La Couronne de Cuivre

D'ici...

Ce fut Mathieu qui passa le premier, suivi de Lae. Ensuite, Raevan fit signe à Astrée de pousser Kalju par le passage et de le franchir à son tour. Le genasi ne parut en rien surpris ou perturbé par leur subite irruption dans le sous-bois automnal. Les feuilles étaient rousses, jaunes, brun sombre, écarlates, et les arbres qui les surplombaient, gigantesques, n'avaient rien à envier à ceux de la Lorien. Un unique oiseau chantait — un coucou, à en croire le son — et des milliers de champignons poussaient, un peu partout, certains d'apparence commune, d'autres tout à fait fantastiques, dont plusieurs qui mesuraient plusieurs pieds de hauteur. Raevan arriva un peu plus tard — sans doute avait-il tenu à échanger quelques mots avec Dimitri avant de les rejoindre — et la fente fluide entre les plans disparut. Ils étaient en Féérie, deux humains, un genasi, un drow et un elfe, et manifestement, aucun d'entre eux n'y avait jamais mis les pieds.

Astrée prit quelques instants pour observer les lieux autour d'elle. La nature ici était magnifique, et, en tant que druidesse, elle se disait qu'y cheminer serait une expérience merveilleuse, enthousiasmante, formidable, encore plus qu'en Lorien. Certes, ça n'était pas la même nature, c'était un autre monde, elle dut se le répéter. Mais cela n'enlevait rien à son enthousiasme.
Il lui vint tout de même, au bout de quelques instants, une question un peu angoissée, qu'elle posa à Raevan.
" Est-ce que Dimitri vous a dit comment... comment on revient dans notre monde ? La guérisseuse nous y ramènera ?"

" Oui, c'est l'idée, dit-il. Cela devrait être plus ou moins une formalité, pour elle. Mais nous pourrions nous retrouver à Solarcis ou à Antelucas... Ce n'est apparemment pas possible de le prévoir. Dimitri avait l'air de penser que cela dépendrait de... son appréciation à notre égard."
Lae pinça les lèvres.
" Avons-nous la moindre certitude que cette guérisseuse va être capable de nous... soigner ?
— Pas vraiment. Et Dimitri a aussi parlé d'un coût. Mais nous n'avons pas le choix, en l'occurrence. Nous n'aurions atteint ni Luménis, ni Eredhun à temps, tu le sais."

" On aurait pu... Contacter un clerc... qui se serait téléporté le plus près possible... Mais le temps qu'on se rejoigne.... Effectivement, on n'avait pas trop d'autre choix"
Surtout pour Kalju. Si toutefois on pouvait le soigner.
Elle préféra ne pas s'inquiéter du coût éventuel. Cette guérisseuse devait être quelqu'un de bien, Dimitri lui faisait confiance. Donc ils trouveraient un accord...
Elle revint au problème du moment et observa à nouveau les lieux, cherchant un chemin.
" Et donc, l'idée, c'est... on prend une direction au hasard et elle nous mène là où on veut aller ?"

" Je ne crois pas, non, dit Raevan. L'idée, c'est de trouver quelqu'un qui nous indique le chemin à emprunter.
— Comment est-ce qu'on trouve quelqu'un dans une forêt magique ? demanda Mathieu.
— A mon avis, il suffit de marcher, dit Lae. Nous allons attirer l'attention tôt ou tard.
— Mais on ne sait pas de qui, fit Mathieu. Gentille dryade ou vile... dryade.
— On avisera à ce moment-là."

Astrée sourit à Mathieu.
" Bah, tu lui feras du charme, fit-elle avec un clin d'oeil. Heu... Je plaisante, bien évidemment."
Ils étaient avec un elfe, elle était donc confiante : ils avaient une affinité, quelque part, avec la Féérie, lui semblait-il. Ils ne devraient donc pas être si mal reçus. Mais Dimitri disait de se méfier... Donc elle serait sur ses gardes.
Elle avait glissé la pierre de Recha dans sa poche, songeant qu'un simple cheval unique ne leur servirait probablement à rien, puisqu'ils étaient toute une troupe. Mais elle était heureuse de la savoir là, à défaut d'avoir la compagnie de Prince.
" Donc... On part par là?, fit-elle en désignant une direction au hasard. Et on attend de voir ce qu'on trouve ? Qui passe devant ? Vous ?"
Elle s'était tournée vers Raevan, décidée à lui laisser la direction des opérations comme il en avait visiblement l'habitude.

L'elfe se massait la tempe gauche et pinça les lèvres.
" Peu importe. Nous sommes déjà observés. Choisissons le terrain le plus simple à arpenter. Je ne pense pas que nous allons trouver de chemins à proprement parler...
— Et si nous en trouvons, il faudra probablement s'en méfier, compléta Lae.
— Pfff, vous êtes tellement négatifs tous les deux, siffla Mathieu. On se les pelait dans ces tunnels et ces foutues ruines. Ici, il fait meilleur, c'est plus joli, et on va se promener dans un pays magique. Allons par là."
Il s'écarta aussitôt entre les arbres et les deux elfes, sur un échange de regards, lui emboîtèrent le pas. Raevan resta un peu en arrière, cependant, histoire de s'assurer qu'Astrée parvenait à mettre son encombrant compagnon en mouvement.

Astrée posa une main sur le bras de Kalju, et l'invita à avancer. Elle aurait préféré marcher à côté de lui : derrière, elle ne voyait pas le reste du groupe, et devant, elle risquait de manquer un arrêt impromptu du genasi. Mais la végétation les obligerait certainement à rester souvent en file indienne. Elle se résigna donc à l'idée de jouer le rôle d'arrière-garde.
En revanche, laisser Mathieu en avant-garde n'était peut-être pas une excellente idée... Elle fit signe à Raevan de ne pas s'inquiéter pour Kalju et elle, espérant qu'il irait rejoindre l'impétueux jeune homme. Il était sans doute le seul à avoir une quelconque emprise sur lui.

En réalité, la végétation n'était guère dense, si on exceptait les champignons. Après quelques pas, Mathieu s'arrêta, comme pris d'un doute soudain.
" Vous croyez qu'on peut marcher dessus ou bien c'est sacrilège ?" demanda-t-il en se retournant.
Son sourire s'élargit en observant ceux qui le suivaient.
" Bon je vois que Kalju en a déjà fait de la charpie sur une toise, donc je ne vais pas trop m'inquiéter."
Effectivement, en avançant, le genasi avait piétiné des dizaines de champignons.
" Je ne suis pas sûre que la question était complètement stupide." dit Lae, avec un certain souci.

Astrée se morigéna intérieurement de n'avoir pas envisagé le problème. Lequel, en l'occurrence, paraissait relativement insoluble.
" Vous avez raison... Mais ça va être compliqué de guider Kalju suffisamment précisément pour éviter les champignons."
Elle haussa les épaules.
" Enfin, je veux bien essayer..."
C'était sans doute trop tard, le mal était fait. Mais elle essaya tout de même de lui expliquer, par la voix, puis par le geste, qu'il devait éviter d'écraser les champignons. Il était probable qu'il ne comprenne pas ou que le problème le laisse indifférent. Elle allait devoir tenter de le guider mieux...
Elle songea que si vraiment cela restait un problème, elle pourrait peut-être faire appel au cheval de Dimitri pour servir de monture à Kalju. Mais le genasi était lourd, le cheval ne saurait peut-être pas lui non plus éviter les champignons, et elle avait l'intuition qu'elle devait garder cette option pour un cas d'urgence.

Cela n'eut effectivement aucun effet. Le genasi n'écoutait pas, ou ne comprenait rien, mais en tout cas, il marchait sans regarder ses pieds et donc ce qu'il écrasait.
" Essayons de trouver un endroit où il y en a moins, proposa Raevan.
— Au moins, nous aurons attiré l'attention, dit Mathieu, en riant.
— Si c'est sacrilège, rire n'est pas vraiment indiqué, le tança Lae.
— Pardon, je vais être très sérieux."
Raevan s'était écarté et leur fit signe de le suivre. Kalju piétina encore quelques toises de champignons mais ils atteignirent une zone où il n'y en avait quasiment plus.
" Heureusement que ce n'est pas le printemps, commenta Mathieu. On aurait pu avoir de fragiles petites fleurs, aussi.
— Personne n'habite dans les fleurs, dit Lae.
— Ah, parce que tu crois qu'on vient de détruire toute une ville ?"
La drow haussa les épaules avec une grimace.
" Ah oui, c'est pas bon, effectivement. Je crois qu'on a grillé notre capital sympathie."

" Je crois aussi," commenta Astrée, sincèrement désolée.
Il restait à espérer que cela ne leur attire pas trop d'ennuis. Elle se demandait si les champignons pouvaient véritablement être habités, mais les elfes en savaient certainement plus qu'elle sur la question. Il fallait partir du principe qu'ils l'étaient peut-être. Et espérer que leurs habitants éventuels seraient magnanimes, tolérants... ou du moins qu'ils ne viendraient pas se venger de ce désastre.
Il ne leur restait plus qu'à redoubler d'attention pour la suite... et à ne pas trop s'attarder, sans doute.
" Bon. On ferait peut-être mieux d'avancer..."
En espérant n'avoir rien fait de grave...

Ils avancèrent donc entre les grands arbres, dans le tapis de feuilles multicolores. L'orée de la forêt était invisible et les points de repère peu nombreux, d'autant qu'ils paraissaient parfois se déplacer ou changer d'apparence selon le moment. Astrée comprit qu'il ne servait à rien de chercher à s'orienter dans ce dédale. Les signes qu'elle aurait d'ordinaire utilisés, comme la position des mousses ou le courant d'un ruisseau, paraissaient déposés au petit bonheur la chance, sans réelle logique naturelle. Il n'y avait toujours qu'un unique oiseau - le coucou - dont le chant les suivait comme s'il était posé sur un arbre juste au-dessus d'eux, et les seuls insectes visibles étaient de petits papillons nacrés qui volaient au ras du sol, jamais dans leur trajectoire. La certitude d'être observés, qui avait frappé Raevan le premier, était désormais partagée par tous. Lae surveillait les alentours d'une circonspection bien drow, tandis que Mathieu s'en souciait comme d'une guigne, cheminant en bon promeneur. Kalju suivait sans rien dire, de son pas pesant.

Astrée par habitude, avait tendance à se montrer presque aussi circonspecte que Lae. Mais elle était parfaitement conscience que toute sa concentration ne les protégerait pas de grand-chose. Ils étaient repérés, "on" les avait vu saccager les champignons... et tôt ou tard "on" allait les aborder. Elle aurait préféré qu'ils se manifestent rapidement plutôt que faire durer indéfiniment l'attente. Elle se demandait ce qu'ils attendaient. Elle avait presque envie de leur demander à voix haute. Presque. Il valait mieux faire profil bas, en l'occurrence...
Malgré tout, elle s'efforçait de ne pas afficher d'agressivité : son arc était à portée de main mais ses flèches soigneusement rangées dans son carquois -il ne manquerait plus qu'ils soient surpris à tuer un habitant de Féérie, même dangereux-, et elle marchait d'un pas tranquille, observant simplement les alentours avec curiosité et beaucoup d'attention.

" J'ai un peu faim, moi, dit soudain Mathieu. Est-ce que Dimitri a dit quelque chose sur ce qu'on pouvait manger ?
— Il n'a rien dit, répondit Raevan.
— A mon avis, quoi qu'on mange, ce sera catastrophique, fit Lae avec une grimace.
— Venant de toi, toute autre prédiction m'aurait semblée suspecte.
— Quoi ? Qu'est-ce que tu veux dire ?
— Mais rien du tout !
— Nos corps ne vieillissent pas. Nous n'avons sans doute pas besoin de manger.
— Oui, enfin, ça, ça m'étonnerait vraiment."

HRP : edit car j'ai été vérifier ses sortilèges mémorisés... j'avais un doute)

Astrée sourit à Mathieu.
" Si nécessaire, je peux tous vous nourrir de merveilleuses baies délicieuses et hautement nourrissantes... bien que minuscules. Mais ça m'ennuie de gaspiller de l'énergie magique si ce n'est pas indispensable. J'imagine que les habitants de ce monde mangent parfois. Donc on pourra leur demander quand on aura fait connaissance et que tu auras usé de ton charme irrésistible, fit-elle avec un clin d'oeil. Après, si vraiment on a très faim, je suppose qu'on doit pouvoir prendre un fruit ou deux, de la même façon qu'on peut boire un peu d'eau du ruisseau. Il faut juste reconnaître ce qui est comestible. Est-ce que ça ressemble aux arbres et aux fruits de la Lorien ?" demanda-t-elle à Raeven.
Car elle se souvenait parfaitement des conseils répétés de Garahel et Nremyn concernant le fait de ne rien toucher et rien manger de cette végétation inconnue.

Ce dernier parut pris au dépourvu par sa question.
" Heu...
— Mauvais modèle d'elfe, Astrée." remarqua Mathieu en riant.
Lae observait les baies d'un buisson voisin avec circonspection.
" Vous pensez qu'utiliser la magie de notre Plan est sûr en pareil endroit ? Moi je me méfierais des effets...
— Bien entendu." dit Mathieu.
Cette fois, Lae lui tira la langue.

Astrée grimaça.
" Je n'en sais rien, j'ai oublié de demander à Dimitri."
Elle était un peu surprise que Raeven semble ne pas connaître la Lorien. Elle imaginait, naïvement, que tous les elfes d'Hélonna y avaient des racines, ou, à défaut, la curiosité d'aller voir leur congénères.
Elle observa elle aussi les baies du buisson voisin, sans en conclure grand-chose : elle ne les connaissait pas.
" Quel est le plus grand risque ? Manger un fruit potentiellement interdit et peut-être toxique pour nos organismes ? Ou tenter un sortilège ? Personnellement... Si vraiment vous avez faim, je préfère risquer le sortilège. En outre, cela permettrait de savoir s'ils fonctionnent, en cas de besoin..."
Elle attendit toutefois l'accord du reste de la troupe avant de le lancer.

" Je propose plutôt que Mathieu fasse un effort, dit Raevan. Nous pourrons poser la question bien assez tôt.
— Tu dis ça, mais ça fait des heures qu'on marche, et personne ne se manifeste. Pour autant que je sache, on tourne en rond. Enfin, sauf que si on tournait en rond, on retrouverait les champignons que Kalju a piétinés. Sauf s'ils ont repoussé, ou disparu. Au moins, le sortilège d'Astrée pourrait... je ne sais pas... mettre de l'ambiance."

" En gros, tu veux provoquer une réaction, quelle qu'elle soit ? Tu sais qu'on peut aussi continuer. Tôt ou tard, on finira par arriver quelque part, non ?"
En réalité, ce n'était pas forcément le cas, vu la description qu'avait faite Dimitri. Mais envisager le contraire était trop étrange pour qu'elle s'y attarde.
" Écoute, Mathieu, je pense que Raevan a raison. Soyons patient, avançons encore... et attendons d'avoir vraiment très faim, de n'avoir pas d'autre choix. Peut-être que lancer un sortilège de notre monde peut être vu comme une provocation ou un sacrilège. Autant l'éviter aussi longtemps qu'on pourra."

" Pfff..." commenta le jeune homme, avant de se remettre en route.
Quelques pas plus loin, il décocha un coup de pied dans un caillou blanc, qui roula jusqu'au tronc d'un arbre où il ricocha. Une dizaine de fruits — ni glands, ni marrons, ni noisettes — se détachèrent des hauteurs et tombèrent en pluie sèche sur le sol, percutant le promeneur mécontent. Il jura et accéléra le pas. Lae gloussa à mi-voix, mais personne ne fit de commentaires.
Ils marchèrent encore un moment, puis, soudain, Raevan leur fit signe de s'immobiliser. D'un doigt, il leur désigna la droite et ils aperçurent, à bonne distance, une silhouette de petite taille, mince, habillée de vert, qui les observait. Elle était silencieuse, debout à côté d'un arbre, et ne fit aucun mouvement dans leur direction, même quand ils se furent tous arrêtés.
" Tu parlais le sylvestre, Astrée, c'est ça ?" souffla Mathieu.

Astrée grimaça, fort embarrassée.
" Heu... Ben... Je suis juste en train d'apprendre... un peu."
Mais elle connaissait au moins les formules de salutation et de politesse, qu'elle trouvait relativement imprononçables. Elle aurait espéré que Raevan en sache davantage...

Elle s'avança vers la silhouette, d'un pas lent pour ne pas l'effrayer, un sourire amical aux lèvres et les yeux plein du curiosité.
Elle comptait s'arrêter à distance respectueuse -ou dès que l'inconnu donnerait l'impression de vouloir reculer ou disparaitre-, pour le saluer, en s'appliquant à prononcer mieux qu'elle ne l'avait jamais fait.

Mais à peine eut-elle fait quelques pas que la créature s'esquiva derrière le tronc, hors de vue.
" Mauvaise réponse, dit Mathieu, dépité.
— Il ou elle reviendra, fit Raevan, conciliant. S'il a décidé de se laisser voir, c'est qu'il en avait l'intention. Ce n'est que partie remise."

" Il faut lui laisser le temps...," renchérit Astrée.
Apprivoiser les créatures de Féérie était-il plus ou moins facile qu'apprivoiser un animal ? Elle n'en savait rien mais Raevan avait raison : l'inconnu s'était laissé apercevoir volontairement. Il devait être encore là, en train de les écouter.
Elle s'appliqua donc à prononcer, en sylvestre, un "bonjour" amical, aussi clair que possible. S'il ne répondait pas ou ne reparaissait pas, au bout d'une ou deux minutes, ils reprendraient leur chemin.

Les deux minutes s'écoulèrent sans que la créature ne reparaisse.
" AMIN MERNA VASA !" s'exclama Mathieu à pleins poumons.
Lae ouvrit des yeux ronds.
" Ce n'est pas parce que c'est petit et que ça vit dans les bois que ça parle elfique, dit Raevan.
— Mon accent ?
— Acceptable. Mais la méthode d'Astrée était plus délicate."
Une petite créature aux allures d'elfe, aux oreilles cependant plus longues et à la peau ocre, apparut sur leur droite. Elle était pourvue de deux grandes ailes de libellule et volait à environ un mètre du sol. Elle les observa de ses grands yeux verts, puis s'adressa en sylvestre à Astrée, à une vitesse vertigineuse, et la druidesse n'en saisit pas un mot.
" Ma méthode a été efficace, au moins." grommela Mathieu à mi-voix.

Astrée leva les yeux au ciel. Mathieu l'avait fait sursauter et elle lui aurait volontiers rappelé la discrétion requise en territoire étranger... Mais après tout, il avait provoqué un effet.
Elle sourit à la créature ailée, et articula de son mieux, en sylvestre, l'indispensable phrase apprise par coeur :
" Bonjour. Je ne parle pas bien ta langue... Parles-tu le commun ?"
Elle avait toujours une petite hésitation devant cette langue où le vouvoiement ne semblait pas exister, et un peu de mal à se convaincre qu'elle ne commettait pas d'impair en tutoyant ses interlocuteurs. Mais Neffen, puis Sohel, le lui avaient assuré.

HRP : il faudra que tu me spécifies ce que Sohel lui a appris, je n'en ai aucune idée et ça peut avoir son importance.

La créature gloussa, mais resta à bonne distance.
" Mieux que toi le sylvestre, répondit la créature en commun. Vous êtes une drôle de compagnie. Qu'est-ce que vous faites dans le bois, à part piétiner, piétiner et piétiner ?"
Il était difficile de déterminer si c'était un mâle ou une femelle, et sa voix aiguë n'aidait en rien. Une épée pendait à sa taille et ses vêtements semblaient fait de feuilles entremêlées, vertes comme si on venait de les cueillir.

HRP : je n'ai jamais défini précisément... Mais elle n'a que 4 mois d'apprentissage, pas très intensif, d'une langue complexe : ça ne va pas chercher bien loin ! Juste les formules de politesse, de quoi se faire comprendre et comprendre lorsqu'elle doit demander quelque chose de simple (avec renforts de signes) : son chemin, manger, un abri, le nom de quelqu'un... quelques notions de la structure globale de la langue... On peut imaginer un niveau de 6eme-5eme en anglais, je suppose... avec un accent de débutante et du mal à comprendre. Tu veux que je précise plus les détails ?

La question était directe, et Astrée répondit tout aussitôt.
" Nous nous excusons de déranger votre bois. Nous cherchons une guérisseuse. Elle se nomme Kaljivahu. Celle-qui-soigne".
Elle avait bien noté l'allusion au piétinement, probablement celui des champignons. Mais tant qu'il n'y aurait pas de reproche plus net, elle préférait ne pas relever.

" Toi tu dis ça, mais lui..."
Il désigna Mathieu.
" Il dit qu'il a faim."
Il la regarda à nouveau.
" Alors qui croire ?
— J'ai faim et je veux trouver Kal... La guérisseuse. L'un n'empêche pas l'autre, si ?"
La créature ne parut pas convaincue.
" Mais qu'est-ce qui compte le plus ? Ta faim ou la guérisseuse ?
— La guérisseuse. Mais si on pouvait trouver quelque chose à manger en route, ma foi...
— Peut-être que tu devras manger un autre de ton groupe. Lui, par exemple."
Il désigna Raevan.
" Pour une fois que ce n'est pas moi qu'on veut envoyer au bûcher, je ne vais pas protester, railla Lae.
— C'est une mauvaise dryade, remarqua Mathieu. Je le savais."

Astrée secoua la tête, amusée, et intervint.
" Il préfère les fruits."
Il était évident qu'ils n'allaient pas chasser du gibier ni même oser demander où trouver un repas comportant de la viande : elle ne savait rien des moeurs locales et ne voulait pas commettre d'impair. Enfin... le moins possible.
Elle ouvrit la bouche pour redemander où trouver la guérisseuse... Puis opta pour mentionner la nourriture : Mathieu serait infernal tant qu'il n'aurait pas l'estomac plein. Il fallait parfois prioriser les choses.
" Mais... est-ce permis de manger des fruits, sur notre route vers Kaljivahu ? Et savez-vous lesquels sont comestibles pour nous ? "

La Couronne de Cuivre

[Féérie] Sur la piste de Kaljivahu...

[Féérie] Sur la piste de Kaljivahu...