[SCSA] Sans Chaleur, Sans Avenir

[Kasumi]

Benoît voyait leur groupe se disloquer, impuissant et entravé qu’il était. Il vit revenir son meilleur copain mais cela ne lui apportait que peu de soulagement alors que Cricri et Bellatrix, les deux premières victimes désignées par le maudit Grincevoix avaient d’ores et déjà disparues. Il hurla à l’adresse de Grincevoix en y mettant sa rage et sa frustration :

- Maudit piaf, avises-toi de toucher à un seul de leurs cheveux et je te carbonise les plumes de ton bec à ton croupion !

Puis, après avoir constaté qu’il se débattait vainement, il en appela à l’aide de Piotr, n’ayant plus le choix :

- Piotr, ma cheville est entravée. Tu peux m’aider ? Mais faut se dépêcher !

Dans la chute, il avait laissé tomber son grimoire mais tout allait bien : il n’avait pas l’air d’avoir trop souffert de la boue…

[Mornagest]

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L'essoufflement provoqué par cette course insensée, il s'en rendait compte maintenant, trop tard, le laissait pris de court. Il n'avait plus de force, ses jambes flageolaient, et même la peur indicible qui s'était emparé de lui alors qu'il venait d'entendre du bruit derrière lui ne parvint pas à lui arracher un sursaut d'instinct de survie suffisant pour lui permettre de s'enfuir à nouveau. Il ne pouvait que rester bouche bée, d'effroi et de surprise, en regardant cette ignoble femme s'approcher de lui et tendre les bras en sa direction...

Un voile blanc s'abattit devant ses yeux. Il avait de nouveau froid, comme si son âme lui avait encore échappé. Devraient-ils refaire tout ce chemin pour retourner dans ces infernaux sous-sols labyrinthiques ? Il regarda autour de lui, et voyait la forêt emplie de ténèbres, comme à travers du verre dépoli : encore plus terne, aux contours flous, aux couleurs délavées - si couleurs il y avait. Plus aucun bruit effrayant ne l'atteignait. Au loin, il lui sembla entendre les voix de ses camarades qui l'appelaient, ou appelaient, tout du moins. Étaient-ils en mauvaise posture ? Il ne pourrait plus jamais leur venir en aide...

Il se vit alors environné d'autres fantômes, ceux de Sophie et de ses petits camarades également disparus. Tous le regardaient, l'air triste et grave. Christophe voulut poser une question, la seule qui pouvait encore importer désormais, mais elle resta en suspens au bord des lèvres. Il connaissait déjà la réponse...

Tout s'effaça.

[Althéa]

Bellatrix ne voyait pas Christophe. Et elle avait le choix entre trois chemins. Une bonne et deux mauvaises. Deux possibilités de ne pas voir le générique final ce qui était assez effrayant. Il ne fallait pas qu'elle reste toute seule. ça, ce n'était vraiment pas la bonne option. Alors prit-elle une nouvelle fois son crayon et son carnet. Il lui fallait un garde du corps, un allié. Elle le dessina grand, avec un grand chapeau et une cape. Une sorte de Zorro. Si ce n'est qu'à la place de son épée, il avait à la place un énorme croc de boucher. Un phénomène de mode, sans doute.

Elle se concentra, espéra de toutes ses forces qu'il sorte de sa feuille.

[Taliesin]

Pierre avait bien failli se remettre à courir, afin d'essayer d'éviter qu'un funeste destin ne s'abatte sur Christophe. Mais déjà, Bellatrix s'était remise à courir, disparaissant bientôt de leur champ de vision. Puis Benny, se ravisant, lui demandait de lui prêter main forte. Le gamin obtempéra donc, s'agenouillant pour l'aider à libérer sa cheville. Quand ce serait chose faite, il ramasserait l'ours en peluche puis, aux côtés de son ami, tenterait de rattraper la fillette, en espérant qu'elle n'aurait pas pris trop d'avance. Rester ensemble était une priorité, et voilà qu'ils se retrouvaient dispersés... Les choses lui paraissaient donc bien mal engagées mais, refusant de perdre courage, il tenta de se persuader qu'elles finiraient par s'arranger. En tout cas, il ferait tout son possible pour que cela arrive.

[Manfred]

Pour Christophe :

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Des larmes d’argent se mirent à couler sur les joues de Sophie alors qu’elle s’approchait de Christophe.
« J’avais si peur que ça arrive. Mais.. pour mon Tony, ce n’est pas grave... Tu es gentils, tu as essayé.. »
Elle le prit par la main. Plus de chaleur, plus de froid non plus... plus rien...
« Ho moins, tu ne connaitras pas la solitude. Viens. J’ai quelques amis. On va jouer ! »
Et ils partirent, sans un bruit, par-delà les ténèbres. Au sol, à côté de la tombe, au milieu des fleurs blanches, reposait le corps du garçon... si pâle...

A deux, les garçons eurent tôt fait de venir à bout de la ronce. Ils se mirent alors à courir et rattrapèrent bientôt Bellatrix. Celle-ci s’était arrêtée pour dessiner un garde du corps. Celui-ci sortit de la feuille, devenant le sinistre Zorro armé du croc de boucher qu’elle avait imaginé. Décidément, si un psychologue voyait cela, il se poserai des questions.

Trois des quatre membres du groupe étaient de nouveau réunis. Devant eux, l’intersection. Tout droit, le large sentier. A gauche, celui plus tortueux. Lequel avait emprunté Christophe ?

Pour Benoît :

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« Des menaces ? »
Grincevoix éclata d’un rire affreux, reprit en échos dans l’esprit de Benny. Ce dernier commença à avoir une migraine.
« Moi, j’aime les actes ! D’ailleurs, maintenant, c’est au tour de la fille. »
Terrible révélation que celle-ci, à moins qu’il ne s’agisse d’un mensonge.

[Kasumi]

Au soulagement de se libérer et surtout de retrouver Bellaztrix succéda une vague d’angoisse qui cloua Benoît sur place, à l’intersection. Christophe avait disparu et… ce que le maudit Grincevoix semblait suggérer ôta toute chaleur du corps du petit garçon. Il s’adressa au vide d’une voix proche de l’hystérie :

- Non, laisse-nous tranquille maudit ! Tu ne la toucheras pas ! Et rends-nous Christophe ou bien...

Et aussitôt de chercher frénétiquement dans son grimoire la page qu’il avait perdue dans sa chute. Est-ce que le rituel pouvait empêcher Grincevoix d’apparaître ou se contentait-il de fournir une arme pour le combattre quand il apparaîtrait. Le gamin n’en était plus si sûr mais son étrange grimoire fonctionnait ainsi. Contrairement à tous les autres livres qui lui restaient en tête, ce qu’il y lisait ou y inscrivait disparaissait aussitôt de son esprit jusqu’à ce qu’il en ait besoin.

[Althéa]

Bellatrix regarda son Zorrosinistre avec un grand sourire. Il avait vraiment la classe, leur allié. Elle sourit un peu plus en voyant arriver Pierre et Benny. Plus que Christophe et le groupe serait de nouveau entier pour affronter Morticia, et pour sortir de ce fichu manoir.

"Je sais pas où Christophe est passé, finit-elle par dire, il est allé trop vite ... Et lui, il s'appelle Rick parce que Rick Crochet ..."

Elle regarda autour d'elle pour trouver quoi que ce soit qui les renseignerait sur la direction qu'avait empruntée leur ami.

[Taliesin]

En entendant les dernières paroles prononcées par son copain, il était devenu blanc comme un linge. Car elles signifiaient que Cirstophe avait été capturé ou, pire encore, qu'il était mort. Cependant, peut-être ne s'agissait-il que d'un mensonge destiné à les terrifier ? Il fallait qu'ils en aient le cœur net : la seule idée de tenter de s'échapper alors qu'il pouvait subsister une chance de le sauver le rendait malade.

-A mon avis, il est allé par là, dit le gamin en montrant le large chemin qui s'ouvrait juste en face d'eux. Quand on a peur, on court tout droit, non ? Puis l'autre passage a l'air beaucoup plus difficile, il aurait pas pu continuer à courir s'il l'avait pris...

Restait à espérer que le Zorro de Bellatrix, le grimoire de Benny et sa propre épée seraient des armes suffisantes contre leur ennemi enplummé et sa sinistre maîtresse.

[Kasumi]

Les arguments de Piotr étaient plutôt convaincants. D’autant que si Christophe avait emprunté le chemin le plus difficile, les ronces auraient certainement laissé les indices visibles, non ? Mais en fait il n’en savait rien… Tout ce qu’il connaissait de la nature, il le savait pour avoir lu des livres qui les évoquaient mais ces passages ne l’avaient jamais véritablement passionné. Bref, il avait déjà fait perdre assez de temps à ses camarades, scellant peut-être par là même le sort de Christophe. Il n’était donc plus question d’entamer un long débat mais plutôt de se fier à leur instinct et… à la chance.

- Allons tout droit alors ! Il n’est peut-être pas trop tard…

[Manfred]

En y regardant de plus près, Piotr eut la certitude que Christophe était allé tout droit. Dans la boue, il y avait ses traces. Alors, le groupe se mit en marche, remontant la piste. Aux détours d’un virage, ils aperçurent une autre source de lumière que celles de leurs lampes. Quelques rayons lunaires arrivaient à se frayer un chemin entre les branches, jusqu’au sol. Ils formaient une pâle et douce colonne. Celle-ci illuminait... des fleures blanches. Au milieu de ces fleurs, une pierre tombale se dressait. A côté de la pierre, le corps inerte de Cricri était allongé. Et à côté du corps, il y avait une sombre silhouette.

A l’approche des trois enfants, la sinistre forme leur fit face. Une femme grande et mince dans sa robe noire... Morticia. Il ne fut pas possible de la détailler, ni même de pleinement réaliser qu’elle était bien là, car l’instant d’après, il n’y avait plus trace d’elle. Seul restait Christophe qui, peut-être, c’était à nouveau évanouit...

[Althéa]

Morticia ! Espèce de vile petite pimbêche ! L'espace d'un instant, elle souhaita la voir toute vêtue de rose histoire de rigoler un peu. Et puis soudain, elle avait disparu. La vile, la lâche. C'était vraiment de la triche. En même temps, cela rajoutait beaucoup de suspens à l'action, mais surtout de l'angoisse.

Elle vit alors Cricri sur le sol. Peut-être évanoui. Peut-être pire. Mais il fallait peut-être se méfier parce que si la Morticia pouvait disparaître, elle pouvait sûrement réapparaître à volonté.

Avant de s'élancer vers lui, elle fit signe à Rick Crochet de lui emboîter le pas.

[Kasumi]

Benoît se figea un instant en voyant la silhouette allongée de Christophe qui faisait si bien écho aux sinistres paroles prophétiques de Grincevoix. Il lui fallait savoir ! Et avant tout, il ne pouvait pas laisser Bellatrix s’avancer seule, même épaulée par son étrange et quelque peu inquiétant allié. Lui aussi se rapprocha donc avec une certaine circonspection de la forme qu’il n’espérait être qu’évanouie.

- Faites attention ! Il ne faut pas s’attarder ici… Bella, tu devrais peut-être apporter Tony à Sophie ?

Oui, c’était une piètre excuse pour l’inciter à ne pas s’approcher de Christophe mais serait-elle dupe ? Et n’était-il pas en train de l’envoyer dans un piège ? Dans les bras de l’odieuse dame Larouge ?

[Taliesin]

-Si tu veux le prendre, il est dans mon sac à dos, dit Pierre à Bellatrix - il avait très bien compris où leur copain voulait en venir et n'avait aucune intention de réduire à néant son initiative. Je suis désolé, mais... Je préfère ne pas lâcher ma lampe ou mon épée...

Il avait parlé d'un ton distant, les yeux rivés sur le corps étendu. Ils devaient s'approcher, oui. Pour savoir. Malheureusement... Il croyait savoir, déjà, malgré tout l'optimisme dont il était coutumièrement capable.

-S'il est... Enfin, si Morticia l'a... Bref, vous comprenez, ajouta le gamin, dans un souffle. Faudra pas paniquer, ou s'écrouler, ou quoi. Ce sera difficile, je sais, mais... Oublions pas qu'on a modifié l'article de journal, et que si on arrive à quitter les limbes, ben, ça voudra dire qu'on n'y sera jamais venus. Ni nous, ni lui. Alors je crois... je suis sûr, même, que ça le sauvera.

[Manfred]

Musique d’ambiance

Ils s’approchèrent, alors ils virent... Christophe reposait à quelques mètres à peine de la pierre tombale. Il était si pâle... comme ils l’avaient tous été avant de retrouver leurs âmes... peut-être plus blanc encore en y réfléchissant. Son visage était figé dans une expression de surprise mêlée de peur. Ses yeux étaient encore ouverts, voilés par la mort. Car oui, pas un souffle, pas un battement de cœur, il était bien mort. Et si quelqu’un osait le toucher, il était aussi froid. Sans chaleur, sans avenir... Pas une trace, pas un coup. L’horrible femme de M. Larouge l’avait peut-être tué d’un regard, d’une parole ou d’un simple touché. Son arbalète, décrochée par la chute du corps, était juste à côté, dernière preuve du talent du bricoleur.

Le bois était devenu silencieux. On entendait juste quelques battements d’ailes lointains. Le temps s’était comme suspendu. Mais ne l’était-il pas depuis le début ? Tout d’un coup, une brise, un murmure. Voilà le fantôme de Sophie assis sur sa tombe. Tout comme les trois enfants, elle observa le défunt avant de chuchoter de sa voix désincarnée :

« Il devait m’apporter Tony et c’est sa compagnie qu’il m’a offert... J’avais si peur que cela arrive... J’ai tout vu, je n’ai rien pu faire... »

[Kasumi]

Benoît s’y était attendu, avait tenté de s’y préparer. Les paroles de Piotr auraient pu atténuer le choc par un nouvel et frêle espoir mais non, rien ne pouvait soulager la peine qui s’empara alors du garçon. Pas même les larmes qui se mirent à inonder son visage sans qu’il songe un instant à les cacher. La prophétie se réalisait, inéluctable, accablante, sans pitié. Christophe était le premier à tomber si injustement. Et Benoît était condamné à voir les autres subir le même sort. Serait-ce moins difficile quand ce serait le tour de Bellatrix qu’il aimait secrètement ? Serait-ce pire encore quand il perdrait Pierre, son meilleur ami de toujours ? Et même la mort ne lui apporterait nulle paix, Grincevoix l’en avait assuré, l’en avait convaincu. Seules demeuraient les limbes, la vie n’était que passagère, trompeuse, éphémère.

A quoi bon continuer de lutter dans ses conditions ? Benoît n’osa pas s’approcher du corps de Christophe pour lui rendre un dernier hommage. Non, au lieu de cela, il s’affala dos à l’arbre le plus proche, avec l’intention de ne plus jamais se relever.

[Althéa]

Bellatrix avait écouté les paroles de Piotr. Puis elle avait regardé du coté du petit cadavre. Parce que c'était bien ce que c'était ? Celui qui ne verrait pas le générique final. Parce qu'ils avaient été séparés. Et qui lui disait que ce n'était pas pendant qu'elle cherchait à convoquer égoïstement son allié que c'était arrivé ? Des larmes roulèrent sur ses joues, muettes.

Oh, elle allait botter les fesses de Morticia. Mais en attendant, il fallait reprendre Tony. Elle alla le chercher dans le sac à dos de Piotr puis alla le donner au fantôme de la petite fille. Plus question de fanfaronnades ou de plaisanteries déplacées. Elle n'avait plus du tout envie de parler. Elle espérait simplement que son ami ait raison. Et qu'on pouvait encore sauver Cricri.

[Taliesin]

Pierre n'avait jeté qu'un regard au corps avant de s'en détourner, pâle, tremblant. Avoir anticipé le choc ne le rendait pas moins brutal et, pourtant, il savait ne pas avoir le droit de se laisser abattre. Sinon, tous leurs efforts auraient été vains et aucun d'entre eux ne quitterait les limbes. A moins bien sûr qu'il ne s'agisse d'un simple cauchemar. Mais, étrangement, cette idée autrefois si réconfortante ne produisait plus guère d'effet, comme si elle avait perdu une bonne partie de sa crédibilité.

-J'espère que... que tu pourras te reposer, maintenant que tu as retrouvé Tony, dit-il à au fantôme de Sophie. Nous... Je suis désolé, mais on doit vite s'en aller. Si on prend l'autre chemin, celui tout plein de ronces, on arrivera peut-être jusqu'au bus. Et alors on sera sauvés. Même Christophe...

Il adressa un pâle sourire au petit spectre puis, ayant glissé sa lampe à sa ceinture, il se pencha et prit Benoit par la main.

-Allez, viens. Faut pas rester ici.

[Kasumi]

La main de son ami l’arracha quelque peu à son monde de songes épouvantés, pour le ramener à la dure réalité de leur deuil. Si toutefois on pouvait qualifier ce cauchemar permanent et incessant de réalité. Bien qu’il ne se sente plus aucune force de lutter, Benoît obéit à la voix de Piotr, refusant de le mettre en danger même si tout cela paraissait bien futile. Il prit sur lui de se lever et de faire quelques pas, sans oser regarder la silhouette inerte qui avait été leur copain.

- Oui, je vous suis.

[Althéa]

Bellatrix suivit ses deux copains, la mort dans l'âme. Ce n'était pas juste. C'était moche. Et elle avait envie de crier et de se mettre à pleurer. Après tout, elle n'était qu'une petite fille. Une petite fille qui regardait des films invraisemblables en étant contente qu'ils n'arrivent jamais dans sa réalité. Mais une petite fille. Et plus que jamais, elle se sentait perdue.

"C'est ma faute, murmura-t-elle entre ses dents, si je lui avais couru plus vite après, peut-être qu'il serait pas mort. En fait, je suis peut-être un monstre moi aussi, comme Jason, Michael Myers et tous mes autres copains. Peut-être que c'est ce que je vais devenir. Et après, je poursuivrai les autres pour leur réclamer des traductions en les menaçant avec mon fouet."

[Manfred]

Tony, sitôt dans les mains de Sophie, redevint aussi fantomatique qu’elle. Son jouet préféré, l’un des seuls réconforts qu’elle possédait dans cette non vie, lui était revenu. Elle l’observa puis, voyant que le groupe s’éloignait déjà, elle les interpela :

« Attendez ! Il n’y a pas de bon chemin ! Ce bois est sans fin... Le méchant corbeau et la vilaine femme le change presque comme ils veulent. Restez ici, à la lumière de la lune, vous serez protégé contre leurs maléfices. Et moi, je vais chercher mon amie. Elle pourra vous guider. Je fais vite ! »

Sur ce, elle disparut.

Pour Benoît :

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L’atroce voix reprit. L’être diabolique jubilait :
« Ha ! C’est dur de voir la vérité en face ! Trace le symbole, prononce mon nom... ton âme pour en sauver deux, un marché toujours honorable ! Fais vite car la fille n’en a plus pour longtemps ! »

[Kasumi]

Benoît s’approcha précipitamment quand Bellatrix commença à faire part de sa détresse. Puis, sans vraiment bien savoir ni pourquoi ni comment, il lui attrapa la main et se sentit gagner par un élan de courage nécessaire pour la protéger, là où il n’avait pas trouvé les ressources de faire face à ses propres échecs :

- Ne dis pas de bêtises ! Tu n’es pas un monstre et si on n’a pas rattrapé Christophe, c’est uniquement de ma faute. Je vous ai retardé en tombant bêtement. Et j’aurais peut-être pu le sauver si j’avais accepté de céder au corbeau… Il parle sans arrêt même si je suis le seul qui peut l’entendre.

Benoît s'interrompit quand le corbeau profita qu'il parlait de lui pour l'agresser à nouveau. Il faillit céder tant l'appel était tentant en cet instant d'intense désespoir. Mais, si près de céder, il sentit toute sa fureur se focaliser en révolte contre une cible unique, la cause de leurs malheurs, de la mort de leur ami. Furieux, il répondit à voix haute en s'adressant semble-t-il au vide :

- On reste ici ! Je suis là pour la protéger !

[Taliesin]

Pierre, qui avait adressé un sourire réconfortant à Bellatrix, posa une main sur l'épaule de son copain.

-Essaie de pas faire attention à ce qu'il raconte. Je sais que c'est difficile, et franchement, j'aimerais pas être à ta place. Mais dis-toi que s'il te parle dans ta tête, c'est parce qu'il ose pas t'attaquer en vrai. Et puis, il mélange beaucoup de mensonges à un peu de vérité, juste pour te faire peur... Là, il peut rien faire contre nous, on est protégés. Et bientôt, l'amie de Sophie nous guidera, on restera tout le temps tous ensemble, on se défendra s'il le faut, et on finira par atteindre le bus et par quitter ce cauchemar.

Bien sûr, il n'était pas aussi confiant que le laissaient entendre ses paroles rassurantes. Et pourtant, il n'avait pas perdu espoir. Non, il restait même persuadés qu'ils avaient une chance de s'en sortir. A condition, du moins, de ne plus commettre d'erreur.

[Kasumi]

Benoît trouva quelque réconfort dans la voix et le geste de son ami. D’autant plus qu’il faisait écho à sa propre résolution de rester ici à affronter Grincevoix et ses sbires s’ils osaient montrer le bout de leurs plumes. Ils allaient tous payer pour le trépas de Christophe ! Et même s’il restait un petit espoir de quitter ce cauchemar en retrouvant leur ami bricoleur d’après Piotr, il y avait tous les autres enfants, comme Sophie, qui n’avaient pas eu cette chance. Le gamin parla donc d’une voix résolu à défaut d’être parfaitement sereine :

- Entendu ! Croix de bois croix de fer ! Nous les affronterons ensemble. Bellatrix, tu es avec nous ?

[Althéa]

"Bien sûr que je suis avec vous. D'ailleurs, je ne peux pas être ailleurs, non ?"

Elle lui offrit un petit sourire mutin qu'elle affichait lorsqu'elle racontait ses effroyables blagues. Mais le coeur n'y était pas. Elle avait peur, comme les deux autres. Elle ne voulait pas mourir comme Cricri, même si c'était apparemment juste pour un petit moment. Regarder des films où les gens mouraient, c'était bien beau. Mais beaucoup moins drôle quand ça vous arrivait en vrai, non ?

[Manfred]

A peine Bellatrix eut-elle terminé de parler que le bruit d’ailes se fit plus présent. De vague rumeur, il devint grondement puis vacarme. Des croassements par centaines, par milliers. Nul doute que Grincevoix et sa légion étaient arrivé. Des corbeaux, on ne voyait rien, si ce n’était leurs ombres se détacher sur le sol quand ils passaient au-dessus de l’ouverture permettant à la lune de venir jusqu’ici. Des lors, la luminosité protectrice, à cause de ces ombres de plus en plus nombreuses, commença à décliner.

« Grincevoix ! Grincevoix ! Grince... »

A nouveau, les trois fantômes étaient là, ou plutôt, les trois souvenirs. Contre un arbre, Jonas avait tracé la silhouette funeste du sombre oiseau. Avant qu’il n’est le temps de terminer la formule, Phil s’était jeté sur lui. Tous les deux, à présent, se battaient dans la boue.

« Arrêtez ! S’il vous plait, arrêtez ! »

Sophie n’osait s’interposer. Très inquiète, serrant son Tony dans les bras, elle regardait les deux garçons se battre. Mais derrière elle, venait une forme, une grande femme, droite et digne, si sévère dans sa robe noire. L’ex femme de M. Larouge semblait glisser sur le sol. Sa robe ondulait tant qu’on pouvait douter qu’il y ait un corps à l’intérieur. Au dernier moment, Sophie se retourna. Trop tard, elle ne poussa pas même un cri quand le monstre lui imposa les mains sur le visage. Elle tomba en arrière. Phil s’en rendit compte. Fou de rage, il laissa Jonas, à moitié sonné, pour se jeter sur l’assassin mais déjà celui-ci n’était plus là. Alors, il s’accroupit auprès du corps inerte de la fillette, n’osant croire ce qui venait de se passer.

« Sophie ! Dis quelque chose ! Fais quelque chose ! Reste pas comme ça ! »
« Grincevoix, Grincevoix, Grincevoix ! » hurla Jonas.

Le symbole du corbeau sembla prendre feu. Puis, tout disparut.

[Kasumi]

Cette vision terrible de son ennemi intime faillit faire craquer Benoît qui voyait déjà ses deux amis se faire encercler et déchiqueter par les becs cruels sous ses yeux. C’est alors que l’intervention des trois spectres, souvenir du passé et avertissement le fit paradoxalement reprendre le contrôle de sa réalité. S’il cédait à Grincevoix, s’il faisait mine de se dissocier de ses amis, tous seraient perdus. Il en était convaincu. Alors, une nouvelle résolution s’empara de lui :

- Bellatrix, Piotr, restez vigilants ! La vieille pie n’est pas loin, c’est sûr ! Moi je m’occupe de son copain à plumes.

Puis, de rechercher le rituel dans son grimoire, profitant des quelques instants qui restaient peut-être avant que le clair de lune protecteur ne soit masqué par la nuée sombre.

[Taliesin]

Bien sûr, ayant déjà assisté à plusieurs scènes fantomatiques, ayant connaissance de la fin funeste qui s'était abattue sur le trio, Pierre se doutait que Jonas avait fini par succomber aux insidieux appels de Grincevoix. Cependant, assister à ce drame s'avéra fort éprouvant, en même temps que cela renforça son admiration pour Benoit : celui-ci était vraiment courageux et déterminé, pour ne pas se laisser prendre. Alors ce n'était certainement pas le moment de lui faire défaut.

-Pas de souci, Benny : on veille au grain, dit-il, balayant les alentours avec le faisceau de sa lampe de poche.

Entre Bellatrix, l'inquiétant Zorro qu'elle avait invoqué et lui-même, Morticia n'aurait guère de chances de s'approcher sans qu'ils ne la voient venir.

[Althéa]

Bellatrix était triste, inquiète et furieuse. De plus en plus, elle haïssait la pseudo Morticia. Qu'elle vienne et elle ... Elle la haïssait tellement qu'elle avait envie de la ... tuer ? Elle sursauta à cette pensée. Tuer, c'était se comporter en monstre. Comme elle. Comme ses copains. Mais elle voulait protéger Pierre et Benny et aussi venger Christophe et Sophie. Et aussi survivre.

"On est assez forts ... A la place de Morticia, j'aurais vraiment peur."

[Manfred]

Lentement mais sûrement, la lumière s’estompait face à la marée cauchemardesque. Malgré le vacarme des plumes et des becs, une voix perça, pas celle du roi corbeau, non... celle de Benoît aussi distante et désincarnée que celles des fantômes. Un souvenir, là encore... Le groupe n’était pas sorti des Limbes qu’il avait déjà laissé en ce lieu une marque sans doute indélébile.

« Bien que ta tête soit sans huppe et sans cimier, tu n’es certes pas un poltron, lugubre et ancien corbeau, voyageur parti des rivages de la nuit. Dis-moi quel est ton nom seigneurial aux rivages de la Nuit plutonienne ! »

Un oiseau perça les frondaisons pour s’immobiliser sur une branche basse, non loin des enfants. On ne distinguait de lui que sa silhouettes, ombre entre les ombres, mais tous savaient déjà qui il était. Quand il s’exprima, cette fois, tous entendirent la voix dédoublée, tous la ressentirent plutôt car elle naissait dans la tête de chacun.

« Je suis Grincevoix, je suis VOTRE FIN ! »

Musique d’ambiance

Le dernier rayon de lune s’effaça. Le noir se referma. Juste à côté du groupe, il y eut un mouvement proche, très proche. C’était Christophe qui se relevait et récupérait son arbalète. Benny avait retrouvé la page contre les corbeaux, Piotr avait son épée, Bellatrix avait son gardien prêt à obéir...

Pour tous :

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Jets de peur :
Pierre : pas peur
Benoît : presque peur
Bellatrix : pas peur
HRP : je hais mes dés !

[Kasumi]

Se voir incarné, même sous la forme d’un souvenir était assurément une expérience de plus déstabilisantes pour un gamin de sept ans. Même si le gamin en question était familier des expériences mystiques et paranormales de cet acabit. L’apparition de son ennemi intime à la vue de ses camarades eut donc un effet équivoque : terreur d’être à nouveau pris pour cible contre conscience de sa responsabilité, tristesse de mettre en danger ses camarades contre volonté de tout faire pour repousser l’Infâme. En une parodie de vie, Christophe reprenait le combat et semblait leur prêter main forte mais n’était-ce là qu’un souvenir ou une sombre illusion destinée à les tromper ?

Tremblant, Benoît eut du mal à maîtriser ses émotions quand Grincevoix apparut dans toute sa noirceur et que la lueur protectrice fut dissipée, absorbée par l’ombre. Alors, pour se reprendre, pour se redonner du courage, il invictiva le corbeau, espérant aussi détourner son attention et permettre à ses camarades de lutter :

- C’est toi qui es fini, vieux perroquet radoteur ! Vieux pigeon nauséabond ! Vieille mouette au bec vermoulu !

Puis, il chercha à exécuter le rituel, si Grincevoix lui en laissait toutefois le temps. Sinon, il espérait que ses amis pourrait profiter de son sacrifice tandis qu’Il se concentrait sur lui.