La Couronne de Cuivre

[Quête : l’invasion des ombres]
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Si les résidences de la noblesse avaient toujours été gardées, les choses avaient pris une dimension nouvelle depuis le coup d’Etat. Des hommes en armes se tenaient devant les grilles et toisaient d’un air mauvais quiconque semblait s’approcher de trop près. Inutile de dire que ce furent de véritables regards meurtriers qu’ils jetèrent sur la bande de résistants et de réfugiés qui avait émergé du parc. Les souvenirs des pillages qui avaient accompagné la prise de pouvoir de Morféa étaient encore récents, et c’est la main sur la garde de leurs épées qu’ils hélèrent les nouveaux venus pour leur demander ce qu’ils voulaient.
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A chaque fois, Magariz et l’ambassadeur s’avancèrent seuls et tentèrent d’expliquer ce qu’ils désiraient aux gardes. Et à chaque fois, on les interrompait pour les envoyer promener, avec plus ou moins de rudesse. A deux reprises, on les menaça même d’aller quérir le guet.
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-C’est bien mal engagé ! soupira l’ambassadeur après avoir été éconduit de la sorte. Mais il faut pourtant continuer…
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Les choses se passèrent différemment lors de leur dernière tentative. Une fois n’est pas coutume, on les laissa parler jusqu’au bout. Les hommes d’armes échangèrent des regards indécis, puis l’un d'eux murmura :

-Prenez la prochaine ruelle à droite. Il y a une petite porte. On vous y attendra.
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Lorsqu’ils atteignirent ladite entrée, celle-ci était entrouverte. On les introduisit à l’intérieur du jardin. Quand le dernier Luménien fut entré, on referma l’huis avec précipitation. Un vieil homme richement vêtu s’avança alors et s’adressa aux deux chefs du groupe.
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[font=&quot]-Je suis le propriétaire de ces lieux. On m’a dit que vous demandiez asile. Je n’ai pas encore pris de décision à ce sujet, et j’aimerais entendre de vive voix les raisons de votre démarche. Parlez vite, je vous prie : je prends déjà de gros risques en vous recevant chez moi.
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[Quête : l’invasion des ombres]
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Le vieil homme dévisagea longtemps Magariz, puis leva un instant les yeux au ciel : vers le nord, les nuages de fumée continuaient à s’épanouir, lugubres et menaçants.
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-J’avais ouï dire que quelque chose de mauvais était en cours là-bas, murmura-t-il enfin, mais je n’aurais jamais imaginé que Nwalk en viendrait à de telles extrémités. C’est tellement... A vrai dire, j’aurais du mal à y croire si je n’avais pas sous les yeux vos malheureux compagnons, tant la chose est insensée, disproportionnée, inimaginable ! Cet homme set fou, je n’en doute plus à présent...
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Il hocha la tête puis observa ses concitoyens qui, tous, portaient les stigmates des épreuves qu’ils venaient de traverser.
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-Mais pardonnez-moi : je disserte à un moment bien inopportun. Vous pourrez vous abriter chez moi autant de temps qu’il faudra. Vous êtes nombreux, mais la maison est grande, et peut-être trouverons-nous des solutions pour vos loger chez d’autres résidents du quartier. Enfin, pour l’instant, l’essentiel est que vous ne restiez pas dehors. Nous ne sommes pas à l’abri d’une patrouille particulièrement curieuse ou zélée.
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Il fit alors signe aux Luméniens de le suivre et les introduit à l’intérieur de sa demeure. Il distribua ordres et consignes à ses serviteurs qui se mirent en devoir de trouver une place à chacun dans les nombreuses pièces. Le contraste entre la mise lamentable des survivants et l’ameublement luxueux était saisissant, mais personne ne sembla y faire attention : tout le monde avait des choses bien plus importantes en tête.
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Tandis que ses gens s’affairaient, le vieil aristocrate revint vers Magariz et l’ambassadeur.
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-Nous allons y arriver !fit-il en leur souriant. Avant peu, tous auront un endroit ou se reposer... Mais me trompe-je en pensant qu’il est inutile de vous proposer d’en faire autant ? J’imagine que vous désirez rejoindre vos compagnons au combat, ou tenter de les aider par d’autres moyens ?

[Quête : l’invasion des ombres]
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L’ambassadeur rattrapa Magariz avant qu’il ne se fut trop éloigné.
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[font=&quot]-Un instant, je vous prie ! haleta-t-il en s’immobilisant. Je n'ai pas réagi sur le coup, mais... Je sais que vous êtes pressés de rejoindre vos compagnons au port. Cependant, ne devrions-nous pas tenter de rallier les nobles du quartier, comme l’avait suggéré votre chef ? Nous nous sommes fait rabrouer de partout, certes… Mais peut-être notre hôte a-t-il des connaissances dans les environs, des personnes qu’il sait susceptibles de nous soutenir ? C’est peu probable, mais sans doute cela vaut-il la peine de tenter le coup. Et seul, je ne pourrais m’y risquer.[/font]

Quête: L'invasion des ombres.

HRP: Désolée pour le Serial Posting, j'obéis au MJ !!!

Galathée et ses deux gardes du corps improbables débouchèrent hors du parc. La rôdeuse s’était souvenue in extremis qu’elle portait encore une livrée luménienne, et elle s’était trouvé une tenue de rechange grâce à la bonne volonté de quelques réfugiés reconnaissants. Le résultat était hasardeux mais moins voyant qu’un uniforme usurpé.
« On fait quoi ? » demanda George, lorsqu’ils arrivèrent devant les façades des premières grandes maisons.
« On ouvre l'oeil et on les cherche... Et si on ne les trouve pas, on espère qu’ils nous trouvent, eux. » répondit Galathée, les mains sur les hanches.
« Super. On fait comment ? On sonne aux portes ? » fit Fred, peu emballé.
« On va essayer d'être un peu plus discrets... » murmura-t-elle, puis elle les entraîna plus avant dans la rue, les sens aux aguets, cherchant la trace du passage des rescapés.

Quête: L'invasion des ombres.

Lorsque le groupe armé arriva à proximité, Galathée sentit les deux garçons se raidir, mais elle les arrêta d’un geste. L’homme qui venait à leur rencontre lui était vaguement familier, sans doute l’avait-elle aperçu au Parc, plus tôt dans la journée. Son impression fut confirmée par la présence de l’ambassadeur manostien, debout derrière lui. Elle espéra qu’ils avaient bonne mémoire eux aussi. Les puissants avaient tendance à mélanger facilement les gens de rien, mais en ces temps troublés, distinguer l’allié de l’ennemi était crucial.
« Bonjour à vous. Nous arrivons des entrepôts où nous avons accompagné Sire Kasumi... »
Sans doute reconnaîtraient-ils le nom du rôdeur, à défaut d’autre chose.
« Nous vous cherchions. Nous avons... besoin d'un toit pour une cinquantaine de réfugiés supplémentaires. »

[Quête : l’invasion des ombres]
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Le petit groupe pénétra dans le jardin de la demeure par la petite porte latérale. Les gardes les laissèrent passer sans poser de question. Sous la conduite de l’ambassadeur et de Magariz, ils entrèrent dans la maison qui bruissait d’activité. Ils finirent cependant par retrouver le vieil aristocrate en pleine discussion avec l’un de ses serviteurs.
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-Messire, dit l’ambassadeur. Nous avons d’autres réfugiés en provenance du quartier ouest. Une cinquantaine. Pour l’heure, ils sont dans le parc, mais ils risquent d’être repérés s’ils y restent trop longtemps… Pensez-vous pouvoir les accueillir ici, au moins de manière provisoire ?
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Le vieil homme se gratta le menton, la mine perplexe. Puis il haussa les épaules
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[font=&quot]-Le plus important est de les mettre hors de vue. Allez donc les chercher au plus vite. En nous serrant, tout le monde devrait pouvoir avoir une petite place… Mais je vais réfléchir pour trouver quelque chose de plus durable… Peut-être certains de mes amis accepteront-ils de recevoir une partie de ces rescapés...[/font]

Quête: L'invasion des ombres.

Galathée parlementa quelques minutes avec Fred et George pour les convaincre de rester à l’abri. Ils avaient été suffisamment exposés, elle avait apprécié leur protection, mais à présent, elle serait plus efficace seule. Témoin de leur échange animé, l’ambassadeur manostien, un peu incrédule, finit par intervenir pour proposer à la rôdeuse de lui adjoindre deux de ses hommes, ce qui mit fin aux récriminations courroucées des adolescents, forcés d’admettre leur manque d’expérience en comparaison.

Elle regagna donc la rue avec ses deux nouveaux gardes du corps et fila jusqu’au parc. Là, les réfugiés accueillirent son retour avec soulagement, et se mirent en route sans traîner. Moins d’une demi-heure plus tard, le nouveau flot de rescapés s’engouffrait par le portail de la propriété mise à leur disposition, sous les yeux un peu effarés du propriétaire.

« D’où sortez-vous tous ces éclopés ? » demanda l’ambassadeur, à voix basse, alors que vieillards, boiteux et gamins défilaient devant eux.
« Ce sont des esclaves. Les plus valides ont accompagné Kasumi sur les quais. » fit Galathée, levant d’instinct les yeux vers le ciel, encore marbré de fumées sombres mais distantes.
Lorsque le dernier fut entré, les serviteurs du noble refermèrent les portes, jetant des regards furtifs dans la rue pour vérifier qu’aucun espion ne s’y trouvait. Galathée poussa un léger soupir, et s’autorisa un sourire.
« Si vous n’avez pas besoin de moi dans l’immédiat... » continua-t-elle.
Mais l’ambassadeur s’était déjà écarté, rejoignant Magariz et leur hôte.
« On dirait que non. » souffla-t-elle en haussant les épaules.
Elle s’engouffra alors dans la demeure, qui résonnait de mille et une respirations, conversations, pas, soupirs, sanglots, rires, et avisa une femme d’un certain âge qui campait dans les escaliers.
« Bien le bonjour. Je cherche un enfant à la jambe cassée. Il s’appelle Victor. Un petit brun, plus ou moins 8 ans. Peut-être l’avez-vous vu ? »
Galathée s’attendait à devoir interroger cent personnes avant de mettre la main sur son protégé, mais il fallait bien commencer quelque part.

[Quête : l'invasion des ombres]

La rôdeuse fut donc surprise de voir la femme hocher affirmativement la tête.
<!--[if !supportEmptyParas]--> <!--[endif]--><o></o> -Je l’ai vu, et même entendu, votre gosse ! dit-elle avec un sourire. Vous êtes la Dame aux Corbeaux, non ? Il raconte vos exploits à qui veut l’entendre. Paraît que vous êtes très forte pour descendre dans les puits et monter sur les toits. Et visiblement, pas forte que pour ça. Mais j’ai pas entendu son récit jusqu’au bout : y avait plus de place en haut, donc je suis redescendue… Enfin bref, il est au premier, dans une petite pièce, sur votre droite. Vous devriez pas avoir de mal à le trouver.
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Galathée la remercia puis se fraya tant bien que mal un chemin dans l’escalier encombré. Parvenue à l’étage, elle avança dans un large couloir, et sut qu’elle avait trouvé la pièce en question avant même d’y pénétrer : elle entendait Victor qui, visiblement, était en train de narrer quelque chose de palpitant. Avec une idée désagréablement précise de l’histoire dont il devait s'agir, elle franchit le pas de la porte pour découvrir le fils Desmoulins, assis sur un matelas au milieu d’un cercle d’enfants de tous âges. Ils étaient si absorbés par son récit qu’aucun ne remarque la présence de la rôdeuse.
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<!--[if !supportEmptyParas]--> <!--[endif]--> <!--[if !supportEmptyParas]--> <!--[endif]--> -Alors, le Monstre s’est levé et il a dit d’aller vers le Nord, où des gens essayaient de se battre avec les gardes rouges… Puis il a disparu, comme ça, pouf, d'un seul coup ! Et on a fait comme il avait dit…
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Relevant les yeux de son auditoire captivé, Victor s’interrompit brusquement en apercevant Galathée.
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<!--[if !supportEmptyParas]--> <!--[endif]--> <!--[if !supportEmptyParas]--> <!--[endif]--> -Oh, vous êtes revenue ! fit-il en lui adressant un large sourire.
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Les autres gamins se retournèrent, et l’expression qui se dessina sur leur visage était bien moins réjouie, et même plutôt effrayée… pour ne pas dire complètement terrifiée. Ils se relevèrent d’un bond tandis que la jeune femme s’approchait d’eux, et s’enfuirent sans demander leur reste, en veillant bien à ne pas la frôler de trop près. Un instant plus tard, il ne restait plus que Victor.
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<!--[if !supportEmptyParas]--> [font=&quot]-Heu… balbutia le petit garçon en rougissant légèrement sous la saleté qui lui maculait le visage.J’aurais peut-être pas dû leur dire que vous étiez l’amie du Monstre…Ils ont eu un peu peur, je crois.
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Quête: L'invasion des ombres.

Galathée ressentit un soulagement indicible en le trouvant là, simplement assis sur son matelas. C'était un sentiment qu'elle ne s'expliquait pas complètement, qu'elle rangea parmi les émotions brutes de la journée, sans tenter d'y trouver un sens précis. Elle s’agenouilla devant lui et posa une main amicale sur son épaule.
« Ce n’est pas grave... Ils reviendront. » murmura-t-elle. « Et toi ? Comment te sens-tu ? Tu as trouvé de quoi manger ? Quelqu’un a regardé ta jambe ? »
Il avait l’air étonnamment calme en dépit des épreuves difficiles qu’il avait traversées seulement quelques heures plus tôt. Les enfants étaient dotés d’une incroyable résilience... Galathée espérait pouvoir faire preuve d’autant de force le moment venu.

[Quête : l’invasion des ombres]
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-Je… ça va… dit-il, son sourire se fasant soudain beaucoup moins large. Ma jambe me fait un peu mal, mais… On me la soignée au parc, vous… tu te souviens ? Ici, personne a eu le temps, y a tellement de monde ! Mais on m’a donné une pomme.
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Il observa le visage de Galathée, se mordit les lèvres, pris unr profonde inspiration. Puis se lança.
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[font=&quot]-Tu as vu mes parents ?

Il n'y avait plus trace de joie sur son visage. Juste de l'inquiétude, de l'angoisse.
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Quête: L'invasion des ombres.

Galathée se glissa sur le matelas, à ses côtés, décida de ne pas tergiverser.
« Je ne les ai pas revus, pas encore, non... Je suis allée sur les quais, pour libérer des esclaves... Je pense que ton père a dû retourner chez vous pour y chercher ta maman. »
Elle grimaça furtivement.
« Ton père est un homme courageux, et fort. C’est un homme bien, aussi. Il... Il reviendra sûrement bientôt... quand tout ceci se sera... un peu tassé... Il sait que tu l'attends. Il n'oubliera pas. »
Levant les yeux, elle regarda une seconde par la fenêtre. Quelle était la valeur de cet abri ? Quelles étaient les chances réelles que l’ennemi ignore encore leur présence en ces murs ? Elle frisonna et pinça les lèvres.
« Nous devons lui faire confiance, à présent, et ne pas nous inquiéter pour les choses qui nous échappent. »

[Quête, l’invasion des ombres]
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Victor s’affaissa et baissa la tête, contemplant ses mains comme si c’était la première fois qu’il les voyait.
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-C’est pas facile, murmura-t-il. En plus, on peut rien faire pour s’occuper.. On fait qu’attendre. Et je crois que j’ai raconté à tout le monde ce qui s’est passé après qu’on soit partis de chez moi… Y en a qui ont écouté deux fois, mais je crois que ça leur suffit, maintenant.
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Une idée sembla alors lui traverser l’esprit car il se redressa légèrement et regarda Galathée.
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[font=&quot]-Comment ça se fait que vous connaissiez le Monstre ?[/font]

Quête: L'invasion des ombres.

La question prit la rôdeuse complètement au dépourvu. Elle ouvrit une bouche ronde, dévisagea ce petit bout d’homme qui la regardait sans frémir, avec sa mine tirée et son courage démesuré. Il lui avait fait confiance, en plaçant sa vie entre ses mains. Elle devait pouvoir en faire de même. Un instant, elle pensa éluder la question, puis la digue se rompit.
« Oh... C’est une histoire ancienne... » murmura-t-elle, sentant la nostalgie lui grimper le long des tempes, lui saisir la gorge et les tripes. « Mais en fait, je ne suis pas certaine de connaître le monstre. Pas vraiment. Je pense... je pense que c’est... ou que c’était... qu’il est apparenté, une ombre, ou une empreinte... d’une personne que j’ai connue à Manost, il y a... oh... il y a longtemps, maintenant. Du temps où tu étais encore petit... Cette personne... J’ai appris qu’elle était ici en arrivant à Luménis. Prisonnière du seigneur Nwalk. Je pensais pouvoir lui venir en aide mais... mais la résistance ne voulait pas s’encombrer de nos petites... de ces... du coeur, sans doute. C’était un homme... un elfe... à mille lieues d’un monstre. Alors je ne sais pas bien... Je ne pense pas qu’il puisse être devenu un monstre. A moins qu’il ne soit mort... C’est bizarre. Je n’ai même jamais pensé qu’il puisse être mort... »
Elle réprima un frisson, et une émotion assassine.
« En même temps, je pense que nous nous sommes reconnus. Je le crois en tout cas. Je ne sais pas si c’était Taliesin. Peut-être que j’avais envie de le voir, alors je l’ai vu... »
Elle haussa les épaules, se tourna vers Victor, embarrassée.
« Je suis désolée. Tout ceci ne doit pas faire grand sens pour toi. Je n’ai pas vraiment eu le temps d’y réfléchir... Je ne sais pas si le monstre est mon ami. Je ne sais même pas ce qu'il est. »

[Quête : l’invasion des ombres]
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Victor observait la rôdeuse avec de grands yeux. Depuis qu’il l’avait rencontrée, elle avait toujours gardé son calme, conservé le contrôle d’elle-même, même aux pires moments de leur périple au cœur du quartier martyrisé. Il n’avait pas tout saisi de ce qu’elle venait de dire, mais il la voyait bouleversé, et cela l’effrayait, le peinait et lui faisait amèrement regretter d’avoir posé la question.
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-Pardon… je voulais pas te rendre triste… souffla-t-il en posant une main timide sur son bras. Mais... C’est peut-être bien le monsieur que vous connaissiez avant. Il avait des oreilles pointues, je crois. Et puis, ce n’est peut-être pas devenu un monstre… même s’il n’est pas… pas très beau. Parce qu’il nous a aidés. Il a été gentil avec nous. S’il avait pas tué les gardes, ils…
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[font=&quot]Les mots s’étranglèrent dans sa gorge, et il resserra sa prise sur le bras de Galathée.[/font]

Quête: L'invasion des ombres.

Galathée prit l'enfant dans ses bras et le serra tout contre elle.
" Nous sommes vivants. C'est tout ce qui compte. " murmura-t-elle. " Nous sommes blessés, mais ils ne nous ont pas touchés au fond de nous-mêmes. Ils ne peuvent pas nous atteindre. Et ils sont morts."
Elle ne savait pas exactement pour qui elle disait ces mots, mais elle les laissa sortir à mesure qu'ils lui venaient.
" Nous sommes encore debout, Victor."

[Quête : l’invasion des ombres]
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HRP : Sortez mouchoirs et violons !

-Pas moi… murmura Victor, son visage pressé contre l’épaule de la rôdeuse. Je suis assis, à cause de ma jambe.
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Galathée ouvrait la bouche pour préciser sa pensée lorsque l’enfant leva vers elle son visage ou les larmes avaient tracé des sillons clairs au milieu de la couche de suie. Il affichait un mince sourire, et la jeune femme sut qu’il avait très bien compris ce qu’elle voulait dire. Mais le sourire disparut, tel les rayons du soleil masqués par un nuage noir, et il ne resta plus que de la grisaille sur les traits fatigués de l’enfant.
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Il reprit la parole d’un voix tremblante, parlant lentement, comme s’il cherchait ses mots, comme s’il se débattait avec des concepts qu’il était bien trop petit pour appréhender complètement.
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-On est vivants… Mais les gardes voulaient pas juste nous tuer. Sinon, on serait morts. C’était pas comme à la guerre, quand les soldats tuent les autres soldats pour gagner. On était pas des soldats, nous. On pouvait rien leur faire. Enfin moi… Ni la grand-mère, dans la maison en feu… Mais les gardes… Qu’est-ce qu’ils voulaient faire ? Pourquoi ils avaient l’air de jouer avec nous ?
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Il s’interrompit, déglutit péniblement, puis poursuivit, dans un souffle.
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-Le mien.. Il… Il m’a enlevé mes habits, puis il a joué avec son couteau, comme si il voulait me couper avec… Il… Plus je criais, plus j'avais peur, plus ça le faisait rire. Puis ça a eu l’air de le lasser et il a voulu... Mais le monst… le monsieur que vous connaissez est arrivé. Et lui, il les as tués tout de suite. Il a pas essayé de jouer avec eux. Alors qu’on dit que c’est lui, le monstre. Mais c’est eux, les monstres ! Pourquoi ils faisaient comme s’ils s’amusaient ? Pourquoi ils ont pas juste essayé de nous tuer ? A cause de mon papa ? Mais pourquoi ils faisaient ça à plein de gens, alors ? Juste pour rigoloer, comme quand des enfants s'amusent à arracher les ailes des insectes ?
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[font=&quot]Les questions se bousculaient de plus en plus vite dans sa bouche. Débordé, perdant le fil de ses pensées bouillonnantes, il se tut à nouveau et, cette fois, ne reprit pas la parole. Il enfouit au contraire sa tête contre l’épaule de la jeune femme, et elle sentit ses larmes couler à travers l’étoffe de sa chemise.[/font]

Quête: L'invasion des ombres

HRP: c'est de la triche d'annoncer la couleur !!

Galathée le laissa pleurer de tout son saoul, cherchant des mots sans les trouver, des explications élusives, et laissa les gestes parler plutôt que la langue. Lui caressant doucement les cheveux, qu’il avait sales, couverts de suie, de sang, de sueur, Galathée songea à sa propre apparence, à leur mine qui les désignait comme des rescapés de l’enfer, et elle frissonna une seconde.
« Je n’ai pas de réponses à ces questions... La guerre et... le pouvoir... font des choses aux gens. Comme s’ils libéraient en eux des démons... Peut-être les Dieux maléfiques trouvent-ils alors une entrée facile en leur âme, quand le sang, la violence et l’injustice règnent en maître... Mais ces monstres... ils n’ont pas leur place dans cette ville, et c’est pour ça qu’aujourd’hui la ville brûle. Pour en chasser les monstres à tout jamais. »

[Quête : l’invasion des ombres]
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Dans la petite pièce, au premiers étage, Galathée sentit Victor se détendre progressivement, au fur et à mesure que la tension accumulée au fil de la journée s’écoulait avec les larmes. L’enfant, s’essuyant les yeux, finit par relever la tête et lui adressa un pale sourire.
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-Il… il n’y a pas que des dieux méchants, heureusement, dit-il d’un voix encore mal maîtrisée. Les gens disent que les bons dieux ont arrêté de regarder Luménis, qu’ils se fichent de ce qui nous arrive. Moi, je crois pas. Sinon, il y aurait plus personne de vivant, personne aurait combattu contre les gardes. Et personne aurait essayé d'aider ceux qui peuvent pas se défendre.
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IL poussa un long soupir vibrant, dévisagea la rôdeuse, puis lui demanda :
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-Qu’est-ce que tu vas faire, maintenant ?
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</o> Au rez-de-chaussée, l’ambassadeur et l’aristocrate s’étaient éloignés de Magariz, afin de le laisser reprendre quelques forces. Ils discutèrent longuement, le vieil homme devant parfois s’interrompre pour donner des consignes à ses serviteurs. Finalement, l’ambassadeur revint auprès de Magariz.
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[font=&quot]-Notre hôte va nous aider à contacter d’autres nobles du quartier pour tenter de les ralier à notre cause. Je l’accompagnerai dans ses démarches. Vous pouvez vous joindre à nous, si vous voulez. Mais je connais votre désir de rejoindre les vôtres aux quais militaires. Rien ne s’oppose à ce que vous le fassiez, alors, n'hésitez pas, si c'est là la conduite que vous dicte votre coeur. Ils auront à n'en pas douter besoin de toute l’aide nécessaire.[/font]

Quête: L'invasion des ombres.

La jeune femme sourit doucement au petit garçon. Dans le désordre, elle aurait aimé manger, dormir, se laver, regarder les nuages défiler dans le ciel, toucher le tronc d’un arbre...
« Je pense que... le plus logique serait que je retourne aux quais. Je ne sais pas ce qu’il s’y passe, mais... les fumées noires qui montent du ciel n’annoncent rien de très bon, et chaque... chaque guerrier y a sa place... »
Elle leva un doigt, anticipant sa réponse.
« Je t’arrête tout de suite. Je sais que je n’ai pas l’air d’une combattante bien aguerrie, mais je me défends. J’imagine que je devrais y aller. J’aurais aimé pouvoir aider les gens, ici, mais... mais c’est prématuré tant que nous n’avons pas pris un meilleur avantage. Si la bataille des quais tourne à notre désavantage... »
Elle serra les poings.
« Mais ça n’arrivera pas. Je vais y retourner. »
Elle lui sourit à nouveau, espérant refléter une certitude et une confiance qu’elle ne ressentait en rien, et se leva.
" Tu m'attendras ici ?"

[Quête : l’invasion des ombres]
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Victor fit signe que oui.
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-En même temps, je peux pas aller très loin tout seul... fit-il, une lueur espiègle dans le regard. J’espère juste que le plancher sera plus solide ici que dans la maison en ruine. C'est dangereux de t'attendre !
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La rôdeuse se rendit compte que, sous ses dehors faussement détachés, le gamin n’en menait pas large. Mais le fait qu’il fasse bonne figure était encourageant.
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-Fais attention à toi, murmura-t-il en levant la main en guise de salut.
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Quête: L'invasion des ombres.

La rôdeuse hésita une seconde, réprima son envie de retourner vers lui, et se contenta de lui rendre son geste, souriant avec chaleur et optimisme.
« Je ferai ça. » murmura-t-elle.
Puis elle s’esquiva dans les escaliers. A mi-parcours, elle retrouva la femme qui campait entre deux marches, comme un cerbère désoeuvré.
« Je sais que je ne peux pas vraiment vous demander ça... » commença Galathée.
« Allez-y toujours. » répondit l’autre, sans animosité.
« Il y a un petit garçon, dans la chambre au bout du couloir du premier... Celui qui raconte des histoires... Il est assez éprouvé et... j’aurais voulu être sûre qu’il ne reste pas tout seul. » fit la rôdeuse.
La Luménienne lui sourit doucement, à la fois accablée et stoïque.
« Nous sommes tous éprouvés, mademoiselle... et aucun de nous ne désire rester seul. Ne vous inquiétez pas pour lui... Les autres orphelins sont probablement déjà de retour. »
Orphelin, mais ce n’est pas un orphelin, songea la jeune femme, mais elle acquiesça sans rien ajouter et retourna dans la cour.

Là, elle retrouva l’ambassadeur et Magariz.
« Je ne sais pas quelles sont vos intentions... Pour ma part, j’imaginais rallier les quais au plus vite. » commença-t-elle.
« Vous tombez bien. Notre ami ici présent escomptait emprunter la même route... » répondit l’ambassadeur, avant de se tourner vers le guerrier luménien.

[Quête : l’invasion des ombres]
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Emergeant des profondeurs du parc verdoyant, Galathée arriva aux abords de la demeure du vieux noble qui avait accepté de recueillir les réfugiés provenant du quartier ouest. Les gardes, à la porte latérale, étaient les mêmes que la veille : ils la saluèrent en souriant et la laissèrent passer. S'ils n'osèrent pas lui poser de questions, elle vit qu'ils en mourraient d'envie...
<o></o>
Peu désireuse d’être soumise à un long interrogatoire sur les événements du jour précédent, la rôdeuse se coula dans la maison aussi discrètement que possible. Elle se rendit vite compte, cependant, que ses précautions étaient inutiles : montait de la salle de réception une discussion animée. Reconnaissant les voix du propriétaire des lieux et de l’ambassadeur de Manost, elle tendit l’oreille : visiblement, ils avaient été informés de la victoire et débattaient de la meilleur manière de soulever le quartier sud. Les choses paraissaient en bonne voie, à en croire leur enthousiasme.
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S’aventurant plus avant dans la maison, Galathée nota qu’elle était beaucoup moins surpeuplée que la veille : personne n’était assis dans les couloirs, ni dans l’escalier. Sans doute des bonnes volontés s’étaient-elles proposées d’héberger certains des réfugiés.
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Parvenue à l’étage, elle s’approchait de la porte de la petite pièce où, la veille, elle avait découvert Victor, lorsque celle-ci s’ouvrit et qu’en sortit une femme âgée. L’apercevant, la vieille posa un doigt sur ses lèvres et l’attira vers une autre chambre.
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-Désolée, m'dame, fit-elle, c’était pas très courtois d’ma part, mais... Les p’tits dorment enfin tous. Et c’est un miracle. Y en a qui ont fait des cauchemars toute la nuit, et leurs cris réveillaient les autres... Pas étonnant, avec tout ce qu’ils ont vu et subi... Mais ils dorment maintenant, c’est l’essentiel. Faut donc pas les déranger. A moins, bien sûr, que vous v’niez en chercher un...
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S’interrompant, elle dévisagea Galathée et sembla seulement prendre conscience de son apparence.
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-Vous... Vous êtes la Dame aux Corbeaux, non ? La rôdeuse acquiesça. Ah, j’aurais dû m’en douter... L’ptit Victor arrêtait pas de dire que vous ou ses parents reviendriez le chercher. J’osais pas le contredire, l’avait tellement l’air d’y croire... Mais, j’l’avoue, j’étais pas très optimiste... J’suis contente d’avoir eu tord, en tout cas ! Vous pouvez allez le chercher, si vous voulez : l’est tout au fond de la pièce. Mais faites pas de bruit, s’il vous plait.

Quête: L'invasion des ombres.

HRP: Défi relevé

Galathée hésita une seconde, puis décida de laisser l’enfant dormir encore quelque peu. Après tout, la journée promettait d’être rude et qui sait quelles contrées il arpentait dans son sommeil... L’esprit humain avait des ressources inespérées pour se protéger du réel. Elle regagna le couloir, toussa deux fois dans son poing et tenta de parler.
« Excusez-moi... » murmura-t-elle, à la fois soulagée et horrifiée par le filet de voix qui s’échappa de sa bouche.
La vieille se retourna et sourit amicalement, comme pour l’encourager.
« Je cherche... un endroit pour me laver ? »
« C’est un étage plus haut, la porte du fond du couloir. C’est la salle de bain d’la défunte dame du maître de ces lieux... C’est un homme très généreux. Mais je parle, je parle... Montez donc. J’vais vous envoyer de l’eau. »
« Je peux m’en ch... »
« Chhh... Montez, j’vous dit. »
Galathée acquiesça avec un sourire reconnaissant et grimpa les escaliers sans se faire prier davantage.

La petite salle d’eau était coquettement meublée, mais le capharnaüm qui y régnait trahissait le nombre de réfugiés qui s’y étaient rafraîchis. Ils avaient pourtant tenté de dissimuler leurs traces au mieux, repliant les serviettes et empilant les pains de savon dans un panier tressé. Mais certains petits signes ne trompaient pas, et le sol était encore couvert d’une couche d’eau glacée. La rôdeuse retira ses bottes et les déposa près de la porte. Un mouvement la surprit sur sa gauche et se retournant vivement, elle se retrouva face à un grand miroir qui lui renvoyait, impitoyable, son reflet en pied. Elle baissa les yeux, attrapa une serviette abandonnée, et la jeta sur la surface argentée, la reléguant aux ténèbres.
La porte s’ouvrit alors sur deux jeunes gens qu’elle ne connaissait pas. Ils portaient chacun deux grands seaux d’eau chaude qu’ils déversèrent dans le tub, avant de se retirer sans rien dire. Sans doute avaient-ils eux aussi entendu parler de la Dame aux Corbeaux. Dans les circonstances présentes, Galathée n’avait pas vraiment envie de bavarder, cela l’arrangeait donc bien. Elle remarqua cependant que l’un des deux lui avait déposé une tenue de rechange, un ensemble de fine facture, sans doute l’ancien costume de selle de la noble dame qui avait vécu ici, et elle fut malgré elle touchée par cette délicate attention.
Elle finit par se déshabiller rapidement, jeta ses vêtements déchirés et maculés en pile contre le mur, et gagna le refuge de l'eau sans attendre, et surtout sans regarder. La surface claire se troubla instantanément, grisée par la poussière des combats, rougie par le sang versé. Le tub n’était pas très grand, mais la chaleur de l’eau agit comme un baume bienfaisant sur les muscles courbaturés de la rôdeuse, qui se sentit gagnée par une étrange langueur. Au prix d’une savante contorsion, elle s’immergea jusqu’au sommet du crâne, lâcha quelques bulles, puis agrippa un pain de savon qui traînait et entreprit de se décrasser. Elle se savait sale, mais la couleur qui prit l’eau au fur et à mesure de son ouvrage la dégoûta franchement, si bien qu’elle finit par se redresser et quitter le tub avec une grimace.
Elle se sécha rapidement dans l’air froid, et revint au miroir, hésitante. Mais c’était le moment d’affronter, tout, et elle retira la serviette d’un geste brusque, comme pour se défier de revenir sur sa décision.
La vision lui arracha un hoquet et elle resta pétrifiée une minute entière, soudain insensible au froid qui lui hérissait les poils. Du bout des doigts, elle effleura les zones les plus meurtries, impressionnée par la résilience du corps humain, par ses capacités de survie, par la métamorphose qu’il pouvait subir pour s’adapter au mal. Et par la certitude que le corps, au moins, récupérerait...
Puis elle se détourna et s’habilla rapidement.

Galathée regagna ensuite la chambre des enfants, mal à l’aise dans ses vêtements de trop bonne qualité. Mais lorsque Victor posa sur elle des yeux ensommeillés, elle oublia bien vite ces tracas accessoires. Elle réalisa aussi que la valériane avait cessé de faire effet, la trahissant au moment le plus crucial. Serrant les lèvres, elle passa un bras sous les épaules de l'enfant, et le souleva pour l'emmener au dehors, vers une pièce désertée et les indispensables révélations.