Quête : Guerre des Plaines Brûlantes - vers Chêne-des-Clercs

[Lothringen]

Un peu surpris, Lothringen répondit néanmoins.

"Très bien, je vous écoute."

Il espérait que le sujet en valait la peine : ils avaient à peine galopé une demi-heure qu'on s'arrêtait déjà un peu trop longuement à son goût.

[Kasumi]

Le luménien hocha la tête et leva le bras en faisant un signe étrange de la main, sans doute un signal de reconnaissance comme il ne manqua pas de le confirmer.

- Le maître-mage guettait ce signe que vous acceptez de communiquer. Il m’a chargé de vous avertir qu’il ne pourra maintenir le sort qu’une minute ou deux.

L’instant d’après, une silhouette légèrement translucide apparaissait devant le cheval du conseiller et de son escorte. L’homme portait une robe à capuche ornée de signes cabalistiques et inclina légèrement la tête en signe de respect. Lothringen l’avait déjà rencontré à l’occasion de la réunion d’état-major ayant suivi le débarquement luménien à Graëlon :

- Mes hommages, conseiller. Pardonnez ce petit subterfuge mais je ne peux hélas pas me déplacer jusqu’à vous pour l’heure. Cependant, je gage que les nouvelles dont je suis porteur sont susceptibles de vous intéresser.

Une telle manifestation était déjà des plus inhabituelles comme pouvait aisément en juger un expert de la divination du calibre du demi-drow.

[Lothringen]

Quelle urgence pouvait bien justifier une telle débauche de sortilèges, ou même l'intervention directe de ce haut dignitaire allié ? Un peu gêné, Lothringen, ayant salué, baissa les yeux sur l'encolure du gris, que l'apparition magique rendait particulièrement nerveux. Tout en poursuivant la discussion, le manostien passait machinalement la main dans sa crinière, pour l'apaiser...

"Parlons-nous toujours de Chêne-des-Clercs, maître ?"

Il doutait que le sort de ce village soit seul en jeu. Mais de quoi pourrait-il s'agir d'autre ? Cela ne faisait guère qu'une journée qu'ils avaient quitté Graëlon...

[Kasumi]

L’homme se contenta de hocher la tête avant de répondre du même ton sans hâte ni grande émotion :

- En partie oui. Votre homologue conseiller m’a chargé de vous aider d’autant plus qu’une partie de nos troupes est également en jeu. Je dois vous avouer qu’il s’inquiète de vous voir exposé loin des troupes bien que cela ne remette en rien les compétences de votre garde en cause. Mais passons aux informations : nous n’avons pas encore découvert où se dirigeaient les mercenaires que neuf des nôtres ont pris en chasse mais nous sommes capables de les suivre eux. Le général suggère de regrouper nos forces mais il s’en remettra évidemment à votre décision en la matière. Le sergent Fontbois et ses hommes sont à une cinquantaine de lieues au nord-est de votre position et se dirigent droit vers l’ouest. S’ils ne changent ni de trajectoire, ni de rythme, vous avez une bonne chance de les intercepter près de la localité que vous appelez le Bosquet de Celd.

[Surya]

Surya contint un soupir en observant le bosquet. Bon, une nuit à la dure, elle allait s'en remettre...
- Vous êtes sûr qu'on ne risque rien, par ici ? glissa-t-elle au soldat.
Elle s'efforçait d'avoir l'air confiante pour ne pas inquiéter inutilement Lucinda, mais tout de même, cette histoire d'ogres l'inquiétait.
- Est-ce qu'il faut, je ne sais pas... qu'on organise un tour de garde, peut-être ? Et est-ce qu'on peut faire un feu ou est-ce qu'il vaut mieux ne pas risquer de se faire repérer ?
Elle grimaça.
- Je suis un peu novice en matière de nuits à la belle étoile en terre hostile... Je veux dire, j'ai déjà bivouaqué, mais généralement dans des lieux sûrs.

[Kasumi]

Pour Surya :

Le luménien mena ses ouailles près des arbres et leur fit mettre pied à terre avant de répondre en aparté à la petite barde pour ne pas risquer d’être entendu d’eux.

- Je crains que nous ne soyons en sécurité nulle part sur cette île mais cet endroit vaut mieux qu’un autre. Si des ennemis approchaient, nous les repérerions les premiers et nous pourrons nous cacher entre les arbres. Nous ferons un feu avant la nuit histoire que vous puissiez tous manger chaud. Mais nous devrons l’éteindre ensuite. Je resterai éveillé toute la nuit, j’en ai l’habitude. Vous pourrez dormir sur vos deux oreilles.

[Lothringen]

A supposer que les luméniens étaient toujours sur leur piste, le groupe des preneurs d'otages avait ainsi d'abord suivi une trajectoire nord-est qui n'avait été qu'un leurre destiné à faire croire qu'ils souhaitaient repasser en territoire mélandien, avant de bifurquer plein ouest... c'est-à-dire qu'ils cherchaient selon toute probabilité à rejoindre la mer. Ils étaient rusés. Avec un nécromancien puissant dans le lot, pour avoir pu lever un tel nombre de mort-vivants... Cette dernière circonstance inquiétait un peu Lothringen. Même avec le renfort luménien, ils allaient manquer de sorts divins pour contrer la nécromancie. Mais il y avait plus. Contre un mage de haut niveau, il ne s'agissait pas que Mornagest tombe malencontreusement dans la zone d'effet d'une dissipation de la magie. Il allait falloir que le semi-drow trouve le moyen de mettre ce dernier en garde avant une hypothétique bataille...

Tout à ses réflexions, Lothringen était resté quelques instants muet. Devant lui, le mage attendait une réponse. Le conseiller ne releva pas les réflexions sur sa prise de risque dans cette expédition : il avait ses raisons, mais il n'avait surtout pas à se justifier.

"Entendu, je vous remercie pour ces informations. Nous tenterons de rejoindre vos hommes là-bas. En fonction de ce qu'ils auront à nous dire, nous déciderons de la stratégie à tenir : un choc frontal n'est pas forcément la meilleure option si l'on veut tenter de sauver les otages."

D'autant que l'incertitude sur le nombre des mercenaires était toujours intacte...

[Kasumi]

Le maître mage s’inclina à nouveau avant d’ajouter du même ton patient et flegmatique :

- Entendu, je vais en avertir le sergent Fontbois – sans révéler votre identité au cas où il devrait être capturé par l’ennemi, rassurez-vous – Je vous recontacterai si la trajectoire ou le lieu de rendez-vous venaient à changer. J’ajoute en outre que la plupart de nos Appariteurs sont mobilisés sur le front sud ou sur la défense d’Aghoralis mais que je peux en détacher un ou deux à votre service si le besoin s’en faisait sentir. Bonne route d’ici là !

Avant que le conseiller n’ait pu répondre, l’image disparut brusquement.

[Mornagest]

Bon et bien. Ils allaient au-devant d'une troupe de mercenaires à l'objectif inconnu, avec leurs arrières protégés par des otages, accompagnés d'un nécromancien puissant et dont le nombre précis était entre trente et cinquante coupes-jarrets. Quoi de plus réjouissant que de se lancer à leur poursuite à brides abattues, sans même savoir exactement quelle direction prendre ?

Bah. Après tout, c'était ça aussi, l'aventure... l'incertitude, la peur, les déconvenues... ils ne pouvaient pas tout le temps vaincre de malheureux orques asservis à des ogres-mages, tout de même.

Sans mot dire, il interrogea Lothringen du regard. Il ne tenait qu'à lui de donner le mot d'ordre pour se mettre en route.

[Lothringen]

Le silence était retombé après la brusque disparition du mage. On n'entendait plus que le frottement du cuir, le piétinement des sabots, les respirations encore haletantes. Le gris, désormais calmé, encensait néanmoins pour réclamer de se dégourdir les jambes, et à ses côtés, Mornagest et sire Rowan le regardaient avec insistance et impassibilité, mais n'émettaient pas le moindre commentaire. Sans doute attendaient-ils de Lothringen qu'il leur redonne l'ordre du départ, comme il finit par le déduire une fraction de seconde plus tard qu'il n'aurait dû... Il ne se sentait décidément pas à sa place dans le rôle du chef, du donneur d'ordre ou du héros, selon la façon dont on voulait considérer cet état fort déplaisant qui faisait de vous le point de convergence de l'attention générale, fussiez-vous en train de rêvasser.

Le semi-drow ne fit qu'un signe de la main, pressa des mollets les flancs de son cheval, qui ne se le fit pas dire deux fois, et la petite troupe reprit sa course en direction du nord ouest. A présent qu'ils connaissaient leur prochaine destination, ils perdraient sans doute beaucoup moins de temps à chercher leur route. Ils avaient une carte, après tout.

[Kasumi]

Pour Lothringen et Mornagest :

Même avec une carte, la localité serait probablement assez compliquée à localiser : il ne s’agissait probablement guère plus qu’un lieu-dit ou un hameau et probablement déserté étant donné sa position septentrionale. La trajectoire la plus directe vers leur objectif les mènerait rapidement vers un haut plateau puis vers une forêt, guère le chemin idéal avec des chevaux équipés pour la guerre. Toutefois, repiquer vers la cote leur coûterait encore davantage de temps, réduisant d’autant les chances des otages voire même de trouver leurs alliés au lieu de rendez-vous. En suivant la trajectoire suggérée par le mage et prise d’emblée par le conseiller, ils pouvaient espérer arriver en fin d’après-midi le lendemain. A condition que Tymora les accompagne et que rien ne les retarde.

[Surya]

- Vous êtes sûr que vous allez tenir réveillé toute la nuit ? Même après la journée que nous venons de passer ?
Surya fixait le garde, un brin incrédule. En se disant que finalement, rester éveillé était peut-être un moyen comme un autre d'échapper à des cauchemars peuplés de morts-vivants.
- il faut me dire si vous avez besoin que je vous relaie un moment... ou si vous voulez, je peux veiller un moment ce soir pour que vous dormiez quelques heures. Je suis plutôt une couche-tard... Enfin, je veux dire, il vaut mieux que je monte la garde le soir que le matin, je serai mieux réveillée. Mais c'est comme vous voulez, bien sûr, vous avez davantage que moi l'habitude de ce genre de situation...
Non pas qu'elle ait une envie folle de se retrouver pour un temps responsable de leur sécurité. Mais entre devoir assurer la sécurité, et s'endormir sans avoir confiance en celui qui devait le faire, elle préférait encore assumer sa part de veille. Elle n'avait pas peur du noir. Enfin, tant qu'elle avait une percussion pour se défouler les doigts, même en sourdine...

[Kasumi]

Pour Surya :

Le garde lui adressa un sourire et finit par proposer un compromis après que tous se soient installés dans le petit bosquet :

- Très bien. Si vous préférez vous coucher un peu plus tard, je propose d’aller me coucher dès que nous aurons mangé un morceau. Vous vous débrouillez bien pour maintenir le moral et nos passagers en ont bien besoin. Je n’aurai besoin que de trois petites heures pour être pleinement opérationnel. Cela ne devrait pas trop vous priver.

Le soldat s’occupa lui-même du feu et de la tambouille avant de laisser le soin à la barde d’animer la veillée sans trop l’empêcher de dormir.

[Lothringen]

Hé bien, c'était donc parti pour deux jours de folle équipée à travers la campagne et les aléas du terrain, où l'on ne pouvait espérer croiser âme qui vive (à l'exception notable des orques et des mort-vivants), deux jours et une nuit, donc, à éviter les branches et se tasser les vertèbres sur la selle... Heureusement, les chevaux sortaient de plusieurs journées de repos complet et ne s'étaient pas non plus épuisés durant la progression de l'armée ; ils devraient tenir le choc. Ils le tiendraient probablement mieux que les humains... Pour sa part, Lothringen avait toujours monté à cheval par obligation, guère par plaisir. Au fil des heures, ce lui devint même une activité fort pénible. Les chevaux s'aspergeaient de boue les uns les autres en pataugeant dans les flaques laissées par l'orage, et les arbres semblaient prendre un malin plaisir à s'ébrouer sur leur passage : ils étaient à moitié trempés. Cela rajouté au fait que certains de leurs vêtements n'avaient pas eu assez d'une demi-nuit pour sécher : se connaissant, le semi-drow pronostiqua un rhume carabiné avant la nuit.

[Surya]

Surya choisit des airs doux et lents, qu'elle joua à la flûte après le repas. Pas trop fort, juste assez pour qu'ils entendent. Puis elle laissa courir ses doigts sur un disque de peau cerclé de bois, obtenant un son doux et chaud, et chanta, presque à voix basse, dans une langue inconnue des hommes qui l'entouraient. La langue de son peuple, là-bas dans la jungle. Cela ressemblait fort à une berceuse, calme et apaisante, apte à rassurer les coeurs et à endormir les êtres.
Elle continua à jouer, tout doucement, pour elle-même, même une fois que tout le monde se fut endormi. Pour se donner confiance et espoir. Pour ne pas craindre l'obscurité qui l'entourait. Pour faire fuir la peur et les pensées sombres. Pour oublier les horreurs de la journée et ne songer à rien. Le son était à peine audible, et elle espérait ne pas attirer de prédateurs ainsi. Puis, au bout d'un long moment, elle cessa de jouer, les sens aux aguets, décidant que la prudence devait tout de même l'emporter.

[Kasumi]

Pour Lothringen et Mornagest :

Le refroidissement et ses conséquences désagréables eurent le bon goût d’attendre qu’ils mettent tous pied à terre pour le bivouac du soir improvisé dans une petite clairière dotée d’un ru en son milieu. Il ne frappa pas seulement le conseiller mais aussi une bonne moitié de tous ceux qui n’étaient pas si injustement immunisés du fait de leur lien divin. Mais peut-être ces derniers accepteraient-ils de partager les bienfaits conférés par leurs pouvoirs. Si on le leur demandait… Malades comme vaillants furent tous mis à profit pour s’occuper des chevaux, monter le campement ou pourvoir à tout le confort possible dans ce genre de halte pittoresque et champêtre. Au moins la pluie avait-elle décidé de prolonger sa trêve et le vent les délaissait grâce à la forêt environnante.

Pour Surya :

Les airs doux de la jeune barde avaient fait des merveilles, allant jusqu’à dessiner un sourire tranquille et paisible sur le visage de son public pourtant très éprouvé. L’ancien messager s’était endormi le premier, assis sur une pierre avant que Lucinda ne le mène vers son couchage. L’adolescente avait veillé un peu plus longtemps, dédiant des regards emprunts d’admiration pour Surya et son art. Mais la fatigue avait fini par la rattraper elle aussi et la barde s’était retrouvée seule, bercée par les ronflements des dormeurs autant que par sa musique. Il devait être proche de minuit quand elle sentit ses yeux lui piquer affreusement, signe qu’il était plus que temps de réveiller le soldat et de trouver le chemin de sa couche. Rien hormis quelques oiseaux nocturnes n’avait attiré sa vigilance durant sa garde attentive.

[Mornagest]

Le froid humide était mordant, mais le vent était tombé et le ciel était relativement dégagé, fort heureusement. Cette chevauchée n'était guère une partie de plaisir, et ils étaient tous fourbus après la mauvaise nuit passée à combattre et à veiller en craignant un retour des orques. Ils auraient sans doute plus de facilités à monter la garde, avec un terrain un peu plus dégagé.

Guère inquiet quant à de possibles répercussions du froid sur lui-même, il espéra que ses compagnons n'en souffriraient eux-mêmes pas. Une bonne flambée permettrait au moins de se réchauffer un peu, à défaut de prévenir un rhume, ou pire...

Il s'acquitta de sa tâche sans réelle ardeur, à savoir, panser son cheval, lui ôter sa selle et l'attacher pour lui permettre de brouter tranquillement. Il avait le dos en compote, et songeait avec délectation à sa paillasse, espérant en silence ne pas devoir se réveiller une fois encore pour combattre.

[Lothringen]

Il eut d'abord mal à la gorge, puis commença à éternuer... Et dès qu'ils eurent mis pied à terre, cela n'arrêta plus. Eternuement sur éternuement, avec une intensité à fendre les bûches. Dans le même temps, son mouchoir criait grâce, et il lui semblait que son cerveau le quittait par les narines. Lothringen s'astreignit néanmoins à agir comme si de rien n'était, sortant son livre de sorts pour préparer ses incantations, mais c'était difficile ; à ce train-là, il allait effacer les pages... De guerre lasse, il finit par demander à sire Rowan si quelqu'un, et qui, bénéficiait encore de sorts divins au sein de la garde. Il s'était plusieurs fois posé cette question délicate sans oser affronter le problème directement. Il avait bien entendu, lors du dernier combat, que certains blessés avaient reçu des sorts de soin... mais il n'avait pas enquêté davantage. Le sujet était glissant. Ravestha avait choisi sa garde rapprochée parmi les helmites les plus fervents, et le conseiller ne doutait pas que s'il n'avait tenu qu'à eux, tous seraient demeurés indéfiniment fidèles à leur dieu mort. Mais, dans la garde comme ailleurs, le principe de réalité avait la vie dure...

Le capitaine de la garde s'assit près de lui sur un tronc d'arbre et lui expliqua à mi-voix.

"La garde est composée, très exactement, de cinq paladins, trois guerriers, deux guerriers-mages, dont je fais partie, et deux guerriers-prêtres. Lorsque la nouvelle de la mort de Helm est tombée, j'ai dû renvoyer dans leur temple plusieurs prêtres qui ne nous servaient désormais plus à grand chose..."

Lothringen devinait pourquoi les paladins et les guerriers-prêtres étaient restés : il leur restait de solides compétences martiales, comme Mornagest en faisait l'amère expérience à chacun de ses entraînements.

"A notre retour à Manost, il a fallu aviser. Trois des paladins et l'un des guerriers-prêtres se sont convertis. A Tyr, A Torm, à Ilmater. Ainsi, depuis peu, ils peuvent de nouveau nous assister de leurs sorts divins... Mais ils ne s'en vantent guère. Pour certains, j'ai dû leur forcer la main. Je vais demander à Losha de vous faire une guérison des maladies. Sauf votre respect, vous êtes notre meilleur mage ; ce serait dommage de vous voir rater une incantation à cause d'un rhume..."

Lothringen était dans un état de fatigue et de fièvre trop avancé pour protester. La journée de cavalcade s'ajoutait à la maladie, à la nuit interrompue, au combat précédent, et à trois journées de coma et de jeûne qui l'avaient déjà passablement affaibli.

[Kasumi]

Le dénommé Losha procéda avec discrétion en amenant Lothringen un peu à l'écart, mettant en évidence ce dont venait de l'avertir sire Rowan. Quoiqu'il en soit, le semi-drow perçut aussitôt l'amélioration fulgurante de son état : il cessa immédiatement d'éternuer et sentit l'air vivifiant de la campagne reprendre ses droits dans ses poumons alors que son nez et sa gorge étaient maintenant parfaitement dégagés. Toutefois, comme Tymora sait parfois se montrer facétieuse, le conseiller en sentit d'autant mieux les remugles du campement à commencer par les chevaux humides tout proches et l'odeur fuyant une journée bien trop confinée dans les bottes de la Garde blanche.

De son côté, même s'il n'avait pas fait preuve d'un enthousiasme forcené, Mornagest parvint rapidement au bout des tâches qui lui furent assignées et il apprit avec surprise qu'il échapperait ce soir aux roulements de garde. Une longue nuit l'attendait donc jusqu'à l'aube !

HRP : vous pouvez aller au lit avec le sentiment du devoir accompli, je vous ai assez torturés pour la journée.

[Lothringen]

Les gardes avaient dressé le bivouac, s'étaient occupés de poster des sentinelles, de soigner les chevaux, de préparer le repas. Lothringen ne participa à rien de tout cela, sauf en tentant de se rendre le moins encombrant possible : il ne devait pas s'en mêler, ce ne serait pas correct - il avait bien retenu la leçon l'autre fois. Après avoir sobrement remercié le paladin qui l'avait délivré de sa malédiction des constitutions fragiles, le semi-drow était retourné à ses sorts. Il devrait contacter Graëlon, demain, avant de partir... mais aussi pouvoir parer toute éventualité... Au final, il ne modifia que peu son arsenal.

Le dîner arriva bientôt, bref et peu loquace, mais délicieusement chaud autour du feu de camp. Du coin de l'oeil, Lothringen constata que Mornagest n'était pas le plus mal en point des gardes, il s'en fallait de beaucoup. Il effectuait ses tâches, machinalement, résistant vaillamment à la vague de rhumes démoralisante... Le semi-drow aurait voulu pouvoir lui glisser un regard, un encouragement, un sourire, mais... non. Les risques étaient trop grands s'ils étaient découverts.

Le conseiller resta encore une petite demi-heure près du feu, à regarder crépiter les flammes, puis se traîna sans gloire jusqu'à sa paillasse. En s'allongeant, il respira une dernière fois l'odeur de pin, de sève, de terre humide, de feuilles mortes, de bois brûlé – la forêt, son enfance, son refuge – et, se lovant tant bien que mal sous sa couverture, songea rêveusement à la personne dans les bras de laquelle il aurait souhaité s'endormir. Si loin, si proche... Il s'endormit quand même, et rapidement.

[Mornagest]

Finalement, il acheva ses menues tâches, et, après avoir mangé un morceau - frugal, surtout comparé à ce qu'il avait l'habitude d'engloutir - Mornagest discuta quelques minutes avec les autres gardes, tout aussi exténués que lui par ces deux jours de chevauchée quasiment ininterrompue, sauf par leur mauvaise nuit. Il apprit par là qu'il n'aurait pas à s'acquitter d'un tour de garde durant cette nuit. Si personne ne venait les attaquer, cela voudrait dire qu'il pourrait bénéficier d'une huitaine d'heures de sommeil sans discontinuer. Un rêve... à portée de main : il savait qu'il sombrerait dans le sommeil dès qu'il aurait posé la tête sur sa paillasse.

Prenant congé de ses compères, le guerrier ôta son armure. Il ne parvenait pas à se faire à l'idée de dormir avec autant de quincaillerie sur le dos, et récupérer suffisamment de forces. Tant pis pour les quelques instants qu'il perdrait à l'enfiler en cas d'urgence... et après tout, il avait toujours fait sans jusqu'à présent, bon an, mal an.

Le corps allait se reposer, mais l'esprit également. Cependant, pas avant d'avoir une nouvelle fois fait appel à ses souvenirs fraîchement récupérés. Ses pensées allèrent naturellement vers le semi-drow, qui sommeillait déjà, non loin de lui. Il osait à peine le regarder, autrement que depuis son rôle de subalterne. Le temps était parfois long...

Il s'endormit.

[Surya]

Surya finit par se lever pour aller secouer l'épaule du soldat qui devait la relayer. Sa veille avait été calme. Trop peut-être : elle avait eu tout le loisir, hélas, de penser à la journée accomplie, aux découvertes macabres dans le village, aux horreurs commises sans qu'elle parvienne à en comprendre le but. Le fantôme qui errait sans parvenir à trouver la paix. Ce père qui avait préféré tuer lui-même son fils pour lui éviter un destin pire encore. Les morts-vivants, dans le temple, prêts à sortir dès qu'il ferait suffisamment sombre au-dehors. Ces gens qu'on avait immolés par le feu, ou tué de toutes les façons possibles ou imaginable, sous les yeux impuissants de leurs proches. Elle avait préféré ne pas demander ce qui était advenu du frère de Lucinda ou de la camériste qui s'était faite passer pour elle, lui sauvant ainsi la vie.
Une fois ou deux, elle avait joué, en sourdine, pour s'occuper l'esprit à autre chose. Mais dès qu'elle s'arrêtait, les événements de la journée lui revenaient. Elle ne comprenait pas, vraiment pas, pourquoi les Mélandiens avaient décidé de telles atrocités.
- Rien à signaler pendant cette partie de la nuit, souffla-t-elle au soldat lorsqu'elle le vit ouvrir les yeux. Je vous laisse prendre votre tour de garde...

[Kasumi]

Pour les tourtereaux :

Mornagest dormit d'une traite d'un sommeil profond, sans rêve dont il put se souvenir, jusqu'à ce qu'on vint doucement lui secouer l'épaule pour qu'il participa à sa part des quelques corvées matinales. Il avait encore toutefois le temps d'enfiler son armure avant de s'occuper d'aider à abreuver les chevaux qui seraient les premiers à se sustenter eut égard à leur rôle de premier plan en cette nouvelle journée.

Lothringen se réveilla de lui-même au son des hommes s'agitant tout autour de lui. Il se sentait reposé, bien moins qu'après une nuit dans un lit confortable peut-être mais bien plus que s'il n'avait pas demandé à être soigné de son début de rhume. Avec une nouvelle longue journée de chevauchée en perspective, ce n'était pas forcément un luxe.

Pour Surya :

Le garde répondit dans un murmure pour ne pas risquer de réveiller les dormeurs :

- Merci Surya. Je me sens bien reposé. Espérons que la nuit sera aussi calme durant ma veille que pendant la vôtre. Tâchez de vous reposer vous aussi, nous partirons dès l'aube. De cette façon nous serons à Graëlon au plus tard en milieu d'après-midi.

Et sans plus de cérémonie, le soldat s'installa au centre de leur petit campement improvisé tandis que la barde emportait ses réminiscences et ses ruminations là où le sommeil menaçait de l'emporter malgré tout.

HRP : tu peux coucher et réveiller ta barde comme il te plaira. La nuit sera très calme mais fraîche.

[Lothringen]

Au réveil, Lothringen mit un peu de temps pour se remettre les idées en place, mais globalement, il se sentait sinon frais, du moins dispos. Il aurait en tout cas assez d'énergie pour affronter une nouvelle journée de chevauchée – restait à savoir sur quel genre de péripéties elle risquait de s'achever. Tandis que l'on s'affairait autour de lui, il en profita pour contacter le capitaine Bacramad, à Graëlon. Il lui expliqua dans les grandes lignes où ils étaient, ce qu'ils faisaient, ce qu'ils avaient appris sur les événements de Chêne-des-Clercs et ce qu'il convenait de faire avec les mort-vivants de ce village. Ils échangèrent aussi quelques mots sur les courriers du jour.

Le capitaine ne fit pas de commentaires, mais son inquiétude était palpable. A plusieurs reprises, il demanda si le conseiller désirait des renforts. Mais ils étaient au milieu de nulle part, à pister une cible mobile : comment retrouveraient-ils des renforts, alors qu'ils étaient déjà loin de la ville et qu'ils allaient peiner à retrouver les luméniens... Lothringen promit de le recontacter quand il en saurait davantage.

Puis il alla faire un tour à la feuillée, ce qui ne mériterait pas d'être raconté si ce n'avait été un prétexte commode pour s'isoler et agiter discrètement les bras sous sa cape.

Lothringen = = > message : Mornagest

« Mornagest... Je voulais te prévenir de faire très attention si nous en venons à affronter le nécromancien – il pourrait bien avoir un niveau suffisant pour faire tomber ensemble la métamorphose et la permanence, alors tiens-toi loin de ses sorts. »

[Surya]

Surya ne tarda guère à trouver le sommeil : il était tard, et l'épuisement de la journée commençait à se faire sentir. Elle prit le temps de relire quelques parchemins de sorts, puis se mit à chantonner intérieurement, cherchant à trouver la sérénité nécessaire pour s'endormir et mémoriser efficacement.

L'armée luménienne lui avait fourni une couverture chaude, du moins c'est ce qu'il prétendaient. Elle se réveilla pourtant une heure ou deux avant l'aube, transie de froid, et dû prendre le temps d'enfiler son manteau par-dessus ses vêtements pour retrouver une chaleur acceptable. Elle rêvait d'un thé chaud et de petits gâteaux au coin d'un bon feu de cheminée... avec un luth ou des percussions dont elle jouerait au gré de son envie, avec un public enthousiaste. Des danses, aussi, rythmées, pour réchauffer les coeurs et les corps. Et encore du thé, avec un peu de lait chaud. Sauf que le public en question, créé par son imagination, s'avéra être composé de fantômes et squelettes, à moins que ce ne fut-ce d'autres types de morts-vivants. Elle se réveilla en sursaut avant d'avoir pu le déterminer.
Il faisait jour et bien trop froid pour sortir de sous les couvertures. Elle décida, égoïstement, d'attendre que le soldat ait ranimé le feu.

[Kasumi]

Pour Surya :

Le soldat ne tarda pas à répondre à ce souhait-là au moins en allumant une bonne flambée et en mettant immédiatement de l'eau à chauffer. Surya sentit plus qu'elle ne vit leur petit campement s'agiter alors que, tout comme elle, Lucinda et le caporal manostienn avaient probablement eux aussi attendu ce moment pour émerger de leur couche inconfortable. Le vent soufflait en agitant les branches des arbres du bosquet mais ces derniers protégeaient pour l'heure les campeurs. Fort heureusement, il ne semblait pas encore pleuvoir pour l'instant. Au moins le soldat semblait décidé à finir de préparer le petit déjeuner avant de les enjoindre à quitter leurs couvertures et à affronter la dernière journée de chevauchée vers Graëlon.

[Surya]

Surya profita de ses couvertures jusqu'à la dernière minute, attendant que le parfum du thé vienne lui chatouiller les narines, avant d'émerger de son couchage et de s'habiller, réussissant à enfiler ses vêtements en un temps records. Pour sûr, elle allait prendre froid avec l'humidité qui régnait au petit matin. Et puis il faisait toujours un froid de canard. Non, c'était décidé, jamais elle ne serait barde dans une armée. Cette aventure-ci serait sa seule et unique expérience de ce genre. Et tant pis pour les œuvres épiques qu'elle escomptait en tirer... Ou alors, il faudrait qu'elle choisisse une guerre estivale, ou peut-être dans un pays chaud. Et encore... dans les pays chauds, il y avait des scorpions et des serpents partout.

Elle finit par rejoindre ses compagnons, bonne dernière, leur sourit en guise de salut et s'empara d'un bol de thé bouillant qu'elle avala en quelques gorgées sans se soucier de s'ébouillanter la gorge.
- Est-on encore loin de Graëlon ?, s'enquit-elle auprès du soldat. Il était, après tout, le seul parmi eux à connaître les lieux et l'itinéraire à suivre. Bon, certes, elle avait fait le chemin en sens inverse précédemment, mais le sens de l'orientation n'était pas son fort et elle devait s'avouer bien incapable de retrouver seule la route.

[Kasumi]

HRP : Je laisse répondre Mornagest dans l'autre groupe avant de vous mener plus loin.

Pour Surya :

Le soldat tenta de lui rendre son sourire mais avec moins de réussite : il ne pouvait pas se vanter de posséder le magnétisme exotique de la petite barde, même de bon matin.

- Avec un cheval de la Trouée, un bon cavalier pourrait atteindre la cote en milieu de matinée mais nous allons progresser plus raisonnablement. Je pense que si nous ne tardons pas à nous mettre en route et que nous ne lambinons pas en chemin, nous pourrons déjeuner en ville, même avec un peu de retard.

Lucinda sembla se réjouir de la nouvelle et esquissa elle aussi un sourire avant de se lever pour préparer au plus vite ses quelques affaires. Le manostien semblait en revanche totalement indifférent à cette nouvelle, son regard à nouveau vide. Il ne donnait même pas l'impression d'avoir compris de quoi il retournait.

[Mornagest]

Tandis qu'il préparait ses affaires et les attachait solidement à la selle de sa monture, Mornagest ressentit une incursion dans son esprit. Il se rappela cette sensation, dont il avait été plusieurs fois la cible. Un sortilège pour lui transmettre un message. La voix de son compagnon résonna dans sa tête :

"Mornagest... Je voulais te prévenir de faire très attention si nous en venons à affronter le nécromancien – il pourrait bien avoir un niveau suffisant pour faire tomber ensemble la métamorphose et la permanence, alors tiens-toi loin de ses sorts."

Une mise en garde avisée. Il ignorait la puissance nécessaire à un magicien pour créer des morts-vivants, mais apparemment, celui qu'ils pistaient faisait partie des quelques-uns à avoir atteint une maîtrise certaine dans son domaine. Mornagest avait connaissance de sortilèges puissants pour dissiper les enchantements les plus élaborés, et même son changement d'apparence n'était pas infaillible, Lothringen le lui avait dit lorsqu'il lui avait lancé ce sort.

Peut-être un jour pourrait-il se débarrasser de cette apparence qui n'était pas la sienne sans craindre pour son avenir... peut-être. En attendant, il lui faudrait combattre les protecteurs du nécromancien pour éviter toute déconvenue.

Quelques minutes plus tard, le guerrier en avait terminé et était prêt à se remettre en route. Ses fesses encore endolories en trépignaient d'impatience...

[Surya]

Surya observait le manostien devenu fou avec des sentiments mitigés, mi-agacée, mi-apitoyée. Peut-être irait-il mieux une fois arrivés au campement, lorsqu'il aurait rejoint son armée et retrouvé ses marques. Ou peut-être avait-il définitivement perdu l'esprit, auquel cas il aurait presque été plus charitable de le laisser mourir là-bas.
A tout hasard, elle se dirigea vers lui, répétant sa mascarade de la veille.
- Soldat, nous ne sommes plus très loin de votre unité de rattachement, et vos supérieurs attendent votre rapport. Rassemblez votre paquetage et mettez-vous immédiatement en selle.
Elle avait parlé d'une voix claire et autoritaire, une voix qui n'admettait aucune discussion. Hum... l'autre avait raison : avec un peu d'entraînement, elle pourrait presque se faire passer pour un officier. Elle aurait pu essayer, la veille, lorsqu'ils avaient croisé la délégation manostienne. Quoique... un officier de moins d'un mètre cinquante, femme de surcroît ? Et bien... pourquoi pas après tout ?