[Lieu] Bortheias

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald salua modestement puis leva la main pour avoir le silence. Les derniers convives avaient terminé leurs plats et sirotaient à présent leur verre de vin ou un bol d'infusion. Maedron était appuyé à son comptoir, l'expression amusée. Une serveuse vint déposer une bouteille de vin clair sur la table que partageaient la rôdeuse et l'Eldathien. Celui-ci écarquilla les yeux de surprise en déchiffrant son étiquette puis leva les yeux vers le drow, qui lui adressa un clin d'oeil. Dès qu'Astrée y goûta, elle réalisa que c'était un nectar de grande qualité, qu'il lui faudrait savourer avec félicité.
« Bon. Une gente dame de ma connaissance m’a lancé un défi, tout à l’heure. Elle m’a demandé si je pouvais lui interpréter une chanson sur la nature et le printemps, et peut-être même la montagne… Je dois dire que ce n’est pas ma spécialité, les chansons champêtres. J’ai donc un moment songé à tricher, à aller chercher le texte d’un autre… Et puis finalement, je me suis dit : Reynald, c’est indigne de toi. Tu as suffisamment d’expérience, maintenant, pour te lancer dans ce genre d’aventures. Mais je vais vous demander un coup de main. »
Il leva les yeux et jeta un sourire sur l’assemblée.
« Qui peut me donner un mot qui rime avec printemps ? »
Il sourit.
« Allez, ne soyez pas timides. »
Bref silence.
« Heu… vent ?
— Vent. Qui dit mieux ?
— Sentiments !
— Content ?
— Champ ?
— Temps ?
— Printemps, temps, c’est pas terrible, mais c’est bien essayé.
— Goéland !
— Serpent !
— Dragon d'argent !
— Du calme, du calme. C'est parti. »
Il s’éclaircit la gorge et décocha un regard mutin à Astrée, avant de se pencher sur son instrument.
« C’était un jour de printemps,
J’me promenais dans les champs,
Quand j’ai vu un gros serpent,
Cheminer dans le grand vent.

Il m’a dit, mon pauvre hère,
Retourne vite dans ta chaumière,
Je vais manger la lumière,
Je suis l’esprit de l’hiver.

Et je lui ai répondu,
Mais ton temps est révolu !
Le printemps est apparu !
Perdurer c’est défendu.

Il n’était pas très content,
M’a regardé en sifflant,
Maudit sois-tu vil manant
De protéger le printemps

Il a voulu m’attaquer
Espérant m’empoisonner
Moi j’ai couru dans les prés
Pour pouvoir lui échapper

Marguerite et coquelicots
Chêne, seigle et puis bouleau
Nénuphars au bord de l’eau
Et le galop des chevaux

La biche, le faon, le furet
Le saule pleureur, le bleuet
La perce-neige, le muguet
Le renard et le poney…

La nature s’est emportée
Le reptile s’est éloigné
L’hiver avait trépassé
Le printemps est arrivé !

Dame, je suis bien conscient,
De la faiblesse de mon chant,
Il est bon d’être indulgent,
Avec mon coeur débutant... »

Et il la gratifia, bien évidemment, d'un clin d'oeil enjoué.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Le vin était absolument divin. Maedron les soignait vraiment trop bien. Ils allaient finir par lui vider sa cave...
Elle goûta doucement une gorgée, puis une autre, savourant lentement... et faillit s'étrangler lorsque Reynald fit allusion à elle. Heureusement, il ne l'avait pas nommée ni même regardée, il se contentait de jouer avec son public... Oh, non, ça y est, il l'avait regardée, et elle était sûre que tout le monde l'avait remarqué. Bon, peut-être pas après tout ? Mais elle sentait la rougeur sur ses joues et aurait largement préféré se trouver tout au fond de la salle. Heureusement que le public n'avait d'yeux que pour le Sorlyn.

Et puis, finalement, il s'en sortait pas mal du tout. C'était vraiment le roi de l'improvisation poétique. Et il savait trouver la mélodie qui convenait parfaitement.
Elle écouta de toutes ses oreilles puisque la chanson était composée exprès pour elle. Étonnée -soulagée? ou peut-être déçue?- de ne pas y trouver d'allusion à la montée de la sève, au réveil des coeurs endormis, à l'amour qui fleurit ou quelque chose comme ça... elle l'aurait bien vu chanter ce genre de chose exprès pour la faire rougir. Cela dit, il n'y en avait pas besoin de tant pour la troubler : le clin d'oeil qu'il lui lança à la fin suffit à colorer à nouveau ses joues. Mais elle lui répondit néanmoins d'un sourire joyeux, leva son verre à sa santé, avant d'applaudir de bon coeur. En évitant soigneusement de regarder quiconque dans la salle, espérant que personne n'avait remarqué le clin d'oeil.

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald profita de la fin de sa chanson pour faire une petite pause. Tybert se leva pour lui apporter un verre de vin et ils échangèrent quelques mots. A voir la mine du Sorlyn, il était tout à fait enchanté du breuvage que Maedron leur avait sélectionné. Tandis que l'Eldathien lui parlait, Reynald jeta un oeil en direction de leur table et sourit à Astrée.
Quelques minutes plus tard, Tybert revenait vers elle et Reynald réaccordait son instrument avant de s'éclaircir la gorge.
Il enchaîna sur deux contes très dissemblables, auxquels il ajouta ses petits effets magiques et quelques ritournelles pour leur donner plus d'ampleur. Le premier était une histoire sombre, ayant pour cadre un village maudit dans la Vallée du Nirvana, dans lequel ne naissait plus aucune fille depuis que Lliira avait décidé d'en punir les habitants. Le second était un récit rocambolesque mettant en scène cinq adolescents à Eredhun et leur stratagème incongru pour se venger d'un clerc de Mystra leur ayant interdit de pêcher sous le pont du Temple. Durant le premier, Reynald fit frémir la salle, durant le second, il la fit rire aux éclats, avec l'aisance tranquille d'un conteur rompu à ce genre d'exercices.
Tandis que Tybert et Astrée l'écoutaient, une troisième personne vint s'asseoir à leur table, discrète et silencieuse. La rôdeuse crut d'abord qu'il s'agissait de Maedron mais réalisa, en lui jetant un réel coup d'oeil, que c'était Goran de Bortheias.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Astrée écoutait avec passion. La première histoire la fit frémir. Il racontait si bien qu'elle en paraissait réelle. Pourtant, non, ce n'était pas possible, c'était trop affreux... La seconde la fit rire aux éclats. Elle était prête à parier que les cinq adolescents en question n'étaient autres que lui-même, Tybert, Albérich Megrall, la prêtresse de Séluné, et leur comparse dont il n'avait pas dévoilé le nom. Ce qui rendait l'histoire d'autant plus cocasse pour elle.

Un éclat de rire mourut sur ses lèvres lorsqu'elle prit conscience de l'identité de la personne qui venait de s'asseoir à leur table. Non, ce n'était pas possible, pas lui ! Mais qu'est-ce qu'il faisait là ? Et puis, qu'est-ce qui lui prenait de venir s'asseoir à leur table ? Comme s'il n'y en avait pas des dizaines d'autres places !
Elle serra les dents, et avala une gorgée du délicat nectar en silence. Pour se donner une contenance. Pour se donner du courage peut-être. Pourquoi ce type venait-il lui gâcher sa soirée ? En tout cas, il était hors de question qu'elle lui adresse la parole la première, et elle ne lui répondrait que le strict minimum exigé par la politesse. Elle laisserait Tybert faire la conversation ! Ce qui risquait fort de ne pas les mener bien loin.
Histoire qu'on ne puisse pas lui reprocher d'être impolie, elle inclina très légèrement la tête dans sa direction en guise de salut, puis se concentra de son mieux sur le spectacle, feignant d'être trop passionnée pour se préoccuper d'autre chose. Mais les contes avaient subitement perdu de leur saveur. Elle tenta de son mieux de faire abstraction de la présence indésirable de Goran, et jeta un regard en coin sur Tybert pour voir comment il réagissait. Sans doute pas, comme d'habitude...

[Galathée]

Quête : Equité

Tybert jeta un regard à Goran et inclina poliment la tête, Goran répondit d'un sourire. Reynald avait recommencé à accorder son luth, écoutant attentivement le son que lui renvoyait sa quatrième corde. Il jeta un oeil vers leur table, tranquille et satisfait, puis reconnut son beau-frère et son expression se figea. Pendant un moment, les deux hommes s'observèrent. Reynald semblait comme paralysé. Puis ses lèvres formèrent un léger sourire, qui n'avait rien d'ironique ou de revanchard, un petit sourire triste, peut-être, et il hocha la tête deux fois, doucement. Il baissa les yeux, pinça les lèvres, l'air soudain très concentré, et tira quelques notes de son instrument, avant d'entamer une mélodie plus complexe qui, Astrée le comprit, préfigurait d'une chanson triste.

"Sybille ô Sybille,
Et le cheval s’est emballé,
Sybille ô Sybille
Petite reine s’en est allée,
C’était le printemps
Dans ta prairie parée de fleurs
Et en un instant
On m'avait arraché le cœur

Sybille ô Sybille
Nulle justice dans ce destin
Sybille ô Sybille
Qui t’a ravie un beau matin
Je suis étranger
Sans cette partie de moi, de toi,
Qui s’est envolée
Je n’ me reconnais presque pas

Sybille, ô, Sybille
Nous étions né le même jour,
Sybille, ô, Sybille
Rien ne ressemblait à l’amour
Que nous partagions,
Et qui leur faisait un peu peur,
Nos rires, nos chansons,
Identiques, un frère et une soeur

Sybille, ô, Sybille
Où que tu sois, ange et lumière,
Sybille, ô, Sybille
Pardonne à ceux qui sur la terre,
Doivent continuer,
Dans ce monde devenu plus froid,
A jamais privés
De ta présence et de ta joie

Sybille, ô, Sybille
Je voudrais pouvoir t’embrasser
Sybille ô Sybille
Je n'ai pas su te protéger
Il est des jours noirs
Où ton visage me hante si fort
J’ai besoin de croire
A une vie après la mort

Sybille, ô, Sybille
Je ne peux pas flancher souvent,
Sybille, ô, Sybille
Rien ne met fin à mes tourments
Que tout le bonheur
Que je sais tu voudrais pour moi,
Je sèche mes pleurs,
Et toujours je te garde en moi."

Au moment du dernier accord, Astrée réalisa que si le clerc était manifestement ému par ses propres vers, son voisin malvenu versait des larmes silencieuses.

[Voyageuse]

Trop belle la chanson !

Quête : Equité

Sybille... Etait-ce le nom de la soeur de Reynald, de l'épouse de Goran ? Sans doute.
Elle ressentait fortement l'émotion des deux hommes. Elle les regarda tour à tour, emplie de compassion, oubliant même la colère larvée qu'elle ressentait instinctivement envers Goran. Et eux-mêmes semblaient avoir oublié leurs griefs, unis, pour une fois, dans la même peine.
Elle aurait voulu trouver quelque chose à dire. A Reynald, qui était trop loin, ou même à Goran... mais il n'avait pas forcément envie de savoir qu'on l'avait vu pleurer. Elle ne dit rien, se contentant d'un maigre sourire compatissant vers son voisin de table, puis, un peu plus assuré, vers le sorlyn.

[Galathée]

Quête : Equité

Goran lui rendit son sourire et s'essuya lentement les yeux du bout des doigts, stoïque dans son chagrin, peut-être satisfait aussi. Reynald eut une légère grimace, comme s'il était désolé d'avoir, un instant, plombé l'ambiance de la soirée. Dans son impassibilité, même Tybert semblait touché et Maedron, à son comptoir, avait l'air franchement inquiet. Les spectateurs paraissaient embarrassés, on n'entendait des toux discrètes, le murmure de quelques conversations discrètes. Puis l'expression du clerc changea, un sourire revint sur ses traits, et il jeta un regard malicieux sur l'assemblée.
" C'est le moment de pousser les tables." déclara-t-il, très sérieux.
Pendant quelques secondes, personne ne bougea, puis les convives des premières tables se levèrent tous ensemble et dégagèrent une petite piste de danse, sous les yeux satisfaits de l'artiste.
" C'est le moment de vous trouver une partenaire, de vous choisir un cavalier..." dit-il.
Plusieurs couples se formèrent et s'approchèrent de l'estrade.
" Voulez-vous danser, gente dame ?" demanda alors Goran, juste à côté de la rôdeuse.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Non, elle ne voulait pas danser. Enfin, pas avec lui. Elle aurait adoré danser... avec quelqu'un qui n'était absolument pas disponible puisqu'il assurait l'animation. A la limite, avec Tybert ? Non, même pas. Et surtout pas avec Goran. Elle aurait dû s'attendre à sa proposition... Mais elle l'espérait trop pris par son chagrin pour y songer...
Mais... pouvait-elle refuser ? Serait-ce impoli ? Non, la question était... oserait-elle refuser, alors qu'après tout il les avait aidés, qu'ils avaient un marché en cours avec lui où il pouvait très bien annuler le sursis accordé ? Bien sûr, elle pouvait prétendre être trop fatiguée et monter dans sa chambre. Elle finirait par le faire s'il la harcelait trop.
Elle soupira.
- Je ne sais pas vraiment danser, je n'en ai guère l'occasion, ce n'est pas trop ma tasse de thé....
Un demi-mensonge, autrefois Gwendal s'était fait une joie de lui apprendre certaines bases... Il y a longtemps.
- Il y a certainement d'autres cavalières bien plus douées que moi dans la salle. Mais si vraiment vous ne trouvez personne, je veux bien accepter. Juste pour une danse.

[Galathée]

Quête : Equité

Goran ne prit pas ombrage de son refus et lui décocha un sourire entendu.
" Je ne peux pas chercher d'autre cavalière, cela briserait mon anonymat." lui dit-il, goguenard.
Il ne lui reposa cependant pas la question.
Reynald semblait heureux du petit attroupement qui avait répondu à son appel.

" Bon, pour terminer cette soirée sur une note un peu plus endiablée, je vais vous proposer un classique qui vient de loin, de la cité incontournable, notre très chère capitale, bien que, je dois l'avouer, je n'y ai personnellement jamais mis les pieds. Mais peut-être que certains d'entre vous en sont originaires, peut-être que d'autres s'y rendent, justement, et puis pour les derniers, ce sera un souvenir ou un mirage. L'air vaut la peine d'être dansé.

Dans ma ville, il y a des marins,
Des voleurs et des paladins,
Des fantômes, des princes, des catins,
Des marchands et des comédiens,
Dans ma ville, il y a des guerriers,
Des forgerons et des fermiers,
Des capitaines, des boutiquiers,
Des prêtres, des rôdeurs, des sorciers

Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
La cité m'a jeté un sort
Je danserai jusqu'à la mort
Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
Je danse pendant que tout l'monde dort
Je danse, je danse, je suis plus fort

Dans ma ville, y'a un sanctuaire,
Où vit le dieu de la lumière,
Des jardins, le bord de la mer,
Un général prêt à la guerre,
Il y a une université,
Des comptoirs bien achalandés,
Dans le Luménien Libéré,
On parle des votes à l'assemblée.

Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
La cité m'a jeté un sort
Je danserai jusqu'à la mort
Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
Je danse pendant que tout l'monde dort
Je danse, je danse, je suis plus fort

Dans ma cité, on pleure parfois,
On manque de confiance en soi,
On est sujet au désarroi,
Puis on laisse éclater sa joie
Dans ma ville règne l'espérance
L'amour, le bonheur, la confiance
Et si tu as un peu de chance
Tu viendras rejoindre la danse.

Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
La cité m'a jeté un sort
Je danserai jusqu'à la mort
Et moi je danse, je danse encore,
Dans le Palais et sur le Port,
Je danse pendant que tout l'monde dort
Je danse, je danse, je suis plus fort."

S'ensuivirent quelques mesures musicales, jusqu'à épuiser le dernier danseur, et Reynald s'arrêta pour saluer. Goran était reparti, subrepticement, pendant son morceau.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Astrée fut soulagée que Goran n'insiste pas davantage. Elle aurait accepté mais n'y aurait pris nul plaisir.
Etrange visite, au fond. Elle aurait parié qu'il ne mettait guère les pieds ici, surtout lorsque son beau-frère y était. Et d'office, ce dernier avait su ce qu'il attendait de lui. Comme un pacte tacite entre eux...
Elle avait écouté la chanson luménienne avec un sourire rêveur, sans prêter attention au départ de Goran. Elle fut toute surprise de trouver sa chaise vide. Et presque soulagée... Une discussion entre lui et Reynald n'aurait pas été de tout repos.
Elle termina son verre du si délicieux breuvage, et sourit au sorlyn. Il devait être épuisé...

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald ne tarda d'ailleurs pas à remballer gentiment les quelques personnes qui étaient venues lui parler et à se diriger vers leur table. De plus près, sa fatigue était bien plus apparente, il avait les traits légèrement tirés, une fine couche de sueur sur le front et il dégageait le parfum légèrement marqué de l'effort. Il tira cependant une chaise et s'assit avec eux.
" Ah, mon dos !" fit-il en s'appuyant avec félicité contre le dossier.
Une serveuse s'arrêta derrière lui et lui déposa une grande carafe d'eau, ainsi qu'un verre, et il la remercia chaleureusement.
" Voulez-vous un bain ? demanda-t-elle.
— Non, c'est gentil."
Elle s'éloigna sur une courbette, et, peut-être, une expression un peu contrariée. Peut-être pas.
" Je me baignerai dans les torrents de montagne dès demain." se défendit le Sorlyn, dès qu'elle se fut éloignée.
Un rare sourire bourgeonna sur les traits de Tybert.
" Sainte, sainte félicité." dit l'Eldathien.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Astrée répondit d'un sourire amusée à celui de Tybert. Elle aussi aimait l'eau fraîche des torrents de montagne.... et il était si rare de voir l'Eldathien sourire.
Elle saisit la bouteille du délicieux nectar qu'ils avaient entamée, et en remplit un verre qu'elle tendit à Reynald.
- Tiens, bois ça pour te remettre, tu l'as bien mérité...
Entre l'émotion suscitée par la visite impromptue de Goran, et l'énergie nécessaire pour faire vibrer la salle avec lui, il devait être à bout de fatigue. Elle-même se sentait un peu vidée. Trop d'émotions.

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald accepta le verre avec un sourire las.
" J'aimerais festoyer toute la nuit avec la satisfaction du travail accompli mais nous devons nous lever à l'aube et partir sur les sentiers escarpés. Il serait sans doute bon que nous vidions nos verres et que nous allions nous coucher."
Tybert leva un sourcil, comme surpris d'une telle proposition.
" Quoi ? Tu es inquiet parce que je suis raisonnable ? Je suis clerc, je suis sage, c'est écrit dans le contrat."
L'Eldathien lui décocha une grimace incrédule.
" C'est vrai, pourtant !"

[Voyageuse]

Quête : Equité

Astrée rit de bon coeur.
- Je croyais qu'un artiste ne pouvait pas se passer de son cinquième en-cas...
Puis elle se dit que Reynald devait être vraiment épuisé pour se montrer aussi raisonnable, et elle reprit, avec plus de sérieux.
- On n'est pas non plus obligés de partir à l'aube. Tu dois être épuisé. Prends le temps de te reposer autant que tu en as besoin, et de manger un morceau, peut-être... Et tant pis si on fait une étape un peu plus courte, non ? Enfin, c'est vous qui connaissez la région, peut-être que je me trompe.

[Galathée]

Quête : Equité

" Bon, un rapide en-cas, alors... et puis je monte me coucher."
Tybert avait toujours l'air circonspect.
" Je te signale que j'ai passé la nuit dernière partiellement attaché à un mur !"
L'Eldathien leva les yeux au ciel.
" Oh, pitié, je parie que tu vas jouer les victimes pendant les six prochains mois." souffla-t-il.
Le Sorlyn manqua lui rétorquer quelque chose, mais Maedron s'intercala entre eux et posa une assiette de fromage devant le rouquin.
" C'était une bonne soirée, Reynald. Si tu as encore de la voix au sortir de ta détention champêtre, je suis volontaire pour une petite veille de résidence. Mes habitués vont avoir un goût de trop peu et c'est mauvais pour les affaires.
— Tu sais bien que Goran va me presser comme un citron. Il va vouloir que je chante pour son lever, pour son bain, que je chante quand il chevauche, quand sa jument préférée accouche, pour couvrir les bruits quand il va pisser, à midi pour ses invités, une berceuse avant la sieste, puis toute la soirée. J'aurai de la chance s'il me laisse dormir : il va falloir que je compose trente-six chansons à la gloire de roussins quelconques.
— Le Fier Etalon de Bortheias est une belle chanson.
— Oui, qui m'a quasiment valu le fouet, la dernière fois que je l'ai interprétée.
— Je pensais qu'il avait payé un clerc pour la faire effacer de ta mémoire.
— Je cours beaucoup trop vite pour ça !"
Il secoua la tête et sourit.
" Mais je viendrai, Maedron. Il faudra bien que je me retape quelque part."

[Voyageuse]

Quête : Equité

- Le Fier Etalon de Bortheias... je serais curieuse d'entendre ça... Non, je plaisante, je te rassure, je ne veux pas te causer davantage d'ennuis !
La description des attentes présupposées de Goran l'avait fait sourire. Elle avait du mal à le cerner. Il l'horripilait au plus haut point, et puisqu'il était si souvent brouillé avec Reynald, elle ne comprenait pas pourquoi il le voulait sous la main. Mais effectivement, il était peut-être bien capable d'abuser de la situation de la sorte. Pauvre Reynald. Tout ça, indirectement, par sa faute à elle... enfin, celle de son étalon. Mais, il semblait prendre la chose avec philosophie, et elle le sentait parfaitement de taille à se défendre...

[Galathée]

Quête : Equité

Maedron promit de leur préparer un petit déjeuner solide pour le lendemain et un balluchon pour la route. Il leur souhaita ensuite la bonne nuit et retourna à ses clients : la soirée était bien entamée mais la salle ne désemplissait pas. Reynald se sustenta tout en gardant un oeil attentif sur ce qui se déroulait autour de lui, comme aux aguets. De temps en temps, son regard passait sur Astrée et il souriait légèrement, mais il ne relança pas la conversation. Il finit par étouffer un bâillement derrière sa paume.
" Je crois que je vais vous fausser compagnie, mes amis, et aller me reposer."
Tybert paraissait toujours surpris mais quand Reynald se leva, il jeta un coup d'oeil à Astrée.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Astrée croisa le regard de Reynald sans trop savoir quoi en penser. Sans trop vouloir se poser la question ni d'ailleurs en avoir le temps. Mais elle réagit d'instinct en se levant à son tour.
- Je vais y aller également. La nuit dernière a été rude, ajouta-t-elle comme s'il lui fallait absolument se justifier.
Elle eut la sensation que ses joues se coloraient légèrement. Mais non, Reynald ne l'avait regardé à ce moment-là que par hasard et ce n'était nullement une invitation à le suivre. Ou bien, peut-être avait-il envie de lui parler, après tout.
Qu'est-tu en train de faire ? Non, d'imaginer faire, simplement. Elle avait trop d'imagination...

[Galathée]

Quête : Equité

Bien évidemment, Tybert ne demeura pas seul à table et se leva à son tour. Les trois compagnons gravirent donc les escaliers ensemble et quand ils parvinrent au troisième étage, les deux clercs souhaitèrent la bonne nuit à Astrée puis s'éclipsèrent vers leur chambre bleue, l'abandonnant sur le pas de la sienne. A aucun moment Reynald ne sembla se surprendre de la manière dont les choses se déroulaient, il ne jeta de regard ni à la jeune femme, ni à son comparse, se contentant de bâiller de temps en temps, comme quelqu'un qui s'endormira avant même d'avoir rabattu la couverture de son lit.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Et voilà, elle avait trop d'imagination. Ou pas. De toute façon il y avait Tybert. Oh, et puis cela n'avait guère d'importance... Elle était épuisée, de toute façon. Fatiguée par... leurs aventures de la veille. La soirée et ses émotions. La journée et ses émotions. Ce fichu cœur qui ne pouvait s'empêcher de battre un peu trop fort quand Reynald la regardait, lui troublant les idées et lui faisant imaginer absolument n'importe quoi.

Elle se débarbouilla rapidement, enfila sa tunique de nuit et se glissa sous les draps. Elle se sentait complètement vannée. Mais, décidément... elle n'avait pas sommeil. Les idées qui tournaient, encore et encore. Reynald. Sa soeur jumelle... le lien entre eux expliquait-il l'espèce de haine entre Goran et lui ? Cette soirée avait dû remuer de bien tristes souvenirs, pour l'un comme pour l'autre. Et puis, il y avait eu les autres souvenirs tristes, ceux concernant Albérich.... Puis elle sourit en repensant au jeu de piste, à ses yeux qui brillaient tant en lui proposant. Ils avaient passé une journée merveilleuse, seuls tous les deux. Et elle avait encore neuf jours à profiter de sa présence. Oui... sauf qu'ils ne seraient plus seuls. Il y aurait Tybert... Elle aurait dû accepter qu'il reste en arrière l'autre jour. Elle avait bêtement laissé passer sa chance. Quelque part au fond d'elle, une petite voix s'offusqua de ce regret, sans qu'elle l'entende réellement. Elle souriait légèrement, ressassant les souvenirs de la journée, des journées précédentes. La tête beaucoup trop emplie de lui. Pas sommeil. Pourtant il faudrait dormir, la journée serait longue le lendemain...

Elle prit conscience qu'elle guettait des bruits de pas. Absurde. Complètement stupide. Il était épuisé, et vu le voyage qui les attendait, il n'allait certainement pas se relever pour composer, même s'il n'arrivait pas à dormir. Et puis, pourquoi n'arriverait-il pas à dormir? Non, c'était absurde d'attendre. Et puis, même s'il se levait, qu'est-ce que ça ferait ?
Une petite sonnette d'alarme, au fond d'elle, tinta plus fort. Qu'attendait-elle exactement ? Elle n'en savait rien. Elle refusait de le savoir. La petite voix de la raison lui rappela qu'elle avait une vie, ailleurs. Et qu'elle risquait de la ficher en l'air stupidement. Mais elle s'en fichait. Non, ce n'était pas exactement ça, c'était simplement... une autre vie, ailleurs, bien trop lointaine. Oui, elle risquait de la ficher en l'air. Mais que pouvait-elle faire d'autre, face à ce coeur qui battait trop fort, à cet émoi qui la prenait aux moments les plus inattendus, face à la pulsion de vie qui l'appelait, ici et maintenant ? Elle n'avait pas d'autre choix possible que de vivre cette passion inattendue. Et c'était merveilleux...

Elle se tourna, encore une fois. Oublie un moment tout ça. Cesse de le guetter, il dort déjà. Il faut dormir...
Mais il y avait toujours son visage en gros plan dans ses pensées, sa voix, son rire, ses yeux...
Bon, elle finirait bien par tomber d'épuisement...

[Galathée]

Quête : Equité

Mais elle n'avait pas encore eu le temps de rendre réellement les armes lorsqu'elle entendit qu'on frappait à la porte.
Ou peut-être était-ce son imagination... Le vent dans les volets. Le craquement d'une corniche.
Non, on frappait vraiment à sa porte.
" Dame Astrée, es-tu déjà dans les limbes ?" souffla une voix étouffée par le battant de bois.

[Voyageuse]

Quête : Equité

Elle avait déjà bondit du lit, avant même d'entendre sa voix. Dès qu'elle avait compris que ce n'était pas son imagination. De toute façon ce ne pouvait être que lui...
- J'arrive...
Elle ouvrit la porte, réalisant qu'elle ne l'avait d'ailleurs pas verrouillée... un acte manqué dont elle savait parfaitement la cause.
Elle lui sourit, le coeur battant décidément trop fort.
- Entre, fit-elle, presque timidement.

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald se tenait sur le pas de la porte, faiblement éclairé par les lampes du couloir. Il lui décocha un sourire malicieux et se glissa à l'intérieur de la pièce obscurcie. Dès qu'elle eut refermé derrière lui, ils se retrouvèrent dans un noir quasi total.
" Je suis vraiment vraiment désolé..."
Ce qui ne semblait pas du tout vrai.
"... de te déranger alors que tu es si fatiguée et de t'avoir, pire, peut-être réveillée, mais..."
Il la chercha du bout des doigts, à tâtons, et posa une main sur son épaule.
" Tu avais promis de me dire ce que tu pensais de ma chanson sur le printemps. Et si nous attendons demain, tu auras sûrement tout oublié !"

[Voyageuse]

Quête : Equité

L'obscurité avait un avantage indéniable : elle masquait parfaitement la couleur écarlate de ses joues.
Astrée était certaine que la situation amusait beaucoup le Sorlyn, à voir son expression malicieuse en entrant. Et son excuse absurde sur la chanson à commenter la fit sourire. Il était évident qu'il ne venait pas pour ça. Et qu'il prenait un malin plaisir à les voir tous deux plongés dans le noir.
Elle osa à peine se dire qu'elle se faisait des idées... Trop d'imagination ?
- Et c'est tout ce que tu as trouvé comme excuse pour oser me réveiller en pleine nuit ? répliqua-t-elle d'un ton amusé, posant à son tour sa main sur la sienne. Mais si c'est ce que tu veux savoir... Ta chanson était parfaite... Et puis... je ne dormais pas encore...
Elle tendit l'autre main, à tâton, cherchant son autre main, en un geste instinctif. Heureusement qu'il ne pouvait pas entendre les battements de son coeur...
- Je... je devrais peut-être nous trouver un peu de lumière..., souffla-t-elle d'une voix un peu troublée, réalisant au même moment qu'elle n'en avait pas vraiment envie. Son coeur battait trop fort. Comme l'autre jour, sous l'orage. Le noir... c'était pas si mal...

[Galathée]

Quête : Equité

" La lumière est partie, c'est la nuit, à présent." fit Reynald, d'une voix douce.
Il la saisit par le poignet et elle sentit ses doigts se refermer juste à la base de sa main.
" Hum, voilà un coeur bien emballé... Est-ce qu'il y a quelque chose qui t'effraie ? Est-ce ce noir tout autour de nous ?"
Il s'était insensiblement rapproché. La main qu'il avait laissée sur son épaule bougea doucement, remonta le long de son cou, jusqu'à sa joue, où elle s'arrêta.
" Ou est-ce que c'est autre chose ?"

[Voyageuse]

Quête : Equité

Son coeur s'était emballé. Elle avait peur, quelque part, encore un peu... De ce qu'elle ressentait, de ce qu'elle allait faire. Mais ce n'était pas la peur qui lui faisait battre le coeur si fort.
- Ça doit être autre chose, je suppose... souffla-t-elle doucement. Et... qu'est-ce qui peut bien t'amener à rendre visite à une dame à une heure pareille...?
Elle tendit la main, effleura doucement ses cheveux.

[Galathée]

Quête : Equité

Il se rapprocha encore un peu, bougea la tête pour inviter sa main à se faire plus entreprenante, et, lui lâchant le poignet, glissa sa paume au creux de ses reins, sans la presser, comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Quand il reprit la parole, son ton s'était fait moins joueur, plus sérieux.
" Astrée. Es-tu certaine de vouloir ceci ?" murmura-t-il.
Ses doigts écartèrent quelques mèches de son oreille, elle sentit son souffle, à présent tout proche.
" Quand nous nous sommes rencontrés, tu m'as parlé de ta vie à Luménis..."

[Voyageuse]

Quête : Equité

Il ne cherchait pas à abuser de la situation, et Astrée se sentit infiniment touchée par sa délicatesse. Mais il se rapprochait, encore... elle sentait son souffle tout proche. Et tout son corps à elle se tendait vers lui.
Elle dut faire un effort sur elle-même pour résister encore un instant et avouer, tout bas :
- Je sais... et il y a bien quelque part une petite voix de la raison qui tente de me répéter que je ne devrais pas. Mais... je ne peux pas continuer comme ça à ne plus dormir ni manger, à penser à toi sans cesse. C'est juste... que je ne peux pas résister à quelque chose d'aussi intense. J'ai essayé, au début... mais ce que je ressens est trop fort. Trop beau aussi... Je ne veux plus lutter contre. J'en ai trop envie. Et le reste n'a plus aucune importance...
D'une main derrière la nuque, elle l'attira doucement, et sans lui laisser le temps de répondre, posa ses lèvres sur les siennes. Il y avait trop longtemps qu'elle l'attendait...

[Galathée]

Quête : Equité

Reynald lui rendit son baiser, avec douceur, puis plus d'intrépidité, ses mains caressèrent ses épaules, jusqu'à l'attirer complètement contre lui. Ses paumes glissèrent le long de son dos, reposèrent un instant autour de sa taille et il la serra plus fort. Astrée sentit aussitôt l'intensité de son désir. Mais il n'alla pas plus loin, laissa ses mains vagabonder sur l'étoffe de sa tunique, puis, la relevant lentement, directement sur sa peau. La jeune femme reconnut les doigts d'un musicien, délicats mais précis, les ongles un peu plus longs de la main droite, les cals légers de la main gauche, et il suscita de légers fourmillements autour de ses hanches, dessina des caresses langoureuses dans le creux de son épine dorsale, empauma ses omoplates avant de nicher une main dans sa chevelure. Il détacha les lèvres une seconde des siennes, et elle devina un sourire même sans le voir, dans l'arrêt momentané de sa respiration.
" J'écrirai une chanson, un jour..." souffla-t-il avant de l'embrasser à nouveau.

[Voyageuse]

Astrée sourit aussi. Ne chercha pas à répondre. Dès le premier contact entre leurs lèvres, elle avait senti un torrent d'émotions et de sensations l'emporter sans qu'elle songe un seul instant à vouloir lui résister. Il n'y avait plus que lui, elle, leur corps qui s'appelaient et se désiraient si fort. Une passion intense, comme décuplée par cette trop longue attente, par ce combat vain qu'elle avait voulu mener contre elle-même.
Elle répondit avec fougue aux baisers, laissant ses mains descendre doucement le long de son dos, les glissant à son tour sous sa tunique, caressant doucement sa peau. Son dos. Le creux de ses reins. Ses hanches. Puis descendit plus bas, hardiment. Et commença doucement à le déshabiller.