[Bâtiment] Le Comptoir des Transparences

[Galathée]

Trois petits coups, comme un pivert dans son songe noir.
Puis plus rien.
Encore deux petits coups, un grincement.
" Taliesin... Taliesin, c'est l'heure..."
Il faisait encore nuit. Baptiste dormait sur le ventre, le visage détendu. Guéric ronflait joyeusement, comme à son habitude. De Kerun, nulle trace.
" Je redescends... à tout de suite..." continua la voix de Sedanius.

[Taliesin]

-J'arrive... répondit-il, sans savoir si ses paroles avaient été compréhensibles.
Mais son grognement inarticulé, au moins, avait dû être perçu.
Conscient qu'il se rendormirait immédiatement s'il ne bougeait pas aussitôt, il fit un violent effort de volonté pour s'arracher à ses couvertures. Une fois debout, il s'habilla avec des gestes d'automate puis, toujours dans le même état, entreprit de rallier la salle commune.
Décidément, les bardes et les réveils matinaux, ça faisait deux.

[Galathée]

Quand il arriva dans la salle commune, Taliesin trouva le petit déjeuner sur la table et une certaine tension dans l'air. Kerun fixait le vide, la bouche pincée, et lui adressa un sourire furtif. Lena paraissait contrariée mais l’accueillit avec chaleur. Sedanius versa une tasse de thé puis la poussa vers le barde.
« Dès que vous avez l’estomac plein, on bouge, dit la drow. Perceval prépare les chevaux.
— Je vais déjà y aller, fit Kerun. Soyez prudents. Si vous avez le moindre doute, renoncez. Lena peut entrer en contact avec vous ou moi, Sedanius aussi… L’information doit circuler au besoin. A tout à l’heure. »
Sur ces entrefaites, il se leva.

[Taliesin]

Dans son état semi-comateux, Taliesin mit beaucoup de temps - et eu bien du mal - à comprendre les paroles, à jauger les expressions. La seule chose qui lui semblait claire, c'est que l'opération n'était pas annulée. C'était l'essentiel, assurément... Il préféra donc se concentrer sur son petit-déjeuner avant de chercher à en savoir davantage.
-Il y a un souci ? s'enquit-il finalement en reposant sa tasse vide.
Comme il l'avait espérer, boire et manger lui fit du bien.

[Galathée]

" Aucun souci, dit Lena en se levant. Vous pouvez tout laisser en l'état, Abel se chargera de débarrasser quand il se lève. Ou Perceval. Bref."
Elle sortit aussitôt de la pièce, gagnant le hangar. Sedanius poussa un léger soupir et se frotta le visage des deux mains.
" Les femmes, dit-il. Kerun n'est pas très malin, dans certains registres."

[Taliesin]

-Il a fait une grosse gaffe ?
Il se ravisa.
-Enfin, j'imagine que ça ne me regarde pas. Et de toute façon, nous devons nous concentrer sur la mission.
Il se leva.
-Bon, habillage, transformation physique, transformation vocale, et nous serons parés...
Restait juste a espérer que ce qui s'était produit n'aurait pas d'influence négative sur l'opération. Elle était déjà assez ardue comme cela pour ne pas en rajouter.

[Galathée]

Sedanius n'en dit pas davantage et ils suivirent le programme tracé par le barde. Une fois équipés, ils rejoignirent Perceval et Lena dans le hangar. Le premier les salua chaleureusement et leur souhaita bon courage. Il promit d'attendre les enfants avec quelque chose de nourrissant. Taliesin, Sedanius et Lena montèrent ensuite en selle. La magicienne incanta pour les englober d'une sphère d'invisibilité centrée sur sa personne. Il était nécessaire qu'ils restent bien côte à côte pour demeurer dans la zone d'effet du sortilège, mais ainsi protégés, ils purent quitter le Comptoir sans être vus et gagner les rues.
Leur première étape se situait dans le Havre bourgeois, où ils rejoindraient le fameux mur aveugle du Monastère, afin de s'y métamorphoser. Ils ne furent pas inquiétés durant leur périple, grâce aux ténèbres et à la magie, même si les sabots de leurs chevaux semblaient parfois résonner de bien fantomatique manière sur les façades endormies des hangars et autres villas.
Arrivés à bon port, Lena se remit à incanter, dissipant par là leur protection. Elle transforma chevaux et cavaliers, glissant ensuite à terre.
" Je vous attendrai ici pour réceptionner les enfants." leur dit-elle avant qu'ils ne s'éloignent, sombres et menaçants, Taliesin en tête, Sedanius dans son ombre, pour aller trouver le charpentier et son esclave.
Leur route les mena du Havre aux rues plus sales de l'Esplanade. Ils croisèrent un tandem de prostituées qui s'enfuit dans une ruelle en poussant des cris étouffés, un jeune boulanger qui les regarda passer la bouche ouverte, un camelot qui poussa rapidement sa charrette hors de leur chemin. Puis ils parvinrent à destination, devant une demeure qui aurait pu être modeste si ses boiseries n'avaient été neuves et de formes enchantées.

[Galathée]

Quête : Les Squelettes du Placard.
Chapitre 9 : Sauvetages (suite)

Quittant lesrues arborées du Havre, Taliesin, Sedanius, Lena et les deux enfants, sous le couvert de l'invisibilité, regagnèrent l'abri du hangar. Dès qu'ils furent à l'intérieur, la drow sauta de selle et referma la porte. Ensuite, elle leva les illusions. Les deux enfants étaient toujours sous leur drap noir, les mains liées, et Sedanius mit pied à terre, soulevant ensuite le gosse qu'il remit à Lena. Il vint en renfort de Taliesin pour faire la même chose avec le petit Hippolyte.

[Taliesin]

Avec des gestes précautionneux, le barde entreprit aussitôt de débarrasser le gamin de l'horrible sac noir qui le recouvrait de la tête aux pieds.
-Sedanius, as-tu encore les moyens d'apaiser le petit ? s'enquit-il. Il m'a l'air terriblement éprouvé et... C'est par là qu'à commencé Ombeline avec Fulgence.
Si le clerc ne disposait plus de ce sortilège... ils s'arrangeraient. Qui sait : quand ils auraient vu qu'on les déliait, qu'on les traitait bien, quand ils auraient constaté qu'ils étaient au milieu de personnes inconnues mais bienveillantes, parmi lesquelles se trouvait déjà un enfant... Peut-être les deux garçons se détendraient-ils.

[Galathée]

Le clerc se porta à hauteur d'Hippolyte, mit un genou en terre et incanta. Taliesin fit bien, cependant, de demeurer derrière le petit garçon, car il le sentit sur le point de détaler. Ainsi encadré, il n'osa pas bouger et ses frémissements s'atténuèrent quand l'énergie grise de Tyr l'encercla puis s'immisça à l'intérieur de sa carcasse.
" Cela ne suffira pas très longtemps, dit Sedanius en se relevant. Ce n'est qu'un apaisement momentané."
Attirés par le bruit, Perceval et Baptiste avaient fait leur entrée, le gamin restant caché dans l'ombre du guerrier. Lena leur sourit.
" Je vais m'occuper des chevaux. Allez donc installer ces jeunes gens dans la salle commune." dit-elle.
Hippolyte paraissait désormais calme si pas rassuré, mais Gurvan manifestait à nouveau des signes de détresse, regardant autour de lui comme si quelque chose de terrible allait lui arriver.
" Je veux rentrer chez moi." gémit-il.

[Taliesin]

"Chez moi"... En entendant ses mots, Taliesin sentit son cœur se serrer, et le malaise se fit pire encore lorsqu'il songea à cette femme effondrée à qui ils venaient d'arraché l'enfant.
C'était nécessaire. C'était pour son bien.
Il soupira, chercha ses mots puis, avant de les prononcer, il prit soin de lever le sortilège qui modifiait sa voix, ce qu'il n'avait pas pensé à faire jusqu'ici.
-Je suis désolé, Gurvan, mais ce n'est pas possible, dit-il, réconfortant.[color=#FFFFF66] Tu était en grand danger, là-bas. Car les hommes dont nous avions pris l'apparence par magie, les recruteur de la Phalange des Ténèbres, seraient bientôt venus te chercher, et nous n'aurions alors plus été en mesure de t'aider. C'est pourquoi nous avons tout fait pour les empêcher de te capturer, comme nous avons tout fait pour les empêcher de capturer Hippolyte.[/color]
Il jeta un regard compatissant aux deux gosses, leur adressa un sourire qu'il espérait réconfortant.
-Vous êtes en sécurité, ici. Personne ne vous fera de mal.
Il faillit ajouter que, sous peu, ils rentreraient à Luménis, mais se souvent de l'effet de cette déclaration sur Fulgence, il s'abstint.
-Vous voyez ce garçon ? dit-il plutôt. Il s'appelle Baptiste, et lui aussi est Luménien. Il pourra vous confirmer que je ne vous mens pas... Mais, en attendant, seriez-vous d'accord pour nous accompagner dans l'autre pièce ? Perceval, ici présent, vous a préparé de quoi manger.

[Galathée]

Hippolyte acquiesça poliment, sans doute encore sonné par l'effet du sortilège de Sedanius, tandis que Gurvan grimaçait d'incrédulité.
" Je ne comprends pas, souffla-t-il. Qui vous êtes ? Qui c'est la Phalange ? Je ne vais jamais retourner chez Maître Bellacornice ? Il allait m'affranchir... Il avait dit qu'il allait m'affranchir..."
Sedanius posa une main sur son épaule et le poussa vers l'avant, tandis que Baptiste osait un sourire embarrassé.
" Ton maître n'aurait pas pu te protéger très longtemps, dit Perceval. Même s'il t'avait affranchi, comme tu es Luménien, tu aurais été en danger..."
Mais Gurvan paraissait ne rien y comprendre.

[Taliesin]

Alors c'était à ce point-là ? Le gosse avait eu la chance incroyable d'être acheté par de braves gens qui l'avaient bien traité, qui l'avaient aimé, qui s'apprêtaient à l'affranchir et, qui sait, à l'adopter, pour peu qu'une telle chose soit possible ?
Perceval a raison. La Phalange aurait fini par lui mettre la main dessus.
Peut-être. Mais en attendant, il était désolé pour Gurvan, désolé pour le charpentier et sa femme...
N'y aurait-il pas moyen de les informer ? De les réconforter ? De leur dire que le petit était sain et sauf ?
Plus tard. Il songerait à cela plus tard.
-Je te promets qu'on t'expliquera tout, dit-il en se mettant lui-même en mouvement. Et je peux dès à présent te dire que tu as déjà été affranchi : il n'y a ni maîtres ni esclaves, entre ces murs.

[Galathée]

L'enfant le regarda, incertain, mais ne lui opposa nulle résistance. Sedanius demeura une seconde en arrière et échangea quelques mots avec Perceval, qui opina du chef. Taliesin le vit partir vers les portes et devina qu'il allait sans doute les verrouiller, par prudence, en attendant que les enfants soient véritablement apaisés. Baptiste se porta à hauteur des nouveaux venus, souriant, mais n'osa pas leur adresser la parole.
Dans la salle commune, un petit festin attendait les braves : du thé, du lait, un jus de fruits à la couleur ensorcelante, mais aussi une belle tourte aux pommes et un gâteau aux noisettes encore fumant. Perceval et Baptiste échangèrent un coup d'oeil et se sourirent quand ils aperçurent la mine ravie d'Hippolyte. Sedanius arriva derrière eux.
" Bienvenue au Comptoir des Transparences ! annonça-t-il, tandis qu'Hippolyte se glissait à table.
— Ça s'est passé comment ? demanda Perceval.
— J'ai pas fait exprès mais j'ai fait pipi." murmura alors Hippolyte, d'une voix chuchotante.

[Taliesin]

-Ne t'inquiète pas : ce sont des choses qui arrivent, ça n'est vraiment pas grave, lui souffla-t-il en retour. Promis, on te cherchera des habits secs.
Il faudrait aussi des vêtements pour Gurvan, qui ne portait que sa tunique de nuit. Restait cependant à espérer que le "quasi plus rien" évoqué par Lena suffirait pour tous les deux. Sinon, il faudrait se débrouiller avec les moyens du bord et hâter la visite chez le tailleur.
-Tout s'est très bien passé, répondit-il à Perceval - et à voix haute. Je n'aimerais pas recourir souvent à cette couverture, qui est vraiment éprouvante pour les gosses. Mais comme on ne pouvait l'utiliser qu'une fois, de toute façon... Et puis, l'essentiel, c'est qu'on ait réussi.
Il porta enfin son regard sur Gurvan. Pour l'heure, c'était celui des enfants qui réclamait le plus d'attention.

[Galathée]

Gurvan ne semblait pas savoir quoi faire de lui-même, aussi obtempéra-t-il quand Perceval le poussa doucement vers l'avant. Il s'assit juste à côté d'Hippolyte et demeura immobile, les yeux pleins de larmes.
" Je ne comprends pas." souffla-t-il.
L'apparition de Lena saisit les deux garçons et la drow fila dans le couloir, peut-être à la recherche de vêtements.
" Elle est gentille. Même si elle a pas l'air." dit Baptiste, d'un ton amical.
Tout le monde paraissait un peu gauche, sans savoir vraiment quoi faire pour détendre l'atmosphère. Perceval coupa la tourte et le gâteau.
" Qu'est-ce que tu voudrais ? Hippolyte."
Le gosse sursauta, comme foudroyé.
" C'est bien Hippolyte que tu t'appelles, non ?
— Oui. Oui, c'est Hippolyte.
— Tu veux quoi ?
— Je veux tout. Heu... de tout !" fit-il avec un large sourire.

[Taliesin]

Au moins cela en faisait-il un de content, bien que le sortilège lancé par Sedanius y soit sans doute pour quelque chose. D'un autre côté, quand on avait été exploité par un homme tel que le sieur Sombregloire, et même sans avoir été vraiment maltraité, tout changement devait être le bienvenu...
-Alors tu auras de tout. Mais essaie de manger lentement, d'accord ? Tu as le temps, ça ne va pas disparaître...
Il se tourna vers Gurvan.
-Je comprends que tout cela te paraisse bizarre... Mais nous allons t'expliquer, et tu as aussi le droit de nous poser toutes les questions que tu veux. Simplement, je pense que ça te ferait du bien de boire et de manger quelque chose... Enfin, ça n'a rien d'une obligation : c'est juste une proposition.
L'instant suivant, il faisait face au troisième garçon.
-Tu peux t'assoir aussi, Baptiste. Toi non plus, tu n'as pas eu droit à du gâteau depuis longtemps, et vu tout le mal que tu t'es donné, tu mérites bien d'en profiter ! Et si tu as soif, n'hésite pas, c'est ma tournée : thé, jus de fruit, lait... Quelque chose te tente ?
Au regard des circonstances, et même s'il n'entendait le forcer à rien, l'enfant était probablement leur meilleur allié.
Quant à lui... Il était barde. Et normalement, c'était aux bardes de détendre l'atmosphère. Alors il allait s'y efforcer, quitte à user de télékinésie ou de tours de passe-passe : après tout, la prestidigitation avait plutôt bien fonctionné, avec la jeune elfe des étoiles qui...
N'y pense pas.
Il chassa donc le souvenir, préférant se tourner vers les adultes.
-Hé, Perceval, Sedanius, ne faites donc pas cette tête : je vous jure que je ne vais rien casser ! D'accord, je n'ai jamais travaillé comme serveur. Mais à force de regarder autour de moi quand je joue de la musique dans les auberges et les tavernes, j'ai appris quelques petits trucs. Tiens, ça me rappelle ce que faisaient les employés de la Bienveillance...

[Galathée]

La métamorphose prolixe de Taliesin laissa ses compagnons un peu pantois, mais ils se prirent rapidement au jeu et l'atmosphère se détendit sensiblement autour de la table. Les assiettes circulèrent, tout comme les verres, chacun reçut de quoi se sustenter. Hippolyte observa les adultes avec inquiétude, mais Baptiste donna l'exemple en entamant sa propre part de gâteau et le petit palefrenier suivit. Lena revint avec des couvertures et quelques vêtements. Croisant le regard de Taliesin, elle haussa les épaules, embarrassée.
" Moi je suis Baptiste, disait le petit garçon. Lui, c'est Sedanius et c'est un clerc de Tyr... Et lui c'est Perceval, et elle c'est Lena, et lui c'est Taliesin."
Hippolyte hochait la tête, le nez dans son verre de lait, les yeux écarquillés, comme s'il assimilait chaque mot avec émerveillement. Gurvan ne touchait à rien, de son côté, la bouche pincée. Abel fit son apparition depuis les hauteurs, mal réveillé. Il était encore très tôt, le soleil se levait tout juste sur la petite cour qu'ils apercevaient par la fenêtre voisine.

[Taliesin]

Une aube radieuse pour fêter la libération de deux Luméniens supplémentaires : l'elfe voulut y voir un signe, un encouragement. Bien sûr, il était toujours inquiet pour Gurvan, mais puisque l'ambiance s'était déjà sensiblement améliorée, il n'en rajouta pas dans la volubilité, ne se fendit d'aucune pitrerie, d'aucune grande explication. Il fallait faire preuve de patience, agir par petites touches, espérer que le gamin se détendrait peu à peu en constatant qu'aucun mal ne leur était fait, qu'ils étaient au contraire bien traités... Peut-être l'enthousiasme d'Hippolyte détendrait-il sur lui, la gentillesse de Baptiste le toucherait-elle...

[Galathée]

Baptiste essayait de se montrer affable en tout cas et il entreprit d'expliquer aux deux autres enfants où ils se trouvaient, avec ses mots à lui. Il mentionna aussi le Temple de Baine et la manière dont il avait été secouru par tout un commando de membres de la Réunion. Abel et Perceval ajoutèrent des précisions tandis que Sedanius demeurait les bras croisés, observant tout ce petit monde avec un sourire qui paraissait à la fois ému et inquiet.
Lena s'était glissée à côté du barde et elle posa la main sur son bras.
" Je ne sais pas si le moment est bienvenu, mais si tu le désires, je peux te renseigner sur les progrès qu'Arion et... et Meloenn ont fait cette nuit."

[Taliesin]

Taliesin hésita un instant, craignant sans doute que les nouvelles soient mauvaises.
-Je veux bien, répondit-il néanmoins, s'efforçant de sourire.
Il devait savoir. Et puis, constater que les paroles de Baptistes étaient vraies, que la Réunion s'efforçait bel et bien de sauver tous les Luméniens réduits en esclavage... Cela ne pouvait que rassurer les nouveaux venus, Gurvan au premier chef.

[Galathée]

Lena ne haussa pas la voix, pour ne pas attirer l'attention et ne pas déranger les autres.
" Arion est allé chez les Louviers. Leur fille, Bérénice, est disciple, elle aussi, apparemment. Il a visité sa chambre et a déniché des notes d'expérience. Apparemment, son esclave était une vieille femme sur laquelle elle a surtout travaillé en nécromancie. Nous pouvons donc éliminer les Louviers. De son côté, Meloenn a côtoyé pas mal de nobles, hier soir, mais évidemment aucun des Disciples. D'après les informations qu'elle a recueillies, les Sumpfknochen avaient un petit garçon, peut-être celui dont tu as entendu parler chez les Tombefol, les Vainevie ont accueilli un demi-orque à moitié fou et les Doucechute un vieux clerc de Helm qui n'a pas tenu plus de trois jours."
Elle se tourna vers les enfants.
" Il ne nous reste plus que quatre familles potentielles. Peut-être ne sera-t-il pas nécessaire de nous livrer à ce dangereux tour de passe-passe ce soir... Mais nous en saurons plus quand Arion et Meloenn se seront levés, peut-être. Ou quand Kerun reviendra. Après tout, il a eu les informations dès leur retour."

[Taliesin]

Plus que quatre familles : ils avaient avancé à pas de géant.
Et seulement deux cobayes tués au cours des expériences : bien sûr, il y en avait peut-être un ou deux de plus, mais le taux de mortalité était donc moins dramatique qu'il ne l'avait craint.
Un coup d’œil à l'astre diurne.
Un sourire plus détendu.
-Merci pour ces informations, Lena. Merci beaucoup. Elles sont très encourageantes. Et, effectivement, peut-être pourrons-nous nous dispenser d'infiltrer les disciples, compte tenu de nos récents progrès. A mon avis, Kerun sera de cet avis : comme nous avons multiplié les opérations spectaculaires ces derniers temps, un peu de discrétion ne serait pas malvenu, sans empêcher en rien de poursuivre l'enquête par des moyens plus traditionnels et moins risqués...

[Galathée]

" Sans doute... En fonction de ce que pourra nous apprendre Hippolyte... s'il sait quelque chose... Je crois que la méthode d'Arion lui a paru la plus efficace, finalement. Pour autant que les protections mises en place dans les manoirs soient contournables, aller jeter un oeil dans la chambre des Disciples génère pas mal d'informations. Enfin, évidemment, ils risquent d'être chez eux ce soir... Je ne sais pas. Nous verrons bien."
Elle lui sourit.
" Pour te changer les idées, cependant, je pense qu'une visite chez le tailleur va s'imposer... Vu nos invités, je crois que le mieux est de te faire passer pour un maître qui a besoin de vêtements pas chers pour ses esclaves. Certaines boutiques sont spécialisées dans ce type de choses. Mon seul souci, c'est que je vais manquer de sortilèges pour déguiser tout le monde... Il faudra aviser. Certains des vêtements de Guéric pourraient aller à Hippolyte, ils ont un gabarit assez similaire, mais je ne suis pas certaine qu'il sera ravi... Enfin... C'est pour la bonne cause."

[Taliesin]

-Je suis sûr qu'on arrivera à le convaincre, quitte à le menacer de devoir trouver des activités pour occuper tout ce petit monde... Et de toute façon, il ne s'agirait que d'un prêt provisoire. Certes, il faudra voir si les enfants son en état de resortir dès aujourd'hui, si tu penses qu'il n'est pas préférable de garder quelques sorts en réserve en cas d'imprévu...Mais quoi qu'il advienne, le problème sera réglé très rapidement.
La couverture suggérée par Lena lui semblait idéale. Néanmoins, s'il était trop dur pour les garçons d'endosser à nouveau le rôle d'esclave, il serait toujours possible d'aviser, d'imaginer un père amenant ses fils chez le tailleur.

[Galathée]

" Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire sortir les enfants, dit Lena. Un maître se soucie peu de l'ajustement des vêtements. Il indiquera une hauteur approximative, et le marchand s'attendra à ce qu'il ait une esclave pour faire des retouches au besoin."
Elle jeta un oeil sur les gosses.
" Je pense qu'aucun d'entre eux ne doit ressortir. Je ne connais pas bien les enfants, c'est la première fois que nous en prenons en charge mais... Baptiste donne le change, Gurvan est absolument imprévisible et le petit Hippolyte a l'air complètement ailleurs... Non. Il faudra y aller sans eux. Sedanius, avec un déguisement, pourrait faire ça bien, en fait. Tu es trop reconnaissable sans l'intervention de la magie."

[Taliesin]

-Désolé, je t'avais mal comprise : évidemment, les gosses ne doivent pas quitter le Comptoir. Ah, je dois avoir l'esprit un peu ailleurs.
Il baissa le ton.
-Autant arracher Hippolyte au Sombregloire ne m'a posé aucun problème, même si j'étais désolé de terrifier le gosse, autant Gurvan.... Le charpentier et sa femme, surtout... Ce sont de braves gens. Je préfère ne pas pensé à la peine qu'on leur a involontairement causée... En plus, les bonnes âmes sont si rares, à Melandis...
Il secoua la tête, soupira, puis reprit, d'une voix normale :
-Pour le reste, si Sedanius n'a pas envie de ressortir, je m'en chargerai. Je ferai ce que vous voudrez, en fait. Tout ce qui compte, c'est que je puisse m'occuper, me rendre utile... et ne pas demeurer les bras croisés.

[Galathée]

" Ce n'est pas parce qu'ils se sont pris d'affection pour le gosse qu'ils sont fatalement de braves gens, dit Lena avec une petite grimace. Même les matrones drows aiment leurs filles... à leur manière."
Elle secoua la tête.
" L'un dans l'autre, ils ont fait une erreur en s'attachant à un petit Luménien et vous lui avez sauvé la vie. Tôt ou tard, la Phalange serait venue le chercher. Croire qu'on peut lui échapper, c'est être naïf, et les naïfs ne vivent pas vieux à Mélandis. Tu ne dois rien regretter. Le gamin est secoué mais il peut trouver mieux : des gens qui ne s'attacheront pas sa loyauté en lui promettant de lui rendre une liberté qu'il n'aurait jamais dû perdre et qui ne leur appartient pas."

[Taliesin]

Soudain las, il se frotta le visage.
-Tu as raison, bien sûr... Je suis trop sur les nerfs et du coup trop sensible... Il faut dire que nous avons enchaîné les opérations d'envergure, ces derniers jours...
Il se redressa, sourit.
-Mais je ne regrette rien. Au contraire : nous avons réussi des choses formidables, sauvé beaucoup de monde en un temps incroyablement court... C'est inespéré. Il y a donc de quoi se réjouir.

[Galathée]

" Oui." fit la magicienne avec un sourire réconfortant.
Autour d'eux, Perceval s'était levé et entraînait Hippolyte vers le couloir, sans doute pour lui permettre de se changer. Baptiste parlait avec Gurvan, sans trop d'effets notables, car le petit garçon gardait les yeux gonflés et la mine revêche. Il opinait cependant du chef de temps en temps. Sedanius vint poser une fesse près de Taliesin.
" Comment est-ce que vous pensez qu'on doit les installer ? Tous les trois ensemble ? Ou bien nous les répartissons avec les adultes ? Nous avons récupéré de la place avec les récents départs, mais... d'habitude, nous logions une partie des gens à bord du bateau... Ici, nous devrons déplacer pas mal de monde...
— Je peux bouger, dit Lena, mais je ne vais pas chez Meloenn. Je préfère encore m'installer un hamac dans le hangar ou prendre une cellule !"