[Haute-Forêt] Quête : Racines

[Voyageuse]

- C'était à moi de veiller sur lui, protesta Eärundra. Et je ne me suis pas assez méfiée moi non plus, je m'occupais de Léo et lui tournait le dos. J'ai réagi trop tard... Un coup de malchance surtout, ils auraient très bien pu passer un peu à distance.
- Mais vraiment, je n'ai rien, ne t'en fais pas... Je vais me changer, je déteste me sentir plein de terre... Et je n'ai pas envie d'assister davantage au spectacle, ajouta-t-il avec un geste vague en direction de Léo.
Il n'avait effectivement que quelques égratignures, et reprenait quelques couleurs en commençant à se diriger vers la rivière, son sac sur l'épaule. Il se tourna vers son demi-frère avec une pointe d'hésitation, comme s'il l'attendait.
- Tu crois que je risque d'autres mauvaises surprises près de l'eau ?

[Kasumi]

Kasumi hocha la tête et eut un geste apaisant en direction d’Eärundra, signifiant qu’il ne lui en voulait pas.

- Ce n’est pas plus votre faute que la mienne en effet : ces accidents peuvent arriver à tout instant dans ces bois, aussi paisibles peuvent-ils paraître.

Il irait lui parler plus longuement après, pour vérifier que la druidesse n’avait pas pris ombrage de sa remarque. Cette dernière n’avait pas été destinée à la remettre en question ou jeter une quelconque responsabilité sur elle. Décidément, il avait encore bien des progrès à accomplir pour savoir faire preuve de diplomatie. Et surtout avec les femmes ! Peut-être demanderait-il quelques conseils à Tilmandil qui devait être bien plus doué que lui pour les appréhender… Plutôt que de répondre à la question de ce dernier, il se contenta d’annoncer d’un ton calme :

- Je t’accompagne. Et puis Eärundra a besoin de se rapprocher de Léo. Ces moments de communion sont sacrés parmi les nôtres.

[Voyageuse]

Ils se dirigèrent donc vers la rivière, un peu en contrebas. Tilmandil se débarbouilla rapidement, jugeant l'eau bien trop froide, et se changea, secouant ses vêtements poussiéreux, essayant de laver quelques tâches. Il semblait assez déconfit, ce qui se traduisait chez lui par un silence inhabituel.
- Je n'aurais pas dû vous accompagner, finit-il par marmonner. La forêt, ce n'est pas mon domaine... Je ne vais être qu'un poids inutile, peut-être même vous retarder. Je ne sais pas ce qui m'a pris... J'avais envie de faire ma part, d'aider, mais je me rends compte que j'en suis bien incapable. Je suis fait pour chanter les héros, pas pour en être un...

[Kasumi]

Kasumi était resté silencieux lui aussi pendant les ablutions de Tilmandil, le laissant trouver son moment pour exprimer ses sentiments, pour évacuer sa frustration. Quand le barde s’apitoya comme il s’y était attendu, le rôdeur s’approcha lui avec une expression intransigeante et sincère, destinée à le secouer : il ne servait à rien d’alimenter ces attitudes défaitistes :

- Tu n’es pas un poids et tu me rappelles à chaque instant pourquoi je suis là moi aussi, à rechercher un père que j’ai fui il y a des années. Et tu es loin d’être inutile même si tu n’es pas dans ton milieu de prédilection : il arrivera un moment où tes talents, magiques et sociaux nous seront indispensables, même ici. Comme ils l’ont été dans les souterrains de Calimshan. Ta présence et tes sorts m’ont permis de tenir le coup à ce moment-là. Nous formons une équipe et retrouver notre père exigera que nous combinions toutes nos aptitudes aussi diverses que complémentaires.

Après l'avoir regardé dans les yeux, il ajouta d'un ton beaucoup plus léger :

Et au-delà de ça, qui raconterait mes exploits si tu n'étais pas là pour tout mettre en chansons ! Alors maintenant, tu devrais retirer la boue que tu as dans tes beaux cheveux à moins que tu cherches à passer pour une sorte d’ermite rôdeur taciturne ![/color]

[Voyageuse]

Le barde grimaça.
- Attends, tu crois vraiment que je vais me laver les cheveux dans de l'eau glacée ? Tu rêves !
Son ton était redevenu léger.
- Bon, j'imagine que je n'aurai pas le choix dans les jours à venir... Tu ne me feras pas chauffer un peu d'eau pour ma toilette, le matin ? Non, vraiment pas ? Pffffff... Tu n'as vraiment pas l'étoffe d'un aubergiste !
Il observa la rivière d'un air dubitatif, passa la main dans sa tignasse effectivement sale, et finit par s'accroupir, à regret, pour tremper ses cheveux dans l'eau claire, en prenant bien garde de ne pas se mouiller quoi que ce soit d'autre et surtout pas le crâne. Il se redressa aussitôt en frissonnant.
- C'est la dernière fois que je te suis en forêt, que ce soit clair ! Promets-moi de me le rappeler si d'aventure je l'oublie...

[Kasumi]

Le rôdeur s’était à nouveau placé en retrait pendant les ablutions forcées de Tilmandil. Il s’était adossé au tronc d’un arbre pour observer les environs à la recherche d’un danger potentiel sans vouloir en donner l’impression à Tilmandil. Quand il se redressa, prêt au départ, il se détendit au point de répondre sur le même ton que le barde :

- Un barde qui aurait des problèmes de mémoire ? N’est-ce pas handicapant dans ton métier ? Mais c’est d’autant plus méritoire comme choix de carrière ! A moins que tu ne te sois pas posé la question et que tu te sois contenté de la réputation de succès avec les filles d’une telle profession ! Par contre, les rôdeurs n’ont pas besoin d’une grande mémoire alors je ne peux pas m’engager à oublier de te prévenir la prochaine fois. Il se peut d’ailleurs très bien que j’oublie - inconsciemment bien sûr – afin de profiter égoïstement de ta présence distrayante. Tu l’es bien plus que les sangliers et les ours. Et ne fais pas cette tête, c’est un sacré compliment venant d’un homme des bois !

[Voyageuse]

Tilmandil lui tira la langue, et finit par rire de bon cœur.
- Tu dois avoir des ancêtres bardes, pour avoir tant de bagout. Du côté de ta mère peut-être ? Parce que du coté de notre père... J'ai bien cherché un peu, on a une tante artiste certes, mais pas de barde.
Il finit de se rhabiller, et se mit en marche en direction de la clairière, avant de s'arrêter subitement, comme pris d'un doute.
- Mais j'y pense... peut-être que la véritable raison de ma présence ici, ce serait que tu comptes sur moi pour chanter de jolies sérénades, et te créer à la veillée une atmosphère tendre et complice avec la belle Eärundra ? Non ? As-tu remarqué ses magnifiques yeux verts ?
Il avait un sourire faussement innocent, mais son ton léger indiquait clairement qu'il ne croyait pas une minute à ce qu'il venait de dire. Ou peut-être que si ?

[Kasumi]

Le rôdeur se figea à la remarque de Tilmandil, tellement surpris qu’il avait failli percuter un arbre ! Après une seconde d’hésitation et d’incrédulité totale, il se tourna vers le barde, regarda l’expression de son visage et partit d’un fou-rire incontrôlable. Après quelques instants, et avoir repris son souffle à grand peine, il répondit d’un ton énigmatique et grave. Mais ses yeux continuaient de briller d'une lueur amusée ce qui gâchait un peu son effet :

- J’ai entendu dire que les bardes n’avaient pas leur pareil pour lire dans le cœur des hommes - et surtout des femmes – ce qui explique que leur art puisse tant les toucher et les inspirer. Ils savent ce que les gens pensent et ressentent... Si tu veux mon avis d’expert sur la question : on dit surtout énormément d’âneries !

[Voyageuse]

Tilmandil leva les yeux au ciel d'un air faussement désespéré.
- Rabat-joie, va... Tu es incorrigible ! Moi qui sais lire dans le coeur des femmes -parce que non, ce n'est pas une légende-, je te dis que tu as une touche, pour peu que tu daignes t'en rendre compte ! Enfin, je crois... Bon, attends quand même d'en être sûr pour déclarer ta flamme, parce qu'elle tient quand même de la lionne... faudrait voir à ne pas trop la mettre en colère je pense.
Il rit.
- Mais elle a quand même des yeux magnifiques, même toi tu devrais le reconnaître !
Il dut néanmoins se taire, parce qu'ils approchaient trop de la clairière et risquaient d'être entendus de la principale intéressée.
Celle-ci leur tournait le dos, occupée à caresser Léo en lui parlant à voix basse. Elle avait changé son pansement maculé de terre et de sang. l'animal, parfaitement repus, était allongé sur le flanc. Son regard jaune se posa immédiatement sur Kasumi pour ne plus s'en détacher, peut-être vaguement méfiant.
Il leur abandonnait une carcasse sanguinolente, où demeuraient tout de même de bons quartiers de viande. Tilmandil pâlit à nouveau devant le spectacle.

[Kasumi]

Le rôdeur ne releva pas les nouvelles paroles légères de son demi-frère, se contentant d’un haussement d’épaule qui pouvait signifier tout et son contraire. Lui non plus ne savait pas très bien ce qu’il en pensait : certes, Eärundra était charmante à sa façon et avait effectivement des yeux tout fait séduisants mais il n’arrivait pas à éprouver le moindre désir d’explorer plus avant ce genre de pensées.

Il avait tout ce qu’il désirait ou du moins le croyait-il. Il n’avait donc aucune intention de tromper son ennui avec une autre. En cela, il se savait tout à fait différent de son demi-frère, ce qui avait déjà engendré quelque tension. Le plus sage était d’éviter le sujet ou le tourner en dérision comme il ne manquait pas de le faire.

Abandonnant ces réflexions parasites, il reporta son attention sur la carcasse sanguinolente puis sur Léo en train de se reposer et sa compagne occupée à nouer des liens avec lui.

- Je crois que je vais m’occuper de découper ce que nous pourrons récupérer de bon sur cette carcasse. Nous laisserons leur part aux charognards bien sûr. Tu ferais mieux d’aller te reposer un peu comme Léo et Eärundra le font. A moins que tu préfères m’aider, bien sûr !

Le rôdeur ne pensait pas en avoir pour plus de vingt ou trente minutes pour isoler les bons morceaux qui agrémenteraient leur repas du soir. Ensuite, il faudrait songer à se mettre en route…

[Voyageuse]

- Non, non, ça ira, je ne suis même pas sûr que je pourrai en manger, marmonna Tilmandil en détournant ostensiblement le regard. Il alla s'asseoir à l'autre bout de la clairière et entreprit de ranger ses affaires soigneusement dans son sac, tournant le dos à Kasumi et son travail de boucherie.
Eärundra, bien sûr, n'eût pas un instant d'hésitation et entreprit de l'aider. Elle se révéla aussi efficace que lui, ayant une longue habitude de la chasse. Ils salèrent les morceaux et les enveloppèrent soigneusement dans un morceau de toile grossière, avant de se les partager, les répartissant dans leurs deux sacs.

La suite de l'itinéraire, longeant la rivière, ne présentait guère de difficulté. Ils avançaient à une allure raisonnable, moindre que celle qu'aurait pu tenir le rôdeur s'il avait été seul, mais Tilmandil n'avait pas son endurance et ils devaient faire des pauses régulières. Puis vint le moment où le soleil commença à décliner fortement. Ils se trouvaient dans une portion de forêt plutôt accueillante, de chênes, de bouleaux et de frênes, avec quelques buis odorants mais peu de ronces, et quelques clairières plus herbeuses.

[Kasumi]

Sans savoir pourquoi il lui prenait l’idée de faire une chose pareille à part sans doute un contrecoup de la joie de se retrouver dans ces bois connus, le rôdeur s’approcha d’un arbre choisi au hasard dans une des petites clairières. Il s’arrêta devant, tendit lentement une main, paume ouverte, devant lui et toucha délicatement son écorce comme s’il entrait en communion avec le végétal. Puis, il se retourna vers Tilmandil et déclama d’un air grave :

- Nous allons nous installer ici pour la nuit. J’ai besoin de parler à ce chêne. Nous avons énormément de choses à nous dire depuis le temps qui a passé. C’était mon meilleur ami tu sais ? L’un des seuls pour tout dire. Nous avions souvent des conversations ! Nous nous racontions tout. Mais je lui interdisais de révéler tous mes petits secrets. Voyons s’il accepte encore d’échanger avec moi les derniers ragots…

Puis, se tournant vers Eärundra, il lui fit signe de s’approcher et annonça :

- Eärundra, pouvez-vous approcher ? Avec l’aide d’une druidesse, ce serait plus facile !

Puis, quand elle fut à portée, il murmura à sa seule attention :

- Jouez le jeu, je crois que ce sera amusant de voir comment *il* réagit à ça. On aura sûrement droit à une très belle histoire improvisée. Peut-être même une chanson !

[Voyageuse]

Tilmandil l'interrompit.
- Ne me prend pas non plus pour un idiot ! Je sais qu'il existe des arbres qui parlent, qui connaissent notamment la langue sylvestre. Les sylvaniens. Mais celui-ci n'en est pas un, c'est un vulgaire chêne.
- Et comment savez-vous que ce n'en est pas un?, intervint Eärundra, entrant dans le jeu avec un ton mystérieux. Prétendez-vous savoir reconnaître un sylvanien immobile d'un arbre ordinaire ?
Tilmadil hésita, perturbé par l'intervention de la druidesse. Celle-ci en profita pour psalmodier quelques syllabes -en sylvestre peut-être-, caressant doucement l'écorce du chêne. Et celui-ci, à la stupéfaction du barde, inclina une branche...
Le regard de Tilmandil allait de Kasumi à Eärundra, incrédule.

[Kasumi]

Kasumi aurait dû se douter que Tilmandil n’était pas né de la dernière pluie en matière de connaissance de la nature et de ses mystères. Toutefois, l’intervention de la druidesse lui avait laissé une nouvelle chance de surprendre le barde et, même s’il n’était pas très bien perçu d’abuser du pouvoir pour des raisons aussi futiles, il fallait bien reconnaître qu’Eärundra semblait trouver amusant de se prêter au jeu. Il se rendit alors compte que, bien qu’étant sans doute une elfe âgée de plus d’un siècle, elle était probablement assez jeune pour sa race comme l’avait suggéré sa grand-mère. En tous cas, elle gardait l’esprit espiègle des elfes encore un peu immatures. Il n’en fallait pas davantage pour motiver le rôdeur à renouveler son jeu en affirmant avec aplomb :

- Oui, ce soi-disant « vulgaire » chêne est très spécial ! Je crois que votre intervention a suffi à l’éveiller pour moi. Cependant, si vous le voulez bien, Eärundra, j’apprécierais que vous ne communiquiez pas à mon demi-frère ce qu’il pourrait vous révéler. Vous avez le droit de savoir en tant que gardienne des bois mais je crois que Tilmandil s’empresserait de mettre en chanson toutes ces petites révélations honteuses que ce chêne connait sur moi. Comme cette fois où je lui avais confié mes sentiments pour cette charmante petite nymphe des bois… Mais bref, j’en ai déjà trop dit. C’est sans doute l’émotion de revoir un si vieil ami !

[Voyageuse]

- Je serai muette comme une carpe, assura Eärundra. Ou comme un arbre, devrai-je dire... Je ne dirai rien, en particulier, des détails qu'il me donne concernant vos ébats amoureux, juste sous ses branches, avec la nymphe en question. Pourtant, que d'imagination, que de recherche dans l'étreinte mille fois renouvelée... Elle a dû être comblée !
Elle parlait avec une telle apparence de sérieux que Tilmandil resta un instant interdit. Avant de se mettre à rire aux éclats, guettant la réaction de Kasumi.
La druidesse, quant à elle, gardait son calme comme si tout cela avait été parfaitement sérieux. Mais à bien y regarder, ses yeux brillaient d'une lueur amusée.

[Kasumi]

Kasumi joua à l’indigné en tournant ostensiblement le dos à l’arbre et en croisant les bras sur sa poitrine en une attitude de bouderie feinte :

- Il a osé vous raconter ça ? C’était pourtant un secret ! En plus, il a exagéré à moins que vous ayez mal interprété ses allégations. Les arbres n’ont pas tout à fait la même vision du monde que nous autres. En tous cas, je crois que je ne lui pardonnerai pas d’avoir révélé ça et que nous ferions mieux de chercher une autre clairière avant qu’il raconte ce qui s’est passé avec la louve dont j’avais roussi par mégarde le pelage et la façon dont j’ai dû me faire pardonner pendant tout un hiver auprès de sa maîtresse…

[Voyageuse]

- Non seulement il me raconte, mais il m'envoie des images par télépathie. Vous a-t-on déjà dit que vous avez un corps très... séduisant ?
Elle parlait d'une voix suave. Tilmandil partit de plus belle dans un fou-rire inextinguible.
- Il m'envoie tous les détails de vos étreintes... c'est très... intéressant... instructif même... je vais finir par envier cette nymphe. L'histoire avec la maîtresse de la loupe est un peu moins... attrayante, dirons-nous.
Il était clair qu'elle cherchait délibérément à le mettre mal à l'aise.
- Bon, vous avez fini de vous payer ma tronche, tous les deux?, finit par hoqueter Timandil, toujours hilare.

[Kasumi]

Cette fois, Kasumi était curieusement bien d’accord avec son demi-frère et il fallait trouver un moyen de couper court à cette discussion qui avait tourné à son désavantage en raison d’une elfe un peu trop facétieuse. Il se contenta donc de répondre d’un ton neutre, peut-être un peu trop précipitamment pour masquer sa gêne :

- N’importe quoi ! J'avoue, j'avoue : je te faisais marcher, Tilmy, et il ne s’est jamais rien passé de la sorte sous *ce* chêne-là ! En tous cas, vos réactions respectives prouvent bien une chose : les druidesses ont une imagination débordante et une façon convaincante de raconter alors que les bardes manquent de patience et de goût pour écouter les histoires qui ne sortent pas tout droit de la leur ! Mais trêve de plaisanterie, nous avons un campement à installer si nous voulons pouvoir dormir un peu avant l’aube.

[Voyageuse]

Eärundra éclata d'un rire cristallin.
- Tel est pris qui croyait prendre, l'entendit-il marmonner à voix basse, comme pour elle-même.
- Je n'ai pas manqué de patience, répliqua Tilmandil quasiment au même moment. J'ai au contraire trouvé votre histoire particulièrement hilarante... Ah, elle n'était pas sensée être drôle ? En ce cas, pardonne-moi... Et... puisque tu m'appelles Tilmy, comment vais-je te surnommer... Sumi ? Non, ça n'irait pas. Kasu ? Bof... Tu n'as pas un surnom qui te conviendrait ?

[Kasumi]

Kasumi dut convenir qu’il s’était bien laissé attraper mais aussi que la plaisanterie en avait valu la peine. Il s’éloigna donc de l’arbre avec bon humeur à la recherche d’un bon emplacement pour disposer leurs couchages pour la nuit. Il chercherait aussi de nouveaux symboles. Car bien qu’il se souvienne de la clairière, les environs avaient bien pu changer en tant d’années.

- Alors là, Tilmandil, si vous espérez que je vais vous livrer sur un plateau tous les sobriquets honteux dont on m’a affublé durant toutes ces années, vous vous faites des illusions. Je ne t’appellerai plus comme cela, promis, mais je crois que tu peux dresser notre campement ici. Je vais m’occuper du feu. Et je crois que nous allons profiter de cette bonne viande plutôt que de chasser encore ce soir.

[Voyageuse]

- Beurk... je crois que je n'aurai pas faim, ce soir, soupira Tilmandil. Mais je viens t'aider, pour le bois. Je pense que tu es plus habile que moi pour monter la tente, on le fera après...
Il lui emboîta le pas, laissant la cuisine aux bons soins de la druidesse.
- D'ailleurs, comment va-t-on se répartir ? Tu as pris une tente deux places il me semble... Si tu comptes que je te laisse en tête à tête avec Eärundra, tu te fourres le doigt dans l'oeil ! Je ne vais pas dormir à la belle étoile avec toutes ces bestioles autour...

[Kasumi]

Kasumi devait bien reconnaître qu’il n’avait pas pensé à la question, anticipant certainement que la druidesse, en bonne adepte des expéditions dans les terres sauvages, se débrouillerait d’elle-même. Mais si ce n’était pas le cas, il serait bien embêté. Il serait possible de palier à l’oubli dès le lendemain mais il était trop tard pour improviser un abri pour ce soir. Il préféra donc détourner la question épineuse par une nouvelle plaisanterie car seule Eärundra pourrait décider ce qu’elle préférait :

- Nous ne pouvions décemment pas prendre deux tentes avec nous dont une aurait pu se révéler parfaitement inutile. Pour ma part, je peux fort bien m’en passer. Et comme j’ai décidé qu’il est hors de question que je te laisse seul avec notre charmante druidesse depuis que tu m’as affirmé la trouver à ton goût, il ne reste plus qu’une solution : en bon adeptes de la nature, Eärundra et moi profiterons des moustiques. Toi, tu auras le droit à une belle tente et une couverture très chaude en la personne de Léo. Au moins, je suis parfaitement serein sur le fait que tu ne tenteras rien avec lui ! L’inverse par contre… Et pour ce qui est du repas, il nous reste des champignons ainsi que des œufs. Je vais te concocter une belle omelette si Eärundra n’y a pas déjà pensé.

[Voyageuse]

Lorsqu'ils revinrent au campement, chargés de bois mort, ils n'y trouvèrent tout d'abord que Léo, en train de lorgner les steaks de viande que la druidesse avait soigneusement disposé sur une pierre. Mais sa maîtresse avait dû le briefer : il ne s'en approcha pas une seconde.
Il y avait également des champignons émincés, un flacon d'huile, quelques oeufs... Tout le nécessaire pour préparer le repas. ne manquait que le feu. Et la troisième convive...
- J'arrive !
La voix provenait des feuillages, assez loin au-dessus d'eux. Eärundra se laissa glisser avec grâce, de branche en branche, jusqu'au sol.
- Je dormirai là-haut cette nuit, expliqua-t-elle simplement.
Voilà qui résolvait l'épineuse question du couchage à partager.

[Kasumi]

Kasumi s’approcha du feu pour s’occuper de prendre le relais d’Eärundra dans la préparation du repas. Il ne put s’empêcher une dernière sortie amusée à l’adresse de son demi-frère :

- Tu as vu, Tilmandil ? Elle a pensé à toi ! Et la répartition des places dans la tente est maintenant évidente : elle est pour ce cher Léo et pour toi ! Tu n’y vois aucune objection, bien sûr ? Et regarde-le comme il se réserve de toucher à la viande juste pour toi en plus, c’est touchant !

[Voyageuse]

- Et toi, tu serais là-haut aussi, c'est ça ? Fais-moi penser à ne pas installer la tente juste au-dessous, en ce cas. Je tiens à ne pas me trouver là quand tu vas t'étaler en pleine nuit au sol...
Il saisit la toile et les piquets, les contempla un moment d'un air dubitatif, avant de ronchonner.
- Aide-moi plutôt à monter la tente au lieu de dire des bêtises. De toute façon, vu sa taille, je ne risque rien : elle n'est pas assez longue pour un lion ! Je ne sais même pas comment tu envisages de tenir dedans avec la portion de viande que tu vas avaler ce soir.
Le feu commençait à crépiter joyeusement, et Eärundra écoutait leur discussion d'une oreille distraite tout en jetant de fines lamelles de viandes dans la poêle, ajoutant champignons et herbes.

[Kasumi]

Le rôdeur rajusta sa tunique en donnant l’impression de recevoir une terrible révélation et écarquilla les yeux comiquement avant de demander à Tilmandil, le plus innocemment du monde :

Ça plus la remarque de ce matin concernant mon torse ! Est-ce à dire que je me suis empâté dernièrement ? Que bientôt, je ne tiendrai plus dans mon armure ? Le trouvez-vous aussi Eärundra ? Dans ce cas, je ne connais qu’un remède à cette avanie : demain et les jours suivants, nous doublerons le rythme de marche !

Mais tout en bavardant, le rôdeur avait très habilement disposé les piquets et maniait la toile de la tente sans même donner l'impressionner d'avoir à se concentrer sur sa tâche.

[Voyageuse]

L'installation, puis le repas, se déroulèrent dans la même ambiance de légèreté et d'insouciance. Comme s'ils souhaitaient éviter de se souvenir de la raison de leur présence ici. Le rôdeur avait détecté quelques signes de pistes, qui semblaient se diriger vers le campement dont il gardait le souvenir. Rien ne semblait avoir changé depuis son départ.
Eärundra se révélait d'une compagnie agréable, gaie et espiègle, ne manquant pas une occasion de mettre Tilmandil en boite, lequel prenait la chose avec philosophie... et quelque bouderies heureusement courtes.
Puis le soir vint, amenant une fraîcheur humide. La brume ne pénétrait pas vraiment le couvert des arbres, mais quelques nappes de brouillard stagnaient au-dessus de la rivière.
Tilmandil, peu rancunier, prit sa flûte et se mit à jouer une mélodie douce et envoûtante, inconnue de Kasumi. Une berceuse peut-être. La fatigue de la journée commençait à se faire sentir.

HRP : je n'aurai pas le temps de poster pour Surya je crois, désolée... Passe un bon été !

[Kasumi]

Il était d’ailleurs préférable de ne pas prolonger inutilement la veillée : le rôdeur et sans doute ses compagnons aussi avaient hâte d’arriver au campement pour, peut-être, glaner les premières pistes de leur enquête et obtenir des nouvelles d’Elryndel. La fatigue reprenait également ses droits après plusieurs jours de voyage à un rythme soutenu et la douce musique de Tilmandil marquait un point final grandiose à cette belle journée, peut-être l’une des dernières avant longtemps…

Se sentant soudain d’humeur morose, le demi-elfe fit bonne figure pour souhaiter la bonne nuit aux deux elfes avant de se diriger vers la tente.

- Un tour de garde ne sera pas utile ce soir, pas si près du campement. Mieux vaut donc profiter de cette nuit pour vous reposer.

[Voyageuse]

Ses deux compagnons acquiescèrent. Eärundra disparut dans les hauteurs de son arbre après un joyeux "bonne nuit" général. Tilmandil, quant à lui, se glissa près de son demi-frère sous la toile de tente. Il se tourna et se retourna plusieurs fois avant de trouver une position confortable, et maugréa quelques mots indistincts - souhaitant que le "campement" annoncé par kasumi comporte quelques habitations en dur...

Un violent orage éclata, quelque part au milieu de la nuit, mais leur toile était bien tendue et ils ne risquaient rien. Il en allait sans doute autrement d'Eärundra... mais après tout, elle avait l'habitude de prendre soin d'elle-même.

Le soleil brillait à nouveau au petit matin, dardant ses rayons obliques à travers les feuillages, salué par des trilles et pépiements innombrables qui auraient réveillé le dormeur le plus paresseux. Tilmandil, du reste, était déjà éveillé, en train de ranimer tant bien que mal le feu. Eärundra, tout comme Léo, n'étaient pas visibles..

HRP : c'est juste pour profiter d'une borne wifi gratuite, sans garantie que ça se reproduise

[Kasumi]

Kasumi avait éprouvé bien moins de difficultés à trouver le sommeil que son demi-frère. Il était habitué à ces conditions de confort plutôt fruste et le bruit de l’orage avait contribué à le détourner de ses sombres réflexions à propos de son père.

Le demi-elfe avait toutefois profité de l’air frais du matin pour prolonger sa nuit, se payant même le luxe de se réveiller après Tilmandil. Le soleil qui baignait la clairière et la rosée qui décorait encore la végétation avait quelque chose d’enchanteur invitant à prolonger le moment de détente. Cependant, le rôdeur était bien placé pour savoir qu’il leur restait encore du chemin à parcourir pour gagner son campement natal. Retrouver ses anciens mentors ou apprendre ce qu’il était advenu d’eux le remplissait d’impatience comme d’une certaine part d’angoisse, achevant de le dégriser et de le décider à se remettre en route au plus vite.

Kasumi ne résista toutefois pas à l’envie de surprendre Tilmandil occupé avec le feu, s’approchant sans un bruit dans son dos. Quand il fut à moins d’un mètre derrière lui en pensant être resté inaperçu, il parla d’une voix forte en tentant d’imiter le chef de leur communauté d’après ses souvenirs lointains :

- Qui vous a autorisé à faire du feu et à camper ici ?