La Couronne de Cuivre

Elle peinait à distinguer quoi que ce soit sur les versants rocailleux de la montagne et, vu la présence de défilés et de crevasses dans les parois, il n'était pas impossible qu'il ait déjà quitté la petite vallée où reposait le lac. Mais l'esprit de Prince, tout hésitant qu'il soit, céda à ses injonctions. Elle ne vit rien de spécial : même le cheval miel était invisible dans le paysage bigarré. Elle perçut un instant de panique, puis de soulagement. Au même moment, les ombres dans le ciel se mirent en mouvement, à grands coups d'ailes, filant vers la droite, quelque part, hors de vue.

Il se passait quelque chose sur la droite... Les trolls ? Astrée ne pouvait que se perdre en hypothèses et elle n'en avait pas le temps. Elle rangea cette information dans un recoin de son esprit, et continua à avancer dans la direction où étaient censés se trouver le cerf et Prince.
Elle ne voyait rien. Elle pouvait sûrement se guider sur son lien avec Prince pour les trouver, mais ça n'était pas très précis... Elle aurait voulu savoir à quelle distance ils se trouvaient. Elle pouvait essayer d'obtenir l'aide d'un oiseau pour les voir... mais elle ne voyait pas de rapace à portée. Elle craignait qu'ils soient trop loin d'elle, et que les rejoindre nécessite une monture. Elle songea qu'au pire, elle pouvait se transformer... En quoi ? Elle ne l'avait jamais fait... Mais elle garda l'idée en tête, en espérant que ce ne soit pas nécessaire
Elle contacta à nouveau Prince pour savoir si le cerf s'était arrêté, s'il pouvait revenir vers elle avec lui, si Eyri avait repris le contrôle de l'animal. Bref, ce qui se passait là-bas...

Prince rencontrait manifestement des difficultés, mais la seule chose qu'Astrée perçut clairement, c'est sa détestation profonde de l'elfe. Il n'était pas difficile d'imaginer que la transformation subite d'un écureuil en cheval n'avait pas dû passer inaperçue et il n'était pas certain qu'elle ait beaucoup rassuré ni le cerf, ni son cavalier.
Quelque chose dans le ciel poussa un grand cri.
" Astrée !" hurla une voix derrière elle.
C'était Jeroen.
" Revenez ! C'est trop dangereux !"

Astrée espérait que l'elfe et son cerf auraient reconnu sa monture, qu'ils avaient tout de même côtoyée pendant plusieurs jours. Bien sûr, la transformation avait dû les inquiéter, mais ils devaient l'identifier comme "ami" une fois la surprise passée. Elle l'espérait du moins...
Le cri dans le ciel la fit sursauter, et elle s'arrêta pour en chercher l'origine avec inquiétude. Les trolls n'étaient pas les seuls dangers du secteur, après tout.
" Prince essaie de ramener Eyri, tenta-t-elle d'expliquer. J'attends juste de savoir s'il y arrive et je viens... Sinon j'irai les aider."
Dans le pire des cas, s'ils n'avaient pas le temps de revenir, il devait y avoir des cachettes... Si le cerf était à trop bout de force par exemple. Mais c'était en dernier recours, évidemment.
Elle jeta un nouveau coup d'oeil au ciel, puis aux alentours. Elle devait estimer le temps qu'il lui faudrait pour rejoindre les ruines, et l'endroit où se trouvaient les dangers, quels qu'ils soient.

" Ne faites pas n'importe quoi ! dit le mercenaire. Ils se débrouilleront ! C'est inutile de perdre une personne supplémentaire. L'elfe connaissait les risques et il n'en a fait qu'à sa tête. Il ne ferait pas la même chose pour vous."
Il ne fit pas un pas en sa direction, cependant. Dimitri avait été clair : son équipe ne se mettrait pas en danger pour leurs beaux yeux. Pour le reste, Astrée ne pouvait pas savoir combien de temps il lui faudrait pour rejoindre Prince et Eyri, ni combien de temps il lui faudrait pour revenir. Elle devait se mettre à leur recherche ou revenir en arrière. Sans compter que c'était désormais pleinement le crépuscule. Il ferait nuit avant une heure.

Astrée savait pertinemment que l'elfe ne lui serait pas venu en aide si les rôles étaient inversés. Son séjour en Lorien le lui avait fait comprendre. Elle se souvenait des paroles de la Dorée, lui disant exactement ces mots-là ou presque. Mais elle se sentait responsable de la survie de leur jeune compagnon de voyage, perdu dans un territoire inconnu dans lequel il ne saurait pas se débrouiller seul. Elle ne pouvait pas l'abandonner. Bien sûr, elle n'attendait aucune aide des mercenaires, qui n'étaient pas payés pour ça.
" Ne vous faites pas de souci pour moi. J'essaie juste de savoir ce qui se passe là-bas. Si Prince me fait savoir que c'est en bonne voie, je vous rejoins tout de suite. Mais je ne peux pas abandonner Eyri derrière comme ça."
Elle se concentra à nouveau pour tenter d'avoir des nouvelles par son compagnon animal. Le cerf était-il calmé ? Se remettaient-ils en route ? Ou étaient-ils durablement bloqués là-bas ?

Elle peine à isoler l'esprit de Prince et elle ne ressentit alors qu'une panique pure et aveuglante, avant d'être rejetée à l'extérieur de la créature. Il était quelque part vers la droite, mais elle avait eu l'impression — la certitude, à bien y réfléchir — qu'il n'était plus cheval mais abeille. Et plus tout à fait au même endroit qu'avant. D'Eyri et du cerf, aucune image, aucune nouvelle.
Un cri déchirant retentit dans le lointain. Mais Astrée aurait été bien en peine d'en identifier l'auteur.

Cette fois-ci, elle n'hésita plus.
" Il y a un problème là-bas, j'y vais," lança-t-elle à l'adresse de Jeroen avant de se mettre à courir vers la droite, dans la direction où elle escomptait trouver Prince et Eyri.
Elle n'attendit aucune réponse : rien de ce qu'il pourrait dire ne pourrait infléchir sa décision, et elle ne comptait pas sur son aide. Elle essayait de comprendre ce qui avait pu se passer, et se souvint du cri dans le ciel, des oiseaux -ou créatures ailées non identifiées- qu'elle avait entraperçus. Avaient-elles tenté d'attaquer Prince ? Une chose était évidente : il s'était fait abeille pour échapper à un danger, que ce soit celui-ci ou un autre. Et le même danger menaçait peut-être Eyri et son cerf. Sûrement, même.

Tout en courant, elle s'efforça de renouer le contact pour lui communiquer qu'elle arrivait aussi vite que possible. Et s'efforcer, aussi, de le localiser, en utilisant à la fois son lien mental avec lui et ses yeux : il ne devait guère être éloigné d'Eyri et du cerf. Et peut-être apercevrait-elle le prédateur supposé dans le ciel.

Elle percevait, par fragments violents, la panique de Prince, et chaque fois, c'était comme un coup sur la tête, qui la faisait vaciller sur ses jambes. Il se déplaçait à grande vitesse, trop grande vitesse pour une abeille, vers la gauche, et Astrée vit qu'il y avait une créature ailée qui se déplaçait plus ou moins dans cette direction, car sa silhouette sombre se dessinait sur le ciel désormais grisé. Difficile de savoir si Eyri et son cerf étaient proches de Prince car il n'en communiquait toujours rien.

Astrée réalisa alors que Prince était emporté par la créature ailée : c'était la seule explication possible. Cela lui paraissait assez inconcevable : sous sa forme d'abeille, il aurait dû pouvoir s'enfuir. Mais apparemment, il ne l'avait pas fait. Et à la vitesse où il se déplaçait, elle n'avait aucune chance de le rattraper. Il lui restait à espérer qu'une abeille ne présente aucun intérêt pour la créature, ce qui était vraisemblable. Elle se concentra pour lui envoyer des ondes rassurantes, et tenter de savoir s'il avait mal, s'il pouvait s'enfuir. Elle songea soudain qu'il avait peut-être été avalé vivant par la créature... et chassa cette pensée du mieux qu'elle le put. Elle devait se montrer rassurante, l'encourager à s'enfuir, et ne pas laisser transparaître sa propre peur pour ne pas aggraver sa panique.
Elle infléchit un instant sa course pour suivre la silhouette ailée, aussi dérisoire que soit cette tentative. Puis elle ralentit, cherchant à voir si la créature transportait quelque chose, un cerf par exemple.

Il faisait trop sombre et la créature était trop haut pour qu'Astrée puisse distinguer quoi que ce soit. D'autant qu'il y avait, en réalité, plusieurs silhouettes qui se dessinaient sur le ciel, certaines très élevées, peut-être des oiseaux, mais celle qui semblait emporter Prince, si c'était bien le cas, était plus massive et plus bas, et ne paraissait pas avoir la forme d'un rapace. Elle volta bientôt dans le ciel et repartit vers la droite. Il était difficile, au sol, d'anticiper dans quelle direction irait la créature.
Un nouveau cri retentit, inhumain et guttural, toujours dans le lointain.

Il était impossible de suivre une créature capable de voler, impossible de venir en aide à Prince dans ces conditions, et Astrée sentit le découragement l'envahir. Elle se demandait ce qui s'était passé, et qui était advenu d'Eyri, et quel était ce cri dans le lointain. Elle cessa de courir en vain, reprit son souffle.
Puis elle tenta de reprendre à nouveau contact avec Prince, pour l'encourager à fuir, et lui suggérer d'utiliser son dard pour piquer le monstre qui l'emmenait... mais peut-être avait-il une peau trop épaisse pour y être sensible. Tout dépendait où se trouvait l'abeille. Quand il serait hors de danger et remis de sa panique, il pourrait sûrement lui dire ce qui s'était passé et où se trouvait Eyri.

Elle parvint, à grand peine, à reprendre contact avec Prince, et elle comprit qu'il n'était pas en état de voler, qu'il était blessé, même s'il ne semblait pas souffrir, ou alors ce n'était rien en comparaison de sa panique. Il ne semblait pourtant pas en danger immédiat, si elle parvenait à faire sens de ce qu'il lui transmettait. Toujours rien sur Eyri et sur son cerf. Mais Astrée, debout au milieu de la plaine, était forcée de quitter son environnement pour gagner la conscience de Prince... Ce qui faisait d'elle une créature sans défense...

Astrée avait conscience, surtout, qu'elle ne pouvait rien faire pour aider son compagnon animal, en-dehors de lui envoyer des encouragements mentaux. Elle serra les poings, impuissante, puis finit par se souvenir qu'elle était en terrain découvert et que des trolls ou autres créatures dangereuses pouvaient survenir. Il lui fallait, au minimum, se trouver une cachette, un abri. Ou bien rejoindre les autres... mais ce n'était pas sa priorité. Elle songeait que peut-être, Eyri était toujours là où il s'était trouvé quelques minutes plus tôt : il lui semblait peu probable que le monstre ailé ait pu emporter à la fois l'elfe et son cerf, et elle ne savait d'ailleurs toujours pas s'il avait emporté qui que ce soit à l'exception de Prince. S'il était là-bas, il pouvait avoir besoin d'aide.
Elle décida donc de reprendre sa progression dans la direction qu'elle suivait initialement, se dirigeant approximativement vers l'endroit dont elle avait vu la créature ailée s'éloigner. Elle jetait de fréquents regards vers celle-ci, au cas où elle décide de se poser dans un endroit suffisamment rapproché pour envisager de s'y rendre.

Il y eut un nouveau cri, puis un autre encore, peut-être plus proche. Le soleil déclinait et il passa derrière la montagne, plongeant brusquement la vallée dans la pénombre. Astrée progressait, prudente, mais elle aperçut soudain un mouvement, droit devant elle, quelque chose qui courait dans sa direction. Peut-être deux choses. C'était agile, sautillant, pas très grand mais pas petit non plus, et ça venait droit sur elle. Très gris. Sans doute humanoïde. Difficile de savoir si ce qui s'approchait l'avait vue... ou peut-être sentie... mais il allait falloir prendre une décision, rapidement.

Le premier réflexe d'Astrée fut d'écarquiller les yeux, espérant reconnaître Eyri. Mais il pouvait s'agir de tout autre chose, c'était même probable. Il faisait sombre, et elle avait conscience que la créature inconnue la verrait certainement avant qu'elle-même ne puisse l'identifier, pour peu qu'elle soit dotée d'une bonne vision dans le noir. Or, s'il s'agissait d'une créature hostile, mieux valait éviter la confrontation : un combat éventuel serait bruyant et attirerait l'attention d'autres prédateurs.
Astrée préféra donc regarder rapidement autour d'elle à la recherche d'une cachette, un rocher susceptible de la dissimuler par exemple, à l'écart du chemin suivi par la créature. Elle laisserait passer la silhouette et essaierai de l'identifier une fois dépassée, de dos. En espérant qu'elle ne soit pas dotée d'un odorat trop développé...

Mais il n'y avait absolument rien de ce genre : la plaine était rocailleuse et accidentée, mais dépourvue de buissons, d'arbres ou de rochers volumineux, du moins aussi loin des versants de la montagne. Elle pouvait espérer que les créatures ne l'avaient pas vue, et que la couleur de ses vêtements la feraient passer inaperçue, mais c'était un pari pour le moins risqué...

Astrée décida de s'écarter le plus possible de la trajectoire des- créatures. Elle fit quelques enjambées vers la droite, puis s'accroupit et resta immobile, espérant passer inaperçue au milieu du terrain accidenté. Bien sûr, elle avait son arc en main, et son bâton prêt à servir également. Elle bondirait sur ses pieds, en cas de besoin, en un instant. Mais elle ne chercherait pas l'affrontement, tant qu'elle ne se sentait pas en danger. En revanche, elle espérait identifier la nature des créatures en question.

Les créatures se rapprochaient rapidement. Elles étaient deux, elles étaient énormes, et elles étaient beaucoup plus agiles que les ogres qu'Astrée avait vus plus tôt. Il ne fallait pas être un spécialiste, ni avoir une vision nocturne particulièrement bonne, pour deviner que c'étaient des trolls. Ils étaient gris, nus et maigres, comme des démons rocheux, les mains repliées en griffes acérées et les crocs dépassant de lèvres minces. Et ils venaient, indéniablement, droit sur Astrée...

Hum... Je suppose que les mercenaires ne lui ont pas laissé un peu de leur enduit à flèche ?

Astrée ne perdit pas davantage de temps. Dès qu'elle eu clairement identifié la menace, elle tira une flèche en direction de l'un des deux trolls, visant le torse. Puis, se souvenant qu'il était particulièrement compliqué de les tuer, elle visa les jambes, lors d'un second tir, pour le ralentir.
Dès qu'ils seraient suffisamment proches, elle utiliserait un sortilège d'enchevêtrement pour les arrêter dans leur course. Mais elle s'interrogeait sur la manière d'en venir à bout. Elle avait la possibilité de lancer de petites flammes, mais cela lui semblait une bien maigre défense.

Ils peuvent t'en avoir laissé, mais pas sûr qu'elle ait le temps d'enduire ses flèches et les enflammer avant d'en avoir au moins un au contact...

Dès qu'Astrée eut tiré sa première flèche, qui sembla bien peu émouvoir le troll, le second prit la tangente, de son petit pas trottant, pour la contourner par la gauche. Avec la pénombre et leur couleur de roche, il était difficile de les suivre du regard, et quand ils se furent séparés, cela devint tout simplement impossible : elle devait en choisir un. Sa seconde flèche fit mouche, déséquilibrant une seconde le troll qui s'arrêta pour arracher le trait, avant de reprendre sa route. S'il avait été blessé... il ne l'était sans doute plus.

Astrée en tira la conclusion qui s'imposait : il était impossible de venir à bout de deux trolls à elle seule. Pendant qu'elle se battrait tant bien que mal contre l'un d'eux, l'autre l'attaquerait par derrière. La seule option possible était la fuite... après les avoir suffisamment entravés.
Elle avança se quelques pas encore en direction du le troll qu'elle avait déjà blessé -ou tenté de blesser, du moins-, espérant disposer d'un peu de temps avant que l'autre ne vienne au contact, et incanta dès qu'il fut suffisamment proche.

Astrée --> enchevêtrement --> troll

Elle tenterait ensuite de repérer son comparse.

Son sortilège se déroula en quelques bribes psalmodiées et des plantules sortirent du sol pour entraver le troll. Celui-ci poussa un mugissement de mauvaise humeur et s'y attaqua aussitôt à grands coups de griffes. Bonne nouvelle, il n'avait pas eu l'air de pouvoir s'en dépêtrer d'emblée. Mais Astrée savait que le sortilège était de courte durée et que si elle pouvait désormais faire volte face, elle devait aussi conserver une partie de son attention sur le maintien du sort, sans quoi le troll retrouverait sa mobilité en quelques secondes. La lumière baissait de plus en plus. Et le second troll semblait avoir complètement disparu.

Astrée hésita, s'efforçant d'évaluer la situation. Elle aurait voulu pouvoir se mettre à couvert, trouver une cachette, puis repartir à la recherche d'Eyri. Mais cela semblait compromis, surtout avec un second troll dans les parages. Décidée à ne pas prendre de risques excessifs, elle fit volte-face et s'éloigna en se dirigeant vers la droite de sa trajectoire initiale, à l'opposé de la direction prise par le second troll.
Elle se retourna quelques instants après, pour contrôler l'évolution de la situation. Elle espérait pouvoir apercevoir et immobiliser son second adversaire, et utiliser ensuite un sortilège de création de de brouillard pour leur faire perdre sa trace, le temps de s'éloigner suffisamment.

HRP : enchevêtrement, max 1 minute, concentration nécessaire ?

Progresser rapidement sur le terrain accidenté de la vallée était des plus complexes mais Astrée avait une certaine habitude de la nature sauvage et de ses aléas. Malheureusement, scruter la pénombre avec vigilance et conserver son contrôle sur le sortilège qui emprisonnait le premier troll n'avait rien. d'aisé et il était probable qu'elle soit forcée de le relâcher au moment où le second se présenterait. Avancer dans la direction opposée à la sienne signifiait aussi ne pas pouvoir surveiller facilement ce qui se passait derrière et... s'éloigner des ruines et des sceaux protecteurs. D'Eyri, bien sûr, pas la moindre trace. Quant au second troll, s'il la suivait, il parvenait à s'immobiliser chaque fois qu'elle se retournait pour le chercher du regard.

HRP : Effectivement, ils ont rudement allégé le sort par rapport à D&D3.5... il est plus court, et de portée bien moindre (avant c'était 120m) ; je n'avais pas fait gaffe à cette histoire de concentration, et je n'y connais rien donc je viens d'aller lire pour savoir ce qu'on peut faire tout en maintenant un sortilège : se déplacer, se battre, mais pas lancer de sort nécessitant de la concentration (mais on peut lancer un autre sort qui n'en nécessite pas).

Astrée essayait de trouver une échappatoire, sans y parvenir -l'urgence de la situation n'aidant pas vraiment à une réflexion efficace. Elle n'avait que deux issues : rejoindre les protections du campement, à condition de pouvoir y parvenir avant la nuit noire et de contourner l'autre troll. Ou continuer à s'en éloigner et se chercher une cachette inaccessible aux trolls, par exemple une grotte à l'entrée étroite, donc peu visible, ce qui était un plan hautement aléatoire. En réalité, aucune de ces deux solutions n'avait la moindre chance d'aboutir dans les circonstances actuelles. Elle en avait pleinement conscience, et usait de toute sa volonté pour résister à la panique.
Elle se retourna à nouveau, guettant le second troll.
Elle se souvenait de son unique combat contre ceux de leur espèce : il avait fallu du feu et un certain nombre de flèches pour en venir à bout. Elle n'avait aucune chance...
Sur une impulsion, elle décida de cesser de fuir et revint à pas lent vers le premier troll toujours emprisonné, guettant son comparse.

En repartant sur ses pas, Astrée constata que le troll qu'elle avait laissé derrière était en train de se dégager des racines qui l'emprisonnaient. Elle pouvait relancer son sortilège pour le bloquer à nouveau, mais il y avait peu de chance que son comparse soit passé à autre chose, à moins qu'il n'ait été attiré par une autre proie. Avec sa couleur et la pénombre, il pouvait passer inaperçu beaucoup plus aisément qu'un être humain... Il lui sembla d'ailleurs détecter un mouvement sur la droite... ou peut-être pas. La grisaille gagnait du terrain, partout autour d'elle. Le troll enchevêtré lâcha un cri qui ressemblait à un rire grinçant, sonore, qui se répercuta ensuite en écho sur les parois des montagnes, comme venant de partout et de nulle part à la fois.

Astrée frissonna, et inspira profondément pour tenter de chasser la peur qui s'infiltrait en elle, hérissant les poils de ses bras.
Elle n'était pas de taille et elle devait fuir. Mais les deux seules issues étaient compromises : la voie vers la sécurité du campement était plus ou moins coupée, la voie vers les cachettes éventuelles du massif était extrêmement hasardeuse. Elle entrevoyait cependant une solution pour s'en tirer : changer de forme pour courir plus vite. Elle ne l'avait jamais fait, mais elle était certaine de pouvoir y parvenir. Enfin... presque certaine. Bien sûr, il lui fallait trouver une forme qui lui assure une bonne vitesse de fuite, tout en étant capable de transporter ses affaires... ce qui n'avait rien de simple.

Dans l'immédiat, l'urgence était de se cacher, pour gagner un peu de temps afin de se déshabiller -elle ne voulait pas déchirer ses vêtements chauds. Elle incanta.
Astrée --> nappe de brouillard
Elle y mit toute la puissance qu'elle pouvait atteindre, pour qu'elle soit aussi vaste que possible, tout en étant consciente que cela resterait sûrement insuffisant pour y noyer simultanément les deux trolls et elle-même.
Elle s'efforça de centrer le sortilège entre sa position et celle du troll enchevêtré, légèrement sur la droite au cas où le mouvement entraperçu soit réel, et de façon à se trouver elle-même à l'intérieur de la nappe, près du bord.

HRP : sortilège lancé avec un emplacement de niveau 2, ça donne 12 m de rayon - 24 m de diamètre... vraiment pas beaucoup... et je présume qu'on ne peut pas la déplacer évidemment !

HRP : va falloir qu'elle se déshabille très vite

Et le monde fut brume obscure. Astrée n'y voyait plus grand chose, ses poursuivants non plus, sans doute, mais rien n'indiquait que la vue soit le sens favori du troll. Elle eut néanmoins une sensation d'isolement total, de la montagne et de ceux qui la hantaient. Un rire lugubre retentit à nouveau quelque part, malheureusement plus proche. Si la druidesse avait l'intention de réaliser quelque chose de spectaculaire, c'était le moment ou jamais...

Pas vraiment d'autre choix

Sitôt le sort lancé, Astrée se décala rapidement de plusieurs pas vers la gauche, sans bruit, tout en commençant à enlever son manteau, puis son pull. Elle comptait sur quelques instants de flottement, estimant que les trolls ne pourraient pas déterminer si elle comptait fuir hors du brouillard à l'opposé de leur position, auquel cas ils avaient intérêt à rester guetter à l'extérieur. Car même pour leur flair, le brouillard était gênant. Et puis, elle avait la possibilité de créer une maigre illusion olfactive si elle les devinait trop proches.
Elle fourra ses vêtements dans son sac en frissonnant et s'accroupit sans bruit : il lui restait à délacer ses bottes, les fourrer avec le reste de ses affaires, et, s'il lui restait du temps, ôter ses chausses. En espérant que tout tienne dans son sac... Heureusement qu'elle n'avait pris avec elle que le minimum.
Elle guettait l'approche des trolls, prête à réagir à la moindre alerte.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Les Rocheuses du Dragon