La Couronne de Cuivre

Quête : la Quête !!?

Les aventuriers furent téléportés sans douceur dans une petite ruelle qui aurait pu être banale. Seulement, elle était bordée de toutes parts par de grandes grilles en recouvertes de pyrite clôturant des parcs à l’herbe pas qu’un peu trop verte. Au loin, on pouvait distinguer, au bout de chaque allée partant à angle droit depuis la ruelle, des villas démesurément imposantes avec surenchère de balcons, tours pointues et colonnades gigantesques. Pourtant, les habitations semblaient, même d’ici, manquer de profondeur. Elles en mettaient plein la vue à condition de ne pas chercher à en faire le tour : les intrépides s’y étant risqué n’ayant plus jamais été revus.

Les quatre compères en costume ridicule n’eurent pas longtemps pour profiter de ce nouveau décor à l’apparence grandiose. Dans leur dos, un bruit de pas précipités se fit soudain entendre suivi de force hurlements et aboiements sinistres.

Quelqu’un courait de toutes ses forces pour atteindre une petite porte ménagée dans la palissade ostentatoire. Trois formes hirsutes poursuivaient le malheureux et réussirent presque à l’atteindre avant que la porte ne s’ouvre devant lui. Deux molosses pillèrent sur le gravier de l’allée mais le troisième fut emporté par son élan à la suite de sa proie qui franchissait la limite de la propriété. A l’instant où ses mâchoires auraient du se refermer sur la jambe du nouveau venu, le mâtin se transforma en petite peluche mignonne avec un cœur rose brodé sur la poitrine…

HRP : Jack, à toi l'honneur !

C’est dans un saut latéral vrillé digne du meilleur athlète des Jeux Amniens que Lefou passa la porte, lançant son strident
« Tiiiirlipimpon ! » au molosse qui avait essayé de lui arracher un lambeau de son beau mollet musclé enveloppé dans un très seyant pyjama blanc à rayures bleues.
La chute se termina dans un tas de foin posé sur le sol, d’où Lefou émergea les cheveux plein de paille, pour découvrir devant lui un groupe de personnages tous plus louches les uns que les autres, et pour le moins mal fagotés.
« Méchant, méchant chien ! » Lefou souffla sur une de ses mèches hirsutes pour en chasser un brin de paille, se mit sur pieds d’un bond, avant de retomber tête la première dans le tas de foin, glissant jusqu’au bas en se tortillant comme un ver, tout enserré dans une camisole blanche qu’il était, cette même camisole dont il n’avait point réussi à se départir depuis sa querelle avec Maac Gaïver au sujet de la dissection de son perroquet.
« Ahhhhh ! Retirez-moi çaaaa ! »
Le hasard voulut qu’il ait roulé cul devant et tête dans le foin, ainsi on ne voyait plus de lui qu’un derrière rayé s’agitant vainement dans le fourrage.

Quête : la Quête !!!

C’est ce moment que Diabolo choisit pour réapparaître à quelques mètres du petit groupe. Le diablotin portait des lunettes noires censées le faire passer incognito en ce lieu de plus en plus étrange. Il se parlait à lui-même tandis qu’il s’approchait du petit attroupement formé par les aventuriers autour du tas de foin gigotant :

- Pile à l’heure ! Les barrières faiblissent… parfait, parfait. Mwahahah !

Diabolo resta un instant à observer les jambes du Fou trottiner dans le vide avant de reprendre la parole à haute voix :

- Aidez-le, il nous accompagne : il ne sera pas de trop là où nous nous rendons.

Brusquement libéré de cette horrible camisole, Lefou déplia allègrement ses bras, s'ébrouant les cheveux, avant d'esquisser une grimace, un oeil fermé : quelque part dans les méandres incertains de son cerveau, quelque chose lui soufflait qu'un instant plus tôt, il se trouvait encore ailleurs.
Dans ses souvenirs, il sautillait sur la route, sautant à pieds joints dans les flaques d'eau, chantonnant "Tirlipimpon..."(et vous connaissez la suite) et tentant d'attraper les oiseaux malgré ses bras emprisonnés. Il n'y avait personne, certainement pas tous ces types autour de lui et cette espèce de diablotin à lunettes...La seule question qui découla naturellement de cette constatation fut donc celle-ci, tandis qu'il toisait Borgporkniel par en dessous, l'oeil torve:
- Rien n'est meilleur qu'une bonne marmelade d'épinards au poivre. Et vous, madame, vous aimez?"

"Moi, je préfère le sel ... C'est tellement plus doux le sel que le poivre. On peut faire beaucoup de choses avec le sel et même saler et saler, c'est mon dada. Un peu de sel, c'est la neige sur la terre, le monde réinventé. C'est comme tracer des sillons dans sa purée. C'est aussi doux que dire chalbalabala. Une pluie de coton dans la bouche. Un rigodon, rigue don don, rigue don daine ... La digue, la digue du ... Oh, mais c'est que je suis parfois poète !"

Elle regarda autour d'elle et se tourna vers Borgporkniel avant de décréter :

"Et puis d'abord, mon père mange plus de grenouilles que le tien"

Quête : la Quête !!!

A la suite de cet échange poivre et sel qui laissa perplexe Diabolo lui-même, le petit groupe se mit à cheminer dans l’étrange ruelle à sa suite. Aussi longtemps qu’ils marchèrent, ils devisèrent pour tuer le temps (le pauvre). Rien ne semblait changer dans le décor entourant leur progression. Toutes les maisons semblaient rigoureusement identiques et jamais une rue ne croisait la leur. Heureusement, ils ne firent aucune autre mauvaise rencontre en chemin.

Le diablotin esquivait soigneusement les questions sur leur destination et l’impatience montait doucement chez les aventuriers quand enfin un changement se produisit : l’allée qu’ils suivaient jusque là déboucha sans prévenir sur une place entourée de hauts bâtiments luxueux. L’endroit fourmillait de l’activité fébrile d’une centaine de calèches entourés de dizaines de valets. Une file continue d’invités se pressait sur les marches couvertes d’un tapis rouge du bâtiment faisant face au groupe hétéroclite mené par le petit monstre volant.

En haut des marches, des golems vérifiaient les invitations des personnes se présentant aux portes. Les importuns ne possédant pas leur précieux césame étaient refoulés sans ménagement. Diabolo fit signe aux cinq aventuriers costumés de s’arrêter à bonne distance de la volée de marches majestueuses :

- Nous devons impérativement entrer dans ce bâtiment. C’est là qu’a lieu la soirée de remise des Awards. Je me dois d’être honnête avec vous : nous ne sommes pas là pour participer aux réjouissances. La célèbre MeuJeu Sally Tin ne manquerait jamais cette occasion d’apparaître en public. Elle ne quitte que très rarement sa retraite et c’est peut être notre seule chance de l’approcher alors ne la ratons pas. Votre objectif est de trouver un moyen de vous rendre chez elle, ici à Follywood. Procédez comme vous le souhaitez : tentez de la séduire, de sympathiser, vous pouvez aussi l’aborder pour vous faire engager dans sa nouvelle production ou alors vous rendre dans sa loge, peut être y trouverez vous une clé ou un laisser passer. Mais tout d’abord, il va falloir tromper la vigilance des gardes, sans invitation cela va sans dire. C'est le moment de faire marcher la masse de chair qui comble le vide entre vos oreilles !

Le jeune Pip n'avait strictement rien écouté du monologue agaçant de l'espèce de monstre ailé. Il était perdu dans la contemplation des ignobles bâtiments décorés selon les normes humaines de couleurs proprement moches et criardes, mais qui lui plaisaient fort bien. Il fallait dire qu'il ne dépareillait pas l'ensemble, avec ses vêtements de fillette, surmontés d'une petite tête au gros nez et aux cheveux filasses.

Ce n'est que lorsque le diablotin eut terminé ses explications qu'il s'arracha à ses rêveries, pour bredouiller bêtement, tout en criant presque :

"Hein ? Euhh, quoi, oui ? Séduire les gardes ?"

Le stupre, la luxure, l’envie, l’orgueil, ces êtres suintaient le vice par tous les pores de leur peau, et Borgporkniel ne put s’empêcher de poser la main sur la garde de sa fidèle Grattepuces, épée à deux mains spécialement ointe pour pourfendre les scélérats oisifs et pervertis de ce monde (et des autres, d’ailleurs).
« Je pourrais nous frayer un passage jusqu’à la porte à coups de lame. Je doute que ces oripeaux cachent autre chose que des culottes de dentelle. La difficulté sera de neutraliser les gardes, mais je peux prendre celui de droite… »
Il baissa les yeux sur l’engeance qui l’accompagnait.
« Et vous, monsieur le lézard, vous chargerez de celui de gauche. Ce sera l’affaire de quelques minutes. Tyr exige que nous nettoyions les Royaumes de cette racaille, et c’est mon devoir d’exaucer sa volonté. Nous serons à l’intérieur avant que ces manants n’aient compris qu’ils viennent de passer de vie à trépas. »

"Et je pourrais aussi faire diversion ! Vous les auriez plus facilement ... Le soleil du midi m'a soufflé une petite idée très rigolote. Et mon pouvoir de séductrice implacable embaume la sérénité ostentatoire de mes ténébreuses chaussettes. Elles sont très belles vous savez. Ils soufflent un air énigmatique qui fait tourner les ailes de moulins. Et rend le paysage bucolique. Comme mon cerveau d'ailleurs. J'aime mon cerveau vous savez ?"

Elle se tourna vers Pyp et lui décocha un regard lubrique.

L'intéressé ne l'était pas, mais alors là, pas du tout. Cette timbrée avait le cerveau - qu'elle chérissait tant, apparemment - aussi désordonné que sa coiffure... et ce n'était peu dire. Il recula d'un bon pas, tout en essayant de n'y rien paraître, puis fit mine de s'intéresser aux propos du paladin, même s'il ne semblait guère plus sensé.

"Je n'ai guère de talents au combat, mais je puis les distraire en chantant quelque chansonnette qui ont un certain succès auprès des miens..."

Il avait en tête cette fameuse chanson sur un nain parti creuser des mines dans une forêt.

Lefou, impressionné par tout ce baratin qui fusait autour de lui comme les étoiles qu'il lui arrivait de voir quand il avait une crise d'hystérie, ferma un oeil, fit la grimace, pour essayer de comprendre ce qui venait d'être dit. Son regard s'attarda sur la folle aux cheveux noirs puis sur le nabot qui parlait à la grande perche armée de cette espèce de braquemart tout moche. Un peu plus loin, une chose couverte d'écailles...Etait-il tombé chez les fous?
Comme il se trouvait une flaque tout près de lui, la chose s'imposa d'elle-même, et à pieds joints, Lefou y sauta, en plein milieu, arrosant ses compagnons.
- Rigue dondon, rigue don daine! Tu sais chanter, femme! J'aime bien!" hurle-t-il à Bellatrix avant de se retourner vers les golems, un oeil fermé:
- Qu'est-ce qu'on attend pour ouvrir ces boîtes de conserve?"
Se tournant vers Borgporkniel :
- Allez donc de l'avant, madame, avant que je ne vous morde le fondement! Ohh..Un poney mauve, là dans le ciel, il galope..."

Quête : la Quête !

[Voix off]Pour gagner du temps et surtout éviter de gâcher de la pellicule en une scène de combat ratée, Diabolo m’a demandé de décrire le résultat de « l’initiative collective de son groupe de dingue » :

Brogporkniel fut le premier à charger bien entendu. Que ce fut son sens de l’honneur tout paladinesque ou son goût immodéré pour la baston de ses origines orques, il fonçât comme un dingue avant de s’apercevoir que les autres avait un peu tardé à le suivre. Il fut donc le premier à mourir sans gloire dans un combat contre deux golems de pierre…[/voix off]

- Merci mon vieux ! Voilà qui devrait leur servir d’avertissement. Bon, vous autres, vous avez toujours l’intention d’attaquer ? Vous tenez vraiment à ce que je vous rappelle que la plupart d’entre vous n’est même pas armé ? Et puis, flanquer la frousse à tous les invités n’est pas forcément le meilleur moyen d’approcher une star discrète comme Sally Tin, oui ?

Lefou, interloqué par la masse engoncée dans son armure qui gisait par terre, réduite à l'état de purée, s'approcha en sautillant, au nez et à la barbe des patauds golems (si tant est qu'ils aient une barbe et un nez) et attrapa la jambe de son ami Borgporkniel, entreprenant de le tirer au bas des marches; et tandis que la tête du glorieux paladin tressautait sur les marches en même temps que le reste de son corps, Lefou dansait la gigue, secouant ses membres revêtus de l'élégant pyjama rayé. Il finit bien par le lâcher, le macchabée, car il fallut bien faire un bond de côté quand un des golems avança son bras, aussi dur et épais qu'une massue.

Quête : la Quête !!!

Fort heureusement les dits golems n’étaient pas dotés d’une intelligence phénoménale, même pour leur espèce. Plutôt que de chercher querelle aux compagnons de la dépouille métallique, ils retournèrent à leur tâche de contrôle au sommet des marches, écrasant deux malheureux invités en retournant à leur poste de leur démarche maladroite.

Diabolo déroula un parchemin et y prit quelques notes en marmottant. D’un air dégoûté, il annonça à la cantonade :

- Malheureusement pour vous, votre camarade avait encore un point de Destin. Je suis tenu par les règles de l’ordre des Meujeux à le réanimer. Evidemment, je ne peux pas faire grand-chose pour l’armure et je pense que notre ami aura du mal à l’enlever désormais. Mais bon, c’est un paladin, cela ne devrait pas le gêner outre mesure, et en plus c’est un demi-orc, donc on peut supposer qu’il ne risque pas de rouiller en tentant de prendre un bain.

Sur ses bonnes paroles, Diabolo ramena à la vie le « brave » Brogporkniel qui ne tarda pas à remuer dans un grand bruit métallique.

Quête : the kate !

Bellatrix prenant son élan sauta dans les bras du fou et se mit à tempêter (que cela créa un tsunami à l'autre bout de la planète) et se mit à chanter :

"Femme qui pète au lit, qui pète au lit éprouve quatre jouissances. Elle bassine son mari, elle sent son cul qui chante !"

Puis prenant l'individu par la main, elle reprit :

"Yé, yé, yo, yo !!"

« Je suis un mort-vivant. » fit soudain une voix dépitée. « Tyr me pardonne, je suis une abomination. Je n’ai plus qu’à pleurer. »
Dans un grand bruit de ferraille, Borgporkniel s’assit par terre et se mit à sangloter à chaudes larmes. En réalité, il se moquait bien d’avoir une armure désormais cabossée : il lui suffirait de trouver un bon forgeron pour s’en débarrasser, et il y en avait plein de rechange dans les tiroirs du haut paladinat de Tyr à Feu-Superficiel. Il se fichait aussi d’être passé de vie à trépas à vie encore. Il avait vu un superbe tunnel, de la lumière, plein de voix sympathiques lui conseillant de rebrousser chemin, de tourner à droite, à gauche, de fermer les yeux et de tourner trois fois sur lui-même, et avait même un instant cru reconnaître la silhouette dure mais juste de son vieux mentor l’attendant en bout de couloir.
Non, en réalité, il pleurait la pauvre Gratte-Puces qui s’était triomphalement, mais avec casse, abattue sur l’épaule rocheuse d’un des golems, se brisant en exactement sept morceaux de poids équivalent. Il avait bien l’intention de les récupérer, cela dit. D’anciennes légendes sur des épées magiques reforgées au moment crucial où elles étaient susceptibles de sauver le monde lui trottaient encore dans le ciboulot.
Mais donc, n'étant pas matérialiste (les paladins ne le peuvent pas), il masquait son chagrin pour le morceau de ferraille éprouvé derrière un masque existentiel des plus tragiques.
Il avait, par ailleurs, complètement oublié l'objectif de leur visite en ces lieux de débauche.

Le petit-homme était devenu tout enthousiaste en voyant le paladin mort redevenu vivant, et il se mit à imaginer une ballade sur le sujet fort atypique :

"Avec le paladin mort
Et son dernier regard vague
Et des vagues de runes
Pour arrêter les ombres
Et son armure amochée
Que les golems froissent
Et qui aura à jamais le Cœur Radieux à ses trousses..."

Ce faisant, il hurlait son improvisation, au risque d'attirer sur lui les foudres du sujet de la chanson, tout comme l'attention des golems gardiens...

Quête : la Quête !

La petite bluette improvisée du barde en robe rose flashy laissa les golems indifférents, d’aucuns diraient même de pierre. Quelques invités ou badauds détournèrent cependant la tête dans la direction du groupe croyant avoir affaire à quelque célébrité excentrique. Un passant plus entreprenant que les autres osa même s’approcher, un carnet à la main. L’individu ne payait pas de mine tant de mise que d’apparence. Tout en lui, jusqu’à sa voix, évoquait un individu tout juste sorti de sa campagne profonde par quelque accident du sort :

- Vous devez être des aventuriers ! Vous avez déjà été à Athkatla ? Il parait que ses rues sont pavées d’or. Et en Ombreterre ? Il parait que c’est un endroit magnifique ! Où avait vous vu eu ces vêtements ? Je peux porter les mêmes ? Vous avez une fort joli épée Messire Paladin, avez-vous à l’affûter ? Voici mon carnet de voyage, j’y note toutes les rencontres que je fais, voulez-vous y inscrire un autographe : mon nom est Niiber.

Le flot incessant de paroles ne cessa que lorsque le jeune homme tendit son carnet rapiécé au demi-orc/demi-elfe, les yeux brillant d’espoir.

Borgporkniel releva les yeux et dévisagea l’incongru personnage qui venait de s’adresser à lui avec enthousiasme. Qu’il ait réussi à l’identifier comme paladin était déjà un miracle en soi, Tyr ne l’avait donc pas complètement abandonné ! Cela dit, le quidam devait avoir un sérieux problème de vue, car il n’avait plus d’épée, seulement un fourreau vide. Les sept morceaux de Gratte-Puces gisaient au pied des gardes golems, piétinés et piétinés encore chaque fois qu’un invité se glissait dans la salle des Awards.
« Vous voulez quoi ? » demanda le demi-elfe/demi-orque.
Comme l’individu gesticulait avec sa plume, Borgprkniel comprit qu’on lui demandait d’écrire, ECRIRE !!! , quelque chose dans le carnet.
Le sang se figea dans ses veines. Il avala sa salive avec bruit. Le vert sombre lui monta aux joues. D’une main un peu tremblante, il saisit la plume, ouvrit le livret au hasard, et avec concentration, il entreprit de tracer une lettre au hasard sur la page blanche. Il espérait que ce serait un B comme Borgporkniel, mais il n’en était pas certain. Peu importait. Il se sentait capable d’improviser une explication pour plus ou moins n’importe quelle lettre : N pour Niiber, P pour Paladin, T pour Tyr… Puis si le jouvenceau se montrait irrespectueux, il lui montrerait qu’un guerrier sacré du Dieu de la Justice sait aussi se servir de ses poings.
" Voilà jeune homme." fit-il ensuite d'un ton dégagé, refermant le livret avant que le touriste n'ait pu prendre connaissance de son élégante dédicace.

"Moi aussi, moi aussi je voudrais te demander quelque chose Niiber, s'égosilla Bellatrix, pourquoi Pim Pam et Toto, pourquoi quand il fait chaud c'est l'été et pas l'hiver, pourquoi on ne met pas de couches culottes au chiens, pourquoi mes vêtements sont noirs, pourquoi la mère Michelle, pourquoi la différence entre un canard et un canard est un canard, pourquoi la girafe, pourquoi on peut descendre par la montée, pourquoi l'eau de ma baignoire déborde quand j'y mets trop d'eau, pourquoi le pourquoi du parce que ? !"

L'instant d'après, elle hurlait.

"Ah, je me noie dans les questions, je me noie. Je ne sais pas nager !"

Elle se rua sur le fou et entreprit de l'escalader pour échapper à ses questions.

Quête : la Quête !!!

Niiber rayonna de joie lorsque Brogporkniel lui rendit son carnet. C’était la première fois de sa vie que quelqu’un acecptait d’y inscrire quelque-chose. Enfin, la seconde pour être plus exact : la première fois, un nain y avait rempli une longue page. Mais la vieille cuisinière de la Demeure un peu chère lui avait fait arracher, outré et le rouge aux joues, quand Niiber lui avait demandé de la lui lire. Les autres se contentaient généralement de jeter le carnet dans un tas d’ordure voire de lui taper dessus avec quand ils prenaient même cette peine.

Quoiqu’il en soit, les questions existentielles soulevées par Bellatrix ne manquèrent pas de l’intriguer. Il était sûr de tenir la réponse à certaines d’entre elles si seulement il parvenait à se remettre de l’émotion suscitée par le brave paladin.

Il se contenta donc d’un hésitant :

- Euh…

Avant de reprendre, plus assuré : dîtes, ça vous diraient de vous joindre à mon groupe ? On irait tuer des lapins ! Il y en a plein dans les cuisines pour la soirée de ce soir.

Il y avait beaucoup d'informations pour Lefou, tellement qu'il les occulta toutes, toutes sauf ce nigaud de Niiber qui brandissait son cahier sous le nez de Brogporkniel comme s'il demandait un autographe à Taum Crouze, la super-star de Follywood, et l'attrayante Bellatrix occupée à essayer de lui marcher sur la tête.
Et c'est tout en essayant de se dépêtrer dans les dentelles noires de la gueuse échevelée que Lefou décida de confier à Niiber la recette de la tarte aux pommes façon Maac Gaïver:
- Moi, mon cher, moi je vais vous donner la recette de la tarte aux pommes! Je suis sûr que ça pourra vous servir, il paraît qu'elle fait fuir l'horrible Tord-Néné, le korrigan des landes qui rôde la nuit pour tordre les nénés! Sans doute en aurez-vous besoin!"

Péniblement (car il avait une charge sur les bras, rappelons-le), Lefou entreprit de chausser ses lunettes à double-foyer et de sortir son carnet de voyage dans lequel il notait toutes les choses intéressantes (dont un portrait griffonné de tous ses compagnons de voyage où l'on trouvait un Borgporkniel représenté avec un groin de porc, ce gringalet de Pip affublé d'échasses pour compenser son handicap de taille, un Led Shark entouré d'un nuage figurant sa puanteur, et une Bellatrix avec plein de petits coeurs autour, la seule qui le comprenne dans ce groupe d'atrophiés du bulbe).
Or donc, il se trouvait que la gueuse gesticulait sur sa tête et Lefou parvint à peine à articuler sa recette devant un Niiber héberlué:
- "Recette de la tarte aux pommes anti-tordnéné, façon Maac Gaïver"
Donc vous prenez de belles pommes bien mûres, une pâte brisée, deux petits pots de compote de pommes, un peu de miel, un peu de canelle..."
S'ensuivit un interminable monologue sur la façon de mélanger le tout mais le poids de Bellatrix fut le plus fort et Lefou finit par s'étaler les quatre fers en l'air et dans sa chute, un de ses très seyants chaussons écossais s'en vint percuter le front de Borgporkniel, tandis qu'enseveli sous l'amas de dentelles noires, Lefou hurlait qu'on était en train de lui voler son pucelage. Il eut le temps de donner son accord à Niiber par de grands gestes désespérés avant de disparaître sous la forme noire.

"Je te suis!"
...
...
"Au secours!"

Pyp ne savait trop que faire. Sa chanson n'avait visiblement eu aucun effet, et le groupe qui l'accompagnait semblait au moins aussi dingue que l'abruti qui leur proposait maintenant d'aller massacrer d'innocents lapins...

"Mais ? Que vous ont donc fait ces pauvres bêtes ? C'est mignon, un lapin ! Les lapins ont le droit de vivre aussi !"

Puis il entonna une célèbre et redoutable chanson populaire :

"Ce matin, un lapin
A violé ma sœur
C'était un lapin qui,
C'était un lapin...
Ce matin, un lapin
A violé ma sœur
C'était un lapin qui,
Avait un..."

La suite fut malheureusement inaudible, car le grand benêt de paladin venait de marcher sur le pied du barde, qui hurla (encore plus fort) un "aïe" retentissant, et tous braquèrent le regard vers lui...

Rouge de honte, il ronchonna, à contrecœur : "C'est bon, on y va."

Quête : la Quête !!

Niiber n’en crut pas ses oreilles et ses yeux, qu’il frotta alternativement à plusieurs reprise. Il ne rêvait pas : les aventuriers étaient disposés à l’accompagner. Lui ! Son cerveau, mal préparé à encaisser pareil choc, il hésita entre sauter de joie ou s’enfuir loin de ces inconscients. Le résultat de ces tergiversations fut mitigé : il s’évanouit, un sourire béat aux lèvres.

Diabolo, impatienté, le baffa joyeusement afin de le réveiller. Et la vue d'un diablotin (particulièremenbt vilain de surcroît) en colère n'est pas le meilleur moyen d'émerger de ses doux songes. Le pauvre jeune homme y retourna donc derechef. Le petit monstre se tourna vers le reste de la Compagnie des Suivants de Niiber et, l'air peiné, s'adressa à la cantonnade :

- J'ai épuisé mon art médical, désolé.

Borgporkniel était encore sous le choc de la chanson outrancière qu’avait blatéré le barde minuscule lorsque les paroles du Diablotin lui pénétrèrent les circonvolutions cérébrales. N’écoutant que son courage et son devoir, surtout, il s’agenouilla (difficilement, vu que son armure n’était plus tout à fait aussi souple qu’au départ) près du malheureux Niiber et lui fit une apposition des mains sereine, béate, en un mot, paladinesque, englobé d’une lueur bleuâtre des plus seyantes, alors que mille anges divins, mille séraphins, volaient alentours de cet instant de grâce.
« Mon frère, mène-nous aux lapins… » murmura-t-il, pénétré.

Quête : la Quête !!

Le jeune Niiber fut soigné de tous ses maux par l’intervention bénie du servant de la Justice et de la Lumière. Son réveil aurait donc du être marqué par la joie de voir disparaître un furoncle douloureux du côté de son fond de culotte. Cependant… L’inexpérimenté Niiber dont l’imagination débordante l’avait amené à combattre victorieusement dragons liches et golems ne put supporter la vue du géant engoncé dans un carcan métallique et auréolé de bleu qui était penché sur lui lorsqu’il ouvrit les yeux.

Il ne tarda pas à les refermer brusquement, dans ce qui commençait à devenir un inquiétant penchant pour les évanouissements chroniques…

" Oh ben ça..." fit Borgporkniel, dépité. " D'habitude, ça marche du tonnerre..."
Comme ses joyeux compagnons semblaient interdits, pétrifiés voire absolument incapables d'échapper à leur inertie (momentanée, cela s'entend), il se pencha à nouveau sur le petit Niiber, l'attrapa par le col, et avec une douceur peu commune pour un être de son gabarit, il lui flanqua une paire de claques intègres et justes, pleines de bonté et de droiture. Le genre de claques qu'on préfère au baiser langoureux d'une damoiselle, c'est dire.
" Les lapins, mon ami ! Les lapins !" dit-il au passage, non sans adresser une prière fervente à Tyr, qui dans sa rectitude, ne manquerait pas de réveiller le manant.

Le barde acquiesça.

"Oui. D'autant qu'il se fait faim, depuis le temps que je n'ai pas mangé... au moins voici deux heures ! Un bon petit lapin rôti, c'est délicieux... menez-nous, très cher ! Sans quoi... je vous entonne une autre comptine enfantine, enfin, au moins aussi innocente que la précédente !"

Il ponctua ses propos d'un sourire un rien dément, puis partit d'un petit rire jovial.

"Allez, je blaguais, ne prenez pas cet air ! Je saurai me tenir. Mais conduisez-nous. J'ai grand faim."

Quête : la Quête

Niiber émergea de ses rêves d’aventures héroïques pour se retrouver au centre des attentions du groupe de dégénérés entourant un Diabiolo de plus en plus impatienté. Il se releva et se composa une bonne mine… (Rayez les mentions inutiles)

1. pour ne pas déplaire à un colosse verdâtre capable de l’étouffer avec ses débris de dents,
2. pour ne pas subir l’absence de talent apparent d’un barde sur le retour d’on ne sait quel taverne campagnarde,
3. parce que c’était son premier semblant d’aventure et que c’était quand même la classe !

Remis de ses émotions, il mena le groupe à travers pas moins de huit portes en bronze toutes plus moches les unes que les autres pour finalement déboucher à l’arrière de la bâtisse dans les relents de crottins et du déjeuner servi aux domestiques (sans pouvoir faire la distinction de l’un avec l’autre)
Le jeune homme ouvrit une porte en planches de bois ajourées menant à la cuisine et fit signe à *son* groupe de le suivre à l’intérieur.