[Quête perso] Dernière étape...

[Mornagest]

Exténué par ses nuits qu'il passait plus éveillé qu'endormi, l'humeur de Mornagest était en chute libre à mesure qu'il approchait de Melandis. Les idées qui lui avaient déjà taraudées l'esprit depuis de longues journées semblaient maintenant être devenues des certitudes inébranlables, indéfectibles. Il perdrait tout en revenant là-bas. Pourquoi persistait-il ? Pour mettre un terme à cette mascarade ? Probablement. Il rentrerait en ville, et annoncerait au Conseil qu'il souhaitait repartir. Et ils l'exécuteraient. Et tout serait enfin fini...

C'étaient là les songes les moins lugubres qui traversaient la tête de Mornagest, en ce moment. Au moins, cette possibilité avait une fin, un épilogue presque heureux. Il cesserait de souffrir, pourrait enfin jouir de la liberté. Mais qu'en serait-il s'il était emprisonné ? L'envie de faire demi-tour lui chatouilla désagréablement l'esprit. Mais il savait qu'ils le retrouveraient... à moins de fuir sur Féérune. Inconcevable.

Sa première nuit dans les territoires de l'Empire fut des plus déplaisantes. Entouré de moustiques, harrassé par le voyage et le manque de sommeil, le guerrier affichait des cernes énormes sous les yeux, et en était presque sur le point de pleurer, seul face au vide que représentait l'obscurité hostile qui s'étalait devant lui.

[Althéa]

Perdu au milieu du désert comme un naufragé au milieu de l'océan. Les dunes s'étalaient devant lui comme une mer calme. Puis, le froid de la nuit s'était installé. Le vent s'était levé. Un vent froid et sec, emportant avec lui le sable, virevoltant de ça, de là. Un croissant de lune se leva, éclairant tout de sa faible lueur. Et partout le silence.

Non ... Là, ce bruit. Un tambour. Une sorte de roulement, lancinant et vif. Ténu mais persistant. Et petit à petit, le son enfla et se répercuta dans l'espace. Et le son vint tirer le guerrier de son demi sommeil.

[Mornagest]

Il avait tout d'abord cru rêver. S'imaginer des sons, un peu comme s'il était de nouveau dans le Bosquet des Druides, en train de pourchasser un ennemi invisible et inconnu. Il s'agita quelque peu dans son sommeil. Puis, il ouvrit presque les yeux, et sentit la fraîcheur de la nuit. Il ne dormait plus. Mais les bruits n'avaient pas cessé...

Il se redressa vivement sur son séant, tendant l'oreille avec une pointe d'anxiété, le coeur battant la chamade. Des gobelins. Peut-être... il saisit son épée, et scruta la nuit d'encre qui l'avait enveloppé depuis plusieurs heures maintenant. Comment pourrait-il les voir ?

[Althéa]

Mais devant lui, il n'y avait rien ni personne à perte de vue. Et pourtant, le son enflait encore. Le vent aussi avait redoublé.

Puis, un éclat attira l'attention du guerrier. Sur une dune tout près de lui, un halo lumineux venait d'apparaître. Une silhouette humaine semblait flotter vers lui. En y regardant mieux, Mornagest put distinguer un vieil homme marchant, appuyé sur son bâton. Le cheveu hirsute et la barbe blanche. Il allait doucement. Il passa à coté du guerrier sans le voir ...

[Mornagest]

Etonné... non. Héberlué convenait mieux. Mornagest regarda fixement la silhouette glisser dans le noir, passer à côté de lui, et poursuivre son chemin sans mot dire. Qui était-ce ? Le guerrier n'en avait aucune idée. Il voulut le lui demander, mais sa phrase resta bloquée dans sa gorge, sans qu'il parvienne à prononcer un mot. Avait-il peur ? Comme c'était drôle...

"Qui êtes-vous ?" parvint-il à articuler d'une voix qu'il voulait assurée.

[Althéa]

L'homme marqua un temps d'arrêt. Mornagest remarquer son visage parcheminé, ses traits tirés, ses yeux vides. Il le fixait à présent. Puis, il avait étendu une main vers lui et avait prononcé quelques mots qu'il ne put entendre. Et, lentement, il s'était remis en route.

"Qui êtes vous ?"

L'écho de sa question lui revint, répercuté par les ruines alentour. L'homme se retourna de nouveau. Il refit un signe indistinct. Peut être invitait il Mornagest à le suivre.

[Mornagest]

Suspicieux, le guerrier serrait la garde de son épée, et se tenait prêt à la dégainer au moindre signe agressif du vieil homme. Le suivre... et risquer de se perdre dans ce désert ? Mais qu'avait-il à perdre ? Son âme ? Il réprima un triste sourire, et, secouant la tête, se décida à lui emboîter le pas, tout en restant à une distance raisonnable. L'homme n'avait pas encore disparu, et Mornagest était maintenant curieux de savoir ce qu'il lui voulait. La mort ? Un conseil ? Une discussion d'une banalité affligeante ?

[Althéa]

L’homme ne s’était pas retourné pour autant. Il avait continué de marcher d’un pas alerte jusqu’à une destination connue de lui seul. Il passa une dune, puis une seconde sans ralentir. Par moments, le vent apporta à Mornagest le son d’une sorte de mélopée. Portée par une voix grave, elle semblait en accord avec le roulement de tambour qui persistait toujours. Le vent quant à lui redoubla de violence.

L’homme se retourna un instant comme pour vérifier que le guerrier le suivait toujours. Puis, tout doucement, il commença à accélérer. Presque même à courir, les bras haut levés. Après quoi courait il ou qui le poursuivait ? Difficile à dire … Si ce n’est que tout d’un coup, sans crier gare, il disparut. Mornagest se retrouva seul dans le désert de sable. En regardant autour de lui, il s’aperçut qu’il ne reconnaissait plus l’endroit d’où il était venu. Chaque dune était semblable à la suivante. Il était donc perdu …

[Mornagest]

Perdu... dans l'immensité froide du désert nocturne. Pourquoi avait-il décidé de suivre ce vieillard ? Heureusement, il avait ses affaire avec lui - soit ses vêtements en loques et son épée... ll pourrait toujours attendre le lever du soleil et se remettre en route à ce moment. Mais peut-être ne retrouverait-il jamais la piste suivie par les voyageurs... et allait-il mourir de soif et de déssechement dans le sable.

Au fond, cela valait peut-être mieux ainsi... Il se laissa tomber à terre et ferma les yeux, harrassé par tout ce qu'il lui arrivait.

[Althéa]

Des voix étouffées d’hommes et de femmes lui firent ouvrir les yeux. Il se trouvait visiblement dans une tente de bédouins. Une table, quelques chaises sur lesquels siégeaient des hommes, des femmes et des enfants. Plusieurs lit dont celui sur lequel on l’avait allongé. Au delà, il put apercevoir un bout de ciel rougeoyant. Le soir tombait de nouveau. Une journée s’était manifestement écoulée.

Combien de temps était il resté inconscient dans le désert ? Il sentit sur sa peau la morsure du soleil. Les voix se turent quelques instants. On avait vu qu’il était réveillé. On vint près de lui pour lui faire boire de l’eau et on lui proposa quelques pâtisseries savoureuses. Il s’aperçut qu’on le regardait avec un certain respect mêlé de crainte. Il comprit pourquoi quand un des hommes se décida à lui parler.

« Vous avez eu beaucoup de chance d’avoir survécu. Un autre que vous n’aurait pas résisté sous cette chaleur. Un bon nombre n’aurait pas résisté à vos brûlures. Vous avez l’air de vous remettre rapidement. Mais que faisiez vous par ici ? Vous seriez vous perdu ? »

[Mornagest]

La peau tendue et brûlante à cause du soleil, Mornagest n'osait trop bouger. Il restait assis, immobile. Ses souvenirs lui revenaient petit à petit. Il avait inconsciemment voulu suivre cet homme qu'il avait vu dans la pénombre vespérale... et s'était égaré, après que l'inconnu ait disparu. Etrange histoire... avait-il rêvé ? Il raconta par le menu sa mésaventure aux nomades, avant de conclure :

"J'ai eu beaucoup de chance. De survivre, et encore plus que vous m'ayez trouvé... je pense avoir eu une hallucination. La chaleur, peut-être."

Lentement, il entreprit de se mettre debout, malgré la douleur qui lui tenaillait le corps. Il ne pourrait sans doute pas marcher aujourd'hui. Mais il était en vie, c'était le principal... à moins que ce ne fût un échec. Tout dépendait du point de vue.

"Je ne pourrai pas aller bien loin... est-ce que je peux rester et reposer mes blessures, aujourd'hui ?"

[Althéa]

Les hommes hochèrent la tête.

"Vous pourrez rester ici le temps qu'il vous faudra pour vous remettre. Nous avons prévu de rester ici quelques jours de toute façon. Il y a peu de mirages nocturnes dans les déserts. Je crois plutôt que vous l'avez vu. Un vieillard marchant devant vous en faisant signe de la suivre n'est-ce pas ? Cela fait des années qu'il hante le désert. C'était un homme violent et autoritaire que sa famille s'est résolue à perdre. Depuis, il erre ici et cherche à entraîner les voyageurs. Peu en réchappent ... Vous avez vraiment eu de la chance ..."

[Mornagest]

Il acquiesça. De la chance, vraiment... il en doutait. Mais peut-être aurait-il subi mille tourments en suivant ce personnage intriguant... et cela ne valait peut-être pas mieux que ce qui l'attendait.

"Je ne resterai pas longtemps... je n'aime pas m'imposer. Et je dois rentrer au plus tôt à Melandis. J'ai perdu du temps avec cette histoire, et... je ne voudrais pas en perdre davantage. Mais je vous remercie pour votre hospitalité. Accueillir un parfait étranger sans craintes n'est pas chose aisée..."

Il changea de sujet, se mettant lui-même mal à l'aise.

"Quelles sont ses motivations ? Pourquoi veut-il perdre les gens dans le désert ? C'est insensé..."

[Althéa]

"Il cherche simplement à se venger. Il ne pensait pas que sa famille en viendrait à cette extrémité là. Pour tout vous dire, cet homme a massacré sa femme et l'amant de celle-ci dans un immense bain de sang. Il a même fait tuer les témoins de la scène ... Son esprit torturé hante le désert ..."

[Mornagest]

"Dans le fond, il pourrait parler de moi", songea Mornagest avec amertume. Qu'avait-il fait, avant de partir pour Lumenis, puis Manost ? Qu'avait-il apporté d'intéressant ? Il n'avait semé que la mort et la souffrance autour de lui. Pour en récolter quoi ? Il l'ignorait encore. Mais il allait peut-être bientôt obtenir la réponse.

"Assez de ces imbécilités. Tu as une mission, tiens-y toi." Il secoua vivement la tête, puis remercia à nouveau les nomades de leur accueil et de leur aide.

Il passa la journée au calme, à moitié endormi par la chaleur qu'il supportait très difficilement, et par la fatigue accumulée par le voyage, les rencontres imprévisibles et les interrogations incessantes.

Le lendemain, il quitta les nomades, non sans les avoir remercié à nouveau. Après tout, il leur devait la vie, et cela pouvait signifier encore beaucoup... ou rien du tout. Il se remit en marche vers Melandis.