doute ? Une quinzaine de soldats et de mercenaires, une dizaine de civils ? Je sortirai avec les clercs et Gaspard cet après-midi."

-Bien sûr, aucun souci. Je m'occuperai des contrats cet après-midi, ça n'est pas très pressé.
Il eut une légère grimace.
-Mais pour ce qui est du poste de responsable des sorties... J'espère que tu ne t'es pas mépris. Je n'ai pas voulu sous-entendre que je ne souhaitais pas m'en occuper, par exemple. Je le ferai, si ça t'arrange. Simplement, rares sont ceux à aimer établir des listes... Et je suis donc d'autant plus embêté que cette tâche t'incombe...

" Je ne pense pas qu'il s'agira réellement de listes... Je vais juste rassembler les noms, former les groupes, et ce sera terminé, à moins qu'il y ait de gros soucis dans l'un ou l'autre. Par contre, il faudra que je trouve quelqu'un pour dessiner la carte de la cité au fur et à mesure de sa découverte... Mais je ne vais pas m'en occuper moi-même, j'en serais bien incapable. Nous avions eu des volontaires, je les mettrai au travail. Je vais voir s'il reste une salle avec une table de bonne taille disponible. Nous pourrions y assembler nos plans... pour le reste, je crois que l'idée est de conserver un fonctionnement stable. Toi le matin, moi l'après-midi, avec peut-être un roulement entre les clercs pour que Gabriel et Barthélémy puissent sortir, et Albérich se consacrer à ses mille tâches. Thibault a l'air souple."
Il fronça les sourcils.
" Cependant, maintenant que j'y pense, Albérich et moi sommes plus en forme le matin... Il faudra que j'y réfléchisse. Mais gardons l'organisation prévue pour aujourd'hui, et je te ferai part des modifications après y avoir réfléchi, et en fonction des résultats de la journée, pour demain."

-D'accord. Mais dès à présent, saches que tu pourras sans aucun souci me mettre de sortie l'après-midi. Honnêtement, je n'ai aucune préférence sur l'horaire.
Il vida sa tasse de thé - pas la première, manifestement - et jeta un regard autour de lui.
-Sans doute vaudrait-il mieux que je lance les préparatifs dès maintenant : plus nous partirons tôt, plus nous pourrons couvrir de terrain... Les quartiers qui longent la rue menant aux portes nord ne sont pas forcément les plus palpitants de la cité, mais vraiment, il faut que nous les sécurisions au plus vite.

" Oui. Je vous souhaite une bonne exploration. Renaud et Roland sont prévenus, je vais leur dire de se mettre sous tes ordres. Je pense qu'ils ont une bonne expérience de ce genre de situations, n'hésite pas à exploiter leurs talents. Je vais aussi prévenir Guillermo."
Il se dépêcha de terminer son petit déjeuner avant de se mettre en mouvement. Il ne voulait pas retarder Etienne mais il devait improviser ce premier groupe au mieux, histoire qu'ils ne rencontrent pas de problèmes une fois sur le terrain. Sans doute aurait-il fallu y penser la veille, mais on l'avait honteusement débauché.

Ses démarches lui prirent peu de temps et, une bonne demi-heure plus tard, la première expédition du jour s'engageait dans les souterrains. Hubert put dès lors se pencher sur l'organisation des missions à venir, tandis que, de son côté, Albérich planchait sur le dossier des novices. L'un comme l'autre ne furent pas dérangés, s'avérèrent efficaces et, quand vint l'heure de midi - et donc du repas -, ils avaient tous deux bouclé la tâche qu'ils s'étaient attribuée. Étienne et ses compagnons n'étaient pas encore rentrés mais, selon toute vraisemblance, ils ne tarderaient plus à se montrer.

Avant le repas, Hubert prit le temps d'informer les membres du groupe de l'après-midi de leur départ prochain. Etienne avait raison : il y avait trop de volontaires pour ne faire que deux équipes, aussi en avait-il prévu quatre qui rouleraient sur deux jours. Seuls Etienne, les deux paladins et lui-même seraient-ils de sortie quotidiennement. Guillermo pourrait alterner avec son second s'il le désirait. Gaspard laisserait la place à Edgar et Matthias alternativement. Bref, il avait essayé de faire au mieux et était plus ou moins satisfait du résultat. A présent il lui tardait de sortir à son tour... en gardant un oeil sur la clique des clercs de l'école éredhine.

Malheureusement, avant que cela n'advienne, il faudrait en passer par un séjour à la cantine, où il parvint à peu près en même temps qu'Albérich. Évidemment, elle était bondée et il y vit maints visages familiers : les enseignants, profitant de cette pause entre deux classes, Giovanni, fraîchement revenu de sa recherche - pour l'heure vaine - du trésor, Barthélemy, momentanément sorti du dispensaire, la petite communauté des mages, discutant d'il ne savait trop quoi, ainsi bien sûr que les participants à l'expédition de l'après-midi qui, d'entre tous, mangeaient avec le plus de hâte.

Hubert rejoignit Albérich sur un coin de table. Celui-ci semblait chercher Thibault du regard, mais il lui décocha néanmoins un sourire tranquille. Le paladin essaya de ne pas se sentir vexé et s'assit.
" Tu as eu le temps de faire ce que tu voulais ?
— Oui. Et j'ai même rassemblé mes affaires : ma masse, ma cotte de mailles et même ce fichu bouclier. Tu vois, je suis un bon élève."
Le paladin sourit.
" Ça me fait penser que je n'ai plus d'armure... Il va vraiment falloir que j'aille en parler avec Ulrich. Avec un peu de chance, on trouvera du fer dans ces mines..."

Thibault et Gabriel parurent peu après, les saluèrent mais, comme il n'y avait pas de place près d'eux, ils durent aller s'assoir plus loin. Ce fut ensuite au tour d’Étienne et des autres explorateurs, le jeune chevalier venant informer Hubert qu'ils avaient ratissé une bonne dizaine de bâtiments sans rien trouver de plus que le jour précédent. Enfin, le repas toucha à son terme, et les membres de la nouvelle mission d'exploration se rassemblèrent au point de rendez-vous donné par le paladin. Le clerc de Sunie parut parmi les derniers et attira aussitôt tous les regards : il faut dire qu'entre son port altier, sa cotte de mailles rutilante et sa cape rouge voletant élégamment sur ses talons, il avait littéralement des allures de prince charmant.

Le paladin avait supervisé l'arrivée des différents membres de l'expédition et il eut du mal à demeurer de glace quand le Sunite fit son entrée, aussi tape à l'oeil qu'on aurait pu l'attendre de la part d'un tel personnage. Il espérait que Thibault survivrait à une déchirure dans sa cape et à de la boue sur son armure. Ce n'était pas garanti. Albérich lui accorda un regard amusé et le rejoignit. Ils faisaient la paire, à n'en pas douter, le Lathandrite discret et le Sunite flamboyant.
" Bon. Puisque tout le monde est là... Nous allons reprendre l'exploration exactement là où l'équipe d'Etienne l'a laissée ce matin. Tant que nous sommes dans le sous-sol, vous pouvez bavarder, mais une fois en surface, les consignes de sécurité et la vigilance sont à nouveau de mise. Nous nous diviserons en trois groupes d'exploration, en travaillant dans le voisinage direct les uns des autres, chacun dans une maison. Gaspard restera en faction à l'extérieur, nous répartirons les hommes et les civils entre Albérich, Thibault et moi-même. Ensuite, nous aviserons."

Sitôt que la troupe eut montré qu'elle avait compris les consignes, elle se mit en route, accompagnée par un groupe d'éclaireurs conduit par Ézéchiel qui, comme celui mené le matin par son confrère rôdeur, se mettrait en quête des monstres errants.
-Nos mots d'ordre seront méticulosité, efficacité et rapidité, souffla Thibault à l'oreille de son ami. Ne va pas penser que je suis déjà blasé, d'autant que je suis certain que les merveilles que je vais sous peu admirer me charmeront, mais... Le lac, ses berges, ses thermes, ses palais... Ça me tente quand même beaucoup.

Albérich rit doucement.
" Je croyais que tu cherchais des morts-vivants ! Mais si ça se trouve, ils ont les mêmes goûts que toi : l'eau chaude, les pelouses ensoleillées et les palais formidables..."
Il secoua la tête.
" Je raille mais je te comprends. Je n'ai jamais été très féru d'architecture, mais il est certain que ces Anciens avaient du talent... et un sens de l'esthétique. Je ne suis pas complètement certain que si je devais faire bâtir une demeure, aujourd'hui, j'irais dans ce... style spectaculaire... mais je comprends qu'on l'admire. Ça a du souffle, indéniablement."

-Je ne te le fais pas dire... Mais te connaissant, cela ne m'étonne en rien que ta préférence aille à des styles plus discrets, et je suis déjà ravi que l'architecture des lieux ne te laisse pas indifférent... De surcroit, je suis persuadé que tu finiras par trouver un édifice à ton goût pour que Gabriel et toi le transformiez en temple de Lathandre. Ces tunnels et ces souterrains le prouvent : les Anciens savaient aussi allier élégance et sobriété. Et de quelle manière ! Les bâtisseurs modernes devraient en prendre de la graine sur ce point comme sur tous les autres... Les artistes modernes aussi.

Albérich sourit.
" Je suis un homme des tunnels qui vénère le dieu de la lumière... Cela ne va pas marcher, Thibault."
Il jeta un regard autour d'eux.
" Quant au Temple de Lathandre... Ne brûlons pas les étapes. Avec Ithilion dans les parages, créer une telle institution... surtout moi, avec mon passif... Je n'ai pas l'intention d'être à la source de ce genre d'initiatives. Pour vivre heureux, vivons cachés, dit l'adage. Je préfère ne pas trop attirer l'attention sur ma présence. C'est mieux pour tout le monde."

-Je te comprends, bien sûr, mais...
Il secoua la tête.
-Albérich, ce n'est pas un secret, que tu as rejoint la Communauté. Tôt ou tard, les Ithiliens le sauront, comme ils sauront que tu fais partie du Conseil... Ou que tu en as fait partie : ne me dis pas que tu vas démissionner, ça ne changerait absolument rien ! Bref, ils apprendront que tu es là, que tu t'impliques, que tu es aux responsabilités... Alors honnêtement, qu'est-ce que cela changerait, que tu ouvres un temple de Lathandre? En plus, il y en a chez tous leurs voisins, ce dont ils doivent bien s'accommoder ! Et puis, tu ne peux pas laisser tes coreligionnaires sans lieu de culte... A mon avis, tu te poses trop de question, d'autant que la Communauté a déjà pris des précautions pour ménager Ithilion.

" D'abord, jusqu'à nouvel ordre, si j'ai des coreligionnaires... Ils sont plutôt invisibles... Gabriel, Hubert et moi-même nous suffisons à nous-mêmes. Tu diras que la communauté a peut-être besoin de s'établir d'abord, que les gens reviendront vers les dieux... Je n'en sais rien. Dans l'adversité, généralement, c'est un refuge fréquent... Or je n'ai pas vu le moindre mouvement en ce sens. Ensuite, tu es naïf, si tu crois que les Ithiliens ne vont pas suivre nos initiatives de très près... et si tu crois qu'ils ne profiteront pas de la moindre bonne excuse pour venir nous chercher des noises. Je dois me tenir à carreau. Et toi aussi, d'ailleurs. Et sans doute Hubert. Il ne faut pas les sous-estimer : nous sommes très loin de Luménis."

-Le devoir d'un Sunite est de diffuser sa foi, de propager l'amour et la beauté. Si la Communauté m'y autorise, j'ouvrirai donc un temple, et j'espère bien qu'il y en aura aussi un de Lathandre, un de Chauntéa... Les Ithiliens trouveront à redire quoi que nous fassions, mais tant que nous n'aurons pas de religion d’'État, tant que plusieurs cultes seront actifs, ils n'auront pas de motif suffisant pour s'en prendre à nous. Ils n'attaquent pas toutes les bourgades voisines, pas vrai ? Et pourtant, elles ne sont pas entièrement vouées à Oghma ! Et de toute façon, même si nous devons être prudents, nous ne pouvons pas vivre constamment dans la crainte. Ce n'est pas une manière d'exister, ce serait plutôt leur accorder une première victoire, nous préparer malgré nous à la soumission.

Albérich manqua lui dire que les bourgades voisines n'avaient ni les ambitions, ni les personnalités de la communauté présente, et qu'il était tout à fait prêt à faire profil bas si cela pouvait lui éviter les ennuis. Mais Thibault n'aurait pas compris.
" Tu as sans doute raison. Mais c'est Gabriel, le Lathandrite de la communauté. Moi je suis un passager clandestin. Et de toute façon, je ne pourrais pas m'engager dans ce genre de projets sans m'en ouvrir à ma hiérarchie et aviser avec eux de l'endroit où je serai le plus utile au culte et à Lathandre. Je ne suis pas certain que ce soit ici. Je n'en sais rien. Nous verrons."

Le clerc soupira.
-C'est vrai que la hiérarchie est quelque chose de très développé dans votre Église, qu'il faut toujours en référer à quelqu'un pour faire quoi que ce soit... Ce n'est pas un peu usant, à force ? En tout cas, sois bien certain que si tu consultes tes supérieurs, et que s'ils prennent une décision aberrante, du genre t'envoyer dans un hameau paumé où tu ne feras d'ombre à personne, je te séquestrerai pour que tu puisses continuer à aider la Communauté. Un groupe d'hommes et de femmes en quête d'une nouvelle vie, d'une nouvelle chance... Moi, spontanément, ça me paraît taillé sur mesure pour des Lathandrites.

" L'Eglise lathandrite est généralement très peu centralisée... L'Hélonienne est particulière à cause de notre histoire, des cabales, des hérésies... Me référer à Alaric ou à Molwen, c'est davantage une question... de courtoisie, je pense. Déjà, je ne les ai toujours pas avertis de ma renaissance, ce qui est malvenu de ma part. Ensuite... Avec mon expérience, et mon parcours... Je me dois de me mettre au service de Lathandre, et de son culte. C'est mon métier. Si j'étais un jeune clerc idéaliste, comme Gabriel, je pourrais me permettre de musarder au gré de mes intuitions... Mais j'ai une responsabilité envers les miens. Et de surcroît... J'ai parfaitement confiance en leur sagesse et en leur bienveillance me concernant."

Thibault soupira derechef.
-Juste une petite question, Albérich... Si rejoindre la Communauté, travailler en son sein, y prendre des responsabilités jusqu'à faire partie de son Conseil... Si tout cela n'était pas servir Lathandre...
Il lui jeta un regard aigu.
-Crois-tu que tu aurais retrouvé le lien avec lui ?
Il haussa les épaules.
-Moi, je pose juste la question. Parce que spontanément, je n'ai pas l'impression que les dieux nous donnent des coups de pouce, quand on va à l'encontre de leurs desseins.

Albérich eut un sourire contraint.
" Mon point de vue, Thibault..."
Il soupira.
" Je ne sais pas quoi penser. Je n'ai pas envie d'y réfléchir trop. Je préfère... imaginer que les dieux n'interviennent pas trop dans nos destinées terrestres... qu'ils ont mieux à faire. A notre échelle... nous pouvons nous réjouir de bénéficier de leur aide pour soutenir notre prochain, chaque jour. Au delà de ça... Je préférerais ne pas poursuivre cette conversation. Je ne suis pas assez... serein sur cette question."

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une cité perdue