La Couronne de Cuivre

Quelque part entre Erhedùn et Togoria, sur les contreforts nord des Mont brumeux et à l'écart des routes fréquentées, on trouve une petite communauté humaine nommée Combeloup.
Pour peu qu'un voyageur égaré y arrive par jour de grand soleil, l'endroit lui apparaîtra charmant, bucolique à souhait. Niché au creux d'un vallon verdoyant, dominé par le donjon rustique du seigneur local, le village se compose de petites maisons de pierre blanche, entourées de jardins bien entretenus, clos de murets ou de haies touffues. Pas de ruelles étroites, sinueuses, ténébreuses : plus qu'à des rues, d'ailleurs, elles font penser à des chemins campagnards, parfois bordés d'arbres ou de buissons fleuris. Ici, nature et civilisation semblent se mêler harmonieusement.
Cependant, si le même voyageur égaré débouche dans les parages alors que le temps est couvert, pluvieux, alors que les brumes sont descendues des montagnes pour envahir le piémont, la bourgade lui inspirera sans doute d'autres sentiments. Il y verra un îlot bien maigre, bien restreint, perdu au milieu d'étendues désertes où les signes d'activité humaine se limitent à quelques cercles de pierres levées vaguement entrevus, plus haut, sur les escarpements rocheux. Se demandera ce qu'on bien pu venir faire les habitants dans un coin de nature si isolé.
Ce qu'ils sont venus y faire ? Ils ont simplement suivi, voilà plusieurs dizaines d'années, le cadet d'une noble famille luménienne, désireux de ne pas être seulement le serviteur de son aîné, de devenir son propre maître, même s'il lui fallait pour cela se tailler un domaine là où personne n'avait jusqu'ici songé à le faire.
Contrairement à ce qu'avaient pu penser les moqueurs, le village à survécu. S'est épanoui, même, quoi que de façon relativement modeste. Aujourd'hui, il vit de l'élevage des moutons et du commerce de la laine. On n'y trouve pas d'auberge : tout juste une pension, quelques chambres louées, à l'occasion, par la veuve Souchecreuse, halfeline d'un âge canonique, l'une des rares personnes encore vivantes a avoir assisté à la fondation du village. Mais rares sont ceux à venir dormir sous son toit : Combeloup n'est pas très visité. Les gens des villages les plus proches - ou les moins éloignés - vous diront que c'est le bout du monde, que les résidents sont un peu étranges, un peu trop sauvages à leur goût.
En dehors de la pension Souchecreuse, on trouve la forge d'Hodor, robuste trentenaire qui a repris le métier de son père. Et de son grand-père avant lui. Le Comptoir des Laines de Combelout est le troisième semblant de commerce. Entrepôt, échoppe, on y trouve la production locale, brute ou parfois travaillée, teinte, tissée en vêtements simples, paysans, rustiques. Umberto Anieli en tient les clefs. De mémoire d'hommes, c'est le dernier "étranger" à s'être installé au village.
Le seul autre bâtiment remarquable est le sanctuaire de Lathandre. Modeste et déserté depuis longtemps. Les Latahndrites désireux de célébrer l'aube doivent se rendre au sanctuaire du donjon où officie le chapelain du baron Eudes de Combeloup, troisième du nom.

Quête : Brumes

D'ici...

Albérich parvint aux abords du hameau un peu avant l’aube. Il faisait gris, sombre, la lune s’était éclipsée, mais le jour ne tarderait pas à surgir droit devant lui. Malgré son état de fatigue, le gel qui s’était immiscé dans tous les recoins de sa carcasse, il goûta à l’ironie de la chose : parvenir dans ce qui s’avérerait peut-être son nouveau refuge, au moment exact où le soleil allait se lever. Lathandre devait jubiler. Aurait jubilé. S’il s’était soucié le moins du monde de lui. Mais il n’avait pas de temps pour ses fidèles serviteurs, pourquoi aurait-il jeté un œil sur les déchus, les parjures et les désespérés ?
Le village était plus vaste qu’il ne l’avait imaginé, les maisons étaient blanches, presque invisibles sous la neige, mais les fines colonnes de fumée qui s’en échappaient trahissaient l’existence de vie dans ce panorama désolé. Il se frotta les yeux, peinant à les garder ouverts. Quelques mètres, encore. Il y était presque. Même s’il n’avait qu’une idée imprécise de l’endroit où se trouvait le cottage d’Alaric. A la lumière du jour, sans doute pourrait-il relire le courrier dont il disposait.
Il avança encore. Un petit donjon. Un sanctuaire modeste. Des fermes. La laine.
Il finit par poser une main sur un premier mur et poussa un profond soupir. Il était bon pour dormir deux jours.
Et ce fichu soleil se leva, évidemment.

Il entendit un son léger. Un halètement. Puis une forme blanche, presque aussi immaculée que la neige envahissante, bondit dans sa direction. L'instant d'après, une langue humide, chaude, lui mouillait la main.
-Belle, laisse le monsieur tranquille !
Du coin d'une maison, un gamin d'une douzaine d'années venait de surgir. A pas pressés, réitérant son ordre, il les rejoignit. L'immense chienne, quant à elle, s 'était tranquillement assise, dévisageant l'ancien aubemestre, langue pendante.
-Pardon, mais je crois qu'elle vous aime bien...

Le clerc posa une main un peu tremblante sur la tête de l’animal.
« Il n’y a pas de mal. » murmura-t-il, soulagé de tomber sur un être vivant, et doué de parole, aussi rapidement. « J’espère qu’elle est bon juge de caractère. »
Il devait avoir une mine à faire peur, gelé dans les lueurs grises de l’aurore, étranger en leur hameau. Il tenta cependant de sourire à l’enfant.
« Peut-être peux-tu m’aider… » ajouta-t-il finalement. « J’ai besoin de me reposer quelque part. La nuit a été rude, et… et je cherche un cottage vide… »
Il se délesta de son sac et entreprit d’y retrouver les documents d’Alaric.

Le gamin l'observait, curieux mais pas franchement craintif.
-Pour vous reposer, le mieux c'est d'aller chez Ada. Enfin, madame Souchecreuse. Je peux vous y amener, si vous voulez, c'est à deux pas d'ici... Et le seul endroit vide du village, à part le temple, c'est l'ancienne maison du rôdeur. Et elle est pas vraiment dans le village. Mais c'est madame Souchecreuse qui l'entretient, et je sais pas si vous aurez le droit d'y aller : si j'ai bien compris, elle appartient à quelqu'un qui s'appelle l'Ours, la maison, maintenant.

La maison du rôdeur, songea-t-il, sans pouvoir s’empêcher de sourire.
Lui qui n’avait jamais eu la moindre fibre campagnarde, c’était plein de promesses. Vivre parmi les loups, les sangliers et les écureuils.
« Dans ce cas, j’irai me réchauffer chez cette Ada… En espérant ne pas la tirer de son lit. Et ton aide me serait grandement utile. »
Il réalisa qu’il ne s’était même pas présenté.
« Je me nomme Albérich. C’est un plaisir de faire ta connaissance, et celle de Belle. »

-Moi, c'est Bastien, fit le môme en lui tendant la main, presque solennel. Enchanté de vous rencontrer, m'sieur.
Quant à la chienne, elle jappa, joyeuse.
-Pour Ada, vous inquiétez pas, elle se lève tôt. En fait, on se demande même si elle dort, des fois. Allez, suivez-moi, ça serait bête que vous geliez alors que vous êtes presque arrivé !
Escorté par son animal, il conduisit Albérich jusqu'à une maison à un étage, l'une des plus vastes du hameau, apparemment. Par les fenêtres filtrait la lumière chaleureuse d'un feu, et lorsque l'enfant toqua à la porte, celle-ci ne tarda pas à s'ouvrir.
-Et bien, jeune pâtre, qu'est-ce qui vous amène si tôt matin ? s'enquit une petite silhouette courbée, se détachant à contre jour dans l'embrasure de la porte. De ce que pouvait en voir Albérich, elle ne semblait pas humaine, atteignait tout juste la taille du garçon.
-De la visite... fit ce dernier en s'écartant.
Le clerc put alors découvrir, plus distinctement, une helfeline apparemment très âgée. Qui le toisait avec curiosité.
-Oh, bonjour, messire Albérich... fit-elle, de but en blanc.

Le clerc demeura pétrifié sur le pas de la porte, ne sachant comment réagir à ce salut. Etait-il possible qu’Alaric ait envoyé une missive le décrivant à Combeloup ? Qu’elle soit arrivée avant lui ? La vieille était peut-être devin, c’était une autre explication… Il sentit un vertige brouiller son esprit. Il était épuisé et gelé. Il ne pensait pas droit. Le gamin avait peut-être mentionné son nom une seconde plus tôt et il l’avait déjà oublié…
« Bonjour madame… »
Il ne revenait plus sur son nom, ça lui reviendrait.
« Je suis désolé de vous importuner aux petites heures, mais ce jeune homme m’a dit que vous pourriez peut-être m’offrir un coin d’âtre, un instant… J'ai marché toute la nuit et je crains de ne pas pouvoir aller beaucoup plus loin sans m'écrouler.»

Ada lui sourit.
-Ne soyez pas désolé, et entrez donc. Le déjeuner est prêt, il y a de l'eau chaude si vous voulez vous débarbouiller, et un lit douiller où reposer vos membres gourds.
Bastien, lui, avait déjà reculé de quelques pas.
-Bon, moi, je vous laisse, faut que je rentre... Bonne journée, Ada. Bonne jour.. Bonne nuit, m'sieur !
Et de filer, son chien sur les talons.
L'intérieur de la demeure de madame Souchecreuse était propre, net, soigné, confortable quoi que simple. Des meubles de bois massif, utilitaires, choisis avec goût sans en rien être ostentatoires. La halefline conduisit son haute jusqu'à la salle à manger. La cheminée était allumée, la table mise.
Pour deux personnes.

Le clerc remercia l’enfant qui détalait déjà dans l’aube naissante, aux trousses de son monstre poilu, avant de pénétrer dans la chaumière, sur les traces de la halfeline. Il demeura un instant en arrêt en découvrant son intérieur fonctionnel et la chaleur qui y régnait lui donna un nouveau vertige, qu’il stabilisa en posant ses doigts gourds sur l’armoire qui jouxtait la porte de la salle à manger. Il se sentit immensément las, avait l’impression d’avoir glissé, à son insu, dans un plan parallèle, une sorte de songe. C’était la fatigue, rien d’autre.
« Vous m’attendiez… » dit-il finalement, et ce n’était pas seulement une question.

-Disons que je m'attendais à vous voir débarquer d'un moment à l'autre... fit Ada, tranquille, en remplissant un bol. Par contre, je ne savais pas ce que vous voudriez en premier, du repas, de l'eau ou du lit. Alors, j'ai préparer le tout, au cas où... Et je vous ai concocté une petite infusion. Aussi mauvaise qu'efficace contre les refroidissements. Je ne saurais donc trop vous conseiller de la boire... Après avoir ôté votre manteau et vos bottes, si vous voulez bien. Vous êtes en train d'inonder ma maison.

Albérich rougit comme un adolescent et balbutia des excuses à mi-voix avant de se débarrasser.
« Il ne fallait pas vous donner tout ce mal. Je vais boire votre infusion puis peut-être… profiterai-je du gîte que vous m’offrez… Je ne sais pas bien… à quoi je dois cet accueil… Mais je vous en remercie. »
Il veilla à disposer de ses bottes et de son manteau sans empirer les dégâts qu’il avait déjà causés à l’intérieur de la vieille, puis glissa sur un banc, et se pencha sur l’infusion. Euphraise, lierre, une pointe de lichen, il ne parvenait pas à remettre le dernier ingrédient. Sa tête lui tournait. Il but à longs traits, sans se faire prier. C’était effectivement infect, mais Albérich avait forcé suffisamment de patients à ingurgiter ses mixtures pour oser rechigner.

-Oh, voyez ça comme un signe de bienvenue envers un nouveau résident de Combeloup, même si son séjour n'est que temporaire...
Elle s'assit en face de lui, se coupa une large tranche de pain et entreprit de la beurrer.
-Vous m'excuserez de manger alors que vous préférez jeûner mais, pendant que vous dormirez, je devrai aller finir de préparer votre maison. Il ne reste pas grand chose à faire... Mais enfin, il faut que tout soit net ! Et pour ça, j'ai besoin de prendre quelques forces. Le froid, ça épuise encore plus que les efforts. Vous en savez quelque chose, on dirait.

Le clerc se sentit envahi par l’embarras.
« Vraiment… Vous ne devez pas vous en occuper. Je peux très bien aller y jeter un œil moi-même… Vous avez sûrement mieux à faire et vous n’avez pas à affronter l’hiver pour… pour moi. »
Il la dévisagea, en terminant son bol.
« Est-ce Alaric qui vous a prévenu de mon arrivée ? » demanda-t-il finalement.

-Si vous parlez d'Alaric d'Antelucas, l'Ours devenue brebis, c'est effectivement de lui que je tiens la nouvelle. Il a envoyé, voici quelque jours, un oiseau porteur d'un message destiné au bourgmestre de Combeloup. Et comme le bourgmestre, c'est moi, j'ai ouvert ledit message et lu ce qu'il contenait.
Elle lui sourit. Rajouta force confiture sur son morceau de pain.
-Quant à l'entretien de la maison... Son propriétaire nous l'avait confié, en même temps qu'il nous permettait d'en jouir à notre guise. C'était le marché, valable jusqu'à ce qu'il ait l'usage du bâtiment ou décide de le vendre. C'est donc bien à moi de vérifier que la demeure soit toute prête à vous accueillir. Vous n'aurez plus qu'à mettre les pieds sous la table, en y entrant...

L’ours devenu brebis. Décidément, les vieilles femmes aimaient les métaphores animalières et malgré lui, il frémit. Il se demanda ce qu’Alaric avait dit d’autre à son sujet.
« L’ancien aubemestre et conseiller de Luménis Albérich Megrall devrait arriver les jours prochains. Il est complètement traumatisé et à moitié fou, mais je suis certain que vous lui réserverez bon accueil. N’espérez pas qu’il vous aide, Lathandre l’a déserté. »
Il secoua la tête et sourit à son hôtesse.
« Si vous aviez usage du bâtiment et que mon arrivée pose problème, nous pouvons nous arranger… » dit-il, soucieux de ne pas débarquer comme le prince qui réquisitionne sans crier gare.
Il étouffa un bâillement malgré lui. La chaleur l'engourdissait peu à peu.

-Oh, ne vous inquiétez pas pour ça, messire, dit-elle. Nous avons déjà pris toutes les dispositions nécessaires. La famille qui résidait là a été expulsée voici quelques jours. Au dernières nouvelle, ses membres partageraient une grotte avec un puma. Reste à savoir si membres est à prendre au sens propre ou au sens figuré...
Sur ces mots, tranquille, elle entreprit de manger sa tartine.

Le clerc demeura bouche bée. La halfeline n’avait pas l’air de plaisanter. Mais elle devait plaisanter. Il était épuisé, voilà tout, il n’était plus capable de saisir les nuances dans la voix de ses interlocuteurs.
« Je vais aller me coucher. » souffla-t-il en se levant. « Si vous pouviez juste m’indiquer… Ne vous dérangez pas. »
Mais Ada ne l’entendait pas de cette oreille et le mena jusqu’à une chambre du premier. Le lit était propre, on l’avait chauffé à la bassinoire, et Albérich remercia la vieille avant de fermer la porte. Il jeta son sac sur une chaise, s’assit sur le lit et poussa un profond soupir. Il se sentait terriblement mal à l’aise. Il avait espéré arriver plus ou moins incognito, et on l’attendait. Pire, on l’attendait avec une maison briquée, un repas prêt, et des anciens occupants qui… qui quoi ? Il frissonna, se déshabilla et se mit au lit. Il était incapable de penser, il avait mal partout, de la nuque aux chevilles. Il était trop tard pour regretter quoi que ce soit, de toute façon. Il verrait quand il serait reposé, aviserait. Le môme avait eu l’air sympathique, mais la vieille…
Toute cette méfiance accumulée, il fallait qu’il s’en défasse. Il avait déjà fait des efforts, des progrès même, pendant le trajet.
Au pire, il monterait rapidement vers Erhedun. Il s’y trouverait bien là quelqu’un pour l’accueillir, quelqu’un qui aurait pitié en souvenir des jours anciens.
Il se retourna dans son lit, aux aguets malgré lui. Puis le sommeil se glissa entre les draps et l’attrapa sans crier gare, et il sombra.

Un bruit tira brutalement Albérich du sommeil. Il mit quelques secondes à réaliser qu'on toquait juste à sa porte. Doucement, sans la moindre once de violence.
-Albérich, vous êtes réveillé ? fit la voix de la halefline, de l'autre côté du battant. Désolée de vous importuner, mais il est deux heures de l'après-midi, et si vous voulez fermer l'œil cette nuit, il vaudrait peut-être mieux vous lever... Ah, et le repas est prêt, si l'envie vous prenait de rattraper le petit déjeuner que vous n'avez pas pris.

Le clerc émergea de son sommeil sans rêves et promit de descendre après un rapide débarbouillage. L’eau du broc était glacée mais il ne se formalisa pas, contempla sa mine à nouveau hirsute dans le miroir qui jouxtait le lit, puis quitta la petite chambre pour rejoindre son hôtesse à la table d’un repas qui l’attendait depuis des jours, peut-être. Il n’avait pas vraiment faim : la tension qui s’était éveillée en lui avant de s’endormir avait fructifié pendant la matinée. Mais il avait l’intention de faire honneur à ce qu’on lui avait préparé, c’était la moindre des choses, même si son estomac n’était pas motivé.
Il mangea donc sous le regard de la halfeline, puis remonta chercher ses affaires et l’accompagna dans le village, vers son nouveau foyer.

Le ciel était blanc, et la neige tombait doucement, épaississant le manteau blanc qui drapait la totalité du paysage, presque inviolé. Il n'y avait personne dans les rues, ce qui n'était guère étonnant compte tenu du temps et du froid plus que mordant. Mais les fenêtres des maisons étaient illuminées, et ils purent entendre les échos de conversations animées, souvent joyeuses. Combeloup avait tout d'une paisible et heureuse bourgade sommeillant paisiblement en attendant le printemps.
Ada le mena vers le sud, en direction des montagnes, et ils ne tardèrent pas à laisser le village derrière eux. Bientôt, la sente qu'ils suivaient se mit à grimper, gravissant, quasiment rectiligne, le flanc de l'une des collines entourant le vallon. Sur leur droite, le donjon se dressait, sombre, piqueté de taches lumineuses. Là aussi, il y avait du monde.
Si Albérich parvint fort essoufflé au terme de l'ascension, il n'en était pas de même de la halfeline qui trottinait toujours, leste et rapide. Ils avaient en tout cas atteint leur destination, car la maison se dressait devant eux.
Si celles du bourg étaient blanches, la bâtisse, comme le donjon, était construite de granit gris. Et les similitudes ne s'arrêtaient pas là : ses fenêtres, étroites, pouvaient faire penser à des meurtrières. De plus, le jardin était ceint d'un haut mur que l'on franchissait par un portail de fer forgé. Et pas de toit d'ardoise : le faîte de la demeure était plat.
-A la base, c'était une sorte de caserne... expliqua Ada. Le premier baron l'avait installée là pour protéger Combeloup de possibles incursions provenant des montagnes. Mais nulle attaque n'est venue... Les soldats ont progressivement regagné le donjon, et c'est un rôdeur qui s'est installé ici. Quelqu'un qui aimait la solitude et la proximité de la nature. Il était servi !

Le décor était pour le moins sinistre, surtout quand on avait vécu dans des halls de marbre clair illuminés de toute part. Le village était heureusement visible, en contrebas, et Albérich resserra les pans de son manteau autour de lui, par réflexe.
Te voilà ermite, comme prévu. J’espère que tu aimes le ragoût de racines.
Il sourit cependant à la vieille Ada, reposa le regard sur la tour voisine. Des soldats au milieu de nulle part, c'était aussi original.
« Et bien, j’espère que la montagne ne changera pas ses habitudes. Je serais un bien piètre rempart pour Combeloup si quelque chose venait à en surgir. » dit-il, faussement enjoué, avant d’étouffer un bref soupir. « Mais je vous en prie, faites-moi visiter. »

L'intérieur de la maison était moins austère que ses dehors. Le sol de pierre avait été recouvert d'un plancher, certains des murs lambrissés, et des meubles simples mais élégant, un peu dans la veine de ceux que possédait Ada, était installés un peu partout. On y avait souvent laissé, volontairement, des nœuds, des courbes étranges, rappelant la nature, la forme originelle des arbres dont on s'était servi. Visiblement, le rôdeur adorait le bois... moins la rocaille.
La bâtisse était cependant vaste, et l'homme n'avait pas utilisé toutes ses pièces. Ada montra à Albérich la salle à manger, la cuisine, une réserve voisine, ainsi que deux chambres, les appartements occupés par le rôdeur. Les autres salles, surtout celles de l'étage, avaient été aménagées après sa mort, pour servir de bureau ou de lieu de repos. On avait loué l'endroit à des voyageurs de passage, l'informa la halfeline. Ou à des amis ou parents du baron venus lui rendre visite.

La maison était beaucoup plus grande que ce qu’avait imaginé Albérich en acceptant les clefs d’Alaric. Il n’avait aucune idée de comment il allait occuper tout cet espace, lui qui avait déjà trouvé son trois-pièces au Temple des plus démesurés. Probablement ferait-il comme le rôdeur, fermerait-il des portes et oublierait-il l’existence de certaines salles. Mais le bureau avait un charme particulier qui le séduisit d’emblée, avec sa table rustique en chêne sombre et sa meurtrière ouverte sur l’ouest. La lumière devait être belle en fin de journée, même si l’étroitesse de la fenêtre ne lui permettrait pas de s’épanouir complètement.
Il déposa son sac dans la salle à manger puis suivit Ada vers le jardin. Il entourait complètement la bâtisse, dressant ses murs couverts de lierre entre la nature et la petite maison fortifiée. Un véritable refuge. Protégé. Mais distant du village. S’il arrivait quelque chose, personne n’en saurait jamais rien.
Il frissonna sous la neige qui colonisait petit à petit les épaules de son manteau. C’était juste le lieu d’une première respiration. Il n’avait pas promis à Alaric de rester. Mais ermite…
Cela dit, vu la taille du bâtiment, l’entretenir lui prendrait déjà la moitié de chaque veille, de quoi lui occuper les mains et l’esprit.
« Et bien… Moi qui m’attendais à un cabanon… Je dois avouer que je suis surpris. »

Ada lui adressa un sourire goguenard.
-Vous vous faites une idée bien piètre des attention que vous porte votre ami l'Ours ! lança-t-elle. Mais vous finirez par être détrompé, je ne me fais pas de souci à ce sujet... Ah, d'ailleurs, avant que j'oublie : le garde-manger est plein, de même que la réserve de bois. Si cela vous chante, vous pourrez vivre en ermite un mois durant. Mais si la compagnie vous tente, n'hésitez pas à descende au village, à venir me rendre visite... Je pourrai vous présenter aux habitants, ils seraient heureux de faire votre connaissance... Et dans tous les cas, je viendrai parfois toquer à votre porte, pour voir si tout va bien... Promis, je ne serai pas intrusive. Et il se peut aussi que vous voyiez Bastien dans les parages : il adore courir la montagne...

Albérich sourit à la mention du gamin au chien blanc.
« Je ne pense pas demeurer cloîtré très longtemps. Le temps de m’installer, de me retaper, et je viendrai vous rendre visite. Je n’ai jamais eu l’ambition de me retirer du monde… Je ne pense pas que ça me réussirait. » dit-il avec sincérité. « Laissez-moi quelques jours. »
Il grimaça ensuite, se remémorant ce qu’elle venait de dire sur le garde-manger.
« Mais je peux sûrement vous dédommager pour la nourriture et le bois que vous me laissez. J’imagine qu’Alaric n’a pas chargé son pigeon de monceaux d’or et je ne mérite pas d’attentions particulières… Je ne suis qu’un étranger de passage… »

-Allons, les amis des cousins de nos défunts amis sont nos amis !fit-elle, amusée. Et plus sérieusement : nous aurions agi de même pour tous ceux amenés à vivre un moment parmi nous. c'est l'une des premières choses que l'on apprend lorsque l'on est isolés, à l'écart du monde : l'entraide. Si on se montre égoïste, on ne va pas bien loin, les disputes se multiplient, et tout le monde court à sa parte. N'hésitez donc pas à demander s'il vous faut quoi que ce soit. Et si le besoin de rendre la pareille vous tenaille, vous ne manquerez certainement pas d'occasions de vous rendre utile. Et vos gestes seront appréciés à leur juste valeur.
Elle sourit.
-Mais pour l'heure, pensez juste à vous installer, à trouver vos marques.

Il se sentit immensément touché par ces attentions simples, qui semblaient naturelles à la vieille, qui auraient été si étranges en milieu urbain, surtout dans une grande ville vouée au commerce, où le chacun pour soi avait souvent cours. Pour lui qui s’était toujours mis au service des autres, à travers son dieu, certes, c’était une découverte apaisante de réaliser que ce genre d’attitude pouvait être partagée par n’importe qui, au sein d’une communauté rurale. Bien sûr, il s’attendait à rencontrer des êtres normaux, avec leurs vices et leurs fragments de lumière, mais l’accueil était indéniablement réconfortant.
Il assura Ada de sa visite prochaine au village et se promit d’aider de son mieux ces villageois qu’il ne connaissait pas encore. La vieille semblait versée dans les simples, ils n’avaient donc pas besoin d’un guérisseur, mais Albérich était prêt à se rendre utile de quelque manière que ce soit. S’il fallait couper du bois, ma foi, il apprendrait à ne pas s’enfoncer la cognée dans le pied. Tôt ou tard.
Il regarda la vieille halfeline descendre vers le village puis battit en retraite dans la maison. Il laissa cependant la grille du jardin entrouverte, petit signe que le cottage était désormais habité. Il la fermerait pour la nuit, sans doute, mais il ne voulait pas s’enfermer.

Il n’avait pas emporté grand chose, il eut donc vite fait de ranger ses quelques nippes, le vin de Blaise et son nécessaire d’écriture. Ensuite, il alluma un feu dans l’âtre de la salle à manger et s’assit. La maison craquait de partout, marque du bois omniprésent, chaque pas posé sur le plancher crépitant dans toute la demeure. Il neigeait plus fort, dehors, le ciel s’était assombri. Au delà du murmure végétal de la petite forteresse, il écouta le silence.

Un jour de Martel, sans doute, 1382 CV
Je n’ai jamais été seul de mon plein gré, aussi loin que je m’en souvienne. Seul avec moi-même, bien sûr, mille fois. C’est une solitude que nous connaissons tous, parfois au sein de la foule, parfois même dans un groupe de proches, qui nous parlent sans nous percer. Mais physiquement seul, jamais. De la maison au Temple, d’un Temple à un autre, d’un sanctuaire somptueux à un dispensaire au creux des Taudis, j’ai toujours été entouré, fatalement entouré, par les miens, avec toute la métamorphose qui peut se glisser dans ce terme. Mon sang, mon âme, ma sueur.
Deux fois, j’ai été seul, et deux fois j’en ai souffert. Dans le cachot de Morféa, dans la cellule des Sharites.
Alors que penser d’une solitude que l’on s’impose, soudain, alors qu’on ne l’a jamais connue, jamais imaginée. N’est-ce pas s’enfouir soi-même dans le ventre de la terre, s’enfoncer, se miner, se détruire ?
Même quand on est seul en soi, la proximité de l’autre permet de tendre une main, de la poser sur une épaule, d’échanger un regard, un sourire, de se saisir d’un prétexte pour partager n’importe quoi. Allègement. Factice, parfois, bien sûr.
Contempler. Facile lorsqu’on a quelque chose à contempler.
Je marchais sur une voie dorée, elle était toute tracée, lumineuse, elle avait ses balises mais elle me laissait fureter. Exprimer mes penchants. Explorer mes élans. C’était une large voie, j’en avais l’impression du moins, une sensation de liberté à l’intérieur de ses frontières, de repère en repère, tout au long du chemin.
Puis il a fait nuit et au petit matin, la voie avait disparu. Plus le moindre tracé, juste la sauvagerie du monde. L’incertitude. Aller à droite ? A gauche ? Reculer ? Jusqu’où ? Vers où ? Pourquoi ne pas s’asseoir, simplement ?
Ce sont les rôdeurs qui détectent les nouvelles pistes. Ils fouillent l’environnement à la recherche d’un signe, d’une marque, branche brisée, empreinte, tache, pliure dans la crosse d’une jeune fougère, puis reprennent leur chemin. Il est donc peut-être bon que je sois exilé dans la demeure de l’un d’entre eux. Peut-être y trouverai-je les secrets dont j’ai besoin pour retrouver la voie, ou un voie, une direction suffit.
Tant que je ne dois pas chasser le lapin, les choses ne sont peut-être pas si mal engagées.

Il ne manquait rien dans la petite maison, Ada avait dit vrai. Il y avait pléthore de couvertures, des bougies à profusion, une batterie de cuisine dont il ignorait l’usage de la moitié des composants, quelques bouteilles de vin prometteuses et même une dizaine de livres, aux titres aussi aguicheurs que « De la reconnaissance ultime des oiseaux aquatiques croisant sur la Sereine » à « Petit précis pratique et précieux du piégeage des putois ». La seule chose qui lui faisait défaut étaient les vêtements. Il avait emporté en tout et pour tout deux tenues complètes et un unique manteau, lesquels avaient tous souffert du périple. Les laver était une priorité, mais les remplacer le deviendrait bientôt. Dans un hameau dont la spécialité était la laine, cela ne devrait pas constituer un réel problème, mais Albérich se lança dans une lessive qui le ramena à ses tendres années de noviciat à Eredhun, lorsque les plus jeunes s’activaient au lavoir pour que les aubes resplendissent sur le dos de leurs aînés. Il finit par arpenter les planchers en tunique, ravi qu’Ada ne soit pas là pour contempler l’inondation que son initiative avait causée dans la cuisine et la salle à manger. Il espéra que le bois ciré qu’il foulait de ses pieds nus survivrait à l’aventure, tandis que ses fripes séchaient au coin du feu. Bonne odeur de fumée en perspective, mais c’était ça ou le gel.

La nuit finit par tomber et il fouina dans le garde-manger, à la recherche d’une illumination culinaire qui ne vint pas. Il avait une bonne connaissance des plantes médicinales, reconnaissait les aromates classiques, mais leur goût n’avait jamais été sa priorité. Il finit cependant par dénicher des bocaux qui semblaient renfermer des plats tout faits, sur lesquels on avait inscrit des mentions impératives du genre « à consommer avant Alturiak !! » ou « Bon jusque fin Mirtul ». Ce qu’il y avait dedans par contre, mystère. Il opta pour une sorte de mixture orangée, peuplée de morceaux plus jaunes et de ce qui devait être une sorte de chair à saucisse. Il ne l’identifia pas davantage dans son assiette, mais ce n’était pas mauvais, et il se posa finalement au coin du feu avec son traité d’histoire de la Trouée et une infusion sucrée contre les mauvais songes.

Il se coucha tôt, dans un lit confortable et propre. Pendant de longues minutes, il écouta les craquements de la maison, tout autour de lui. Il faudrait qu’il s’y fasse. Il réalisa qu’il avait oublié de fermer la grille du jardin, ce qui manqua l’émouvoir, mais la valériane était finaude, et il n’avait pas lésiné sur la dose. Il sombra en imaginant la forêt, la montagne, qui convergeaient autour de lui pour l’engloutir en leur sein. Comme un bon rôdeur, en somme, qui a abandonné derrière lui l’empreinte de ses rêves.

Lorsqu'il s'éveilla, le jour était levé. Mais depuis combien de temps ? C'était un mystère. Etait-ce l'aube, le milieu de matinée, le début d'après-midi ? Impossible à dire. Car, par la fenêtre de la chambre filtrait une lumière blanche, uniforme, cotonneuse, qui semblait ne pas projeter d'ombre.
De la brume. La maison était enserrée dans une gangue de brume opaque et lumineuse, presque solide, qui empêchait de voir à quelques mètres. A quelques centimètres, même : le mur du jardin était totalement invisible. Le clerc eut-il tendu la main à l'extérieur qu'il ne l'aurait bientôt plus vue, happée, évanouie...
Seul au milieu d'un nuage. Du silence : pas un son, en dehors des craquements du bois.

Martel, 1382 CV
Ce matin, il faisait brumeux. La nature me force à affronter ce que je n’ai pas voulu. Mais c’est une bénédiction, en soi. J’aurais pu fuir en avant, aller à Erhedun, me perdre dans le bruit et le fracas des hommes. A présent, je n’ai pas d’autre choix, je dois penser.

Il se lava dans une petite pièce qui semblait propice à la tâche, si pas prévue pour. Se rasa, aussi, devant le miroir de la chambre qu’il avait choisie pour l’heure, au rez de chaussée, puis s’emmitoufla dans son manteau et sortit. Il y avait un petit banc de bois le long de la façade ouest du cottage, couvert de neige, et il le débarrassa du plat de la main avant de s’y asseoir. Puis il regarda ce néant trouble, feutré, les bras repliés autour de lui-même. Il n’entendait rien, ne voyait rien, sinon la buée blanche de son souffle qui gagnait le brouillard pour s’y perdre et le renforcer.
Belle analogie, songea-t-il. Beau reflet de ce que je suis, de ce qui flotte en moi et hors de moi.
Les derniers jours, le périple, l’avaient gardé à l’écart de ce qui l’avait mené là. Rien en réalité. L’obligation avait été de quitter un lieu, pas d’en rallier un autre. Abandonner une place pour se retrouver apatride. Car il n’avait pas voulu flétrir le passé, mais il n’avait aucune idée du futur. Il était encore jeune, mais plus tellement. Et même s’il restait mille possibles, il lui manquait l’élan et l’enthousiasme. Il lui semblait que la seule chose certaine était qu’il voulait ne plus être personne. C’était l’unique manière de se protéger. Il savait que c’était de la lâcheté, mais cela n’avait pas d’importance. Il n’avait rien à se prouver, rien à défendre. En n’étant personne, il ne risquait plus rien. Plus de haine, plus de convoitise, plus de violence. Certains étaient taillés pour l’héroïsme et la lutte, mais il n’en était pas. Il n’était pas prêt à ce qu’on lui veuille du mal. C’était aussi simple que ça. Qu’on lui veuille du mal. Cette seule pensée lui donna un haut le cœur. Comment pouvait-on ? D’où venait cette fêlure ? S’il avait été fort, il aurait posé la question à Noir Dessein. Comprendre pour désamorcer. Mais c’était trop tard. Il avait pris l’autre option, la disparition, la fuite, le retour à un anonymat protecteur.
Tu as eu peur, voilà tout.
Et alors ? Combien de morts fallait-il pour que la peur devienne un droit ? Combien d’Euryale, d’Erwan, d’Hector, de vieille mouette marchant sur la plage, de paladins assurés ? A quel moment devenait-on raisonnable plutôt que couard ?
Il frémit, regarda le vide.
Si Lathandre était resté, peut-être se serait-il battu. Mais que penser de quelqu’un qui n’a de la force qu’à travers quelque chose d’autre ?

Evidemment, rien de cela ne répondait à la question du néant.

Quand la brume se lèverait, il descendrait au village, mais la lumière déclinait petit à petit, ce ne serait pas pour aujourd’hui. Il avait vaguement faim, il rentra dans le cottage pour se dénicher de quoi manger. Il y avait du pain un peu durci, il le fit griller sur les braises, puis le couvrit de beurre et de confiture de mûres, attentif à nouveau aux craquements de la chaumière. C’était comme une musique, un concert d’une vie révolue qui ne voulait pas qu’on l’oublie. Il faisait bon.

Il faut simplement accepter de recommencer à zéro. De remiser tout ce qui a été. Ne pas s’appesantir. Les cauchemars viendront, immanquablement, mais aller de l’avant nécessite de ne pas regarder derrière. Il faut agir pour retrouver du mouvement, se placer dans la danse. Faire pour être. L’inertie mène à la pensée, qui mène à la nuit.
Foutue brume.

Il continua à lire jusqu’à ce qu’il fasse complètement noir. C’était une mauvaise technique pour s’occuper l’esprit, mais sortir dans le brouillard, c’était se perdre à coup sûr et il n’était pas suicidaire. Plus. Pour l’instant. Il mangea à nouveau un plat local en sauce dont il ne savait rien. Des tripes de quelque chose, avec sans doute des carottes et peut-être un peu de blé. Ou bien était-ce des lentilles ? Difficile à dire. Il demeura immobile au coin du feu, de longues minutes, à ne penser à rien. Respirer et attendre. Puis l’émotion vint le chercher, sans prendre de réel visage, et il pleura sur les choses perdues, toutes. Il sentit la rage poindre dans son ventre, et songea à la manière dont le Sharite survivant souillerait son nom devant ses juges. A la manière dont il l’avait contraint à l’exil, au deuil, à toute cette souffrance, à l’injustice flagrante de cette existence qui l’avait mené au milieu de nulle part. Il laissa la violence de ses sentiments l’envahir, sans bouger de son siège, sans esquisser le moindre mouvement. Vague, tout reflua, il se sentit épuisé. Un peu désemparé, il gagna la cuisine, se concocta une infusion de circonstance et regagna sa chambre. Il dormit mal, cependant.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Combeloup

[Lieu] Combeloup

Quête : Brumes

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Re : [Lieu] Combeloup

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