[Ailleurs] Au-delà : troisième pilier - Echo

[Lothringen]

Après avoir mangé plusieurs galettes, elle se servit un verre de vin. Le dragon-fée, qui l'avait observée avec intérêt pendant tout ce temps, perché sur le montant du lit, se précipita alors avec excitation pour y laper le premier.

« Oh, je t'en prie, maître ! Ce vin au miel, c'est mon péché mignon... »

Il avait à peine bu la moitié du verre qu'elle le vit s'immobiliser, puis commencer à tousser frénétiquement, sans pouvoir s'arrêter, comme s'il s'étouffait. Il battit des ailes, toussa encore. Après une demi-minute d'une agonie douloureuse, il s'effondra sur le couvre-lit, recroquevillé sur lui-même, raidi. Chance ressentit aussitôt le contrecoup de sa mort dans ses propres organes : c'était comme un formidable coup de poing qui lui coupa le souffle. Elle se sentait plus faible, plus fragile, alors même qu'elle n'avait pas bu et que ce corps de drow lui avait paru gracile dès le début. A moitié morte, elle s'allongea sur le lit, espérant que cela passerait. Elle ressentit alors une présence soudaine au pied du lit. C'était Lui : son maître. Curieusement, sa présence ne la surprit pas. Il devait avoir un moyen d'être immédiatement averti quand elle, enfin il, se trouvait en danger.
Elle entrouvrit les yeux pour l'apercevoir : c'était un drow de petite taille, menu, vêtu d'une cape blanche porteuse de mystérieux insignes. Il regardait le cadavre de son familier.

« Alors c'était cela la grande idée d'Alaexer ? Le poison ? Voilà qui ne fait pas honneur à la créativité de la famille... Je n'étais pas très enthousiaste pour te laisser prendre un familier, de crainte que tu ne t'y attaches, mais au moins, il aura prouvé son utilité. Pourquoi n'as-tu pas utilisé une détection du poison, comme d'ordinaire ? »

Il se tourna vers elle et la dévisagea. Ou plutôt, non, il la scruta de l'intérieur. "Une lecture de pensée", analysa-t-elle aussitôt.

« Oh, mais je vois. Tu n'es pas lui. Pas vraiment, n'est-ce pas ? Hé bien, il est temps que tu retournes d'où tu viens, en nous laissant à nos affaires. Mais je te remercie, intruse, tu me facilites la tâche. Je ferai disparaître la trace du dragon-fée. Quant à la tentative d'assassinat - voilà au moins un souvenir qu'il ne me sera pas nécessaire d'effacer... »

Il fit un geste vers elle, et elle se sentit comme irrésistiblement arrachée à son corps d'emprunt. Elle perdit conscience, pour ne la recouvrer que dans la clairière sans étoiles, où l'attendaient déjà les quatre autres.