À l'extérieur de Melandis

[Claris de Corvimande]

Ah, oui, bien sûr. À récupérer les chevaux de leurs adversaires, on courrait le risque que ceux-ci soient connus, et donc reconnus. Bon, il allait falloir faire avec.

S'efforçant de demeurer la discrétion-même, Claris, l'arme prête, tâchait d'examiner les deux hommes. Repérer leurs points faibles lui serait certainement utile lorsque viendrait l'inévitable affrontement…

[Kasumi]

En observant les deux nouveaux venus, Claris remarqua immédiatement qu'ils dénotaient par rapport au groupe précédent. Ils portaient des armures plus lourdes et leurs armes, de lourds cimeterres, étaient impressionnantes et laissaient présager un style de combat plus brutal que les premiers hommes dépêchés par Mortesaison.
Ils s'arrêtèrent à quelques pas des chevaux en guettant les environs quand l'un des deux reprit la parole :

- Allez, montre-toi crapule ! C'est dangereux par ici, on va t'escorter jusqu'au Fil du Rasoir.

[Claris de Corvimande]

Décidément, les gens armés dans l'entourage de Mortesaison avait une manière très particulière de proposer une escorte. Claris aurait de toute façon été, compte tenu de la situation, très peu enthousiaste ; et ils semblaient eux-mêmes ne pas se faire d'illusion, à en juger par le qualificatif de « crapule » qui éclipsait le peu de crédibilité qu'il y avait dans leur proposition. Mais qu'appelaient-ils “le fil du rasoir” ?

De Corvimande n'attaqua pas pour l'instant : sans aide contre deux hommes en armure lourde, c'était simplement du suicide. Mieux valait attendre que son guide ne revienne, et attirer leurs adversaires parmi les cactus, où avoir davantage de facilité à se dissimuler leur donnerait l'avantage. S'il était néanmoins possible d'en abattre un – ou, au moins, de le mettre hors de combat – d'un coup d'arbalète, ce serait vivement préférable. Aussi, tout en guettant son allié, l'enfant de Reuel s'efforça de repérer des points faibles dans les carapaces de métal…

[Kasumi]

Le guide sortit de sa cachette, s'avançant à découvert au devant des deux cavaliers et répondit d'un ton amusé, signe qu'il ne se pensait pas en danger :

- Quelle mauvaise surprise de te voir ici, Felaghil ! Ton maître t'a laissé sortir pour aller te faire massacrer au Fil ? Tu ne feras pas le poids face au champion de Bouliakov, tu ferais mieux de rentrer à Melandis.

L'autre se contenta de rire et répliqua d'un ton ironique :

- Tu ne parles quand même pas de ce crétin de Mortesaison ? Il s'est fait tué dans une ruelle d'après la rumeur.

[Claris de Corvimande]

Ah, oui. “Guillermo” pouvait également être le nom de son guide, plutôt que celui de l'homme qu'ils avaient laissé repartir. Cela devait donc vouloir dire que ce n'était pas la première fois qu'il louait le cheval que Claris montait, puisqu'ils avaient pu le reconnaître. Et également, que les hommes de main de Bouliakov et de Mortesaison se connaissaient, chose guère surprenante si leurs maîtres respectifs avaient été en relation.

Peut-être n'y avait-il donc aucun danger ; mieux valait cependant s'en assurer. Claris demeura sous le couvert des cactus un instant de plus, épiant la suite de la conversation : la relative ignorance de l'homme concernant le trépas de son maître pouvait très bien être feinte.

[Kasumi]

Guillermo s'approcha de leurs chevaux avant de répondre au nouveau venu :

- On verra si tu feras encore le fier une fois dans la fosse, pas comme la dernière fois. Le nouveau est bien plus intéressant que cette brute de Mortesaison, tu devrais en prendre de la graine !

L'autre esquissa une grimace et répliqua d'un ton lourd de sens :

- J'envisagerai d'écouter tes conseils quand tu seras assez courageux pour participer toi aussi. Et elle est où ta perle rare ? Elle se cache ? Elle a peur peut-être ? Ou alors tu as besoin de deux chevaux pour supporter ton ego ?

[Claris de Corvimande]

Hm, bon. Claris avait peut-être fait preuve d'un excès de méfiance, pour cette fois.

« La perle rare a parfois besoin de s'isoler un peu, comme le reste d'entre nous. »

Visage dissimulé par les tissus, épée à la ceinture et arbalète à la main, l'enfant de Reuel émerga d'entre les cactus, et avança tranquillement vers le groupe, en songeant que son entrée en scène aurait pu être autrement plus impressionnante avec un serpent sur les épaules. Combattre avec Sissi avait été assez amusant ; il lui faudrait tenter d'en dresser un, un jour…

[Kasumi]

Les deux nouveaux venus se tournèrent vers Claris et l'observèrent avec une certaine curiosité. Le plus bavard des deux, manifestement le chef, répondit comme de juste et sans se laisser impressionner par l'arbalète de poing :

- C'est ce gamin ? C'est une plaisanterie ? J'espère qu'il a d'autres jouets que ce que je vois là sinon il ne tiendra pas dix minutes dans le labyrinthe. Tu ne lui as pas tout dit, j'imagine ?

Plutôt que de répondre, Guillermo monta sur son cheval et adressa un signe à Claris :

- Nous allons faire le reste de la route avec eux si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Par contre, n'écoutez pas trop ce qu'ils pourront dire. Ce sont des mélandiens : ils ne sont pas dignes de foi !

[Claris de Corvimande]

Claris ne se formalisa ni de la remarque de l'homme, ni du peu de considération que son guide semblait avoir pour la parole mélandienne, et remonta à son tour en selle. Que l'homme ne prenne pas ses talents au sérieux était plutôt une bonne chose : se faire sous-estimer permettait de surprendre l'avantage. Cependant, il ne fallait pas non plus se surestimer soi-même, et affronter des adversaires aussi lourdement équipés, si cela s'avérait être la suite du programme, serait assez délicat. De Corvimande avait quelques prétentions sur le combat sans protections d'un côté ni de l'autre ; mais, s'il lui serait beaucoup plus facile qu'à l'autre d'éviter les coups, frapper aux endroits où cela aurait un quelconque effet serait plus problématique. Bah, l'on verrait bien une fois sur place.

[Kasumi]

Les nouveaux venus ne semblaient pas vouloir prendre l'initiative de présentations ou même de la conversation et les quatre cavaliers se remirent rapidement en route. L'allure était toutefois assez modérée pour que la jeune noble puisse interroger ses nouveaux compagnons ou son guide sur la suite des réjouissances.

[Claris de Corvimande]

Claris non plus n'avait guère envie de lancer la conversation. Pour le moment, du moins. Il serait toujours temps de poser des questions sur place.

En attendant, de Corvimande ne manquait pas d'observer ses compagnons de voyage à la dérobée. S'il lui arrivait de devoir les affronter, il serait toujours intéressant de connaître leurs points faibles ; l'armure était d'un modèle différent de celle de son oncle – la seule qu'il lui avait été jusque là donné d'examiner de près.

[Kasumi]

Si l'examen attentif de Claris mit mal à l'aise les deux cavaliers, ils n'en montrèrent rien, se contentant de chevaucher derrière elle et son guide.

- Il parait que Bouliakov nous réserve une de ses surprises pour l'édition de cette année. Une créature d'Outre-terre d'après la rumeur. tu peux nous en dire plus, Guillermo ?

Le guide esquissa un sourire que seule Claris était en position de remarquer :

- Tu me déçois de poser la question. Tu sais bien que si c'était vrai, je ne pourrais pas t'en parler. Tu verras une fois sur place. A moins que tu aies des doutes sur ta participation ? Ce serait bien dommage.

[Claris de Corvimande]

« D'un autre côté, s'il n'y avait aucune surprise, ce ne serait pas drôle. »

Ce qui était sans doute l'une des raisons pour lesquels les serviteurs de Bouliakov étaient tenus au secret. Bien sûr, avoir quelques renseignements supplémentaires à l'avance permettait de mieux se préparer ; mais ce n'était sans doute pas dans les objectifs.
Claris énuméra mentalement les créatures de sa connaissance qui pouvaient éventuellement correspondre. Aucune n'était particulièrement plus encourageante qu'une autre ; mais entre ce que l'on trouvait dans les livres – généralement écrits par des non-combattants – et la réalité, il y avait probablement un pas. D'autant qu'une créature trop puissante serait difficilement restée sous le contrôle d'un maître humain…

[Kasumi]

La remarque de Claris lui valut un sourire de la part de l'inconnu et même une remarque approbatrice :

- Le petit ne manque pas de cran. Enfin, on verra si ça dure une fois dans les souterrains. Il y a toujours moyen d'abandonner une fois la partie commencée mais on y perd plus que sa dignité. Tu t'es préparé à ça ?

[Claris de Corvimande]

« Abandonner ne fait pas partie de mon vocabulaire. »

Claris avait répondu crânement ; cependant, le souvenir de ses dernières blessures, directement responsables de la situation présentes, et surtout d'un combat précédent qui lui avaient laissé des douleurs dans le bras pendant un certain temps, et dans la fierté plus longtemps encore, lui rappelaient que, parfois, mieux valait s'incliner face à plus forte partie, quitte à prendre sa revanche un peu plus tard…

[Kasumi]

La réponse parut satisfaire le concurrent de Claris ou alors il ne se souciait pas vraiment qu’elle sache ce qu’elle faisait en participant au concours. En tout état de cause, les quatre cavaliers poursuivirent leur route jusqu’au soir déclinant apportant un contrecoup de fraîcheur après la chaleur accablante de la journée :


- Nous serons arrivés dans moins d’une demi-heure. Je vous servirai d’escorte pour vous montrer la chambre qui vous sera réservée pour cette nuit. Vous pourrez ainsi vous reposer mais Maître Bouliakov souhaitera vous rencontrer en privé avant le concours qui débutera en milieu de matinée demain.

[Claris de Corvimande]

« Avant le concours, ce veut dire plutôt dans la soirée, ou dans la matinée ? »

Tant que ce n'était pas au milieu de la nuit…

Arriver lui ferait le plus grand bien : voilà un moment que Claris n'avait plus passé une journée entière à chevaucher, et la route commençait à se faire sentir. Découvrir la propriété – le premier grand domaine située en dehors de Melandis qu'il lui serait donné de visiter, en dehors bien sûr du sien – excitait également quelque peu sa curiosité.