La Couronne de Cuivre

RP : Retour à l'abri

Le baiser lui avait fait baisser sa garde mais il n'en avait cure. C'était bon d'apprécier simplement ces moments très agréables et d'oublier un instant tout soucis. Bien évidemment, il se laissa surprendre par l'aspersion d'eau glacée et rit de bon cœur.

- Si tu tiens vraiment à me donner un bain, je n'ai rien contre à condition que tu en prennes un avec moi. Mais pour le moment, une heure ou deux de sommeil en plus nous fera du bien.

Il n'était pas certain de parvenir à s'endormir après s'être levé mais fermer les yeux et somnoler aux côtés d'Astrée était une perspective réjouissante.

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Il régnait un froid piquant, mais emmitouflés et blottis dans les bras l'un de l'autre, ils se tenaient chaud et étaient prêts à affronter les frimas matinaux. Du reste, le soleil monterait vite dans le ciel.
Contrairement à ce qu'il craignait, Kasumi n'eut aucun mal à sombrer dans une douce somnolence. Certes, il ne dormait pas tout à fait - ou peut-être s'était-il endormi quelques minutes ?- mais il avait perdu la notion du temps. Lorsqu'il et rouvrit les yeux, ce fut pour découvrir avec surprise qu'il faisait maintenant grand jour. A ses côtés, il entendait la respiration régulière d'Astrée : elle était sans doute encore endormie.

Une odeur agréable chatouillait ses narines. Une odeur qu'il mit quelques instants avant de définir. Son estomac l'identifia bien avant lui en grondant bruyamment: c'était l'odeur du petit déjeuner. Un pot de terre cuite était posé juste à côté d'eux, et il s'en dégageait une délicieuse odeur de thé chaud. Quelques tranches d'un pain rustique, ainsi qu'un petit pot de miel, complétaient le tableau.

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Kasumi s'en voulait de s'être ainsi laissé aller à baisser sa garde. Il aurait pu arriver n'importe quoi pendant qu'il dormait. Et même en le sachant, cette sieste lui avait laissé les idées embrouillées et il avait du mal à émerger et mettre son cerveau en ordre de marche. Il se redressa en bafouillant, à la recherche du moindre danger :

- Qui a-t-il ? Qui est là ?

Son appétit contribuait à attirer toute son attention sur les mets d'apparence savoureuse mais une telle providence suscitait aussi la méfiance. Il chercha des yeux des signes de présence. Quelqu'un avait forcément amené ce petit déjeuner et il était probable qu'il restait à guetter leur réaction. Avant de réveiller Astrée, il tenait à tirer cette affaire au clair ou du moins à écarter la potentialité d'un danger.

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Seul le silence lui répondit, coupé un instant par le coassement moqueur d'un corbeau.

- Qu'est-ce qui se passe ? demanda Astrée d'une voix ensommeillée, tirée brutalement du sommeil par la voix de Kasumi.
Ses yeux s'écarquillèrent en voyant le petit déjeuner qui les attendait.
- Oh... fit-elle simplement. Notre hôte nous a apporté un petit déjeuner ? Tu l'as vue ?

Rien alentour ne semblait indiquer qu'un autre être humain se trouvait dans les parages. Mais comme la veille, la nature leur paraissait un peu trop silencieuse. Comme si la forêt elle-même les épiait.

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Kasumi sentait que le moindre de leur geste était épié. De leur réaction devant cette offrande dépendait peut être les futures relations avec leur hôte. Mais cela n'empêchait pas la prudence. Il chuchota à l'adresse d'Astrée tout en se redressant pour se mettre assis :

- Tu as toujours en mémoire ce sort de détection du poison ? On n'est jamais trop prudent et je voudrais éviter de fâcher notre généreux donateur en boudant un petit déjeuner aussi appétissant.

Il vérifia la température du thé pour tenter d'estimer depuis combien de temps il avait infusé.

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Astrée, se redressant à son tour, écarta les mains en un geste désolé.
- Non, je ne m'en souviens plus, souffla-t-elle. Tu crois... que ça aurait pu être empoisonné? Mais pourquoi ferait-elle ça ?

Le thé fumant semblait parfaitement infusé, depuis cinq à dix minutes peut-être. Le pot de terre cuite conservait la chaleur de la boisson, qui paraissait à température idéale pour la dégustation..

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Kasumi s'empara du pot contenant le thé et s'en versa une rasade avant d'y tremper le bout des lèvres.

- Tu as raison, je suis un peu trop méfiant. Ce thé m'a tout l'air excellent. Il ne faudra pas manquer d'en remercier notre hôte et généreux pourvoyeur !

L'air de rien, il avait pris le risque de goûter avant Astrée, juste au cas où. C'était un choix autant guidé par la logique - elle était meilleure guérisseuse - que par la volonté de la protéger.

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Le thé était un peu trop tiède, mais excllent. Kasumi ne décela aucun goût suspect, et aucune réaction désagréable ne s'ensuivit dans son organisme dans les minutes qui suivirent.
Astrée ne l'avait pas quitté des yeux, vaguement inquiète. Mais comme rien ne semblait anormal, elle prit à son tour une gorgée de thé.
- Il est délicieux!
Elle hésita à se servir une tartine de miel, et jeta un regard interrogatif à Kasumi, quêtant son approbation.

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Il était peu probable que le miel présente davantage de danger que le thé aussi Kasumi donna son accord à sa façon en s'emparant d'une tranche de pain et du pot de miel pour confectionner en hâte une généreuse tartine. Avant que sa compagne ne proteste, il lui adressa un clin d'œil et répondit d'un ton amusé en lui tendant le mets appétissant :

- J'ai bien vu que tu attendais que je la tartine pour toi !

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Astrée eut un sourire amusé, et rentra dans le jeu.
- Ah, je vois que tu comprends tout sans que j'aie rien à dire... C'est parfait !

Le pain et le miel étaient revigorants, et ne semblaient pas le moins du monde empoissonnés, eux non plus. et un bon petit déjeuner était bienvenu...

- Bonjour, jeunes aventuriers. Le petit-déjeuner semble à votre goût, on dirait. C'est une bonne chose que vous appréciiez mon offrande comme moi la vôtre hier...

La voix était douce, et aurait été musicale si elle n'avais pas été si rauque - comme si sa propriétaire ne s'en servait pas souvent.
Elle appartenait à une assez jeune elfe, très belle. Astrée lui trouva une ressemblance indéfinissable avec Kasumi - sans doute avait-elle simplement du sang elfe de lune, après tout elle n'en voyait guère. A ses yeux, ils auraient pu pu être cousins.... Ce qui frappa Kasumi, quant à lui, ce fut le reflet bleuté de sa peau. Nettement moins prononcé que chez les elfes qu'il avait rencontré lors de cette étrange nuit, mais tout de même présent. Indéniablement, elle ressemblait à la princesse Eärunia

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Kasumi s'était lui aussi laissé tenter par les tartines de miel, savoureuses, surtout après les privations de la veille. Mais il sursauta légèrement en constatant qu'il avait été surpris par leur insaisissable hôtesse. Il ne l'avait pas entendue approcher et ne put, pendant quelques secondes, s'empêcher de la détailler. Légèrement gêné qu'elle ait pu s'en rendre compte, ou pire, qu'Astrée s'en offusque, il répondit d'une voix presque coupable et hésitante :

- Eh bien... Bonjour ! Oui, nous n'avions rien emporté. Nous ne comptions pas nous attarder aussi longtemps. Nous vous remercions pour ce petit déjeuner. Vous souhaitez manger avec nous ?

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L'elfe rit doucement.
- J'ai déjà mangé depuis longtemps ! Le soleil est déjà haut dans le ciel...
Elle s'assit en tailleur face à eux, maintenant cependant une certaine distance.
- Vous avez accepté mon hospitalité pour la nuit - Astrée se dit que c'était une façon très élégante d'admettre avoir oeuvré pour les obliger à rester - ainsi que ce déjeuner, vous êtes donc mes hôtes. Mais maintenant que nous avons échangé nos offrande et notre confiance, me direz-vous ce qui me vaut cette visite inattendue ?

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Kasumi ne voyait aucune raison pour ne pas entrer dans le vif du sujet en répondant à la question de l'elfe aquatique :

- Je suis honoré que vous nous fassiez confiance. Vous n'aurez pas à le regretter. Eh bien, pour ne pas vous cacher la vérité, ma compagne et moi vous cherchions. Ou plus exactement, quelqu'un qui saurait identifier un coquillage que j'ai trouvé dans les montagnes. Il est d'origine elfe d'après ce que nous avons pu apprendre.

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L'elfe s'approcha pour jeter un coup d'oeil au coquillage évoquant un croissant de lune que Kasumi lui tendait, et lui prit soudainement des mains pour l'examiner de plus près, l'air stupéfaite.
- Ca alors.... Ce n'est pas possible... Mais... Où avez-vous trouvé ce coquillage ? C'est incroyable.... Et comment saviez-vous que je... que je le connaissais ? Qui vous a envoyé ici ?
Le ton de la dernière phrase était légèrement suspicieux, mais c'était clairement la curiosité et l'incrédulité qui animait l'elfe. L'émotion lui avait fait perdre un peu de sa retenue, ce qui ne faisait qu'accentuer sa ressemblance avec la belle Eärunia.
Astrée, quant à elle, regardait Kasumi avec intérêt. Après tout, elle n'avait eu qu'une version "allégée" de l'étrange rêve qu'il avait fait cette nuit-là. Ou peut-être surveillait-elle ses réactions face à la beauté de l'elfe?

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Kasumi ne manqua pas de remarquer l'intérêt que portait soudain Astrée à la discussion. Il lui adressa un sourire se voulant innocent avant de répondre à l'elfe en pesant bien ses mots. La réaction de la druidesse était par trop vive pour qu'il se risque à commettre un faux pas. La surveillance d'Astrée était peut être une motivation supplémentaire pour se montrer prudent :

- Comme je vous l'ai dit, nous avons trouvé cet objet plus haut dans la montagne, en dormant près d'un lac. J'ai fait un rêve étrange provoqué par une plante hallucinogène que nous avons commis l'erreur d'utiliser pour notre feu de camp. Au réveil, je tenais ce coquillage. Le rêve concernait une civilisation elfe marine disparue. Je ne m'explique pas être entré en possession de ceci. Plus tard, un homme qui avait entendu parler de vous nous a conseillé de venir vous trouver pour vous interroger à son sujet.

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L'elfe fronça les sourcils.
- Quelqu'un qui aurait entendu parler de moi ? Mais voyons, c'est impossible, personne ne vient jamais par ici, et je m'arrange pour que les quelques visiteurs ne s'aperçoivent pas de ma présence. Il doit y avoir moins d'une demi-douzaine de personnes qui connaissent mon repaire...
- Il se faisait appeler Oncle Henri, répondit Astrée. C'était un Voyageur...
-Hum... Oui, je pense savoir qui c'est en ce cas. Mais pour le reste, cette histoire de rêve... Les rêves n'ont pas le pouvoir de faire apparaître des coquillages, que je sache !
Elle donnait l'impression de ne pas vraiment le croire. Il fallait bien admettre que l'histoire était assez invraisemblable. Elle gardait les yeux fixés sur le coquillage, et avait machinalement porté sa main à son cou, où un lien de cuir servait sans doute d'attache à un pendentif, dissimulé sous sa tunique.
- Et il racontait quoi, ce rêve, précisément ?

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Kasumi se mit un peu sur la défensive face aux dénégations pressantes de l'elfe :

- Croyez-moi, il nous est arrivé plus d'une chose étrange au cours des dernières semaines. Je ne suis guère familier de la magie mais ce genre de phénomène est loin d'être impossible. Mais si cela peut vous aider, je veux bien raconter ce dont je me souviens.

Il marqua une pause pour organiser ces souvenirs, ou peut être trier les moins compromettants avant de reprendre d'un ton moins vindicatif :

- Dans ce rêve, je me suis retrouvé dans une cité sous-marine où demeuraient quelques elfes. Elles étaient bloquées car il ne restait plus aucun héritier mâle à leur dynastie. J'ai retenu un nom : la princesse Eärunia. Il s'agissait soit disant d'une sécurité de la cité qui les maintenait enfermées. Elles avaient besoin de moi pour y remédier mais j'ai refusé. C'était impensable... J'aime ma compagne. Toujours est-il que je me suis réveillé au matin où je m'étais endormi mais avec ce coquillage en main.

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Astrée avait nettement tiqué.
- Elles voulaient... quoi exactement ?
Elle ne précisa pas davantage sa question, et rougit en se rendant compte qu'elle avait coupé la parole à l'elfe, qui s'apprêtait à répondre.
- Excusez-moi...

L'elfe semblait réfléchir.
- C'est étrange comme l'histoire semble se répéter...
Elle prit le coquillage qu'elle portait en médaillon, et le montra à Kasumi et Astrée. Comme l'oncle Henri l'avait dit, ce n'était pas le même : il était en forme d'étoile de mer coupée d'un croissant de lune. La même forme d'étoile que la gravure qu'ils avaient vue dans la grotte l'autre jour, près des statues.
- Ma grand-mère avait un coquillage semblable au vôtre, et sa tribu habitait au fond d'un lac. Sans doute ce même lac près duquel vous avez dormi. Je n'y suis moi-même jamais allée... Le lieu était protégé par divers enchantements, qui permettaient par exemple au temps de s'écouler différemment, et les rendait invisibles. Il y avait aussi un gardien qui était chargé de protéger notre race... Mon aïeule m'a raconté qu'il considérait comme une menace le fait qu'il n'y ait plus d'elfe mâle pour perpétuer notre lignée. Un jour, il a capturé un mâle, sans doute elfe ou demi-elfe, pour remédier à cela, et cet inconnu a accepté de rendre cet immense service à mon peuple. Il s'appelait... Quazmi, je crois. Ma grand-mère est née ainsi, en même temps qu'un frère jumeau. La présence d'un mâle a apaisé le gardien.
Elle sourit.
- Je croyais que tout ça n'était que des histoires pour effrayer les enfants, mais apparemment vous l'avez vu, ce gardien, vous aussi!
Son regard se posa sur son médaillon.
- Ma grand-mère a été envoyée, comme d'autres filles du clan, à la recherche d'autres représentants de notre race. Et elle en a trouvé, dans un autre lac, plus grand, plus à l'ouest. Un clan dont l'emblème était une étoile. Elle a épousé l'un des princes de ce clan, et ils ont fondé une nouvelle lignée, dont voici l'emblème - elle montra son propre coquillage. Et ils ont réussi à rejoindre la mer...
Elle sourit, rêveuse.

- Je n'ai guère de contacts avec eux. Ma mère, ayant hérité de sa mère son esprit aventureux, a parcouru les îles; elle y a rencontré un demi-elfe, qui l'a abandonnée alors qu'elle était enceinte de moi, et elle est finalement retournée parmi les siens. Mais tout ceci est une autre histoire... grâce à laquelle je suis aussi à l'aise sur terre que sous la mer, sans jamais être à ma place nulle part.
Son ton était devenu amer, mais elle se ressaisit aussitôt.
- C'est quand même une étrange coïncidence... Bizarre que l'histoire se soit répétée à nouveau.
Elle haussa les épaules, renonçant apparemment à comprendre.
- Mais je ne me suis pas présentée ! Je me nomme Caláwiel . Et vous?

Astrée ne répondit pas immédiatement, plongée dans ses pensées - ou peut-être voulait-elle laisser son compagnon s'exprimer le premier. Son regard, plongé dans le vague, reflétait une sorte d'incrédulité.

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Kasumi était blême, encore plus pale que d'habitude en tous cas. Durant le récit, il était passa par des sentiments confus d'incrédulité, d'indignation, de dénégation, de colère même mais ce qui dominait tout le reste était l'incompréhension et la crainte qu'Astrée ne se fasse de fausses idées sur son comportement lors de ce rêve. Mais peut être que cela avait été plus qu'un rêve après tout. Se pouvait-il que ce dénommé Quazmi ne soit que lui-même ? Non, c'était impossible, il savait qu'il n'aurait jamais fait ça. Le souvenir de cette nuit se fit plus net, affreusement net. Il avait été inconscient à un moment, avant de se réveiller. Se pouvait-il ? Non, il refusait d'y croire. A côté de cela, se réveiller avec un coquillage dans la main n'avait plus rien d'étrange. Il émit une hypothèse tout haut comme s'il cherchait à se convaincre lui-même :
- Il se pourrait tout simplement que j'aie revécu des souvenirs liés au lac auprès duquel nous avons dormi. Même si les coïncidences sont troublantes, je vous l'accorde. Le plus étrange ait que nous avons ensuite trouvé un tombeau au fond d'une caverne arborant le médaillon que vous avez décrit. Il se pourrait qu'il ait abrité l'un de vos ancêtres, pourquoi pas cet homme qui réanima votre lignée.

Il avait soigneusement évité de révéler son nom, bien trop proche de celui de l'inconnu à son goût.

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Le visage de l'elfe s'illumina.
- Oui, je vois de quelle grotte vous voulez parler ! C'est là que ma grand-mère a épousé mon grand-père. Il me semble qu'elle communiquait avec un lac souterrain, et ils y ont vécu quelques temps, avant de partir à l'aventure en direction de la mer. Ma grand-mère avait un peu de sang de terrien, elle pouvait donc rester longtemps à la surface... Ils sont partis vers les mers de l'ouest.
Elle souriait, heureuse d'avoir évoqué son histoire et celle de ses ancêtres.
- Et moi, j'ai suivi le chemin inverse en revenant par ici, sans doute inconsciemment à la recherche de mon passé. Peut-être le destin m'amenait-il ici pour que je puisse vous rencontrer ? Grâce à vous, je sais que tout ce que je prenais pour des légendes est vrai ! Et dire que j'accusais ma grand-mère de mentir... Peut-être même que vous pourriez me dire où il est exactement, ce lac ? Je voudrais voir si le palais y est toujours...
Ses yeux brillaient d'enthousiasme.
- Oh, s'il vous plaît, vous qui l'avez vu, racontez-moi.... Comment était le palais royal, sous le lac ? Ma grand-mère me disait toujours qu'il était splendide, digne d'un grand royaume, mais j'ai du mal à y croire ! Et Eärunia, mon arrière grand-mère dit que je lui ressemble... Vous qui l'avez vue, dans votre rêve, est-ce que c'est vrai ? S'il vous plaît, dites-moi ce dont vous vous souvenez...
Apparemment, elle se satisfaisait parfaitement de l'hypothèse de Kasumi comme quoi il aurait revécu en rêve une histoire appartenant à un autre. Astrée, elle, paraissait toujours aussi songeuse, réfléchissant intensément.

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Kasumi ne pouvait s'empêcher de ruminer lui-même quelques doutes alimentés par l'expression distante d'Astrée. Ils allaient devoir tirer cela au clair et le plus tôt serait probablement le mieux. Mais il fallait tout d'abord se débarrasser poliment de leur hôtesse. La meilleure façon était de lui donner satisfaction aussi le demi-elfe s'appliqua à lui faire part de ses impressions sur l'architecture de la cité, s'excusant de n'en avoir vu qu'une toute petite partie pendant son bref séjour onirique. Il insista également sans mentir sur le fait que l'angoisse de se retrouver prisonnier ne lui avait pas permis d'apprécier les beautés de la cité à leur juste valeur. Il conclut d'un ton conciliant :

- Ce n'est pas tout à côté mais nous vous indiquerons le plus sûr chemin pour vous y rendre. Je peux même vous dessiner un plan si vous le désirez.

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- Je vous en serai très reconnaissante ! Je ne sais pas comment vous remercier de m'avoir parlé de mon arrière-grand-mère, de mon clan d'origine... même si vous avez l'impression de n'avoir pas vu grand-chose, c'est plus que je n'en ai jamais vu moi-même !

Elle jeta un coup d'oeil au-dessus de leur tête, évaluant l'heure.
- Accepteriez-vous de vous joindre à moi pour le déjeuner? Il est tard, et je serais vraiment très honorée de partager mon repas avec vous. vous ne pouvez tout de même pas reprendre la route le ventre vide...
Elle les regardait alternativement. Il était clair qu'un refus la blesserait. Elle qui vivait seule semblait apprécier d'avoir, pour une fois, un peu de compagnie. Et effectivement, la discussion les avait amenés peu de temps avant midi.

- Et je ne sais même pas vos noms....
Cette fois-ci, ce fut Astrée qui répondit.
- Je me nomme Astrée, et mon compagnon est Kasumi.
Il était difficile de savoir si elle avait répondu par simple politesse, ou si elle guettait une réaction de la druidesse. Elle chercha à croiser le regard de Kasumi, tentant de lui signifier qu'elle lui laissait la décision. Elle n'y semblait pas opposée.
- Kasumi... répéta Caláwiel pensivement. Ca ressemble beaucoup au prénom de mon arrière grand-père. c'est une drôle de coïncidence que vous ayez revécu ces évènements alors que vous lui ressemblez tant, jusqu'au prénom. Je ne me souviens plus très bien du sien, en fait....
Elle était songeuse.

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Songeux, Kasumi l'était bien plus encore. Décidément, cette histoire ne lui plaisait pas. La compagnie de l'elfe était agréable et son comportement bien plus chaleureux qu'il ne s'y était attendu mais ses insinuations visaient un peu trop juste les propres doutes qu'il pouvait nourrir. Mais comment se défendre de ce qu'elle suggérait sans donner l'impression de se mettre sur la défensive ? Dans ces conditions, il ne pouvait guère refuser l'invitation aussi y consentit-il d'assez bonne grâce après un échange de regards avec Astrée. Cette fois, les pensées de cette dernière lui étaient fermées et cela le peinait bien davantage que tout le reste.

- Nous resterons avec plaisir le temps d'un repas mais ensuite il nous faudra rentrer chez nous. A ce propos, nous avions laissé une corde accrochée à la falaise...

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- Ah oui, la corde....
Elle sourit.
- Il me paraissait clair que vous me cherchiez, et je ne connaissais pas vos intentions. Disons que c'était un moyen de vous tester, en vous observant un peu plus longuement avant de décider si oui ou non je pouvais sortir de mon repaire... Je n'ai jamais de visiteurs par ici, mais je tiens à ce que les rares personnes qui se trouvent être mes hôtes, parfois sans le savoir, aient un comportement adéquat. Donc j'ai quelque alliés qui surveillent les intrus pour mon compte...
Elle se leva et s'inclina légèrement.
- Si vous voulez bien me suivre, je me ferai un plaisir de vous recevoir à déjeuner.
Astrée s'inclina légèrement en retour, avec un sourire amical. Quelles que fussent ses pensées et inquiétudes, elle se devait de faire montre de politesse à l'égard de l'elfe qui se comportait en amie.
- Nous serons enchantés d'être vos hôtes.

Ils suivirent l'elfe, descendant la rivière le long d'un chemin invisible, que l'elfe semblait connaître par coeur, écartant parfois quelques branches pour révéler un passage au milieu de l'inextricable végétation.Au bout d'une bonne demi-heure, l'elfe bifurqua, s'éloignant de la rivière, et les conduisit à une petite clairière toute proche, guère plus grande que les autres clairières qu'ils avaient traversées. Elle abritait en sa bordure un chêne immense, manifestement extrêmement âgé, au tronc creux que l'elfe avait aménagé en un abri sommaire, quasiment invisible à moins de se trouver à proximité immédiate.
- L'intérieur est un peu petit pour que je puise vous y recevoir. Installez-vous donc à ma table d'extérieur pendant que je vais chercher de quoi nous sustenter, fit-elle en désignant une souche assez large pour accueillir une demi-douzaine de convives. Des pierres, placées autour, servaient de sièges de fortune.
Elle disparut à l'intérieur.
Astrée la regarda s'éloigner d'un air pensif, mais ne dit rien. Elle avait probablement très envie de poser quelques questions à son compagnon, mas n'en faisait rien, gardant obstinément le silence. Toujours songeuse.

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Le décor était bucolique et le rôdeur comprit qu'ils n'auraient eu aucune chance de repérer l'abri de la druidesse sans son consentement. Il la suivait en silence, désireux de ne pas la froisser mais que ce aussi que ce moment gênant prenne fin. Quand elle les laissa seuls, Astrée et lui, il espéra que sa compagne prendrait la parole mais elle n'en fit rien. Il ne savait pas trop comment aborder ce sujet délicat d'autant plus que l'elfe pouvait certainement les entendre et reviendrait rapidement. Il préféra donc garder le silence, en jetant un regard désolé dans la direction d'Astrée.

RP: retour à l'abri

L'elfe ne revint pas immédiatement, et le silence s'appesantit. Astrée avait pris place sur l'un des sièges. Elle ne semblait pas réellement bouder, mais elle restait silencieuse.

Lorsque la druidesse revint, elle portait un saladier et trois assiettes faits de bois d'olivier. Les couverts étaient deux étranges baguettes de bois, bien différents des fourchettes et couteaux auxquels ils étaient habitués. L'elfe, les maniant avec dextérité, partagea la salade de crudités qu'elle avait préparé - mélange de différents légumes frais et secs, racines et fruits coupés finement, une telle variété d'ingrédients que les rôdeurs ne purent tous totalement les identifier. Ils découvrirent à la première bouchée que l'elfe savait mêler se façon étonnante le sucré, le salé et l'amer : la salade était délicieuse. Très différente de tout ce qu'ils avaient pu goûter jusque-là. Et leur manque de dextérité dans l'usage des étranges couverts leur permit de l'apprécier plus longuement qu'ils ne l'auraient voulu... L'elfe semblait s'en amuser, mais ne proposa pas de leur apporter d'autres ustensiles. Peut-être n'en avait-elle pas?
Elle leur apporta en revanche du pain, de l'eau et du thé, ainsi que du fromage et du miel qui viendraient compléter cet en-cas frugal... lorsqu'ils seraient venu à bout de la salade !
- En voulez-vous encore un peu ?, leur demanda-t-elle avec douceur.

RP : Retour à l'abri

La salade était un délice mais leur petit déjeuner copieux avait déjà fait son œuvre. La difficulté qu'il avait à utiliser ses ustensiles mais surtout le malaise consécutifs à l'histoire racontée par l'elfe lui avait quelque peu coupé l'appétit. Le rôdeur déclina donc poliment :

- Non merci. C'était excellent. Vous avez un don pour la cuisine. Mais j'ai déjà bien trop abusé de votre hospitalité je crois. Si je mange encore, j'aurai du mal à escalader la falaise tout à l'heure.

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L'elfe eut un rire léger, puis inclina la tête avec grâce.
- Si tel est votre désir... je vais vous raccompagner jusqu'à l'endroit où vous aviez laissé votre corde, et vous montrer où je l'ai mise... En chemin, vous aurez le temps de m'expliquer où est ce lac.

Moins d'une heure plus tard, ils étaient au pied de la falaise. Astrée, connaissant mieux la région, avait complété les explications de Kasumi quant à l'itinéraire le plus rapide pour rejoindre le lac, et la jeune elfe paraissait à la fois enthousiaste et vaguement angoissée à l'idée de se rapprocher de son passé.

La corde avait été cachée tout près de l'endroit où ils l'avaient laissée, sous un buisson d'épineux dont l'aspect décourageait toute approche. L'elfe parvint bien sûr à l'en tirer sans la moindre égratignure.
Elle semblait émue en se tournant vers eux.
-j'ai été très heureuse de faire votre connaissance...
Les rôdeurs eurent tous deux l'impression que cette phrase s'adressait davantage à Kasumi qu'à Astrée. L'elfe nourrissait-elle les mêmes doutes qu'eux ? Quoi qu'il en soit, elle n'en laissait rien paraître et semblait avoir parfaitement admis la version improbable d'un simple rêve.
- J'imagine... que vous souhaitez conserver ce coquillage ?
Son ton résigné était éloquent. Lorsqu'elle avait tenu le coquillage en main durant leur discussion précédente, ses yeux brillaient d'émotion, et elle ne l'avait rendu qu'à regret.

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Kasumi était content de récupérer la corde. Elle signifiait qu'ils allaient enfin pouvoir quitter cette vallée où ils avaient erré plus d'une journée avant de se voir révéler cette histoire dérangeante. Le bon accueil de l'elfe avait été une satisfaction, comme le fait de pouvoir l'aider mais le demi-elfe était néanmoins grandement soulagé de pouvoir s'en aller. Même s'il n'était pas dupe un instant du fait qu'il allait devoir s'expliquer envers sa compagne. Il pensait qu'elle lui faisait suffisamment confiance pour lui laisser le bénéfice du doute mais il souhaitait vraiment que cette histoire ne ternisse pas leur relation. Et lui-même avait besoin d'en parler, de se rassurer sur les propres craintes qu'il nourrissait à cet égard. Après tout, il était tombé inconscient dans ce rêve alors qu'il avait poussé à bout les elfes par sa résistance.

Le rôdeur s'était abîmé dans ses pensées au point de faillir manquer les adieux de l'elfe. Il se reprit et ajouta presque distraitement :

- Le plaisir a été pour nous d'être vos invités. Ce coquillage vous revient de droit, je suis heureux qu'il ait retrouvé la place qui lui est destinée.

Ce faisant, il lui rendit l'objet en faisant preuve de déférence.

RP: Retour à l'abri

Le visage de l'elfe s'illumina d'une joie quasi-enfantine. Elle prit le coquillage avec délicatesse, comme si elle craignait de l'abîmer.
- Merci....

Les adieux furent emprunt d'une étrange émotion. Astrée salua l'elfe avec un sourire amical, mais elle semblait assez peu à son aise, à la fois heureuse d'avoir pu rendre service, soulagée de partir, et l'air vaguement inquiète. Pet-être du contenu de la discussion qui suivrait ?
Elle grimpa la première, laissant volontairement Kasumi et la jeune elfe seuls, sans un regard en arrière. Au cas où ils aient davantage de choses à se dire....
Caláwiel, spontanément, prit les mains du rôdeur entre les siennes.
- Merci, vraiment... J'ai été très heureuse de vous connaître...
C'était à se demander si elle aussi ne nourrissait pas quelques doutes sur leur éventuel lien de parenté.