La Couronne de Cuivre

LE DONJON DU DRAGON

Prologue : l’Auberge
(MJ : Manfred) Le mal nommé hameau de Chanteclair se trouvait à une demi-journée de marche à peine du fameux Donjon du Dragon. Cette proximité avait pratiquement changée la localité en village fantôme. Des masures à divers degrés de délabrement s’enchevêtraient autour d’une petite place où soupirait le vent dépressif. Ne chantait ici plus que les corbeaux. Les rares irréductibles villageois qui refusaient de partir de ces ruines croulantes s’étaient mués en ombres mélancoliques errant dans les venelles tortueuses. Des visages mornes pour un endroit mort... Même la forêt aux alentours n’avait rien d’accueillante. Elle semblait pouvoir vomir à tout instant des monstres impies. Au milieu de toute cette désolation subsistait pourtant une lueur de vie, une lueur d’espoir. Sur la petite place aux corbeaux se tenait l’auberge des téméraires, baptisées ainsi car c’était là que les aventuriers attirés par le donjon faisaient leur ultime halte.

Le bâtiment, bien sûr, ne payait pas de mine, mais au moins ne donnait-il pas l’impression d’être désert. C’était un couple âgé qui en assurait la gestion. L’homme, grand et maigre, se tenait derrière son comptoir, échangeant de régulières remarques avec sa femme, petite et grosse, qui s’afféraient dans la cuisine ou la cave. Ici on mangeait bien, buvait mieux encore et des chambres pas trop miteuses pouvaient être louées. Ici surtout, il faisait chaud et l’on pouvait discuter.

* * *

Edda ouvrit la porte de l’auberge avec sa vigueur coutumière. Elle se tint un instant immobile sur le seuil, considérant l’endroit d’un regard critique. Elle adressa finalement un signe de tête au vieux derrière son comptoir, s’avança jusqu’à une table libre, elles l’étaient toutes, puis calla sa grosse hache contre le mur, déposa son sac à terre et se laissa tomber sur une chaise qui protesta quelque peu sous son poids.
« À boire et à manger ! » commanda-t-elle, bourrue.
Tout indiquait qu’elle n’était pas commode. Tout indiquait aussi qu’elle n’était pas là pour le tourisme. Elle avait beau être couverte de maille et de cuir du cou aux pieds, impossible de ne pas remarquer à quel point elle était massive. Pour un peu, si elle avait portée un casque, on aurait pu la prendre pour un homme.

HRP :
À vous de jouer. Faites venir votre personnage à l’auberge. Ce sera l’occasion de prendre ses marques et de faire un minimum connaissance à la mode Rôle Play. Le prologue sera assez court. C’est juste pour se lancer.

Sarill se tenait devant l'auberge des téméraires, immobile, pensif.

Il était satisfait d'être enfin arrivé. Non pas qu'il eu été impatient d'arriver, loin de là, mais la conversation du camelot qui l'avait conduit jusqu'à quelques lieux d'ici ne lui avait vraiment pas rendu la journée agréable, et il était satisfait que ce voyage soit fini. Et après les heures de marche qu'il avait encore du faire à pied pour rejoindre l'auberge, en espérant tout du long que les indication du camelot soient fiables, ses pieds endoloris nécessitaient une pause et son moral en berne réclamait du réconfort.
Il était enfin arrivé, mais pour autant il ne franchissait pas encore la porte de cette auberge loin de chez lui. Une pensée l’obsédait depuis une minute : *et si cette grotte que j'avais aperçu au bord de la falaise en traçant tout droit était "la" grotte ?*. La simple idée qu'il eu pu marcher plus loin que nécessaire sur une si longue distance pour rien le mettait mal à l'aise.

Il fini par balayer cette idée d'un mouvement de tête, et rentra.

L'auberge lui paraissait animée. Du moins, bien plus que le village fantôme qu'il avait traversé pour arriver jusqu'ici. Ignorant les personnes attablées, il se dirigea derechef vers le comptoir, où il se présenta, demanda à boire et à manger, et bombarda l’aubergiste de questions : "Où se trouve la grotte ?", "Quel sont les danger qu'il faut y craindre ?", "Est-ce qu'il y a vraiment un dragon ?"....

Olrik franchit la porte de l'auberge d'un pas traînant. La bouffée de chaleur qu'il reçut en entrant lui arracha un grognement de satisfaction : la dernière prime avait été difficile à trouver et Olrik n'en pouvait plus de dormir dehors. Après un rapide coup d'oeil, l'assassin repéra la sortie du fond ainsi que les deux clients de la taverne : un mastodonte tout en muscle sur lequel il ne s'attarda pas plus que de raison et un humain bizarre à la peau grise.

Impassible, Olrik s'avança jusqu'au comptoir et posa son fourbis à terre :

"Ta meilleure bière et ton plat le plus frais aubergiste, je meurs de faim", demanda-t-il en faisant tinter sa bourse pour répondre à l'hésitation de l'aubergiste.

Il faut dire qu'après 1 mois de marche forcée à battre la campagne, Olrik n'était pas ce qu'on pourrait appeler dans un état convenable : barbe mal taillée, poussières dans les cheveux et sur le visage et bottes pleines de boues ne forment pas un ensemble très attractif.

Si de prime abord, il ressemblait à n'importe quel vagabond, un oeil exercé pouvait remarqué la rangée d'étoile de lancer ainsi que la paire de lame que portait Olrik en plus de son épée. Sa démarche était à peine plus bruyante qu'un bruissement d'étoffe et ses yeux noirs ne cessaient de scruter l'ensemble de son environnement.

Avec un soupir de satisfaction, et une oreille discrétement tendue vers l'aubergiste et son curieux client à la peau grise, Olrik entama sa bière. A priori la rumeur d'un trésor gardé par un dragon avait fait le tour de la région et il n'était, sans surprise, pas le seul à s'y être intéressé.

Après une journée de marche sans histoire, Prudence était enfin arrivée à l’auberge de Chanteclair. Dernière étape avant le Donjon. Elle était à la limite de l’euphorie à l’idée d’être aussi proche d’un dragon !
Couverte de son barda habituel, elle passa la porte et fit le tour des lieux d’un coup d’œil… Un excité semblait harceler l’aubergiste d’une pluie de question, un vagabond accoudé au comptoir regardait dans le vague sans leur prêter attention, et un colosse était assis seul à une table. Elle commença à se diriger vers l’homme assis, sans pouvoir détacher son regard du bavard, fascinée par sa chevelure presque hypnotique à l’allure de flammes dansantes. Ce n’est que juste avant de s’asseoir qu’elle se rendit compte que c’était une femme qui était attablée là, avec la musculature d’un orc et l’air aussi aimable qu’une porte de cachot.
Sans se démonter, elle s’installa et essaya d’engager la conversation : « Alors, il paraît que c’est la saison des dragons dans le coin ? »

L’aubergiste se réjouit à la vue de tant d’étrangers en son établissement. Quatre ! Ils étaient quatre, de quoi occuper une table entière !
« Ha, la nouvelle fournée ! s’exclama-t-il. Je présume que vous êtes tous là pour la même raison ! Pour quelle autre raison vous pourriez être là de toute façon ? C’est mort dans les environs. Un vrai désert, avec des arbres sûr, mais un désert quand même. Enfin, je me comprends. »
Il accepta l’or du type crasseux avant de se tourner vers la personne à la singulière apparence. Celle-ci ne le troubla pas plus que cela, il avait l’habitude des choses étranges.
« Allons, allons, pas toutes ces questions à la fois ! Prenez place, le repas sera bientôt prêt. Et je vous dirais tout ce que je sais sur le donjon. »

* * *

« Parait... » bougonna Edda en faisant tomber son regard d’acier sur la demoiselle miniature.
Ce devait être une halfeline, supposa-t-elle. Par tous les dieux du carnage, elle pouvait probablement la soulever d’une seule main et la jeter comme un vulgaire caillou. Était-il possible que ce genre de demi-portion puisse se trouver ici, puisse convoiter le trésor ou le dragon ? Cette question eut le mérite de susciter la curiosité chez la barbare. Elle n’en oublia pas pour autant de toiser les deux autres individus qui avaient pénétrés dans l’auberge. L’espèce de vagabond lui fit bonne impression. Il était armé et n’avait pas l’attitude d’un misérable. Il était sale mais cela prouvait qu’il n’avait pas peur de se salir. Quant à l’autre, ce type gris avec des cheveux étranges... et bien... il était étrange justement. Et cela, Edda n’appréciait guère. Était-ce une sorte de magicien ? Ou un monstre ? Un démon ? Elle allait le tenir à l’œuil au cas où. Ses yeux retombèrent sur la lilliputienne.
« T’es là pour quoi, petite ? » demanda-t-elle, tout en écoutant les tirades de l’aubergiste.


HRP :
@ Deratiseur : les seules personnes présentes dans la salle sont nos quatre personnages et l’aubergiste.

Olrik regardait la petite assemblée formée dans l'auberge miteuse ; sa méfiance naturelle le poussait à s'isoler dans un recoin de l'auberge mais l'attrait d'un bon feu et la possibilité d'en apprendre un peu plus sur ce fameux donjon eut raison des ses réticences : après tout un peu de compagnie ne pourrait pas lui faire de mal, pensa-t-il en réajustant le fourreau de son épée.

Il tira une chaise vers la table tout en essayant tant bien que mal de tenir sa chope pleine. La halfeline semblait sympathique et relativement inoffensive, offrant un constraste impressionnant avec la barbare assise en face d'elle.

"Mesdames, si vous permettez que je me joigne à vous", dit Olrik s'efforçant de briser la glace, "La première tournée est pour moi" ajouta-t-il en esquissant un sourire.

Sarill regarda l’aubergiste avec dépit. Sa réponse ne lui paraissait pas bizarre, mais ce n’était pas vraiment celle qu'il espérait. Car elle lui signifiait qu'il allait devoir se mêler à la populace. Et ça, il n'y tenait pas. Ils les connaissait, les gens du commun. Tous ne lui témoignaient que défiance et haine. Ce n'est que chez lui qu'il avait réussi à se faire accepter, et encore, pas de tous.

Pendant qu'il ressassait cette réalité qui lui gâchait la vie, il sentait sa chaleur interne augmenter. Il devait vite oublier ça. Il devait se calmer. Prendre la vie du bon coté. Sourire.

Il se retourna alors vers la salle. Une seule table était occupée. Il y voyait une jolie femme en miniature, une armoire à glace blonde et un vagabond crasseux. La petite femme l'observait, et cela le mettait mal à l'aise. La blonde lui paraissait beaucoup plus costaud que lui, et cela l'étonnait. Le vagabond ne lui indiquait rien, mais il savait que s'il était ici, c'est qu'il n’était pas un simple sans-logis.

Pas le choix; il devait les rejoindre. Et puis en y pensant, de toute façon qu’espérait-il faire seul dans le donjon ? Si ceux-là étaient les seuls présent dans ce village perdu, et bien, il fallait qu'il s'en fasse des compagnons d'aventure. Enfin, s'il pouvait s'incruster dans leur conversation...

C'est alors qu'il remarqua le luth. Et cette petite personne qui le regardait, sans haine, plutôt avec curiosité. Il trouva l'idée. Il pris une chaise, la tira vers la table, et la place entre l'alpheline et le vagabond, en face de la guerrière.
A tous il dit "Bonjour" avec le sourire.
Au vagabond il rajouta de suite "merci pour la bière" sans perdre son sourire.
Un coup d’œil rapide sur le visage de la guerrière.
Puis il fini par se tourner vers la petite dame et il lui dit "J'ai vu votre luth. Vous êtes barde ?"

Malgré son air antipathique, la montagne de muscles semblait intriguée par la présence de Prudence. Elle allait lui répondre lorsqu’elles ont été interrompues par celui qu’elle avait d’abord pris pour un vagabond mais dont l’épée portée au côté révélait assez directement la raison de la présence, finalement la même qui avait amené Prudence jusqu’ici. Elle lui adressa un grand sourire lorsqu’il s’installa, puis se tourna vers le colosse pour lui répondre : « Ce n’est pas vraiment pour les charmes des lieux que je suis ici, ce village est presque aussi mort que celui où je suis née… Non, je suis là pour le dragon bien sûr. »

À peine avait-elle fini sa phrase que c’était au tour de l’homme aux cheveux de feu de les rejoindre. Celui-ci s’intéressa au luth de Prudence, ce qui lui alluma immédiatement une lueur de joie dans les yeux ! S’agissait-il d’un autre musicien ? Elle oublia temporairement les deux autres pour se tourner vers lui : « Je n’ai pas la prétention de me considérer comme un barde, mais j’aime passer du temps à mettre en chanson mes aventures lors de mes rares périodes au calme. Et quoi de mieux qu’un dragon comme protagoniste d’un chant épique ? »

Elle fit une nouvelle fois des yeux le tour de ses trois compagnons d’étape, et reprit la parole : « Je ne pense pas me tromper en avançant que nous sommes tous ici pour la même raison ? »

« Semblerait... » marmonna Edda, à la question de la demie portion.
Elle se mit à envisager la perspective de faire équipe avec ces gens. Bah, pourquoi pas. Ce ne serait pas la première fois qu’elle devrait composer avec des inconnus. Du moment qu’ils ne la ralentissaient pas. Du moment surtout qu’ils faisaient leur part du travail. Elle ne put réprimer un regard de travers au type gris avec les cheveux de feu avant de regarder venir le tenancier avec la bière.
« Voilà pour patienter messires et mesdames ! » dit-il en déposant une cruche et des chopes.
La seconde d’après, Edda tenait une chope pleine dans sa main. Elle se mit à siroter sans rien dire de plus. Que les autres parles, elle, elle écoutait. D’ici peu, le repas serait servi et l’aubergiste pourrait donner les informations dont il disposait.

Olrik avait aussi remarqué le luth de la halfeline. Considérant la tablée devant lui, il réfléchit intensément : il lui était déjà arrivé de faire équipe avec d'autres personnes, mais force était d'admettre qu'hormis la barbare, il avait du mal à voir comment l'homme gris et la barde pourraient être utile. Se rappelant son propre aspect extérieur il se dit qu'après tout il ne devait pas paraître au meilleur de sa forme ; tant mieux, il valait mieux garder ses atouts pour soi en attendant de voir comment les choses évolueraient.

Buvant sa bière il écoutait la conversation s'engager entre les protagonistes, en prenant le temps de penser à ce qu'il allait dire :

"En effet, au gré de mon...voyage dans la région, j'ai entendu cette histoire de dragon et d'un fabuleux trésor. J'ai préféré vérifier par moi-même : il serait dommage de passer à côté d'une belle occasion de se remplir les poches", répondit Olrik.

"Aucune information supplémentaire sur la localisation exacte, les gens que j'ai croisé ce sont bornés à m'indiquer ce village", ajouta-t-il, avant de préciser :

"Au fait, je me présente : Olrik Bornheim, voyageur, messager et marchand ! Veuillez excuser mon aspect fort peu présentable, mais le voyage a été long et le temps bien peu clément", faisant mine d'épousseter sa tunique qui masquait son armure de cuir.

Sarill sourit de plus belle à la réponse de la halfeline. Ce à quoi il lui répondit "Et bien madame, j'ai hâte d’entendre vos créations, fussent-elles minimes. j'ai toujours aimé les bardes. Ceux qui passaient par mon village égayaient agréablement nos journées, et je ne doute pas que vous aussi vous ayez une voix agréable."
Se tournant vers le reste de la tablée, et après un coup d’œil au "marchand itinérant", il dit :
Sarill. Forgeron et apprenti sorcier, à votre service. A vrai dire, je n'avais jamais entendu parler de ce dragon avant il y a une semaine. C'est mon maitre d’œuvre qui m'a dit où le trouver, et il m'a donné pour mission de ramener des écailles de la bête.
Je vous avoue que je ne me sens pas vraiment de taille à affronter un dragon. Mais je me suis dis comme ça que comme tous les lézards il devait muer, alors peut-être que je pourrais trouver des écailles sur une de ses mues. Je n'ai même pas espéré une seconde piller le trésor de la bête, à moins bien sur qu'elle en soit très éloignée..."

Voilà qui se présentait bien, l’homme aux cheveux de feu et le "vagabond", Olrik, semblaient suffisamment avenants pour former une bonne équipe pour explorer ce donjon. Et ils seraient d’une aide appréciable si jamais la rencontre avec le dragon devait tourner au vinaigre. Restait le souci de la barbare, mais Prudence soupçonnait que sa rudesse ne soit qu’une facade et qu’elle soit capable de se montrer des plus sympathiques une fois qu’ils auraient appris à se connaître.

Elle prit alors l’initiative, et leur présenta la proposition qui lui trottait dans la tête depuis son entrée dans cette auberge : « Et bien, puisqu’il semble que nous projetons tous de visiter ce même donjon, pourquoi ne pas le faire ensemble ? Les rumeurs qui me sont parvenues laissent présager de grands dangers, et une équipe aura sûrement de plus grandes chances de s’en tirer sans une égratinure que chacun de nous par lui-même. »

Prudence arbora son plus grand sourire en attendant leur réaction à sa proposition, en espérant que son jugement était bon et qu’ils seraient ouverts à l’idée de collaborer pour l’exploration de ce donjon.

« La Hache, Edda la Hache », lâcha de mauvaise grâce la barbare.
Elle reposa sa chope, déjà vide, sur la table, s’essuya la bouche du revers de la main, puis reprit :
« On peut y aller ensemble, ouais. Mais j’vous préviens, si ça commence à partir en couille parce que vous savez pas vous tenir dans un donjon, j’me casse et chacun sa merde ! Parce que j’en ai vu des groupes d’aventuriers se faire massacrer juste parce qu’ils savaient pas bosser ensembles. »
Le tavernier arriva, les bras chargés de victuailles. Il servit à chacun de ses clients une généreuse portion de... ragout ? Oui, ce devait être cela, du ragout et il sentait plutôt bon à vrai dire.
« Vous allez m’en dire des nouvelles ! Avec ça, vous serez en pleine forme pour trucider notre satané dragon ! commenta le vieil homme. Sur le donjon, je ne sais pas grand-chose, juste ce qu’on m’en a dit. Parce que je suis jamais entré, vous pensez bien. C’est pas pour moi ce genre de trucs. Fin bref. Le donjon, il est à une demi heure d’ici. Pas difficile à trouver, suffit de suivre le sentier qui va vers l’est. L’entrée du donjon, c’est une grotte à flanc de falaise. Pour le reste, ce sera à vous de découvrir. Personne n’est jamais ressorti vivant de là. Et pourtant, j’en ai vu passer des aventuriers dans mon auberge ! »

Aux explications données par l'aubergiste, Sarill ne put s’empêcher de s'exclamer : "je le savais ! Je suis passé devant cette grotte en venant ici. Sombre, pas engageante, avec des stalactites qu'on dirait prêtes à vous tomber dessus à la moindre secousse."
Ce à quoi il ajouta à l'adresse de l'aubergiste : "Personne n'en ait jamais revenu ? Ce donjon est-il donc si dangereux ?"

Le doute l’assaillait. Il se sentait déjà incapable d'affronter un dragon, mais il croyait n'avoir pas besoin de s'en approcher, se contentant de trouver une mue, de la découper et d'en ramener les morceaux. Mais si la grotte elle même ne laissait ressortir personne, alors peut-être était il encore temps d’abandonner l'idée. Mr Ventregris lui passerait surement un savon s'il revenait sans rien, mais cela valait mieux que de mourir..."

Une petite flammèche naquit sur son front, qu'il éteignit aussitôt du plat de la main.
Il se tourna vers la tablée et demanda à tous : "Et qu'est ce qui vous fait croire que nous pourrions réussir, nous, là où tous les autres ont échoué ?"

Olrik finissait calmement sa chope de bière. Il réfléchissait intensément à la situation et aux paroles de la barbare : s'associer pouvait augmenter les chances de succès ou précipiter chaque membre vers une mort rapide. Cependant l'exploration pouvait être longue et affronter un dragon ne serait pas une mince affaire si ce dernier existait bien.

S'efforçant de paraître décontracté :

"Travailler ensemble augmente sensiblement nos chances de succès et nous permettra d'être plus en sécurité : personne n'aime se faire trancher la gorge dans son sommeil", dit Olrik en se grattant distraitement le cou.

"Mais je rejoins l'avis de notre amie barbare : il va falloir faire preuve d'un minimum de discipline, d'organisation et surtout de discrétion : un accident sur un piège est vite arrivé et se battre en milieu restreint peut s'avérer...tendu" ajouta Olrik avec un imperceptible tremblement, se remémorant certains contrats particulièrement pénibles.


"Bref, je suis partant pour faire équipe !", annonça l'assassin avant d'attaquer à pleines dents son premier vrai repas depuis des jours.

Le regard d’acier d’Edda tomba sur le type en gris. Elle avait crut voir une flammèche couler sur son visage. Compte tenu de son apparence, cela ne l’étonnait qu’à moitié. Il devait être une sorte d’élémentaire. En tout cas, il ne semblait pas dangereux.
« Que des aventuriers soient morts là-bas, ça me fait ni chaud ni froid. Ça prouve rien. Plus d’une moitié des gens qui se disent aventuriers ne sont que des morveux pleins d’illusions. Mouais, des futurs cadavres. Moi j’suis venu faire le travail correctement avec des gens qui savent se comporter quand y’a des monstres qui déboulent. Si t’as pas l’cran pour ça, tu devrais repartir d’où tu viens. Sinon, moi j’vous l’dit, je fini de manger et j’y vais. Mieux vaut aller là-bas en plein jour. La nuit, c’est un coup à croiser des trucs dans la forêt. »

Aïe, ils n’étaient pas encore partis que l’étincelle d’un conflit semblait naître. Il allait falloir que Prudence calme le jeu pour éviter que ses nouveaux compagnons ne s’étripent avant même d’entrer dans le donjon…
« Allons, pas la peine de monter sur ses grands poneys, tout le monde ici me paraît apte à réagir de manière rationnelle face au danger. Après tout je ne pense pas que l’un d’entre nous soit venu jusqu’ici sans avoir longuement réfléchi aux périls inévitables d’une telle expédition ? Nous allons devoir travailler ensemble pour survivre à cette aventure, il est donc essentiel qu’on apprenne à se faire confiance au plus vite. »
Prudence fit une courte pause le temps de réfléchir, puis proposa une idée qui lui paraissait pouvoir mettre en place cette indispensable confiance mutuelle :
« Edda veut partir de jour, ce qui me paraît une excellente idée, mais surtout nous laisse encore un peu de temps. Que diriez-vous de profiter de ce village vide pour que nous fassions tour à tour une démonstration de nos capacités respectives avant de partir ? »

Personne ne semblait partager les doutes que Sarill avait exprimé. Il semblait tous assez confiants en leur capacités pour se lancer dans l'aventure, et même un dragon ne semblait pas pouvoir égratigner leur motivation. Quel pouvait donc être leur expérience réelle ? S'il n'avait pas de doute sur les capacités de la barbare, le "marchand" cachait surement son jeu, car un simple messager ne pouvait pas se lancer aussi surement dans une expédition aussi dangereuse. Et de fait, Sarill ne lui accordait aucune confiance. Quand à la barde, elle lui plaisait et il lui tardait de l'entendre chanter. Rien que pour elle, il pourrait les suivre.

Il se mit à réfléchir à ses propres capacités. Il savait se battre et il avait déjà exterminé quelques vermines géantes, mais que ferait-il contre des gobelins, ou des orques, ou pire, des draconiens ? Il avait toujours son "arme secrète", mais celle-ci lui servirait-elle contre une bande de montre agressifs ? Surement que non.
Rien ne l'incitait à rentrer dans ce donjon maintenant qu'il en mesurait les risques, mais la proposition des trois autres s'accordait : faire équipe. Et s'ils étaient si puissants que ça, ils pourraient faire la différence. Sauf que la barbare avait clairement déclarée qu'elle l’abandonnerait s'il était un boulet. Et comment ne pas l'être, comparé a cette masse de muscles qu'elle était ?
A nouveau sa chaleur interne augmentait, et quelques flammèches naquirent sous son armure. Il devrait les laisser se consumer, car il ne pouvait pas se déshabiller ici. Et il devait chasser ses idées stressantes de son esprit s'il ne voulait pas que ça empire.

Il savait comment faire : il regarda la barbare droit dans les yeux cette fois et lui dit :
"Du cran, j'en ai bien assez pour être venu jusqu'ici. C'est la sagesse qui me fait hésiter. Mais puisque vous semblez tous croire en nos chances, je veux bien vous suivre. Dépêchons nous de finir ce délicieux ragout, et allons-y. Je vais vous montrer ce que je sais faire."

Olrik finissait son ragoût en raclant son écuelle jusqu'à la dernière goutte, le tout s'achevant dans un rot sonore. Tout en léchant la sauce sur son doigt, il réfléchissait aux conséquences des paroles de ses futurs associés : démontrer ses talents lui ôtait tout avantage de surprise en cas de conflit interne, mais il voyait difficilement comment y échapper. Fronçant les sourcils en direction de la barde, il se demanda jusqu'à quel point l'intervention de la halfelinne pouvait relever d'une subtile manoeuvre ou d'une totale ingénuité.


L'hésitation de "l'homme gris" faisait écho aux propres interrogations d'Olrik, néanmoins il préférait garder pour lui ses doutes d'autant qu'en cas de coup dur, Olrik prévoyait toujours une solution de repli, en repassant mentalement en revue ses fioles. Le voyage jusqu'ici avait eu l'avantage de lui permettre de trouver en bonne quantité les produits qu'il utilisait pour ses mixtures habituelles en plus de quelques philtres d'invisibilité temporaires. "Nul besoin de leur montrer la totalité de mes talents après tout " songea Olrik.

Essuyant sa barbe d'un revers de sa manche, le vagabond s'exclama :

"Et bien, qu'attendons-nous pour nous épater les uns les autres ? D'aussi vaillants compagnons doivent avoir quantité de talents cachés !"

Edda repoussa son écuelle vide, vérifia que sa chope et le pichet étaient tout autant vides, puis elle se leva.
« Peu pour moi, les gens. J’ai pas de temps à perdre avec ce genre de démonstration. »
Elle mit son sac en bandoulière et empoigna son énorme hache à double tranchants.
« Surtout que des démonstrations, c’est que du vent. J’en ai vu des types qui savaient faire mumuse avec une épée pour épater la galerie, mais qui se faisaient dans le froc au premier signe de danger. C’est pas un spectacle qu’on va faire là. »
Elle commença à se diriger vers la sortie.
« Le donjon est truffé de dangers. Dès qu’on y sera, mon p’tit doigt me dit qu’on verra très vite qui est de taille ou pas. Allez ! Si vous venez avec moi, ben c’est tout de suite ! »
Et elle sortit de l’auberge des téméraires.

Le comportement de la barbare avait littéralement laissé Sarill sur place. Et en y réfléchissant, ça lui convenait très bien. Cette femme avec ses paroles hautaines et autoritaires l'agaçait.
Finalement, ça l’arrangeait qu'elle ait donné une telle finalité à la proposition de démonstration, car il n'avait pas envie d'aller jusqu'à monter sa meilleure arme. Et ce n’était pas si mal qu'elle parte devant, car toute puissante qu'elle était, elle déclencherait quand même quelques pièges qui seront ça de moins pour les suivants. Non vraiment, qu'elle parte si ça lui chante, ça lui allais très bien.
Et il avait encore faim.
Il jeta vite un coup d’œil a ses deux autres compagnons de table pour voir comment il réagissaient, et il hélât l'aubergiste : "Une autre s'il vous plait".

Olrik regardait la barbare se lever et sortir de l'auberge. Si ces paroles lui semblaient justes, l'assassin était un peu pris de court quant à son départ soudain : il aurait préféré prendre le temps de digérer son repas et faire un brin de toilette.

Finissant d'un trait sa bière, Olrik se leva et s'épousseta le devant de sa tunique en grommelant :

"Bon bah va falloir la suivre si on veut faire équipe. Tous pareil ces barbares : le sang chaud et pas capable d'aligner plus de 3 phrases dans une conversation."

Rassemblant ses affaires, il continua à l'adresse des autres compagnons :

"L'entrée est pas bien loin, mais ne traînez pas trop quand même, je doute de pouvoir la convaincre de vous attendre très longtemps !"

Olrik franchit la porte à son tour, rejoignant Edda à l'extérieure :

"J'suis plutôt d'accord avec toi et motivé pour travailler en équipe. Bon j'pense pas que ça presse la minute mais j'suis OK pour partir maintenant. Je pense que les autres vont suivre mais...euh comment dire...les gens ont parfois besoin d'un peu plus que 3 secondes pour prendre une décision de cette importance"

S'efforçant d'être bref, Olrik ajouta :

"Au pire, on peut déjà prendre la route et aviser une fois qu'on sera là-bas ! De toute façon même si on arrive en avance, je préférerais faire du repérage aux alentours du donjon et souffler un peu avant de foncer tête baissée : ça laissera le temps aux autres de se décider si ils en ont besoin ! Qu'est-ce que t'en dis ?"

« J’en dis que ce sont des trainards ! » grogna Edda la Hache.
Elle toisa Olrik, soupesa ses mots l’espace de quelques secondes, puis elle planta son arme dans le sol avant de s’appuyer dessus, bras croisés.
« On y va ensemble ou on n’y va pas ensemble. Point barre. Je leur laisse cinq minutes. Tu peux leur dire. »
La porte de l’auberge s’ouvrit à cet instant. Apparût sur le seuil le vieux tenancier.
« Hé, m’dame, vous avez pas payez ! » osa-t-il dire à la barbare, apparemment peu impressionné par cette dernière.
Edda haussa les épaules, empoigna sa bourse et compta rapidement ce qu’elle devait à l’homme. Elle ne savait peut-être pas lire, mais curieusement, elle savait très bien compter, et de tête en plus. Satisfait, l’aubergiste s’en retourna à son comptoir.

Ça ne se passait pas si bien que prévu pour Sarill. Il ne pensait pas que le marchand se laisserait entrainer par la barbare, et voilà qu'il était parti, lui aussi. Il se retrouvais seul avec la jolie hobbit, et cela lui convenait plutôt, mais elle était perdue dans ses pensées. Allait-elle suivre le mouvement et partir elle aussi, quand elle s'apercevrait du départ des deux autres ?
Il lui fallait réagir vite. Sa deuxième assiette était surement sur le point d'arriver, et ma foi, il comptait bien la manger. Mais ensuite ? Bah... il était déjà passé devant cette caverne, il savait parfaitement où aller pour la trouver. Peut-être que les autres mettraient plus de temps. Enfin non, pas s'il suivaient le sentier, la grotte est juste au bord.
Bon, quoi qu'il fasse, la charrette partait sans lui. Il allait devoir se dépêcher, et ça ne lui convenait pas.
Il restait cependant une inconnue dans son raisonnement : Sarill se risqua alors à secouer légèrement le bras de la barde, en lui demandant "hé, ça va ?".

« Hein ? Oh ! »
Prudence venait de se rendre compte qu’elle s’était une fois de plus perdue dans ses pensées, au point où deux de ses compagnons avaient quitté la pièce sans qu’elle s’en rende compte. Elle se tourna vers Sarill et lui répondit avec son sourire habituel :
« Oui oui, tout va bien, je crois que je me suis juste laissée emporter sur mon nuage à l’idée des aventures qui nous attendent… Ce serait un comble que ça nous fasse rater les aventures en question, tu ne trouves pas ? Rejoignons vite les autres avant qu’ils nous sèment sur place ! »
Sans attendre la réponse du forgeron, et comme si elle n’avait jamais eu ce moment d’absence, elle attrapa son luth et ses sacs, laissa sur la table de quoi payer l’aubergiste, et se dirigea d’un bon pas dans la direction prise par les deux autres.

Et zut....
Sarill se retrouvait donc seul, laissé en arrière par les tous les autres....
Cela lui rappelait douloureusement d'autres moment similaires dans sa jeunesse. Les pensées suivantes lui vinrent très rapidement : la barbare était pressée et autoritaire, et elle avait poussé les autres à la suivre. Mais était-ce la seule raison qui les avait fait partir ? Après tout, il avait si souvent été rejeté...
Il n'avait qu'un moyen de le savoir. Il devait rejoindre les autres, et voir comment il serait accueilli. Le sourire de la hobbit lui avait mis du baume au cœur, mais c’était un sourire de convenance, rien d'autre.
Et puis il ne devait pas les laisser partir sans lui s'il voulait que Mr Ventregris ait ses écailles. Il devrait donc jouer le jeu de l'armoire à glace blonde, et cela jusqu'à ce qu'une dispute éclate, ce qui ne manquerait surement pas.
Il se leva, et se dirigea vers le comptoir et la cuisine en fond, et demanda à l’aubergiste : "Mon assiette est-elle déjà prête ?"

L’aubergiste acquiesça, arguant que sa femme cuisinait plus vite que son ombre. Sarill fut sans doute rassuré lorsqu’il put rejoindre le groupe qui l’avait attendu. Ce dernier se mit aussitôt en route vers son inquiétante destination. Le village moribond céda bientôt la place à une forêt aussi sombre qu’hostile. Mais le sentier était facile à suivre et le trajet se déroula sans incident.
Donjon du Dragon
Premier étage
(MJ : Manfred) « Nous y voilà. »
Edda s’immobilisa devant l’entrée de la monstrueuse caverne. Celle-ci ressemblait à une gueule ouverte avec ses stalactites et ses stalagmites garnissant son entrée à la façon de crocs menaçants. Au-delà, c’était la pénombre et le mystère. Un vent soupirant émanait des profondeurs du donjon, semblant murmurer mille fins atroces aux aventuriers. Inébranlable, Edda empoigna sa hache. C’en était fini des enfantillages. Maintenant, c’était du sérieux ! Elle jeta un coup d’œil à ses compagnons.
« Prêts ? » grogna-t-elle.

Sarill acquiesça et répondit à la barbare :
"Vous passez devant ? allons-y alors !"
Finalement l'empressement de la barbare l’arrangeait bien, car il ne voyait personne d'autres pour désactiver les pièges.

Olrik étudiait l'entrée de la caverne : rien de bien rassurant mais quoi de plus normal pour une antre de dragon ? Ré-ajustant la sangle de son fourreau et repassant machinalement ses doigts sur ses étoiles de lancer, il s'efforça de détendre l'atmosphère :

-C'est ça le fameux donjon, dit-il, ben il a pas l'air terrible... ajouta-t-il avant de sentir comme une odeur passagère de brûlée.

-Bon sinon oui je suis prêt ! Tant qu'on a la place de marcher à 2 de front, je propose de passer devant pour repérer d'éventuels pièges accompagné d'Edda au cas où il y aurait du grabuge. Soyez attentif au moindre détail mais surtout pas d'affolement il vaut mieux garder le pied sur une dalle piégée que de courir juste après s'en être rendu compte...enfin la plupart du temps, expliqua l'assassin en affectant de prendre un ton professionnel.

-Au fait comment on s'y prend pour les points de repère ? ça serait bête de faire tout le chemin et de se paumer sur le retour !

Face à l’entrée du donjon, Prudence fit des yeux le tour de ses compagnons, comme si elle les voyait depuis la première fois…

Edda, la barbare aux muscles aussi développés que sa conversation limitée, celle-ci ne lui posait aucune inquiétude. Elle semblait avoir une certaine expérience de ce genre de périple, et ne les laisserait sûrement pas tomber en cas de coup dur.
Sarill, le forgeron aux cheveux de feu, peut-être celui qui mérite le plus qu’on fasse attention à ses arrières. Il ne donnait pas l’impression d’être sûr de lui, et encore moins celle de savoir vers quels dangers il s’aventurait.
Olrik, le mystérieux "vagabond", était très probablement un individu dangereux. Seuls ceux-ci cherchent autant à cacher tant leurs forces que leur faiblesses.

Une équipe des plus hétéroclites, mais c’est justement ce que Prudence cherchait dans ce genre d’aventure. Rassurée sur leurs chances apparentes de survie, elle se tourna vers Edda :
« Plus prête que jamais, ce donjon ne nous cachera pas plus longtemps ses secrets ! »

Un observateur attentif aurait pu apercevoir qu’en prononçant ces mots, elle avait abandonné son sourire pour des traits plus fermés qu’à son habitude. L’aventure est synonyme de dangers mortels, et Prudence avait vu assez de compagnons ne jamais revenir pour ignorer le fait qu’ils seraient très probablement moins nombreux au moment du retour.