[RP] Villa des Sanzunron

[Dreiyan]

En provenance de la

Le silence lui pesait. Depuis de longues minutes il n'avait entendu que le bruit de ses pas et de ceux du muet qui lui servait de guide. De temps en temps des bruits identiques résonnaient au loin dans le labyrinthe que constituaient les égouts de Melandis, mais s'évanouissaient rapidement.

Dreiyan était content de se retrouver à l'air libre. Il avait du mal à supporter la puanteur des égouts et la petite brise s'engouffrant dans la ruelle lui faisait le plus grand bien.
Il se sentait aussi moins déboussolé. Même s'il ne reconnaissait pas l'endroit, il pensait pouvoir s'orienter plus facilement.
La ruelle était déserte. Et l'était sans doutes toujours, étant certainement réputée pour être le théâtre d'apparitions soudaines d'assassins aspirant à une discrétion dont l'importance semblait supérieure à celle de la vie d'un malencontreux passant.

Dreiyan était anxieux. Il avait trainé jusqu'ici un nœud à son estomac et attendait de son collègue qu'il le rassure. Malgré l'obscurité, il tenta de l'observer afin de discerner un signe quelconque. Et attendit une indication de sa part sur la suite du déroulement des opération. Il n'osait pas rompre le silence par une question maladroite.
Pas facile de communiquer avec un muet...

[Mornagest]

Merlon jeta un coup d'œil circulaire dans la ruelle. Pas un chat. Il leva simplement le pouce vers Dreiyan et lui fit ensuite signe de le suivre. Leur cible n'était pas très loin d'ici, mais il fallait longer une avenue beaucoup plus dégagée, où ils seraient exposés à la vue de tout un chacun. Longer les bâtiments et se couler dans les ombres devenait nécessaire dès maintenant.

Par signes, toujours, Merlon indiqua au prêtre de faire comme lui. Il longea les maisons en brique, proprettes et endormies. Pas question de faire du bruit ; le silence était presque oppressant, et Dreiyan avait l'impression que ses propres pas résonnaient dans toute la cité, comme autant d'alertes pour la garde impériale. Il jura de se procurer des paires de bottes aux semelles souples...

Le point sensible était là, désormais : traverser l'avenue. Une longue période de scrutation s'ensuivit alors. Merlon et Dreiyan guettaient le moindre mouvement, le moindre son. Nulle trace de la garde. Ils se hâtèrent, et finirent leur course sous l'ombre d'un toit en ardoises grises. Pas de réaction. Tout allait bien, pour l'instant.

[Dreiyan]

Les deux hommes attendirent ainsi un instant. Dreiyan observait le savoir faire et le sang froid de son compagnon, qui semblait parfaitement à l'aise dans ce milieu. Alors que son pouls à lui battait la chamade et qu'il peinait à masquer le fort bruit de sa propre respiration, le seul son qui parvenait à ses oreilles.
Dreiyan porta ensuite son attention sur le mur contre lequel il s'appuyait. Il appartenait à une masure d'une stature sobre mais imposante, qui semblait soignée. Il observa la rue : elle était pavée, et n'était pas traversée par des égouts à ciel ouvert. Puis les autres bâtiments, dont il commençait à percevoir la silhouette, sa vue s'adaptant à l'obscurité: typiques du quartier bourgeois.
Il attendait un signe de son compagnon. Il était impatient de passer aux choses sérieuses: l'attente ne faisait que monter son anxiété...

[Mornagest]

La voie était libre ; ils poursuivaient leur chemin, longeant les façades, se coulant dans les ombres, comme si elles devenaient leur nouvel élément. Dreiyan entendait un cognement sourd et régulier, non loin de lui. Qu'était-ce ? Une patrouille en approche ? Il s'arrêta un instant, retint sa respiration... et constata que c'était son propre cœur qui cognait follement dans sa poitrine. Il n'était guère habitué au maquignonnage, malgré ses quelques dernières péripéties en dehors de Melandis ; il avait passé une bonne partie de sa vie au service de Talos, engoncé dans le luxe inhérent à sa fonction de prêtre. Il ne craignait rien ni personne, à l'époque... Désormais, il se méfiait même de sa propre ombre, de ses propres bruits, de son odeur... que ne craignait-il pas, en fin de compte ?

Il n'eut guère le temps de s'attarder sur la question. Le roublard lui montra enfin la villa convoitée, entourée d'une bonne surface de jardins ornés de rosiers, buis taillés en forme d'animaux, et autres coquetteries botaniques sans réel intérêt.

Passer par la porte d'entrée semblait aussi farfelu que suicidaire, estima machinalement le prêtre déchu. C'était pourtant ce que s'apprêtait visiblement à faire Merlon, lorsqu'il parcourut sans un bruit l'allée de pavés menant à la lourde en chêne.

[Dreiyan]

Dreiyan était resté immobile. Il regardait avec un étonnement et même une certaine admiration Merlon franchir dans l'obscurité la distance le séparant de la porte du domaine. Sans bruit aucun. Mais Dreiyan n'arrivait pas à emboiter le pas du roublard: il était tétanisé par l'idée de marcher à découvert.
Merlon avait atteint la porte du manoir, et était à présent dissimulé dans les ombres du bâtiment. Dreiyan attendit encore quelques secondes, guettant tout signe de vie. Mais aucun bruit ne venait troubler le silence ambiant, et aucune lumière n'émanait du manoir, trahissant un signe de vie.
Il fut prit d'une petite panique : il ne pouvait pas non plus attendre éternellement ici... la rue n'offrait aucune sécurité. Et Merlon risquait de s'impatienter.
Il prit une grande respiration. Observa le manoir une dernière fois : il semblait toujours aussi endormi.
En se concentrant sur chaque foulée, afin de faire le moins de bruit possible, il suivit la trace de Merlon et se dirigea vers la porte du domaine.

[Mornagest]

Le voleur lui fit à nouveau signe de la main, tout en extirpant un petit objet de sa poche. Un objet qui ressemblait à un outil utilisé pour crocheter les serrures... il n'allait tout de même pas passer par là ?!

Pourtant, le muet s'agenouilla simplement et entreprit de faire jouer l'instrument, d'une longueur d'environ cinq centimètres, dans la fine serrure. Elle ne semblait guère piégée, mais Dreiyan n'avait strictement aucune connaissance à ce sujet. Tout juste ne ressentait-il pas d'aura divine autour de la lourde... pas de glyphe posé par un prêtre. Mais ses facultés ayant été perdues lorsque Talos fut vaincu, et ses prêtres déchus, il ne se fiait plus guère à ses anciens dons...

Au bout d'une petite minute, un léger déclic se fit entendre, et la porte s'ouvrit lentement sur ses gonds, sans un craquement. L'atrium était désormais à portée de main... ce dernier était carré, d'environ six mètres de côté. Presque totalement obscur, seule la faible lumière entrant par la porte qu'ils venaient d'ouvrir laissait voir les quelques meubles décorant les murs de la pièce. Il n'y avait rien au centre, excepté ce qui ressemblait à un épais tapis. Plusieurs portes partaient de la pièce, et un double escalier, de part et d'autre de l'atrium.

Ils devaient maintenant faire un choix.

[Dreiyan]

Dreiyan ne savait pas vraiment comment procéder. L'introduction dans le bâtiment lui avait semblé être une formalité, mais il n'osait espérer que la suite des événements serait aussi facile. Il resta un instant immobile, guettant le moindre son, mais tout était silencieux dans le manoir.
Il se demandait s'il était plus stratégique de commencer à fouiller le rez-de-chaussée ou l'étage. Les objets de valeur étaient sans doutes à l'étage, mais les chambres des occupants également et ils prendraient le risque de les réveiller. Interrogeant Merlon du regard, il s'approcha de l'une des portes et son collègue lui fit signe de continuer, alors que lui se dirigeait vers une autre porte. Ils allaient se séparer pour fouiller le bâtiment le plus rapidement possible.

En prenant toutes les précautions possibles, il abaissa la poignée de la porte et la poussa lentement. Malgré ses efforts, celle-ci laissa échapper un petit grincement en s'ouvrant. La pièce découverte était baignée d'une profonde obscurité. Bien que son regard fut habitué au noir - il n'avait pas vu de lumière depuis leur départ du siège de la guilde - il ne distinguait que vaguement quelques meubles. Hésitant, il s'avança lentement dans la pièce.

[Mornagest]

Il prit quelques instants pour s'habituer à l'obscurité intense qui régnait dans la pièce. Seule quelques minces fentes entre les volets et les murs diffusaient un faible rai de lumière lunaire, et il fit un effort pour s'imaginer les meubles et les éventuels objets qui pouvaient se trouver sur son chemin. Une table, au centre, avec des chaises. Des gros meubles le long des murs, probablement des dressoirs à vaisselle. La salle à manger, sans aucun doute. Un carré plus sombre, au centre, recouvrait le parquet en chêne. Un tapis. Et sur les murs, des tableaux, sans doute représentant des scènes de chasse pompier ou des portraits d'aïeuls aussi rigides que morts depuis des générations... une maison bourgeoise type, en somme.

La pièce comportait une autre porte, donnant en toute logique vers les cuisines. Et une autre encore, vers le salon ? Le plus simple était de s'en assurer, mais... et les pièges ? S'il y en avait ? Les tableaux, n'étaient-ils pas autant de caches permettant de maladroitement dissimuler des sacs d'or ou de bijoux ? Une trappe, sous le tapis, regorgeant de trésors et autres babioles ?

Le tout sans faire grincer ce détestable plancher... qui, en fait, ne produisait aucun son lorsque Dreiyan marchait dessus. Pour l'instant.

[Dreiyan]

Dreiyan ne pouvait rester immobile, même s'il ne savait réellement que faire : il fallait tenter, prendre des risques. Même s'il doutait que ce soit dans leur salle à manger que les bourgeois cachent leurs biens les plus précieux.

Il s'approcha de l'un des quatre murs de la pièce, celui qui comportait le plus de tableaux. Arrivé suffisamment près de l'un de ceux-ci, il chancela sous le regard inquisiteur de celui qui devait être un parent du maître des lieux, immortalisé en un amas d'acrylique sur toile. Se sentant ainsi observé, Dreiyan se décala quelque peu et inspecta le cadre du tableau. Il ne décela rien de suspect. Peu confiant, il tenta de le faire pivoter le tableau - apparemment suspendu par un seul clou - afin de dévoiler une éventuelle cachette.

[Mornagest]

Le tableau pivota lentement et sans frotter sur le mur, mais malheureusement, ce qui n'était pas un piège mais qui y ressemblait fortement - mais dans sa version involontaire - se déclencha, à savoir, le clou qui se détacha du mur en chutant le long de ce dernier, entraînant avec lui un petit morceau de plâtre qui chuta sur le buffet situé en-dessous. Le clou, quant à lui, poursuivit sa chute, que Dreiyan vit au ralenti, comme freiné par une force invisible ; celle de Tymora, qui souhaitait que le prêtre déchu attrapât le morceau métallique avant qu'il ne tombe au sol dans un fracas infernal...

Sans qu'il l'ait commandé à son corps, les muscles de son bras se détendirent et il saisit promptement le clou dans la paume, se faisant légèrement piquer au passage. Le danger était écarté, et il souffla alors, et constata qu'il avait retenu sa respiration pendant ces quelques dernières secondes...

Tout cela pour constater que le pan de mur ainsi dénudé ne recelait aucune cache, du moins visible à l'œil nu. Vexant...

Soudain, un fracas épouvantable vint troubler la quiétude régnant dans le salon obscur. À l'étage, quelque chose de lourd venait de tomber au sol. Dreiyan sursauta et sentit à nouveau son cœur s'emballer.

[Dreiyan]

Ce ne pouvait pas être Merlon, il était resté au rez de chaussée. Peut-être un habitant. Ou un autre intru. Qui - ou quoi - pouvait causer un tel bruit en plein milieu de la nuit? Un meuble, peut-être, mais sa chute devait bien avoir été provoquée par quelqu'un...
Une chose était sûre, il y avait quelqu'un d'éveillé dans le manoir. Et cela n'arrangeait en rien ses affaires.
Il se dirigea rapidement vers la porte menant au hall. Dans la panique de l'instant, il ne fit pas garde à atténuer le bruit de ses pas, qui claquèrent sur le plancher. Cette erreur fit redoubler son angoisse ainsi que l'intensité de son rythme cardiaque.
Il se pencha à travers l'embrasure de la porte pour jeter un coup d'œil en direction des étages, et des escaliers y menant. En espérant glaner une indication sur ce qui se tramait en haut.

[Mornagest]

Dreiyan retrouva Merlon dans le hall. Lui aussi avait entendu le vacarme épouvantable, et il n'en savait apparemment pas plus sur l'origine possible de ce dernier. Mais un nouvel élément vint les éclairer quelque peu : des cris et des bruits d'armes s'entrechoquant avec violence. Une femme pleurait et hurlait. Ils la virent d'ailleurs rapidement sortir sur le palier, au-dessus de leur tête, en haut des escaliers.

Blessée - sa chemise de nuit était déchirée et maculée de sang - elle courait frénétiquement dans tous les sens, sans savoir où aller ni que faire pour échapper à ce qui se passait apparemment dans une des chambres de l'étage.

"Au secouuuurs !", hurla-t-elle, manquant de peu dégringoler les escaliers.

[Dreiyan]

D'un naturel prudent - d'aucuns auraient dit trouillard ou lâche - le premier réflexe de Dreiyan fut de reculer de quelques pas, à l'intérieur de la pièce qu'il venait de fouiller sans succès. Sans doutes avait-on le droit à des règlement de comptes entre bourgeois melandiens. Une histoire d'adultère ou d'argent, qu'en savait-il... peu lui importait : le mieux était d'attendre que les combattants à l'origine de ce vacarme s'entretuent, ce qui finira sans doutes par arriver.. Libre à Merlon et lui de piller ensuite le manoir à leur guise... et, si nécessaire, de se charger des survivants.

Mais le cri de le femme lui glaça le sang. Elle semblait réellement effrayée... peut-être plus qu'un règlement de compte. Il resta néanmoins dans la pièce jouxtant le hall, se collant contre le mur pour ne pas être vu, alors que la femme dévalait les escaliers.

[Mornagest]

Soudain, la femme prit conscience de la présence des deux intrus dans son hall d'entrée, mais n'en parut pas plus offusquée que cela ; au contraire, elle se mit à leur implorer de l'aide.

"Pitié, messires ! Adiez-moi ! Ils vont tous nous massacrer !"

Elle trébucha sur sa robe de nuit, trop longue pour entreprendre une descente d'escaliers en moins de cinq secondes, et passa dès lors à la vitesse supérieure, tête en avant, et dégringola les dix dernières marches en roulé-boulé, atterrissant tête la première sur Dreiyan.

En haut, de fait, on bataillait sévèrement, à en juger par le bruit et les cris qui persistaient à être émis par les combattants peut-être déjà à l'article de la mort...

[Dreiyan]

Dreiyan attendait une réaction de Merlon. Après tout, il était plus expérimenté que lui et saurait sans doutes comment réagir face à une telle situation. Mais évidemment aucune ne vint : difficile d'attendre d'un muet qu'il prenne la parole.
L'ancien prêtre fut prit au dépourvu. Mais il jugea qu'il ne coutait rien de se mettre au courant de la situation, et d'aviser ensuite sur ce qu'il convenait de faire. Il s'agenouilla auprès de la femme, qui tentait de se relever après sa chute malheureuse, et tenta de lui parler d'une voix rassurante et autoritaire.

"Qui vous veut du mal? Combien sont-ils?"
Pas de réponse : la femme était sous le choc. Dreiyan la secoua quelque peu. "Nous pouvons sans doutes vous aider, mais vous devez parler. Combien sont-ils?"

Il n'aimait pas du tout cette situation. Accroupi au centre de l'atrium, il ne pouvait pas échapper à la vue d'un assaillant se lançant à la poursuite de la femme, et serait sans doutes contraint au combat ou à la fuite.

[Mornagest]

Elle regarda un instant le prêtre sans comprendre, puis éclata en sanglots hystériques.

"Ils ont tué ma fille ! Ma petite fille !", hurla-t-elle entre deux hoquets. Nul détail sur leur nombre, ni qui ils étaient. Mais la réponse vint, partiellement du moins, lorsqu'un individu, tout de noir vêtu, sortit sur le palier à l'étage, et, armé d'une arbalète, pointa rapidement son prochain coup vers la femme.

Même de loin, Dreiyan pouvait voir l'expression mauvaise qu'il affichait sur son visage, et les nombreuses taches de sang qui ornaient ses mains. Il portait une lame, engainée à sa taille. Pour l'instant, il semblait seul, et le vacarme avait cessé, dans la chambre, remplacé par une espèce de râle infâme. Peut-être provenait-il d'une gorge entaillée ?

Merlon s'était à présent caché derrière un des meubles de l'entrée. Après tout, cela ne les regardait pas... mais il restait tout de même dans la maison, au lieu de fuir. Le voleur avait sorti de sa poche quelques dagues de jet et en prépara une dans sa main droite, prêt à agir en cas de besoin.

[Dreiyan]

Dreiyan abandonna la femme au pied de l'escalier. Tuer un enfant. Il n'était en général pas sensible au meurtre d'adultes, mais un enfant... son sang se glaça.
L'homme à l'arbalète l'avait sans doutes vu, et risquait bien de le prendre pour cible ensuite - et pouvait également décider de l'abattre en premier et de s'occuper de la femme, de toutes façons hors d'état de fuir ou de se défendre, ensuite.
Sa priorité était de sortir de la ligne de mire du tireur. Il s'élança sous l'escalier en haut duquel se trouvait le tireur, ce qui le rendait intouchable par un tir d'arbalète. Si l'homme descendait ensuite, il pourrait peut-être le surprendre par derrière. Mais peut-être celui-ci l'avait-il vu se cacher malgré le peu de lumière qui régnait dans la pièce.
Son coeur battait la chamade. Il n'avait pas mené de combat armé depuis bien longtemps, et c'est toute tremblante que sa main droite s'apposa sur le pommeau de la dague suspendue à sa ceinture.

[Mornagest]

Le silence se fit un court instant, puis le bruit de la détente du carreau claqua dans l'air froid du hall d'entrée, et un choc sourd se fit entendre lorsque le projectile se ficha sur le front de la cible, et s'enfonça sous l'os pour atteindre le lobe frontal et tuer immédiatement la femme, qui s'abattit sans plus crier.

Un autre bruit, celui d'une lame tirée au clair, résonna brièvement dans le noir, tandis qu'un autre individu arriva sur le palier en maugréant :

"De la visite ? Pas de témoins !
- Un sous l'escalier, l'autre derrière l'armoire à droite. Chais pas qui c'est.
- Vas-y, j'te couvre.

Les pas furtifs de l'un des deux hommes se firent alors entendre dans l'escalier opposé à celui de Dreiyan, qui allait sous peu être découvert.

[Dreiyan]

La détermination de ces deux hommes n'était en rien rassurante. Ils semblaient effroyablement sûrs d'eux. Dreiyan était étonné de voir qu'ils avaient aperçu Merlon ; il pensait au contraire que celui-ci était caché et qu'il pourrait surprendre leurs adversaires par surprise. Néanmoins il y avait un avantage non négligeable à être deux ; d'autant plus que Merlon avait, il se savait, des dagues de jet alors que lui-même n'avait qu'une arme de poing, et de toutes façons aurait été bien incapable d'effectuer un lancer de dague correct.
Le mieux était sans doutes d'attirer l'attention de l'homme, tandis que Merlon en profiterait pour frapper. Il ne lui restait plus qu'à espérer que le muet comprenne et ne rate pas son coup.
Il sortit donc de sa cachette et tout en restant hors de portée de l'homme resté sur le palier de l'étage, probablement armé lui aussi d'une arbalète, se plaça quelque peu en vue de l'assassin de sorte à ce que, en lui faisant face, celui-ci tourne le dos à Merlon en lui offrant ainsi sa nuque dénudée.

[Mornagest]

Dreiyan vit alors l'homme qui s'approchait de lui, et constata alors qu'il s'agissait d'un elfe ! Sa capacité à voir dans le noir expliquait bien des choses, et ses oreilles pointues ne laissaient aucun doute là-dessus. Merlon parviendrait-il à le toucher malgré l'obscurité dense qu régnait dans la pièce ?

Alors qu'il se posait encore la question, une dague fila dans l'air pour venir se ficher dans le dos de l'elfe, qui grogna et tomba au sol, probablement blessé mais pas mort. Simultanément, la corde de l'arbalète de l'autre assassin se détendit et le carreau alla se ficher dans l'épaule du voleur, qui tomba en arrière, derrière le meuble où il se cachait.

Un partout... mais l'autre venait d'utiliser son arbalète et ne pourrait la recharger de sitôt.

[Dreiyan]

Pas le temps de réfléchir des lustres à la situation. Ni une ni deux, Dreiyan s'élança vers l'escalier par lequel l'elfe était descendu, enjambant ce dernier qui gémissait au sol. Pas le temps de s'en occuper, ni de s'occuper du cas de Merlon.

Il grimpa les marches quatre à quatre, sa dague à la main, et se jeta sur le second tireur, espérant le prendre par surprise et pouvoir lui asséner directement un coup fatal.

[Mornagest]

La tentative de Dreiyan était risquée. L'autre elfe avait déjà dégainé, sachant qu'il n'aurait pas le temps de recharger, et le corps-à-corps était inévitable, le prêtre déchu n'ayant pas l'occasion de frapper suffisamment vite.

L'épée courte de l'assassin reluit d'un faible éclat lorsqu'il réfléchit la lumière de la lune, et le duel commença. L'individu était rapide et agile, comme on pouvait s'y attendre de la part d'un elfe. Il toisa Dreiyan un instant avant de foncer promptement vers lui, frappant d'estoc vers la poitrine, prêt à toucher le cœur.

[Dreiyan]

La lumière était particulièrement rare dans le manoir, mais Dreiyan réussit à sentir à temps le mouvement de son adversaire. De par sa promptitude à se battre dans le noir, il s'agissait vraisemblablement d'un elfe également... l'apprenti assassin était dans de sales draps. Son premier réflexe fut s'écarter de la trajectoire de l'épée de son adversaire, et il fit un petit bond vers la gauche, s'éloignant de l'escalier. Il pourrait ensuite tenter d'adresser à son tour un coup de dague à l'elfe...

[Mornagest]

Déséquilibré ? Emporté par son élan ? L'adversaire de Dreiyan lui laissa un grand espace pour qu'il frappe, et, malgré son inexpérience en la matière, il toucha l'elfe au côté, enfonçant la dague dans le poumon. L'autre chut immédiatement en grognant sourdement.

La voie était libre ! Et l'ex prêtre pouvait maintenant voir si Merlon était toujours de ce monde. La femme, quant à elle, était belle et bien morte.

[Dreiyan]

Dreiyan ne pensait pas s'en tirer à si bon compte. Un petit coup de pousse du destin, sans doutes... lui qui avait tourné le dos à toute religion, sourit presque à cette idée. Ne prenant pas le temps de s'assurer que l'elfe soit réellement mort, il dévala les marches de l'escalier. Il enjamba sans autres le corps de la femme, et se dirigea vers Merlon. Celui-ci étant étendu derrière un meuble, il ne le vit pas du premier coup.

Il s'accroupit vers son camarade.

"Merlon? Ça va?"

[Mornagest]

L'assassin était allongé au sol, pris de convulsions violentes. Même dans la pénombre, Dreiyan pouvait voir son visage crispé, et de la bave sortir par sa bouche aux lèvres presque invisibles tant elles étaient serrées. Il essayait, sans y parvenir, d'enlever le carreau qu'il avait reçu au niveau de la clavicule. Empoisonné, sans nul doute, à en juger par son état.

Peut-être l'ancien prêtre connaissait quelque moyen pour cesser la progression du poison ? Mais le temps pressait. Merlon respirait de façon de plus en plus saccadée...

[Dreiyan]

Que faire? Il n'en savait rien. Il connaissait bien quelques remèdes, pouvant éventuellement luter contre quelque poison ; hélas il n'avait avec lui ni fioles ni ingrédients. Sans doutes un appel divin pouvait remédier à la situation ; mais il n'avait en lui plus aucune foi, ni en Talos ni en quelque autre divinité, et aucune envie de retomber dans le piège de assujettissement à un dieu.
Tant pis. Il regarda Merlon respirer ses derniers souffles dans l'obscurité. Il ne le connaissait pas, et même s'il ne souhaitait pas sa mort, il ne tenait pas non plus à lui. Et, au fond, sa survie n'était peut-être pas un élément essentiel à la réussite de sa mission... peut-être même que cela augmenterait son prestige.
Il frissonna. De telles pensées lui semblaient désormais dérangeantes. Merlon ne méritait sans doutes pas de finir ses jours ici. Mais cela ne changeait rien à la situation : il ne ferait rien pour le sauver, car il ne pouvait rien faire.
Quoique. Alors qu'il détourna les talons du corps agonisant de son compagnon, son regard de posa sur le cadavre de l'elfe. Peut-être... peut-être celui-ci avait sur lui une antidote contre le poison. Il entreprit de le fouiller. Et peut-être pourrait-il trouver sur lui d'autres objets, ou informations, utiles.

[Mornagest]

Bonne pioche. L'elfe avait pris la précaution d'emporter avec lui ce que le prêtre déchu reconnut rapidement comme étant une petite fiole d'antidote, probablement au cas où il viendrait à s'empoisonner avec ses carreaux maléfiques. Il la saisit, et, sans hésiter plus avant, la fit avaler tant bien que mal à Merlon, qui était sur le point de s'étouffer à force de manquer d'air.

Sitôt le remède avalé, le voleur se calma. Sa respiration reprit plus nettement, et régulièrement. Ses yeux battirent, et il put se redresser. Il vivait. Il serra Dreiyan dans ses bras, pour lui signifier sa gratitude.

[Dreiyan]

Mouais. Dreiyan n'était pas spécialement touché par le geste de reconnaissance du muet ; tout au plus embarrassé. Néanmoins, le sauvetage de son compagnon rassurait le Melandien : seul, il aurait pu rapidement céder à la panique si la situation s'aggravait...
Sur le cadavre du premier elfe, il n'avait trouvé qu'une potion d'antidote. Mais peut-être pourrait-il trouver d'autres objets sur le cadavre du second. Il grimpa l'escalier à grands pas, sans craindre à présent d'être entendu par un quelconque habitant, et fouilla le cadavre de l'assassin elfe.

[Mornagest]

Hormis quelques pièces d'or, et une autre fiole de précieux antidote, Dreiyan ne trouva rien d'intéressant. Il pouvait, bien sûr, récupérer l'arbalète de l'elfe, mais ce n'était pas forcément pratique à utiliser.

De son côté, Merlon examinait maintenant attentivement le corps de la femme, mais ne prit pas la peine de la fouiller. Sous sa chemise de nuit, elle ne pouvait rien cacher d'autre que ses formes féminines, à jamais figées dans le noir de cette sinistre maison.

Restait à explorer la demeure afin de trouver ces fichues pierres... Avec un peu de chance, ils ne seraient plus dérangés de la nuit. Les occupants de la maison resteraient calmes.