[Haute-Forêt] Quête : Racines

[Voyageuse]

- Je me doute, répondit l'elfe d'une voix faible. Enchantée, et merci de votre aide...
- On bavardera plus tard, les interrompit Sylvia. Il faut qu'on s'éloigne, ils vont nous poursuivre...
L'incantation d'Eärundra s'acheva, et subitement, une tempête de neige se déchaîna devant la grotte, rendant le sol glissant et les empêchant de discerner leurs éventuels poursuivants. Eux-mêmes devaient sans nul doute avoir autant de mal à les voir. sans compter que les araignées préféraient nettement les climats chauds et humides.
La druidesse les rejoignit en courant, et prit la tête.
- Mieux vaut retourner sur le sentier... mais dans quelle direction ?, lança-t-elle à Kasumi. On revient vers le campement d'hier ou on poursuit ?

[Kasumi]

Kasumi n’hésita pas un instant sur sa réponse mais il parla à voix haute, laissant à Galawen l’opportunité de lui opposer ses arguments si elle n’était pas d’accord :

- Il nous faut retourner auprès de Celd. Lui seul pet sauver Elryndel. La racine du bosquet est un leurre.

Le rôdeur s'était remis à marcher aussi vite que possible, ne voulant pas se fier entièrement à l'effet de la neige pour les tirer d'affaire. Et ils avaient l'occasion de débattre en retournant au sentier de toute façon.

[Voyageuse]

La magicienne grimaça.
- C'est la racine qui l'a mis dans cet état, soupira-t-elle en guise de confirmation.
- Il en a pris ? questionna la druidesse.
- Oui... Et il ne se réveille plus depuis qu'il l'a ingurgitée...
- Il vous en reste ?
l'elfe la fixa une seconde sans comprendre.
- Et bien... non, bien sûr... mais...
- Alors il faut retourner là où vous l'avez trouvé, et vite. l'interrompit la druidesse d'un ton sec. Il nous en faut pour le tirer de ce sommeil.
Et elle se mit en marche d'un pas rapide.

[Kasumi]

Kasumi blêmit : l’état de son père n’était guère prometteur mais il avait espéré intervenir avant qu’il n’ingurgite la racine hallucinogène des asabis. Heureusement, Eärundra avait su garder la tête froide et poser les bonnes questions. Pour contrer un poison, le remède venait souvent du mal lui-même. Il s’en remettait à la sagesse de la druidesse sur ce point mais fut tenté de proposer de se séparer, menant son père à l’abri jusqu’au bosquet de Celd. Ce serait trop diviser leurs forces cependant et mieux valait rester groupés pour faire face à une contre-attaque des ettercaps et des araignées survivantes.

- Allons-y dans ce cas ! Est-ce loin ? Avons-nous une chance de l’atteindre avant la nuit ?

[Voyageuse]

L'elfe jeta un regard en direction du ciel, trop couvert hélas pour qu'elle puisse déterminer l'heure.
- C'est à quelques heures d'ici, il me semble... je ne sais pas trop... je n'ai pas vraiment pu évaluer le temps qui passait quand les araignées... nous transportaient.
Elle frissonna.
- Vous devriez manger un bout, fit remarquer Sylvia.
- J'ai des fruits secs par là, renchérit Tilmandil. Ça te fera du bien...
Elle acquiesça. Elle tenait visiblement à peine sur ses jambes.

[Kasumi]

Kasumi hocha la tête et adressa un sourire à sa compagne qui venait de lui rappeler les bonnes manières.

- Bonne idée Tilmandil. Puis nous marcherons une heure avant de faire une pause : mieux ne vaut pas être dans le secteur quand ces maudites araignées auront appris à se tisser des moufles contre la neige. Pensez-vous tenir le coup, dame Galawen ? Votre captivité a dû être très éprouvante.

Il sortit sa gourde pour la proposer à l’elfe qui devait être terriblement déshydratée.

[Voyageuse]

L'elfe hocha la tête.
- Ca ira, oui.
Sa pâleur et son air préoccupé démentaient ses paroles, mais ils n'avaient guère le temps de s'en inquiéter davantage. Tôt ou tard, les araignées allaient les poursuivre. L'elfe, consciente de l'urgence, s'empressa de boire à la gourde de kasumi et d'avaler quelques fruits secs.
Eärundra profita de la pause pour incanter, brièvement. Une aura les enveloppa tous, et subitement, l'hallucination disparut.
Galawen sourit.
- Effectivement... vous lui ressemblez vraiment beaucoup. Il sera heureux de vous voir...
Déjà, la druidesse donnait le signal de départ.

[Kasumi]

Kasumi adressa un pauvre sourire à l’elfe et récupéra sa gourde, glissant tout de même un mot en réponse à son affirmation :

- Merci, je prends ça pour un compliment. Et J’espère que vous avez raison pour le reste.

Puis il redressa une partie du cocon en se coordonnant avec Sylvia. Il leur fallut quelques pas pour harmoniser leur rythme puis ils adoptèrent une marche rapide destinée à avaler les lieues tout en se modérant sur la présence d’une elfe amoindrie et sur la nécessité d’économiser leurs forces. Aussi léger soit Elryndel dans son état actuel, le rôdeur savait que le porter se révélerait une souffrance avant la fin de la journée. Sans oublier qu’ils risquaient fort d’avoir à se battre pendant ou après le trajet.

- Savez-vous quels dangers nous attendent ? Vous en avez certainement affronté avant les araignées, non ?

[Voyageuse]

La magicienne ne répondit pas tout de suite, cherchant visiblement à ressembler ses idées.
- Il y a eu des morts-vivants. Et aussi de drôles de bêtes bien plus féroces que des loups. Des loup-garous je crois. Ou des loups sanguinaires peut-être, je ne sais pas si ça existe. Un sanglier immense et fou de rage, une fois. C'était Marius qui s'en était occupé...
Sa voix se brisa subitement, et elle se tut, baissant la tête.
- Mais je ne sais pas où ils se trouvent par rapport à nous... Ils ont pu changer de terrain de chasse, d'ailleurs.
- Léo va partir devant, il nous préviendra s'il voit quelque chose.
Un éclat roux, plus loin, apparut comme en réponse à l'affirmation de la druidesse.

[Kasumi]

Le rôdeur enregistra ces indications et adressa un sourire compatissant à l’elfe sans chercher à la questionner davantage : le moment n’était pas particulièrement bien choisi, surtout en considérant le traumatisme qu’elle venait de subir.

- Merci, cela nous sera utile. Il nous faut rester vigilant de toute façon, même avec un éclaireur doué comme Léo !

La route promettait d’être longue et de réserver son lot d’embûches et d’angoisses, tout ça pour récupérer la racine fautive. Et le chemin de la possible guérison ne ferait alors que commencer. De quoi décourager le plus entreprenant des rôdeurs… Mais d’un autre côté, Kasumi avait retrouvé son père, en vie qui plus est. Et il était entouré des gens qu’il aimait et en qui il avait toute confiance : la situation pourrait être pire.

[Voyageuse]

Ils rejoignirent assez rapidement le sentier principal, et reprirent leur route, se rapprochant peu à peu du coeur du bosquet. Les bois étaient sombres, denses, le sous-bois envahi de ronces, d'épineux, de troncs d'arbres renversés masquant des zones bourbeuses. Fort heureusement, le sentier tracé par leurs prédécesseurs - par Marius donc- était tout à fait praticable.
Kasumi avait l'impression de plus en plus forte de pénétrer dans un lieu étranger qui refusait sa présence. Un lieu hostile. Il se sentait observé, jaugé, repoussé. Il avait l'impression à chaque pas qu'une armée de créatures mauvaises s'apprêtait à fondre sur lui. Et qu'il n'aurait aucune chance de leur échapper. Qu'il était un intrus, qu'il deviendrait bientôt une simple proie à éliminer, à dévorer. Qu'il ne ressortirait jamais vivant d'ici.
Il s'était déjà senti indésirable, autrefois, dans la forêt maudite. Mais jamais au point de lui miner ainsi le moral.
Même Tilmandil dut finir par ressentir la noirceur du lieu, car au bout de quelques dizaines de minutes de marche, fronçant les sourcils, il s'arrêta. Puis se mit à chanter avant de se remettre en marche. Une chanson entraînante et optimiste, parlant de lumière et de combats contre les forces des ténèbres, de nature paisible et restaurée, d'amis sincères. Une chanson qu'il ne connaissait pas et dont, peut-être, Tilmandil inventait les paroles au fur et à mesure. Mais qui avait un effet immédiat sur son moral : elle repoussait les ténèbres comme l'aurait fait la flamme d'une bougie.

[Kasumi]

L’atmosphère des lieux était plus que déprimante et Kasumi louait à chaque pas ses prédécesseurs pour avoir tracé un sentier rapidement praticable dans cette forêt de noirceur. Progresser ainsi tout en transportant le corps souffrant de son père avait dû être un acte de foi et il espérait que leur lien plus ténu avec la nature ne les avait pas fait affronter la même hostilité que celle qu’il ressentait dans chaque ronce, chaque tronc pourrisse, chaque mousse purulente. La menace était diffuse et incitait à voir dans chaque ombre un ennemi prêt à lui sauter à la gorge, à nuire à ses amis, sa famille. Comme il aurait été facile de se convaincre de retourner en arrière jusqu’au bosquet de Celd s’ils n’avaient pas été là, s’il n’agissait pas pour sauver son père, si proche et si lointain désormais.

Kasumi ressentit un immense soulagement quand Tilmandil leur fit part de ses talents bardiques. Le chant lui redonnait une force intérieure qui le poussait à aller de l’avant, à affronter et triompher de la noirceur que ces lieux oseraient leur opposer. Qu’ils se montrent ces prédateurs et ils apprendraient à qui ils avaient affaire. Au bout de quelques minutes, le rôdeur se surprit même à fredonner avec son demi-frère, à reprendre un vers puis un couplet entier, y greffant même une ritournelle qu’il avait entendue à Luménis.

Au-delà de l’ombre, la lumière brille à jamais.
Après la pénombre, toujours revient le matin.
Dissipant brumes, nuages et fumées,
Louons les premiers rayons du soleil de demain.

Et toujours ils progressaient, inlassablement. L’heure qu’il avait annoncée serait sans doute bientôt écoulée aussi regarda-t-il en direction de Galawen pour tenter d’évaluer son état de fatigue. Pouvait-elle continuer ou valait-il mieux cesser.

[Voyageuse]

Galawen était clairement épuisée. Et elle n'était pas la seule, du reste. Le combat serré, les diverses péripéties angoissantes vécues depuis le matin, tout cela contribuait à leur fatigue à tous. Le corps d'Elryndel commençait à peser. Et le chant de Tilmandil, s'il aidait à conserver un certain allant, ne pouvait rien contre l'épuisement.
Eärundra, qui avait pris la tête du groupe, s'arrêta dans une petite clairière, étroite, sombre, sinistre. Mêmes les rayons du soleil, redescendu de son zénith, n'y perçaient pas.
- On devrait faire un feu, je pense. Prendre le temps de se restaurer un peu, même si c'est froid. Et je préparerais bien une infusion un peu revigorante si vous m'en laissez le temps...
Elle jeta un regard interrogatif aux rôdeurs.

[Kasumi]

Kasumi fut soulagé qu’ils trouvent un lieu acceptable où bivouaquer et les araignées n’avaient de toute façon pas encore donné le moindre signe de poursuite. Cela ne signifiait pas qu’elles avaient renoncé pour autant et il était probable qu’elles leur tendent une embuscade à un moment où à un autre entre les deux bosquets. La sagesse voulait donc qu’ils se reposent un peu pour être en état de les affronter quand elles attaqueraient. La nécessité le réclamait aussi à voir l’état d’épuisement de Galawen et l’impossibilité de lui venir en aide.

- Oui, prenons le temps d’un peu de repos. Gageons qu’avec un peu plus d’énergie nous résisterons tous mieux à cette atmosphère délétère. Je vais m’occuper de ramasser un peu de bois. Nous devrions creuser une fosse aussi pour que le feu ne soit pas visible de loin. Je ne sais pas ce qui rôde par ici mais je suis certain que ce n’est pas amical.

[Voyageuse]

Sylvia partageait son avis, et se chargea de creuser un trou, peu profond, pour dissimuler l'éclat des flammes.
Galawen s'était laissée tomber au sol, visiblement épuisée. Tilmandil fouilla dans leurs provisions pour lui tendre un peu de viande froide et des galettes, qu'elle accepta avec un sourire et commença à grignoter, mais sans grand appétit. Elle avait les traits tirés, et son regard inquiet se portait régulièrement vers Elryndel.
Eärundra, de son côté, triait avec soin quelques herbes qu'elle ajouta à une bonne dose de thé.
- Vous ne pourriez pas l'enlever de son cocon ?, questionna soudain la magicienne. C'est tellement... difficile, de le voir comme ça...
- Le voir inconscient ne sera guère plus réjouissant, fit remarquer Eärundra d'un ton neutre. Galawen lui lança un regard noir.

[Kasumi]

Kasumi ramena une première cargaison de bois auprès du trou que s’était mis à creuser Sylvia et il se sentit quelque peu coupable suite aux paroles de reproche adressées par l’elfe. Il crut bon de se justifier en regardant la forme endormi de son père dont ils n’avaient dégagé que le visage et le cou.

- Cela ne me plait pas du tout non plus mais il souffrirait plus du transport si nous le dégagions de là. Lors de la halte de ce soir, une des priorités sera de lui confectionner un brancard. Nous avons assez de couvertures pour qu’il ait bien chaud. Cela devrait être une consolation mais cela ne l’est pas vraiment. Je me rappelle de lui si plein de vie. De fougue parfois aussi. C’est dur de le voir ainsi.

Le rôdeur sentit la peine sur le point de s’emparer de sa volonté mais à quel point était-ce induit par cette forêt maudite ?

[Voyageuse]

Galawen ne chercha pas à argumenter davantage. Sa peine était visible, mais les arguments du rôdeur étaient pleins de bon sens. Sylvia, décidée à ne pas intervenir dans une conversation qui ne la concernait pas, se mit à allumer le feu, sans paraître prêter la moindre attention aux paroles échangées.
Tilmandil, lui, serra les dents.
- Ne parle pas comme ça de ce dont tu te rappelles. A t'entendre parler, on dirait qu'il va mourir...
Son ton était injustement acerbe. En toute objectivité, Elryndel était quasiment mourant, il n'était pas besoin d'être clerc pour le voir. Mais Tilmandil semblait décider à s'accrocher à la moindre parcelle d'espoir, si ténue soit-elle. Ou peut-être était-il simplement moins sensible à l'atmosphère délétère des lieux ? Ou alors se traduisait-elle chez lui par cette subite agressivité ?
Eärundra mit une gamelle d'eau à bouillir, et leva une main apaisante.
- Cette forêt nous pèse tous sur les nerfs, et aggrave vos angoisses. il faut nous concentrer sur des actes, pas sur des souvenirs ou des sentiments. Nous allons manger, boire cette infusion, puis repartir, trouver cette plante. Essayez de ne penser à rien d'autre tant que nous serons dans cette partie de la forêt. Enfin, quand je dis à rien d'autre... bien sûr, on ne néglige pas la surveillance !

[Kasumi]

Kasumi s'installa près du feu et chercha à capter le regard de Tilmandil :

- Désolé, ce n'est pas ce que je voulais laisser entendre. Elryndel est un elfe plein de vie et c'est ce qu'il redeviendra. Nous sommes tous unis dans ce but en grande partie grâce à toi. Et c'est déjà quelque-chose de formidable en soi, non ? Presque digne d'une chanson une fois que nous aurons réussi. Nous avons des objectifs clairs : trouver la plante puis retourner voir Celd qui nous en apprendra davantage. Eärundra a raison : nous devons nous concentrer là-dessus.

[Voyageuse]

Tilmandil hocha la tête, d'un air relativement peu convaincu. Sans doute était-ce la forêt qui lui minait le moral, et sa protestation n'avait-elle été qu'une façon de se convaincre lui-même que leur père n'était pas mourant.
Il finit néanmoins par prendre sa flûte, celle offerte par les sirènes, et se mit à jouer des notes au hasard, rien qui forme une mélodie connue cependant, mais liées par une douce harmonie, apaisante. Le silence s'installa, tandis que tous se laissaient porter par la mélodie. Il joua jusqu'à ce que l'infusion soit prête, et ne s'interrompit que le temps de boire sa tasse, avant de reprendre de plus belle. Même s'il était moins sensible que les rôdeurs et druides à l'atmosphère de la forêt, il percevait l'humeur de ses compagnons et savait que sa musique leur était utile...
L'espèce de tisane, fortement additionnée de miel et extrêmement concentrée en feuilles de thé, leur rendit un peu d'allant. Ou peut-être était-ce le fait d'avoir mangé. Ou la musique. Toujours est-il qu'ils reprirent la route avec davantage de courage qu'avant leur pause. Tilmandil continua à jouer un moment de la flûte, leur soutenant le moral. Mais pour ce qui était de la discrétion, ce n'était pas idéal. Et le bruit couvrait quelque peu la perception qu'ils avaient de leur environnement.

[Kasumi]

Kasumi ne se sentait pas le cœur à demander à Tilmandil de faire preuve de davantage de discrétion. Peut-être était-ce plus prudent malgré tout mais le rôdeur sentait combien l'énergie qu'il leur insufflait à tous était importante, y compris pour lui-même.

Au moins la piste était-elle toujours aussi dégagée comme si la végétation moribonde peinait à reprendre ses droits ici. Cela leur permettait d'avancer vite mais aussi de voir un tout peu mieux arriver le danger. Du moins le demi-elfe cherchait à s'en convaincre en jetant de fréquents coups d'œil à droite et à gauche, y compris dans la canopée.

- Dame Galawen, je suis désolé si ma question vous replonge dans des souvenirs difficiles mais comment les araignées vous ont-elles attaqué ? Vous ont-elles tendu une embuscade sur le chemin du retour ?

[Voyageuse]

Galawen secoua la tête.
- Non, pas exactement. Enfin, si, en un sens. Elles ont simplement mis des pièges un peu partout sur la portion de chemin qui passait non loin de leur repère, j'imagine, pour piéger les proies qui y passeraient. Notre guide en a repéré la plupart... mais pas tous. Il y a l'une des toiles qui lui est subitement tombée dessus, il s'est retrouvé emprisonné. Il avait lâché Elryndel, et moi j'ai paniqué... Je n'ai pas songé à lancer des sorts, j'ai voulu le libérer, mais les araignées devaient surveiller leurs pièges, et je me suis retrouvée presque tout de suite emprisonnée à mon tour. C'est un espèce de bipède affreusement horrible avec une tête d'araignée qui m'a lancé une boule de soie....
Elle soupira.
- Tout ça pour une racine qui n'a fait qu'aggraver son état... et pourtant on a croisé un druide, par là-bas, qui nous a encouragés...
Eärundra tourna la tête vers eux, interloquée.

[Kasumi]

Kasumi reconnut la technique employée par les ettercaps pour capturer Sylvia ce qui laissait à penser qu'il faudrait davantage se méfier des arbres que du chemin lui même. Cette information était toujours bonne à prendre même si elle n'était pas vraiment nouvelle. Mais le rôdeur abandonna un instant ses réflexions destinées à anticiper les attaques des arachnides à la mention du druide. Il affichait certainement le même air surpris qu'Eärundra.

- Un druide vous dites ? Etait-il lui aussi de la race des asabis ? Et comment vous a-t-il encouragé ? Désolé de vous assommer de mes questions mais je crois que cela peut avoir son importance. Je n'ai toujours pas réussi à comprendre à quoi pour quelle raison véritable on a recommandé cette racine à Elryndel.

[Voyageuse]

- C'est la question que je me pose aussi... Mais on était tellement prêt à s'accrocher à n'importe quel espoir... Et, non, ce druide n'était pas asabit. Je dirais plutôt une sorte d'orque. Et il était vraiment... bizarre... Mais il a juste insisté sur le fait que la racine de l'ayahuasca devait être consommée très fraîche pour avoir la moindre efficacité. Qu'il ne fallait pas attendre d'être revenus au campement. On l'aurait bien interrogé davantage, mais il avait disparu... Alors c'est ce qu'on a fait, on a suivi son conseil.
Eärundra hocha la tête.
- Il me semble que c'est l'un des gardiens mentionné par Cewyn...
Galawen soupira.
- Il n'y est pas pour grand-chose. C'est surtout la délégation asabi à Everaska qui a su le convaincre... Et je voulais y croire, moi aussi, je ne me suis pas assez méfiée.
- Vous saviez, pourtant, que j'allais revenir avec des informations dès que possible...
- Mais ça faisait plus d'un mois qu'on les attendait, et il n'en pouvait plus d'attendre...
- Cela dit, vous avez raison sur un point. Il faudrait savoir pourquoi les asabi l'ont aiguillé sur cette fausse piste...

[Kasumi]

Le demi-elfe sentait qu'ils ne parviendraient pas à résoudre cette énigme qui pouvait pourtant revêtir une importance capitale avec les seuls éléments à leur disposition. Retrouver ce druide orque pour l'interroger pourrait être un début. Amener cette racine à Celd et solliciter sa sagesse une suite logique. Dans tous les cas il leur fallait poursuivre leur chemin et éviter de laisser libre court à leurs regrets ou à leurs reproches. Une gageure dans un lieu aussi maléfique qui s'empressait de jouer avec leur humeur.

- Ce qui est fait est fait. Les asabis sont fourbes et rusés mais il peut-être la clé de la guérison dans leur tentative de duperie. Continuons : nous résoudrons ces mystères une fois la racine récupérée.

[Voyageuse]

Ils poursuivirent donc leur route, poussés par un sentiment d'urgence et par les airs entraînants que Tilmandil enchaînait sur sa flûte.
Le bois devenait plus sombre. Et au bout d'une heure, la piste qu'ils suivaient se fit plus étroite. Comme si ici, au coeur du bosquet, la végétation commençait déjà à reprendre ses droits sur ces traces d'une présence indésirable. Leur fardeau pesait à Sylvia et Kasumi, et Tilmandil proposa de prendre un moment le relais de la rôdeuse. Mais bien vite, en l'absence de sa flûte, leur moral se mit à décliner. Ils savaient qu'ils n'arriveraient pas à ranimer Elryndel. Que rechercher cette racine était, une fois encore, une pure illusion. Que plus rien ne pourrait le ramener à la vie. Ils étaient arrivés trop tard...
Eärundra finit par intervenir et suggérer à Tilmandil de reprendre sa musique. Sylvia, trop peu reposée, reprit sa charge. Mais au fur et à mesure de cette avancée sans fin, leur vigilance déclinait... et ils se laissèrent surprendre par l'attaque d'une forme sombre qui bondit brutalement sur Sylvia. Elle n'eût que le temps de rouler de côté pour échapper à une morsure. C'était un loup, ou quelque chose qui y ressemblait... mais en bien plus gros et bien plus dangereux.

[Kasumi]

A quoi bon poursuivre ? Ils auraient bien mieux fait d'écouter sa première idée de retourner au bosquet de Celd pour peut-être sauver ce qui pouvait l'être. Mais il avait fallu - une fois encore ! - qu'Eärundra mêle sa science imparfaite à cette histoire et cherche égoïstement à récupérer la racine pour son propre usage. Kasumi était presque persuadé qu'elle savait très bien à quoi elle pouvait servir mais qu'à l'instar de tous les druides, elle leur cachait la vérité.

Le rôdeur luttait péniblement contre ces réflexions assassines quand la musique de Timandil reprit et l'aida à les identifier pour ce qu'elles étaient et à les repousser. Au moins pour un moment encore. Concentré sur ce combat contre sa propre volonté, il ne vit que trop tard le prédateur qui bondissait. Il lâcha le cocon de son père en même temps que Sylvia, déséquilibré par son mouvement brusque. Et déjà ses vieux réflexes prenaient le relais de sa conscience défaillante alors qu'il bondissait à son tour, épée en main pour frapper l'animal au flanc.

[Voyageuse]

L'animal avait sans doute escompté une victoire rapide, sous-estimant les réflexes de la rôdeuse. Il tenta une seconde fois de l'attaquer, et ne vit que trop tard l'épée de Kasumi. Vif et rapide, il parvint à l'esquiver au dernier moment, et n'écopa qu'une entaille au flanc. Bien sûr, il avait manqué sa cible, et Sylvia s'était déjà relevée, épée au poing.
Comprenant qu'il n'aurait pas le dessus, l'animal fit volte-face. En quelques bonds, il disparut dans les bois.
- Un loup sanguinaire... commenta Eärundra. Enfin, il me semble. Il ne faut pas traîner dans les parages, il risque de revenir en meute...

[Kasumi]

Ils étaient passé un cheveu de la catastrophe cette fois et ne devaient leur sauvegarde qu'au fait que le loup avait choisi une des cibles les plus agiles de leur groupe. Qu'il s'en soit pris à l'un des elfes et ils ne s'en seraient pas tirés indemnes, à coup sûr. Cela ne faisait que renforcer l'impression de vulnérabilité dont le rôdeur n'arrivait plus à se départir depuis leur arrivée dans ces maudits bois.

Il adressa à Sylvia des mots qui laissaient percevoir ses angoisses tout en examinant son père ou du moins ce qu'il pouvait en apercevoir avec ce cocon. Il l'avait lâché un peu brusquement après tout :

- Jolis réflexes ! Tu n'as rien de cassé ? Tilmandil, Dame Galawen, je serais plus serein si vous marchiez au centre de la piste, juste devant nous. Vous risquerez moins d'être surpris s'ils attaquent à nouveau.

[Voyageuse]

Le cocon n'était pas endommagé, mais il était impossible d'en apercevoir l'intérieur. Il était néanmoins peu probable que Elryndel ait souffert de sa chute, emmailloté comme il l'était.
Sylvia sourit à Kasumi, un peu secouée tout de même par une frousse rétrospective.
- Des années d'entraînement... ça aide !
Tilmandil et Galawen de discutèrent pas la suggestion de Kasumi, et se placèrent au centre de la colonne. Eärundra, en tête, accéléra l'allure, mettant leur endurance à rude épreuve. Ils étaient tous conscients du danger qui rôdait, du risque que le prédateur réapparaisse. Tilmandil n'osait pas reprendre sa flûte, de peur de se laisser surprendre une nouvelle fois. Et l'atmosphère de la forêt leur pesait, de plus en plus. De surcroit, la piste qu'ils suivaient était maintenant envahie, à intervalles récurrents, de ronces agressives qui égratignaient leur peau et déchiraient leurs vêtements. le seul avantage de la situation était qu'ils entendraient nettement l'approche d'une éventuelle horde de loups sanguinaires.

[Kasumi]

Kasumi avait rendu un sourire attendri à sa compagne mais ce petit moment de complicité fut bien vite oublié à mesure qu'ils s'épuisaient tous deux à porter Elryndel tout en se frayant difficilement un passage dans la végétation agressive. L'absence de la musique encourageant de Tilmandil se faisait de plus en plus cruellement sentir et l'obscurité permanente ne permettait même pas de mesurer avec précision le passage du temps. Etaient-ils encore loin de leur objectif ? L'atteindraient-ils avant la nuit ou en seraient-ils réduits à camper sur ce terrain si inhospitalier ? Le bosquet lui-même ne le seraient-ils pas encore davantage ? Le rôdeur trébucha une fois. Puis une autre quelques minutes plus tard. Il manqua d'un rien de s'affaler quand son pied se retrouva pris au piège par quelque racine traîtresse. La forêt passaient-elles plus activement à l'attaque ? A moins que ce ne soit que l'effet de la fatigue accumulée ces derniers temps ?