[Haute-Forêt] Quête : Racines

[Voyageuse]

- Je ne me souviens plus vraiment si j'ai rêvé... Ah, si... Il me semble qu'il y avait... un beau jeune homme blond aux yeux bleus... à moins que ce ne soit un rouquin... Ah, non, je crois qu'il avait plutôt des cheveux noirs, mi-longs... et de magnifiques yeux verts, et des oreilles un peu pointues. D'ailleurs, il te ressemblait étrangement, en y réfléchissant...
Elle rit, d'un rire cristallin qui fit s'envoler quelques oiseaux, et lui déposa un léger baiser sur les lèvres.
- Tu vaux bien tous les rêves du monde...

Un air de flûte s'éleva alors dans les airs. Tilmandil jouait près du feu, concentré. Maintenant qu'il s'était redressé et exposait ainsi son instrument aux regards, Kasumi vit qu'il ne s'agissait pas du pipeau qu'il avait utilisé les soirs précédents. Cet instrument-ci se tenait en travers du visage, et au lieu de souffler à son extrémité, Tilmandil utilisait un trou percé le long du bois. Le son était pur et cristallin, évoquant immanquablement, sans qu'on sache pourquoi, une pluie de fines gouttelettes. C'était sans doute l'instrument donné par les sirènes... Sylvia le fixait d'un air stupéfait.

[Kasumi]

Kasumi avait souri franchement, ravi une nouvelle fois de l’hilarité de la jeune femme. Il se souvint alors avec tendresse que ce rire avait largement contribué à ce qu’il en tombe secrètement amoureux quelques années plus tôt. Il allait le lui confier quand Tilmandil commença à jouer un air qui dévoila la nature du cadeau des sirènes. Le rôdeur arbora alors un sourire énigmatique avant de répondre d’un ton apparemment détaché mais où s’entendait aussi une note d’impatience infantile :

- Oh, on dirait que mon frère a fait une découverte à laquelle il ne s’attendait pas. Je me demande bien qui a pu lui faire ce cadeau ! Mais je crois que c’est avant tout un message destiné à nous faire comprendre qu’il est l’heure de le décharger de certaines corvées…

[Voyageuse]

- Un cadeau ? Comment ça, un cadeau ? Je te jure que ce n'est pas moi en tout cas ! Tu crois que c'est Eärundra ?
Sylvia se redressa, brûlant d'impatience de voir elle aussi la flûte, et s'habilla en un tournemain.
- Et puis, tu as raison, il faut bien qu'on contribue aussi au petit déjeuner ou on va avoir des remarques désagréables... Allons-y !

Tilmandil souriait d'un air ravi lorsqu'ils le rejoignirent. Il posa un doigt sur ses lèvres pour leur demander le silence avant de jouer à nouveau de la flûte, lisant un morceau de parchemin posé devant lui. C'était un air que Kasumi ne connaissait pas, et Sylvia non plus à en juger par son expression. Et il se produisit subitement un événement étrange : un filet d'eau se mit à couler devant eux, venu de nulle part, comme tombé du ciel. Une eau claire et limpide, qu'ils pouvaient recueillir au creux de leurs mains pour la boire, et qui s'écoulait ensuite en un petit ruisselet rapidement absorbé par le sol.

[Kasumi]

Kasumi avait rejoint Sylvia après s’être habillé aussi vite qu’elle et s’était placée à ses côtés devant Tilmandil. Après que celui-ci ait joué le morceau sans doute inscrit sur le parchemin, il sourit franchement et annonça comme si c’était là la chose la plus banale du monde :

- Evidemment ! J’aurais dû m’en douter étant donné leur affinité pour l’eau. Y a-t-il d’autres tours sur ce parchemin ? En tous cas elles ne se sont pas moquées de nous. Ton cadeau te plait, petit frère ?

Le rôdeur affichait maintenant un sourire rayonnant et observait ses deux compagnons tour à tour en espérant ne rien manquer de leur réaction.

[Voyageuse]

Tilmandil le fixait d'un air interloqué.
- Je... non, il n'y a rien d'autre sur le parchemin, que ces quelques notes... Mais... comment tu savais qu'elles allaient me faire un cadeau ?
- Tu veux dire que ce sont les sirènes qui l'ont apportées ? s'exclama Sylvia. Ouah... Tu en as de la chance, Tilmandil...
- Mais... pourquoi m'ont-elles apporté une flûte ? A moi ? Je n'ai rien fait de particulier...

[Kasumi]

Le regard du demi-elfe brilla de malice et son sourire s’élargit mais il savoura l’instant durant quelques secondes avant de révéler le pot aux roses d’un ton amusé :

- C’est juste que tu avais l’air très déçu de ne pas nous accompagner cette nuit. Alors je me suis dit que ça compenserait ta déception et que ça t’inspirerait une bonne histoire et que tu l’as mettrai peut-être en musique avec un instrument approprié… Et les sirènes auraient été déçues voire vexées si je n’avais pas accepté de récompense.

[Voyageuse]

- Je... En fait, c'était une récompense pour toi, alors ? je devrais te la rendre, et t'apprendre à en jouer, plutôt...
Tilmandil était visiblement déçu.
- N'allez pas raconter n'importe quoi. C'était une récompense pour tout le groupe, puisque tout le groupe a tenté d'intervenir pour aider la sirène. Et pas exclusivement l'un de nous... Mais étant donné que vous êtes le barde de l'équipe, il est normal qu'il vous revienne de l'utiliser... Et elle devrait pouvoir nous être utile... à tous. Nous sommes une équipe...
Eärundra semblait surgi de nulle part. Elle s'était probablement approchée en douce, comme à son habitude.
- Je crois que même un certain instructeur de ma connaissance serait obligé de reconnaître les vertus de cette musique... s'amusa Sylvia, dissimulant de son mieux son léger sursaut.
La druidesse ouvrit la sacoche qu'elle portait en bandoulière et en sortit une petite douzaines d'oeufs, quelques herbes inconnues, et une profusion de framboises.
- Après les émotions de cette nuit, j'imagine que tout le monde a faim ?
Le rôdeur surprit une expression dépitée sur le visage de Sylvia. Comme si... elle était vexée que la druidesse se soit chargée du ravitaillement.

[Kasumi]

Kasumi ne pouvait qu’approuver le discours d’Eärundra même s’il se demandait surtout comment elle s’y prenait pour faire preuve de tant de discrétion. A tel point que ça en était presque insultant avec deux rôdeurs censés être un peu plus aux aguets… Il ne lui en voulait guère cependant mais se promettait de trouver le courage de l’interroger sur sa faculté. A un moment mieux choisi peut-être. Alors que Sylvia ne serait pas là pour écouter sans doute. Car bien qu’il répugne à avoir des secrets pour elle, il la sentait tendue dès qu’il était question de la druidesse et de ses compétences somme toute impressionnantes en maint circonstances. Il préféra donc se concentrer sur les sujets plus légers qu’on lui fournissait sur un plateau :

- Bien sûr que la flûte t’est destinée, Tilmandil. C’est moi qui ai choisi la récompense mais nous avons tous participé. Et sans toi, nous n’aurions même pas soupçonné la présence des sirènes ni trouvé le sentier. Et j’ajouterai qu’Eärundra a raison sur un point crucial : c’est pour le bien de tout le groupe que ce soit toi qui en joue et non moi ! Je serai plus utile à la préparation du petit-déjeuner. Tu veux bien m’aider, Sylvia ? Les framboises sont ta spécialité !

Il lui avait adressé un clin d’œil taquin à cette dernière remarque.

[Voyageuse]

Tilmandil eut l'air stupéfait d'apprendre que Kasumi avait choisi le cadeau. Il rougit, embarrassé, mais le sujet avait déjà dévié et il ne répliqua rien, se contentant d'un regard plein de gratitude.
Sylvia, elle, répondit par une grimace comique à la remarque -pas anodine du tout- de Kasumi.
- Tu veux vraiment que je te fasse... une omelette aux framboises ? Non, quand même pas ? Alors je te conseille de surveiller de près les oeufs...

Le petit déjeuner se passa dans une ambiance finalement plutôt sereine. Nul bruit de tambour étrange, nul serpent géant : tout était parfaitement calme. Ils repartirent de bonne heure, prêts à une longue journée de navigation. Et l'ensemble de l'équipe ayant décrété que Kasumi était le plus apte à diriger le radeau, il n'eût d'autre choix que de prendre le premier quart. L'effort était toujours aussi éprouvant, et ses courbatures de la veille n'arrangeaient rien. Sylvia et Eärundra, quant à elles, se partageaient la tâche de décider du chemin le plus adapté, ce qui donnait lieu à moult petits conflits lorsque leurs avis différaient, soit... toujours.

La configuration du terrain était telle que Eârundra avait obligé Léo à monter à bord dès le début du périble. Tilmandil se tenait, comme à son habitude, aussi loin que possible du fauve. Mais celui-ci semblait surtout vouloir éviter la proximité de Kasumi. Il semblait le surveiller constamment de son regard jaune, au grand désespoir d'Eärundra. Elle finit par décréter qu'elle referait le pansement à midi, et que Kasumi devrait l'y aider. Pour resserrer les liens....

Une journée de navigation ordinaire, en somme...

[Kasumi]

Kasumi n’avait pas vraiment eu le loisir d’intervenir dans le conflit opposant les deux jeunes femmes et préférait - sagement – rester en dehors tant qu’il ne menacerait pas de dégénérer franchement. Du reste, il avait fort à faire à s’occuper de maintenir le radeau dans le courant et d’éviter les remous trop violents avec un lion qui n’attendait pas mieux pour manifester sa mauvaise humeur à son égard. Il fut néanmoins soulagé que la druidesse propose qu’il l’aide à prendre soin de lui : il se sentait toujours triste d’avoir trahi involontairement la confiance de l’animal et espérait que cette occasion lui fournirait l’occasion de remonter dans son estime. Il céda donc la perche à Sylvia pour l’occasion et entreprit d’obéir aux injonctions d’Eärundra sans crainte.

[Voyageuse]

Léo ne se révéla pas particulièrement coopératif. Il découvrit ses crocs en voyant le rôdeur approcher, et un léger grondement lui échappa. Il fallut toute la diplomatie de la druidesse pour qu'il accepte le contact de la main du rôdeur sur son flanc. Mais il ne le lâchait pas des yeux. Tilmandil, lui, prenait des notes d'un air concentré.. et amusé : il avait pour une fois la sensation que son frère ne s'en sortait pas mieux que lui avec le fauve, et cela le réjouissait visiblement.
Mais peu à peu, le lion se détendit, grâce aux paroles apaisantes de sa maîtresse, et Kasumi put sans risque lui donner les soins appropriés. Il sentait que la confiance n'était pas totalement revenue. Mais la méfiance semblait retombée.

La journée se passa sans incident notable. Il y eut bien une petite attaque de minuscules insectes voraces qui tentaient de pénétrer par tous les orifices de leurs organismes, particulièrement attirés par tilmandil, au point qu'Eärundra dut faire appel à ses pouvoirs druidiques pour les chasser. Le barde écopa également d'une piqûre venimeuse d'araignée, qui avait dû se laisser tomber à bord depuis l'un des arbres surplombant le canal, et là encore Eärundra le soigna tandis que Sylvia et Kasumi recherchaient la bestiole pour s'en débarrasser. La routine...
Ils quittèrent petit à petit les zones de vase et d'herbes hautes pour aborder, en fin d'après-midi, un secteur boisé... et aquatique. A perte de vue, des arbres immenses aux formes tortueuses, plongeant leurs énormes racines directement dans l'eau. La rive était sans doute au-delà, invisible, et inaccessible. Et la nuit allait tomber...

[Kasumi]

Kasumi prenait leur situation avec une certaine philosophie : dormir en hauteur était toujours dormir. D’autant plus qu’il avait les bras ankylosés à force de manier cette maudite perche presque en continu. Les deux jeunes femmes semblaient bien trop occupées par leurs querelles pour venir le relayer et ce n’était certainement pas Tilmandil qui y pallierait volontairement. Le rôdeur désigna un arbre un peu isolé qui avait donc pu grandir sans la concurrence de ses congénères et se tourna vers le barde avec une lueur amusée dans les yeux :

- Tu as déjà dormi dans les branches d’un arbre ? Tu verras, c’est amusant ! Mais il vaut mieux s’arrêter maintenant pour avoir le temps de nous confectionner des hamacs à partir de ces lianes.

[Voyageuse]

Tilmandil ne paraissait pas ravi outre mesure. Intéressé par l'histoire qu'il pourrait en tirer, oui, sans doute. Mais pas forcément enthousiaste pour la vivre lui-même.
- Heureusement que je n'ai pas besoin de trop d'heures de sommeil... Je sens que je n'arriverai pas à dormir là-haut, j'aurai trop peur que le hamac se renverse.
- Ne t'en fais pas, un hamac c'est parfaitement stable ! Tu verras, tu vas dormir comme un bébé ! Mais cela dit... je pense que je vais vous laisser le soin de les confectionner. les travaux d'aiguille et de couture n'ont jamais été mon fort, et cela y ressemble un peu trop à mon goût... En plus gros, certes. Moi, je me charge d'aller nous trouver de quoi manger !
Le coup d'oeil en coin vers Eärundra prouvait qu'elle était surtout décidée à ne pas laisser à l'elfe le rôle de pourvoyeuse de nourriture.
- Je me charge de décrocher les lianes, fit Eärundra sans se formaliser, et je vous les apporte au fur et à mesure. Je suis sûre que vous saurez nous bricoler ça à merveille, tous les deux. Ah, et bien sûr Léo reste sur le radeau... avec vous...

[Kasumi]

Kasumi n’était pas vraiment rassuré par l’idée de travailler sous la surveillance de Léo d’autant qu’il devrait se concentrer sur la tâche et les conseils à donner à son demi-frère et ne pourrait donc pas le tenir à l’œil. Mais rester avec lui sans Eärundra était sans doute la seule façon de savoir si le lion lui en voulait encore vraiment. Il le saurait en tous cas bien assez tôt. Par ailleurs, il faisait confiance à Sylvia pour apporter de quoi nourrir l’appétit du fauve ce qui lui éviterait peut-être de se rabattre sur lui. Il répliqua donc avec enthousiasme bien qu’il soit loin d’être tout à fait rassuré :

- On s’en sortira… J’en suis certain ! Petit frère, je parie que tu n’avais jamais construit ton propre lit avant de dormir !

[Voyageuse]

Léo ne les quittait pas des yeux. Il paraissait tendu, mais pas agressif. Juste... extrêmement attentif à tous leurs faits et gestes. Au point de les mettre mal à l'aise et de les rendre maladroits dans leurs réalisations.
Eärundra apparaissait à intervalles réguliers, leur lançait quelques lianes, caressait brièvement Léo puis repartait. Sylvia avait disparu au loin.
Tilmandil se révéla un élève plutôt habile de ses doigts : tresser les lianes les plus fines, les nouer à intervalles réguliers en une sorte de toile végétale, n'était pas excessivement difficile... mais très long.
Le soleil baissait à l'horizon lorsque Eärundra les rejoint après avoir récolté sa dernière brassée de lianes. Elle se mit aussitôt au travail à son tour, et son adresse révélait qu'elle n'en était pas à sa première confection de hamac.
Le soleil se couchait, illuminant le ciel de magnifiques reflets mordorés. Le dernier hamac était terminé, enfin.
- On ne pourra pas faire de feu ce soir, fit remarquer Eärundra. Il faudrait installer assez vite les hamacs, tant qu'il fait encore un peu jour.
Sylvia n'était toujours pas revenue...

[Kasumi]

Kasumi avait de moins en moins la tête à sa tâche à mesure que les minutes passaient et que Sylvia ne revenait pas. Il regardait de plus en plus souvent dans la direction dans laquelle elle était partie dans l’espoir de l’apercevoir revenir enfin. D’autant qu’avec la nuit et l’absence de feu, il serait d’autant plus difficile pour elle de retrouver son chemin. Le demi-elfe se rassurait en se disant que la rôdeuse tardait sans doute pour ne pas revenir bredouille mais les dangers des marais n’étaient pas à négliger et il ne pouvait tout à fait étouffer son inquiétude.

- Je devrais peut-être… veiller à ce que Sylvia revienne. Elle a peut-être trouver un gibier qu’elle ne pourra pas transporter seule…

Aucun des elfes ne devait être dupe mais l’inquiétude devait au moins les rassurer sur un point : il ne s’agissait pas d’un nouveau stratagème pour voler un instant d’intimité avec sa compagne.

[Voyageuse]

Eärundra hocha la tête.
- N'ayez crainte, je ne perçois pas de créature hostile dans les environs proches. Mais elle a dû s'éloigner, c'est vrai. Je pense qu'il vaut mieux que je reste ici avec Tilmandil. Nous allons nous occuper d'installer les hamacs. Si vous n'êtes pas revenu à la nuit, nous irons à votre recherche.

Syylvia s'était éloignée en bondissant de racine en racine, s'aidant des branches les plus basses, grimpant parfois plus haut pour passer d'arbre en arbre. Mais la végétation dense l'avait très rapidement masqué aux regards. Il était difficile de suivre sa piste : pas de trace au sol, uniquement une vague direction et l'espoir qu'elle n'en ait pas changé... Néanmoins, en persévérant dans la même direction, le rôdeur put apercevoir quelques indices de passage : quelques branches cassées involontairement, quelques ronces arrachées. Au bout de plusieurs dizaines de mètres, il parvint enfin au "rivage". Les arbres étaient toujours aussi denses, mais la terre ferme apparaissait par moments, par langues étroites bordées de marécages bourbeux, les arbres prenant racine indifféremment dans l'eau ou sur la terre. Il dut chercher un moment avant de trouver sa première empreinte, mais la piste était désormais plus facile à suivre. Et elle s'enfonçait toujours dans la même direction..

[Kasumi]

Quand il aperçut les traces de pas de Sylvia, le rôdeur fut inexplicablement soulagé mais il se demanda alors s’il avait bien fait de céder à son impulsion inquiète. La rôdeuse savait en effet se débrouiller et elle cherchait manifestement à en remontrer à Eärundra alors partir à son aide pour une simple mission de ravitaillement n’était pas forcément l’idée la plus lumineuse qu’il ait eue. S’il la découvrait simplement en train de traquer une proie digne de leur dîner, il s’attendait à ce qu’elle lui en fasse le reproche. Mais d’un autre côté, cela faisait bien une heure qu’elle s’était absentée et l’arrivée de la nuit ne cessait d’inquiéter Kasumi. Il continua donc à se frayer un chemin d’un bon pas tout en s’efforçant de réduire le bruit de ses déplacements au minimum : il ne s’agissait pas en plus de gâcher une embuscade en faisant fuir une proie prometteuse !

[Voyageuse]

Sylvia avait une bonne heure d'avance sur lui, et avait sans doute avancé d'un bon pas en l'absence de proie visible. Les lieux ne se prêtaient pas à la chasse d'un petit mammifère ou d'un rongeur : trop d'eau, pas assez de terre ferme. Les proies les plus évidentes étaient les oiseaux, ou les créatures aquatiques peut-être. Mais la végétation était trop dense pour utiliser efficacement un arc. La chasse avait dû s'avérer difficile, expliquant sans doute le retard de la rôdeuse. Et effectivement, peut-être avait-elle trouvé un endroit plus dégagé où s'embusquer... peut-être là-bas, au loin, où les arbres paraissaient s'écarter enfin, laissant place à nouveau à une zone herbeuse ?
Mais en guise de proie à traquer, ce ne furent ni des volatiles ni des batraciens que le rôdeur aperçut subitement alors qu'il longeait un petit étang sur sa gauche. Une silhouette immense, hideuse, le double de sa taille ou peu s'en fallait, se trouvait assise au pied des arbres en lisière de la forêt, ses jambes baignant dans l'eau de l'étang. La créature avait une peau vaguement verdâtre, marbrée, portait une sorte d'armure en cuir de crocodile, et dégageait une forte odeur de vase. Elle plongea subitement une main palmée dans l'eau croupie pour en sortir un petit batracien qu'elle porta à sa bouche pour l'avaler.
Elle ne pouvait apercevoir Kasumi, bien dissimulé parmi les arbres. Et les empreintes de la rôdeuse, longeant l'étang, semblaient aller droit sur elle...

[Kasumi]

Kasumi ne reconnaissait pas cette espèce mais il n’avait guère besoin de cela pour s’apercevoir combien elle était dangereuse. Le monstre avait en outre suffisamment d’intelligence pour se confectionner une armure ce qui était un nouveau motif d’inquiétude. Cette fois, le doute n’était plus permis : même si Sylvia avait réussi à éviter cette chose, elle était grandement en danger. Il se força à penser que c’était sa présence qui retardait la rôdeuse mais qu’elle n’avait pas été surprise par cette atrocité. Il n’y avait qu’un moyen pour s’en assurer : continuer de remonter sa piste mais il fallait tout d’abord distraire cette chose. Le demi-elfe évalua ses chances de rester inaperçu en se risquant à découvert mais y renonça en quelques secondes : la zone à couvrir était trop vaste pour que la créature ne l’aperçoive pas. Au lieu de cela, il préféra opter pour une méthode qu’il espérait moins aléatoire. Il sortit son arc et visa soigneusement un endroit suffisamment éloigné de sa position et de celle où il souhaitait aller pour y attirer la créature si elle se fiait au bruit en pensant y trouver une proie prometteuse.

[Voyageuse]

La flèche partit, et vint se ficher dans un arbre, un peu à l'arrière de la créature.
Celle-ci se figea, et tourna vivement la tête de côté, cherchant ce qui avait bien pu provoquer le bruit. Elle resta longuement immobile, la tête légèrement penchée, écoutant attentivement. Mais elle sembla décider que ce n'était qu'un petit bruit anodin, puisqu'elle reprit rapidement sa position initiale, guettant à nouveau la surface de l'étang, prête à pêcher la prochaine grenouille imprudente passant à portée de vue.

[Kasumi]

Ne voulant pas abattre la créature sans bonne raison - d’autant qu’elle n’était peut-être pas isolée – ni encore moins se risquer à déclencher un combat, le rôdeur décidé d’effectuer une nouvelle tentative. Cette fois, il visa un endroit bien plus éloigné de la créature, repérant un fruit de belle taille dans un arbre surplombant l’étang. Le tir était beaucoup plus difficile et Kasumi répugnait à gaspiller ses flèches mais il n’avait guère le choix, sauf à tenter de « parlementer » avec cette chose dont il ignorait tout à part qu’elle était bien plus massive qu’un demi-elfe.

[Voyageuse]

Il fallut deux flèches à Kasumi pour parvenir à atteindre le fruit, qui tomba dans l'étang avec un gros "plouf". La créature, un géant sans doute, parut cette fois-ci plus intéressée. Il se leva et se mit à marcher en direction de l'endroit d'où provenait le bruit, de l'eau jusqu'aux cuisses. Mais au moment où Kasumi allait se décider à avancer, un gland tomba à ses pieds. puis un autre le frappa à l'épaule, et un dernier à la tête. Devinant qu'il devait servir de cible, il leva les yeux pour savoir qui le visait ainsi... et découvrit Sylvia, perchée dans un arbre à quelque distance de là, au-delà de l'endroit où se trouvait juste auparavant le géant. Elle lui fit un signe de la main, et profita aussitôt de l'absence ponctuelle de la créature pour accélérer l'allure, passant d'arbre en arbre, et rejoindre son compagnon. Déjà, le géant faisait demi-tour... mais le feuillage la cachait suffisamment pour qu'elle ne risque pas d'être découverte.

[Kasumi]

Kasumi avait ressenti une bouffée de soulagement en apercevant Sylvia saine et sauve de l’autre côté de l’étang et plus encore quand elle parvint à le rejoindre sous le couvert des arbres. Il ne résista pas alors à l’impulsion de se précipiter vers elle pour l’enlacer dans une tendre étreinte et de murmurer à son oreille d’une voix où transparaissait encore de son inquiétude :

- Désolé d’être venu, mon petit écureuil roux mais je me suis inquiété de ne pas te voir revenir.

[Voyageuse]

Sylvia s'était jetée à son ciu sans paraître le moins du monde vexée de le voir. Elle se blottit avec tendresse contre lui.
- C'est gentil à toi de t'inquiéter... J'ai juste été un peu retardé par cette... chose. Un géant des marais sans doute, de ce que j'ai pu observer...
Elle sourit, et l'embrassa avec douceur.
- Mais je ne suis pas bredouille, heureusement. J'ai une grosse oie sauvage dans ma besace, et des pommes... Et tu as bien fait de venir, ça va être un bonheur de rentrer en ta compagnie. Mais filons vite avant qu'il ne nous repère. Je ne sais pas s'il est agressif mais je ne tiens pas à le vérifier.

[Kasumi]

Kasumi dédia un sourire ravi à sa compagne, soulagé qu’elle ne lui tienne pas rigueur de son initiative, tout simplement heureux de l’avoir retrouvé et réjoui de pouvoir retourner au campement en sa compagnie, sans que rien ne les presse. Ils pressèrent néanmoins le pas jusqu’à atteindre une zone où le géant n’aurait de toute façon pas pu se frayer un passage. Alors le demi-elfe ralentit nettement l’allure et passa un bras derrière les épaules de Sylvia pour le simple plaisir de sentir son contact pendant qu’ils marchaient.

- Ce que ça me manquait ces petites balades en forêt avec toi ! Dommage qu’on ne puisse pas s’attarder un peu : les autres vont s’inquiéter si nous traînons trop… Et nous avons un succulent repas qui nous attend grâce à toi !

[Voyageuse]

Sylvia paraissait elle aussi décider à profiter pleinement de ce trop court moment d'intimité. Elle se serra davantage contre lui, glissant son bras autour de sa taille, ralentissant encore le pas.
- Mais j'y pense... on ne pourra pas faire de feu là-bas. Il faudra le faire sur la dernière bande de terre, la plus proche du radeau. Ils devraient nous voir et savoir que c'est nous, je pense, on ne sera pas si loin... Et ça nous laissera un peu de temps rien qu'à nous ! Et on rentrera une fois la nuit tombée, avec la viande cuite... si tu veux bien me guider dans l'obscurité !

[Kasumi]

Le cœur de Kasumi se mit immanquablement à battre un peu plus vite quand Sylvia se serra tout contre lui et à l’idée de prolonger un peu leur moment d’intimité. Il resta silencieux quelques instants pour profiter pleinement de ce moment de bonheur pur arraché à leur périple. Au bout de quelques mètres il ne résista pas à l’impulsion de déposer un baiser sur le front de la jeune femme puis répondit d’un ton affectueux :

- On devrait faire cuire les cuisses et les ailles et réserver la carcasse à Léo, ce sera plus rapide et évitera d’inquiéter nos amis elfes mais ça nous laissera un peu de temps rien qu’à nous ! Ma belle chasseresse intrépide a bien mérité une petite compensation !

[Voyageuse]

Un baiser langoureux fut la seule réponse qu'il obtint. Sylvia aurait volontiers réclamé tout de suite sa compensation... Mais ses habitudes de rôdeuse reprirent heureusement le dessus : il fallait ramasser du bois et allumer le feu avant la nuit. ils accélérèrent légèrement l'allure, s'aidant des racines et des arbres pour ne pas s'embourber dans les zones les plus marécageuses, ramassant des branchages dans les zones plus sèches, jusqu'à la fameuse bande de terre sèche. Ils ne voyaient pas le radeau, les arbres étant trop serrés et l'obscurité ayant déjà envahi le sous-bois. Mais nul doute que leurs compagnons verraient leur feu... à condition qu'ils se décident à l'allumer : à peine avaient-ils posé à terre leur provision de bois et l'oie que Sylvia l'enlaçait, tendrement, amoureusement, passionnément...

[Kasumi]

Kasumi était à nouveau sur le point de se laisser emporter par les caresses et le parfum envoûtants de Sylvia mais une lueur ténue de lucidité persistait à lui faire retenir les gestes que tout son corps brûlait de dispenser à son amante, à son amour. Entre deux baisers passionnés, il songea à la dernière réplique d’Eärundra et cela lui permit de reprendre juste assez de contrôle pour parler d’un ton rauque :

- Allumons simplement ce feu, ma douce. Sinon Eärundra risque de se lancer à notre recherche. Et ensuite tu auras absolument tout ce que tu désires !

Mais l’interruption lui avait beaucoup coûté et il laissa à nouveau ses mains glisser sur son corps si doux, si chaud, si sensuel. Il était incapable de résister à l’envie d’en sentir toutes les courbes sous ses doigts malgré les vêtements qu’il n’avait pas encore osé lui retirer.