[MP] Histoire : Ailyn

[Smidge]

Elle avait pourtant laissé la chambre juste derrière, elle n'était pas folle...

Le couloir s'enfonçait, s'enfonçait, s'enfonçait... toujours bercé de cette lueur fantomatique. Que se passait-il ici ?

Finalement, après une ou deux minutes qui lui parurent avoir durer une éternité, Sofia se trouva devant une porte. Une porte comme elle n'en avait encore jamais vue, et qui ne ressemblait en rien à celle de la pièce qu'elle avait quittée quelques instants auparavant.

Une porte faite d'ossements humains.

[Ailyn]

Sofia frissonna de terreur.

Dans quel genre d'endroit avait-elle pu atterrir ? Quel était donc le secret de ce manoir ? Probablement des mystères plus morbides que ce que son imagination pouvait créer...

Pourtant, pour l'instant, il n'y avait pas d'autre issue.

Le cœur au bord des lèvres, Sofia posa sa main sur la poignée.

[Smidge]

Elle reconnut la salle devant elle tout de suite : cet atelier en rotonde aux larges fenêtres dans lequel Lucien entreposait ses oeuvres, dans lequel elle s'était déjà aventurée lors de ses insomnies de tantôt. Au dehors, il faisait nuit. Une nuit noire, profonde, dont Sofia savait déjà qu'il serait impossible d'y distinguer le moindre rayon de lune.

Mais cette fois-ci, l'atelier était presque vide. A l'exception d'une seule pièce, immense, en plein coeur de la pièce. Recouverte d'un immense drap de soie blanche.

[Ailyn]

Faire demi-tour n'aurai servi à rien. Et malgré le côté épouvantable que pouvait représenter cette idée, Sofia n'avait d'autre choix que d'avancer.

Et de retirer ce drap.

Elle l'empoigna et tira dessus d'un coup sec. Inutile de faire durer le plaisir.

[Smidge]

Ce qu'elle vit ensuite lui glaça le sang. Deux yeux, deux orbites vides, la fixaient intensément.

La "chose" était là. Juste devant elle. L'Ange de la Mort. Faite d'ossements humains torturés. La création de Lucien la dominait de toute sa hauteur, ses mâchoires difformes prêtent à donner la mort.

Et comme si son plus horrible cauchemar prenait vie devant ses yeux terrorisés, la Bête se redressa lentement, poussant un grognement rauque tout droit sorti des Enfers.

[Ailyn]

Sofia fit demi-tour à toute vitesse, tâchant de garder un oeil sur la créature.Ce qu'elle vivait n'avait pas de sens... Comment tout cela était-il possible ?

[Smidge]

Le squelette vivant émit une sorte de cri strident qui fit vibrer toutes les fenêtres de la rotonde. Ses yeux morts scrutèrent tout autour d'elle, mais Sofia avait déjà déguerpi et s'était réfugié dans le couloir derrière elle.

En dehors de la respiration sifflante qui résonnait dans le couloir, tout semblait calme.

Vraisemblablement, elle ne l'avait pas encore repérée...

[Ailyn]

Fallait-il essayer d'entrer en contact avec cette chose ?

Sofia n'en brûlait pas d'envie, elle devait bien l'admettre.

Tâchant de garder la créature à l’œil, Sofia ouvrit le livre pour voir si ne s'y cachait pas quelque chose sur la créature...

[Smidge]

La jeune femme feuilletait les pages à toute vitesse, cherchant en premier lieu une illustration qui aurait pu la mettre sur la voie dans l'océan de pattes de mouches qui recouvrait le papier usé par les ans.

Et enfin, après quelques minutes, elle trouva. "La Bête", tout droit sortie de ses cauchemars.

Malgré les annotations en russe, elle déchiffra approximativement quelques bribes d'explications. La Bête (dont elle n'avait pas trouvé le nom, autre qu'en symboles cabalistiques incompréhensibles) prenait vie dans la psyché des mortels, et gagnait en puissance en se nourrissant de la terreur qu'elle insufflait. Une fois sa victime pétrifiée de peur, la Bête prenait apparemment le contrôle de son esprit... afin de fouler le royaume des mortels et d'y semer le chaos...

Quelques heures auparavant, une histoire comme celle là l'aurait fait au mieux sourire, et au pire lever les yeux au ciel. Mais à présent...

Sofia tourna encore quelques pages, plissant ses yeux sur l'écriture manuscrite qui ornait les illustrations toutes plus terrifiantes les unes que les autres.

Et tout à coup, son coeur se serra.

La page qui suivait la concernait directement...

Le paragraphe s'intitulait "Mort et Renaissance de S. Stoän".
Les lignes suivantes la décrivaient, s'offrant d'elle-même en sacrifice à la Bête. Et tandis que son âme était aspirée dans l'Au-Delà, tout son corps se déformait pour épouser celui de cette créature squelettique sans nom...

[Ailyn]

L'esprit de Sofia était définitivement envahi, colonisé par des pensées très sombres. Dans un réflexe de résilience inattendue, elle dut se retenir de pouffer de rire.
"C'est une blague, une véritable blague... Je ne vais quand même pas me laisser dévorer par ce... ce truc et lui laisser ma peau ?!"

Elle ferma le livre et se massa les tempes de la main droite.

"Pas question, non mais !"

Et silencieusement, elle s'appliqua à remonter le couloir. Il fallait sortir et surmonter sa peur. Il le fallait... pour elle, mais surtout pour son fils.

[Smidge]

A l'instant où Sofia se massa les tempes, sa tête se mit à tourner, et son environnement à devenir plus flou.

C'était comme si... comme si elle n'était pas vraiment là. L'espace d'un instant, les murs, le couloir, tout se brouilla devant ses yeux... pour revenir à la normale l'instant d'après. Si toutefois on pouvait qualifier ces évènements de "normaux"...

A l'opposé en remontant couloir, Sofia atteint finalement une autre porte, moins hostile que celle en ossements qu'elle venait de quitter. Une porte, comme il y aurait pu en avoir dans le maudit manoir de son ancien amant.

En tous cas, si la Bête se trouvait toujours là bas, elle ne semblait pas l'avoir suivie.

[Ailyn]

Sofia ouvrit la porte, plus très certaine d'avoir envie de découvrir d'autres horreurs...

[Smidge]

Qu'est-ce qu'il faisait sombre tout à coup. Sofia avançait à tâtons, lorsque sa main heurta un angle de mur, puis un interrupteur étrangement familier, sur lequel elle pressa son index.

Un grésillement lumineux émis quelques impulsions près du plafond, puis une lueur blafarde éclaira enfin la pièce. Son lit était là. Du moins celui qu'elle avait partagé avec Marjorie la nuit précédente.

Quelques sons de voix étouffées derrière elle attirèrent son attention.

Sofia se retourna, et se figea d'horreur.

Crucifiée à même le mur, le corps ensanglanté de Marjorie était comme suspendu dans les airs, la fixant de ses yeux morts.

"Quelqu'un a vu mademoiselle Stoän ?, saisit-elle dans le brouhaha grandissant derrière l'unique porte de la chambre. Trouvez-la moi tout de suite !"

Sofia baissa lentement son regard vers ses mains. Pleines de sang. Ainsi que ses vêtements.

[Ailyn]

"Cette fois-ci... Cette fois-ci... Je suis foutue. C'est fini. Et l'ironie de tout ça... c'est que je ne sais même pas pourquoi, comment tout cela est possible..."

Des larmes envahirent les yeux de Sofia et elle chancela. Il n'y avait plus rien à faire. Elle aurait dû, elle l'avait toujours su, quitter le manoir avant. Mais... Mais elle ne l'avait pas fait. Et cette fois-ci, la malédiction allait s'abattre sur elle. Il avait gagné. Lucien avait définitivement gagné et elle allait tout perdre. Y compris son fils.

Il ne faudrait pas longtemps avant que quelqu'un s'introduise dans la chambre. Il ne faudrait pas longtemps avant qu'on découvre Marjorie. Il ne faudrait pas longtemps avant que Sofia ne devienne complètement folle.
Et pourtant, il fallait résister. Si possible...

Sofia regarda une dernière fois si le livre était près d'elle. Peut être l'explication serait consignée à l'intérieur...

[Smidge]

Le livre était là. C'était d'ailleurs bien le seul élément qui la rattachait encore à ce qui avait pu se passer avant... que tout devienne fou autour d'elle.

Elle entendait toujours les voix derrière la porte, mais par un hasard presque miraculeux, personne n'ouvrit. Les mains tremblantes, elle ouvrit le grimoire sous les yeux morts de la jeune servante suspendue au mur.

Les pages défilaient devant ses yeux, incompréhensibles... Malgré tous ses efforts, elle ne parvint pas à retrouver le précédent passage qui prophétisait sa propre mort.

A la place, une illustration plutôt détaillée l'illustrait, prostrée au sol, un corps aux longs cheveux blonds crucifié contre le mur de la pièce...

"La Mort est la seule issue", sous-titrait le message au-dessous...

[Ailyn]

Sofia décida de ne pas se laisser abattre. Il fallait sortir d'ici. Rien n'indiquait pourquoi Marjorie avait trouvé la mort, et Sofia ne savait pas si elle voulait vraiment savoir. Il fallait à présent sortir d'ici, définitivement.

Laissant le livre sous le lit, elle décida donc d'entrouvrir la porte avec la plus grande discrétion une fois que le silence se fut fait un long moment dans le couloir.

[Smidge]

Personne...

Elle se trouvait à la porte de la chambre dans laquelle elle avait passé la nuit, mais il n'y avait personne. Pas un bruit, pas un mouvement. C'était comme si tous ces sons qu'elle avait pu percevoir un instant auparavant s'étaient évanouis à l'instant où elle avait ouvert la porte.

Sofia fit quelques pas prudents en direction de la salle à manger... mais rien. Même de la cuisine, où les domestiques auraient dû se trouver en cette heure proche du repas, ne filtrait aucun son.

Et en guise d'éclairage, la même lumière verdâtre que celle qui illuminait ce mystérieux couloir quelques minutes plus tôt...

Que se passait-il ici ?

[Ailyn]

Sofia regarda ses mains, pour vérifier que le sang s'y trouvait toujours...

Elle avait encore la tentation d'aller regarder dans le livre si elle ne trouvait pas une explication mais c'était comme si... elle n'était toujours pas revenue à la réalité.

[Smidge]

Plus de sang sur les mains... ? C'était à n'y rien comprendre.

De nouveaux vertiges la firent chanceler un instant au moment même où elle formulait mentalement sa dernière pensée.

Tout ceci était-il bien réel... ?

[Ailyn]

C'était à se demander si le cadavre de Marjorie avait un jour existé...

Elle retourna en arrière pour vérifier qu'il était toujours là... Où étaient passés les autres invités ?

[Smidge]

De quel cadavre parlait-elle... ? La chambre était vide, comme semblait l'être la totalité du château.

[Ailyn]

Sofia sortit de la chambre en trombe.

"Je ne suis pas sortie de ce cauchemar, je dois me réveiller !"

Elle descendit le plus rapidement qu'elle put vers le hall d'entrée, hurlant à plein poumons :

"Je VEUX ME REVEILLER !!!!!"

[Smidge]

Tout se mit soudainement à tourbillonner. Quelques bribes de souvenirs refirent surface ci et là. Le crâne de la Bête, le sang de Marjorie, le crâne sur la couverture de ce maudit grimoire...

Puis tout s'assombrit lentement.

Quelques secondes, minutes, ou heures, s'écoulèrent dans le silence le plus absolu.

Et enfin, Sofia rouvrit les yeux.

Ce qui percuta en premier ses sens fut une vive douleur aux tempes, qu'elle parvint rapidement à calmer en y portant instinctivement ses mains.

Elle se trouvait toujours dans le bureau, recouvert d'une épaisse couche de poussière. Le passage dans le mur était refermé, et le "tic tac" régulier du mécanisme s'était tu.

Et un peu plus loin, à demi ouvert contre la plinthe, le grimoire.

[Ailyn]

Sofia empoigna le grimoire et quitta la pièce, laissant derrière elle le cadavre de cette pauvre Mylène, à propos de laquelle elle se demandait bien ce qui avait pu lui arriver...

[Smidge]

... à part que le corps de Mylène n'était plus dans la chambre...

Priant de toute son âme qu'elle ne se retrouve pas de nouveau nez à nez avec ce couloir fantomatique interminable, Sofia ouvrit lentement la porte sortant de la chambre... et poussa un soupir de soulagement.

Il s'agissait bien d'un couloir, mais transversal cette fois-ci, et menant sur sa gauche en direction du hall central, et sur sa droite vers les autres chambres, la salle de bain, et l'étage.

La jeune femme tendit l'oreille, mais ne perçut pas d'autres bruits sur celui du vent au loin.

Apparemment, elle était seule.

[Ailyn]

Lentement, elle remonta le hall d'entrée, l'oreille aux aguets. Que pouvait-il bien se passer de nouveau ?

[Smidge]

A peine Sofia avait ouvert la porte du hall central que celle en face s'ouvrait à son tour, laissant apparaître Marjorie, qui s'avançait au pas de course.

"Oh, madame Sofia, s'exclama-t-elle en levant les yeux vers elle. Nous allons bientôt passer à table."

Elles marchèrent l'une vers l'autre jusqu'à se rejoindre au milieu de la pièce.

"Savez-vous si Emile se trouve dans l'aile nord ?, ajouta-t-elle alors. Je n'ai pas non plus trouvé la dame de la police. Si vous les aviez croisés... ?"

[Ailyn]

Tâchant de garder son calme, Sofia lui répondit d'une voix peut être moins enjouée qu'à l'ordinaire :

"Non, je n'ai croisé personne... d'ailleurs, je vous avouerai que j'ai trouvé ça très étrange..."

Elle poussa un grand soupir avant de poursuivre :

"Cette maison est des plus étranges... Il y a longtemps que vous y travaillez ?"

[Smidge]

Marjorie sembla ravie d'abandonner sa mission pour bavarder.

"Oh, non, ça ne fait pas très longtemps. C'est maman qui m'a faite embaucher il y a quatre ans, quand l'autre employée... (elle baissa la voix, sur un ton de confidences) est morte dans un accident..."

Elle attendit quelques instants l'effet de sa révélation, puis haussa tout à coup les sourcils.

"Et vous, qu'est-ce qui se passe ?, reprit-elle en la pointant du doigt. Vos vêtements sont plein de poussière !"

[Ailyn]

Sofia observa ses vêtements quelques instants :

"J'ai voulu m'aventurer dans un couloir obscur... vous savez, ce couloir là qui s'ouvre sur un pénombre si profonde qu'on n'y voit rien... d'ailleurs la porte était fermée pendant un certain temps ! J'ai voulu aller voir et puis... je suis tombée en fait."

Sofia épousseta ses vêtements avant de reprendre :

"La précédente employée a trouvé la mort dans un accident ?"

Il fallait en apprendre plus. Cela pouvait-il avoir un rapport avec... le livre ?