[MP] Histoire : Echo

[Echo]

Gabrielle repéra immédiatement le notaire qui cherchait à se faire oublier ; malheureusement pour lui, elle n'avait pas l'intention de l'oublier de si tôt. Son regard fut également attiré par une jeune femme à l'écart, qui visiblement sanglotait.

- Je vous demanderai de ne pas trop vous éloigner, j'aurais peut-être des questions à vous poser, dit-elle à l'assemblée.

Alors que les conversations reprenaient leur cours entre les invités, Gabrielle s'approcha de la jeune femme en pleurs.

- Excusez moi, dit-elle doucement. Est-ce que tout va bien ?

Sa voix se voulait apaisante, afin de calmer la jeune femme. Elle se demandait si ce n'était pas elle, la malchanceuse qui avait retrouvé le corps du comte.

- Quel est votre nom ?

[Smidge]

La jeune femme se redressa à son contact, et la dévisagea un instant de ses yeux vert vif.

"Sofia, répondit-elle enfin. Sofia Stoän."

Elle avait visé juste. C'était bien elle. Elle avait de longs cheveux bruns et lisses, et un visage plutôt fin. Un tout petit quelque chose dans sa voix lui indiqua qu'elle n'était pas de la région.

Pour peu que le majordome la conduise sur les lieux du crime, et elle pourrait peut-être même avoir sa première reconstitution en temps réel.

[Echo]

- C'est vous qui avez retrouvé le corps.

Ce n'était pas une question mais une affirmation. Elle s'accroupit près du fauteuil, plus dans l'attitude d'une confidente que d'une inspectrice.

- Est-ce que vous pouvez m'en parler ? demanda t-elle.

Elle espérait que malgré son état de choc, la jeune femme consentirait à lui parler. Dans le cas contraire, elle serait obligée de passer à autre chose et de revenir à la charge lorsqu'elle serait calmée.

[Smidge]

Mademoiselle Stoän n'avait pas encore répondu qu'un léger toussotement s'éleva derrière elle.

"Peut-être souhaiteriez-vous voir le corps ?", s'enquit le majordome, qui s'était approché.

Etant donné son état émotionnel apparent, il y avait peu de chances que la jeune femme se confie en présence de tiers. Cependant, elle lui livra tout de même une réponse laconique.

"Oui, c'est moi qui l'ai trouvé."

Des larmes lui embuèrent les yeux, et la jeune femme retira précipitamment ses lunettes qui commençaient à s'embuer.

Il était toujours possible de s'isoler un peu pour poursuivre l'interrogatoire. Ou encore d'enfin se rendre sur les lieux du crime...

[Echo]

- Oui, répondit-elle distraitement au majordome. Je vous suis.

Elle se redressa et s'éloigna de la jeune femme. Elle n'en tirerait rien ce soir visiblement et elle aurait plus de chance de découvrir quelque chose d'utile sur le lieu du crime.

Alors qu'Emile la guidait dans le château, elle lui dit :

- Les invités ne sont pas les seuls à être suspecter vous savez, les domestiques le sont également. Combien de personnes étaient au service du comte ? Et combien sont présentes en ce moment même au château ?

[Smidge]

Le majordome l'invita à la suivre à l'autre bout de la pièce, en direction de la petite porte qu'elle avait repérée à son arrivée. Quelques bruits de vaisselle lui indiquèrent qu'ils s'approchaient bien des cuisines.

C'était une petite pièce, carrée, débordant de placards en hauteur, de plans de travail regorgeant de vaisselle et de restes de plats. Un fourneau dans lequel dormaient quelques braises conférait à la pièce une température nettement supérieure à celle de l'immense salle à manger qu'ils venaient de quitter. Devant un vaste évier, une femme quelque peu enrobée d'une quarantaine d'année, les cheveux assez courts attachés en une queue de cheval serré, et un large tablier sali autour de la taille, était en proie avec plusieurs assiettes, armée d'une éponge mousseuse et d'une brosse. Enfin, au centre de la pièce, une modeste table équipée de quatre chaises supportait les restes d'un couvert.

Et en face d'eux, de l'autre côté, une autre petite porte donnait elle ne savait où. Si quelqu'un était mort, ce n'était certainement pas ici.

"C'est moi, Yvette", lança le majordome.

Elle lui répondit d'un bougonnement incompréhensible, et poursuivit sa tâche avec acharnement. Émile Martineau contourna la table, puis posa sa main sur la poignée de la porte.

"Nous y sommes", annonça-t-il d'un ton solennel.

Il entra le premier, puis tourna l'interrupteur qui actionna l'éclairage. Gabrielle le suivit. Ils y étaient, sans aucun doute : au centre de la pièce gisait un corps, dans une large flaque de sang.

Méthodiquement, Gabrielle passa en revu son environnement.

Il s'agissait vraisemblablement d'une sorte de remise, légèrement plus exigüe que la cuisine adjacente. La pièce était principalement composée de placards et de filets remplis de victuailles suspendus au plafond, à l'exception d'un plan de travail et d'un évier sur la droite. En face, un couloir étroit s'échappait dans l'ombre, en direction de l'inconnu.

Et enfin, le corps... A première vue, le Comte portait un costume de soirée de circonstance. Il était allongé en position latérale, à l'exception de la tête, face contre le sol. Sans même s'approcher, elle devinait une large entaille qui débordait de son cou, duquel avait coulé tout ce sang. Gorge tranchée, donc. La flaque de sang elle-même apportait aussi son lot d'informations. On y distinguait nettement plusieurs traces de pas, qu'elle aurait qualifié à première vue comme étant laissées par une femme. Avec un peu de chance, et surtout de sang coagulé, elle pourrait même en mesurer plus précisément la taille.

Ce n'étaient pas les éléments à examiner qui manquaient. Mais il allait bien falloir en choisir un pour commencer...

[Echo]

A première vue, l'arme du crime n'était pas ici. Mais alors où était-elle ? Le meurtrier avait-il pris le risque de l'emmener avec lui pour s'en débarrasser ailleurs ? Ou alors l'avait-il simplement nettoyer puis remise à sa place ? Le couloir sombre qui lui faisait face l'intriguait également ; où donc allait-il se perdre comme ça ?

Gabrielle se pencha sur le corps, prenant garde à ne pas marcher elle aussi dans le sang déversé sur le sol. Pour l'instant, elle avait décidé de ne pas y toucher et elle se contenta simplement de l'examiner sous toutes ses coutures, essayant de remarquer n'importe quel détail, même anodin, qui pourrait la mettre sur le début d'une piste.

Puis elle regarda les empruntes de chaussures laissées sur le sang ; leur taille faisait penser aux chaussures d'une femme, peut-être celles de mademoiselle Stoän. Information qu'elle vérifierait plus tard.

[Smidge]

Le majordome murmurait à voix basse tandis qu'elle inspectait les traces au sol. Il semblait compter mentalement depuis qu'elle lui avait posé sa question.

"Les domestiques étaient au service du Comte, expliqua-t-il, tout comme moi-même. Il nous fournissait un travail à tous et voir l'un d'entre eux commettre un tel acte... C'est... C'est absolument fantasque."

Oui, c'était définitivement des empreintes de pas féminines. Ou d'un homme vraiment très petit. Du 37 tout au plus, peut-être même du 36 ou du 35. On aurait pu deviner une... marque, à peine séchée, ornant l'une des empreintes sur le bord... Marque corrélant certainement avec la semelle de l'un des invités ?

"Alors..., reprit enfin monsieur Martineau. En comptant mademoiselle Stoän, les invités se trouvent au nombre de six... Il y a aussi la troupe d'acteurs venue expressément pour la soirée, cela fait quatre personnes de plus... En nous comptant nous, c'est à dire la cuisinière Yvette, sa fille Marjorie, le jardinier Fernand, Marie-madeleine qui est venu nous assister, et moi-même bien sûr, cela fait cinq personnes. Six, quatre et cinq... soit quinze personnes en tout."

Antoine avait visé juste. Ils étaient bien quinze... Elle n'eut pas le temps de poursuivre sa réflexion à ce sujet que ses sens en alerte retinrent soudainement toute son attention.

Il n'y avait pas que la flaque. Un jet de sang avait certainement dû gicler de la blessure au moment de l'impact. Ces traces étaient partiellement noyées par l'étendue grandissante au sol, mais on pouvait toujours en observer une partie, en direction des portes de la cuisine. Jusqu'ici, rien n'était anormal. Sauf que... sauf que si elle ne se trompait pas, la forme que prenait ces gouttelettes de sang n'était pas naturelle. "Quelque chose" avait fait obstacle à leur étalement sur le sol. "Quelque chose"... ou "quelqu'un".

Gabrielle émit un petit sourire de satisfaction puis se redressa enfin, forte de ses nouvelles déductions.

Restait encore à inspecter le plan de travail, les placards, le corps lui-même... ou peut-être "autre chose", qu'elle n'avait pas encore repéré.

[Echo]

Un employé qui assassine son employeur ? Pas si fantasque que ça et Gabrielle en avait vu d'autres. Les raisons qui pouvaient pousser un des domestiques du château à assassiner le comte étaient diverses, mais elle n'en savait pas encore assez pour se permettre ce genre d'extrapolation. Ce qui était sûr, c'est que, pour l'heure, les domestiques étaient autant suspects que les invités.

En tranchant la gorge de la victime, le meurtrier avait répandu une giclée de sang sur le sol. En l'examinant de plus près, Gabrielle se rendit compte qu'elle avait été obstruée par quelque chose. Etait-il possible que le meurtrier se soit éclaboussé en tuant le comte ? Autre information qu'elle devrait vérifier plus tard.

Elle se redressa et commença à passer le lieu du crime au peigne fin. Rien n'échappa à son inspection : elle fouilla les placards, regarda en dessous et au dessus et examina l'évier. Elle ne savait pas très bien ce qu'elle cherchait, et le saurait probablement lorsqu'elle l'aurait trouvé. Elle n'espérait pas tomber sur l'arme du crime, mais n'importe quoi susceptible de l'aider un peu aurait été le bienvenu.

Tout en procédant minutieusement à l'examen de la pièce, elle s'adressa au majordome :

- Pouvez-vous aller me chercher mon manteau au vestiaire ?

A première vue, elle pensait que ce n'était ni plus ni moins les empruntes de mademoiselle Stoän, ou peut-être même de la femme de chambre qui était avec elle, mais il était également possible que ce soit là les empruntes d'une tierce personne, une personne qui n'était pas censée se trouver là. Il fallait mieux vérifier

[Smidge]

Le majordome serra les dents à son injonction, puis se fendit d'un bref hochement de tête avant de disparaître en direction de la salle à manger.

La fouille de cette pièce allait se révéler plus longue de prévue, les placards contenant nombre d'objets hétéroclites. Plusieurs tiroirs recelaient de nombreuses armes du crime potentielles, mais jusqu'à présent, aucune ne semblait avoir servi à tuer quelqu'un. A moins qu'elle n'aient été lavées, bien entendu.

L'inspection de l'évier n'avait pas été d'une grande aide. Certes, un fond d'eau y trainait au fond, mais il pouvait aussi bien avoir servi quelques heures auparavant, ou quelques secondes après le crime...

Son premier tour de fouille n'avait rien donné. Vraisemblablement, elle allait devoir y passer un temps considérable pour éplucher la pièce dans son intégralité, et plus encore si elle devait y inclure la cuisine voisine ou le couloir dans le fond. Et peut-être pour rien si rien n'était à y trouver...

Plusieurs minutes s'écoulèrent. Gabrielle avait véritablement besoin de son matériel, à présent. Elle ne parvenait pas à s’atteler à davantage de fouilles probablement inutiles alors que des indices évidents étaient à portée de main.

Mais où était donc parti le majordome ?

[Echo]

La patience n'était pas vraiment le fort de Gabrielle ; lorsqu'elle demandait quelque chose, elle aimait que ce soit fait vite, très vite. Elle ne savait pas ce qui pouvait retenir le majordome aussi longtemps mais elle n'avait pas l'intention de lui courir après, aussi décida t-elle de continuer ses investigations. Le couloir sombre, qui se perdait dieu sait où, l'intriguait beaucoup. Hélas, faute de lampe torche -restée avec son imperméable- elle n'y voyait pas grand chose.

Elle retourna dans la cuisine et chercha du regard quelque chose qui pourrait l'aider à y voir plus clair, un chandelier par exemple.

[Smidge]

Dans la cuisine principale, où la cuisinière avait achevé sa vaisselle et était passée au séchage, il restait un chandelier inutile dans cette pièce où était revenu le courant. Gabrielle s'en empara, et s'avança dans le couloir.

Très vite, elle atteint une intersection. Une intersection qui lui sembla étrangement familière. Ces colonnades ornées de visages difformes étaient quasiment identiques au couloir qu'elle avait déjà emprunté avec le majordome.

Elle demeura ainsi immobile face au mur devant elle, son chandelier à la main. Vers la gauche ? ou vers la droite ?...

C'était sans compter sur son sens sur-aiguisé de l'observation. Il y avait quelque chose, sur la droite. Oui. Quelque chose d'insignifiant... Presque invisible. Au pied de l'une des colonnes, la lumière de ses bougies se reflétait étrangement. Gabrielle s'accroupit un instant, et passa son doigt sur la trace, qu'elle porta à ses narines. Une tâche de gras, à n'en pas douter.

Rien de bien extraordinaire... si elle n'avait pas noté des traces de ce même résidu sur le plan de travail qu'elle venait de quitter...

[Echo]

Gabrielle ne savait pas comment interpréter ce nouvel indice. Comment de la graisse avait pu se retrouver dans ce couloir, sur le sol, c'était un mystère. Elle avait bien quelques théories à ce sujet mais elles étaient toutes plus folles les une que les autres. Elle continua d'avancer, chandelier en main, espérant découvrir quelque chose de plus consistant.

[Smidge]

Le couloir tournait lentement, sans se départir de sa sensation oppressante. Cette décoration aurait eu de quoi faire frémir n'importe qui... Ces chapiteaux aux figures démoniaques semblaient la scruter, et observer le moindre de ses pas. Ils semblaient même affecter la pâle lumière des bougies qui chancelaient sous leur regard.

Après quelques longues minutes éprouvantes à balayer les moindres nouveaux indices - en vain - le couloir déboucha sur une porte.

Gabrielle l'ouvrit, chercha l'interrupteur sur le mur d'une main hasardeuse, et l'actionna. En vain. Le jardinier n'avait vraisemblablement rétabli le courant dans toutes les pièces. Elle éleva le chandelier au-dessus d'elle, et laissa la lumière gagner la pièce.

Quelques fauteuils, une table basse... L'intérêt principal de cette pièce ne résidait cependant pas sur le sol. Chaque pan de mur, du sol au plafond, regorgeait de livres. La pièce n'était peut-être pas aussi vaste que celles par lesquelles elle avait pu passer jusqu'alors, mais la densité était telle qu'elle n'aurait su dire combien il y en avait ici. Des centaines ? Des milliers ? Encore davantage ? Si elle devait la passer au peigne fin, elle en aurait pour des semaines...

A l'autre bout de la bibliothèque se trouvait une autre porte, similaire à celle par laquelle elle venait arriver.

[Echo]

Sa situation actuelle n'était pas sans rappeler un roman policier, où le héros parcourt la bibliothèque d'un château obscur, chandelier à la main, et cherche des indices afin de démasquer un meurtrier. Le courant partiellement coupé et la nuit orageuse ne faisait que renforcer cette impression. Et Gabrielle ne l'aurait avoué pour rien au monde mais cet endroit et l'ambiance qui y régnait la mettaient vraiment mal à l'aise.

Elle parcourait lentement la bibliothèque, examinant toujours avec soin son environnement. Il n'y avait pas grand chose d'intéressant ici et elle hésita à poursuivre ses investigations plus avant dans ce château sans lumière. Poussée par la curiosité, elle ouvrit la prochaine porte, espérant qu'elle ne déboucherait pas sur un autre interminable couloir, auquel cas elle ferait immédiatement demi-tour.

[Smidge]

Derrière l'autre porte, une nouvelle pièce, légèrement plus petite, elle aussi dépourvue d'électricité. A première vue, elle contenait un bureau, ainsi qu'une chaise. Une fenêtre donnait vers l'extérieur, en direction de la cours par laquelle elle était entrée. Mais il y avait quelque chose d'autre... Avant même qu'elle ne détaille plus attentivement la pièce, un dallage blanc chaotique sur le sol attira son attention.

Du papier. *Des* papiers. Partout. Elle regarda instinctivement en direction de la fenêtre, mais celle-ci était indiscutablement fermée. Ce qui ne laissait guère d'explications pour expliquer le capharnaüm qui régnait ici. Le bureau contenait-il quelque objet de valeur ?

Près de la fenêtre, elle devina un volumineux combiné de téléphone en bois suspendu au mur. Peut-être celui avec lequel le majordome avait appelé le commissariat ?

[Echo]

Gabrielle se demanda si celui ou celle qui avait tout mis sans dessus dessous ici avait fini par trouver ce qu'il ou elle était venu(e) chercher.

Elle posa le chandelier sur le bureau et commença à rassembler quelques papiers, les empilant et survolant quelques lignes afin de savoir à quel type de documents il s'agissait. Les examiner tous un par un lui prendrait un temps considérable ; un temps qu'elle prendrait certainement plus tard mais pour l'heure elle se concentra plutôt sur le bureau et se mit à fouiller les tiroirs.

[Smidge]

L'encrier s'était vraisemblablement renversé sur le sol, tâchant du même coup une partie des documents, même si cela n'empêchait pas leur identification.

Du papier libre, des enveloppes, des adresses, des bons de commandes, des reçus, des lettres d'invitation à divers galas de charité, et même une liste de courses... Ces papiers ne présentaient à première vue guère d'utilité. Bien moins que le fait qu'ils soient éparpillés dans la pièce, en tous cas.

Gabrielle ouvrit le premier tiroir, qui contenait quelques photographies de personnes et de lieux qu'elle ne connaissait pas. Le second ne fut pas bien plus enthousiasmant, et ne recelait que de vieilles coupures de journaux des semaines passées, pliés et triés chronologiquement.

Son intérêt fut cependant aussitôt attisé lorsque sa main échoua à ouvrir le dernier. Fermé à clef... Il ne pouvait y avoir qu'une seule raison à cela : ce qu'il contenait méritait d'être protégé des regards.

Quelques secondes de fouille supplémentaire la déçurent partiellement, lorsqu'elle mit trop rapidement à son goût la main sur un petit trousseau suspendu sur le pan du bureau, et dont l'une des clés ouvrait ledit tiroir... Elle fit coulisser lentement les gaines de bois, observant avec toute la minutie dont elle savait faire preuve ce qui se dévoilait devant ses yeux.

Un livre, couvert de cuir et orné de symboles mystiques. Très ancien, à n'en pas douter. Et titré "La sorcellerie au moyen-âge".
Enroulé juste à côté du grimoire, un parchemin tout aussi antique arborait de nombreux symboles inquiétants, qui illustraient un texte dans une langue qu'elle ne connaissait pas.

[Echo]

Ce que le comte faisait avec ce livre sous clé dans son bureau, c'était un mystère. Il était très ancien et sa couverture en cuir était ornée de symboles que Gabrielle n'avait jamais vus. Doucement, elle vint s'asseoir sur la chaise du bureau et tentait de mesurer l'importance de sa découverte.

Celle-ci était, pour l'heure, loin d'inquiéter la lieutenante, beaucoup trop rationnelle pour se laisser aller à des théories extravagantes. Ce livre, probablement un exemplaire unique et très ancien, avait sans doute été enfermé ici pour être protégé de la poussière, voilà tout. Pourtant, Gabrielle avait l'intuition presque viscérale que ce qu'elle tenait entre les mains n'était pas à prendre à la légère.

En déroulant le parchemin, elle remarqua toute une série de symboles ainsi qu'un texte qu'elle ne parvenait pas à déchiffrer. Elle le laissa donc sur le côté puis se mit à feuilleter doucement les pages du livre relié de cuir.

[Smidge]

Ce livre ne lui inspirait rien de bon. Gabrielle avait l'impression de mettre un pied dans un univers dans lequel elle n'était pas la bienvenue... De ce qu'elle put en déduire à première vue, il s'agissait de formules diverses d'alchimie obscure... La majorité du texte était écrit dans une langue ancienne - sans doute en latin - et elle n'y comprenait goutte.

Un nouveau détail retint cependant son attention... Un papier libre était glissé à l'intérieur de la reliure. Un papier beaucoup plus récent, qu'elle identifia rapidement. Il s'agissait d'un bon de commande, pour le moins incongru. "Boite-livre : le jardinage pour tous, en 50 leçons". Quatre francs et cinquante centimes. Le nom de la société lui était parfaitement inconnu.

Qui pouvait avoir glissé ce document là dedans ? Et pourquoi l'avoir enfermé à clef avec ce livre des plus étranges ? Était-ce une erreur ? Le mystère s'épaississait à mesure de ses découvertes, d'autant qu'elle n'avait pas de preuve tangible que tout ceci était lié de quelque façon que ce fut au meurtre...

Gabrielle tira brièvement sa montre de sa poche. Il était déjà presque 11h et demie... Peut-être était-il temps de permettre aux invités de rejoindre leur chambre, ou éventuellement de procéder à la lecture du testament. Ou peut-être pas...

[Echo]

Onze heure et demi ? Elle avait passé plus de temps que prévu à mettre son nez partout, encore une fois. Cela faisait longtemps que le majordome devait lui avoir ramené ses affaires, afin qu'elle puisse mesures les empruntes laissées sur le lieu du meurtre. Gabrielle ferma le livre et pendant un instant, elle se demanda ce qu'elle allait en faire. Finalement, elle décida de le replacer dans le tiroir avec le parchemin et de le verrouiller à nouveau. Au moins, elle saurait où le trouver si elle avait besoin de l'examiner une autre fois. Elle plia le bon de commande et le fit glisser dans sa poche arrière de pantalon avec la clé du tiroir.

Chandelier en main, elle quitta la pièce, prenant soin de refermer la porte derrière elle, et retourna sur le lieu du crime.

[Smidge]

Décidément, elle n'aimait pas ce couloir, avec ces têtes de gargouilles... Paradoxalement, Gabrielle fut soulagée de retrouver le corps inanimé du Comte gisant dans son sang.

Mais le soulagement laissa rapidement sa place à un agacement prononcé : le majordome n'était toujours pas là.

[Echo]

À moins qu'il ne se soit fait également assassiné -et c'était d'ailleurs la seule excuse que Gabrielle accepterait- elle ne comprenait pas ce qui avait pu retarder autant le majordome. Elle se rendit dans la cuisine et posa son chandelier sur une table avant de partir à la recherche du notaire pour s'occuper de cette histoire de testament. Elle espérait qu'il n'ait pas lui aussi soudainement disparu et qu'elle le trouverait là où elle l'avait laissé, avec tous les autres invités. Si elle devait se mettre à leur courir après dans cet immense château, cela jouerait sur son humeur et n'arrangerait les affaires de personne.

[Smidge]

Dans la pièce voisine, la cuisinière achevait le séchage et le rangement de la vaisselle dans les innombrables placards et tiroirs qui l'entouraient. Elle semblait davantage posée qu'à son premier passage, et elle daigna cette fois lui adresser une discrète salutation, que Gabrielle lui rendit tout aussi tacitement.

Les invités ne semblaient pas avoir bougé - elle nota rapidement la présence du notaire - mais aucune trace de monsieur Martineau... Elle se félicita intérieurement de ne pas s'être séparée de ses effets personnels les plus précieux, mais elle avait néanmoins besoin de quelques outils tout au moins utiles, si ce n'était indispensables.

Elle s'approcha de maître Marquand, qui blêmit ostensiblement à son arrivée.

"Je... je peux faire quelque chose pour vous ?", bégaya-t-il maladroitement.

[Echo]

Même si rien ne le laissait paraître, Gabrielle était satisfaite de voir la tension chez le notaire. Il ne semblait plus du tout aussi enthousiaste qu'à son arrivée.

- En effet, je pense qu'il est plus que temps de nous occuper de cette histoire de testament. Qu'en dîtes-vous ?

Cela lui fournirait sans doute quelques pistes pour la suite de son enquête et elle était curieuse de savoir où s'envolerait toute la fortune du Comte...

[Smidge]

"J'ai... demandé à Émile s'il jugeait utile de vous en parler. J'en conclus que vous l'avez croisé ?"

Il haussa les sourcils et le ton dans un élan d'espoir.

"Je crois qu'il est parti trouver une certaine... Marjorie, il me semble.", ajouta-t-il.

[Echo]

- Marjorie ? La femme de chambre ?

Ainsi donc, le majordome était parti la trouver, mais cela n'expliquait pas pourquoi il mettait autant de temps. Peu importe, Gabrielle voulait régler cette histoire de testament maintenant, elle irait trouver cette femme de chambre plus tard.

- Peu importe. Pouvons-nous nous occuper du testament ? demanda t-elle en haussant un sourcil. Visiblement, elle était pressée d'en finir avec ça et de passer à autre chose.

[Smidge]

"Bien entendu..., répondit-il, hésitant. Mais c'est que... c'est Émile qui sait où Lucien le rangeait, et... "

Il déglutit.

"Enfin, j'en ai bien une copie dans mon bureau... à l'office... Mais le temps que je rentre - sans parler de l'inondation..."

Gabrielle sentit monter un énervement soudain. Mais où disparaissaient tous ces gens, alors qu'elle leur avait explicitement demandé de se tenir disponibles ?

Elle n'avait pas entamé une réponse que la porte du salon s'ouvrit tout à coup, découvrant le majordome revenant d'elle ne savait où... son manteau sur son bras.

[Echo]

Gabrielle soupira. Évidemment, cela ne pouvait pas être si simple. Elle faillit lui répondre qu'il était impossible d'aller chercher quoi que ce soit où que ce soit, à cause de l'arbre tombé au milieu de la route, mais elle n'en eût pas l'occasion. La porte du salon s'ouvrit sur le majordome et la lieutenante sentit l'énervement la quitter quelque peu, mais pas encore complétement.

- Bien, il semblerait que nous allons finalement réussir à régler ça avant demain matin, dit-elle, une pointe d'agacement dans la voix.

[Smidge]

Le majordome s'approcha d'elle, un large sourire sur le visage.

"Je suis vraiment désolé, lieutenant, s'excusa-t-il en s'inclinant, ma présence était requise ailleurs et je me suis quelque peu attardé..."