[Quête]Voyage d'Hélonna à Everaska (quête : Racines)

[Kasumi]

Kasumi n'avait pas d'aspiration précise sinon profiter de cette promenade nocturne sous la lune mais il n'avait aucune intention de risquer de surprendre un couple dans une situation gênante aussi entraîna-t-il sa compagne vers la dune qui délimitait la plage la plus proche du village. Il avait passé un bras autour de ses épaules, sans prononcer un mot. Bientôt, ils seraient confinés pour plusieurs semaines et sans possibilité d'un peu d'intimité mais ce soir encore ils étaient libres.

[Voyageuse]

La fraîcheur nocturne contrastait avec la chaleur de la journée, encourageant Sylvia à se blottir contre lui. Les étoiles parsemaient le ciel de mille diamants étincelants, et, loin du village, ils se sentaient seuls au monde.

La fête battait toujours son plein lorsqu'ils revinrent au village, et personne ne prêta attention à eux. Ils purent regagner leur chambre... et profiter de la musique, des chants et des rires qui égayaient l'atmosphère au-dessous, et qui leur parvenaient heureusement atténués. Dormir ne serait pas facile. Mais tôt ou tard, les fêtards finiraient bien par se lasser, eux aussi.

[Kasumi]

Kasumi n'avait pas ménagé ses efforts pendant la journée aussi sentait-il son corps fourbu mais il ne chercha pas à tout prix à gagner le sommeil. Non, rester allongé dans la pénombre à contempler le beau visage de Sylvia lui convenait pour l'heure tout à fait. Il pourrait sans peine y passer des heures sans jamais se lasser. Il murmura dans l'ombre :

- J'en viendrais presque à plaindre ces hommes qui passent leur vie en mer. Loin de l'amour de leur belle. Une fête de temps en temps ne peut pas compenser ce manque.

[Voyageuse]

" Hmmm... Je suis prête à parier que certains d'entre eux en ont plusieurs, de belles, dans différents ports... Et puis, ceux qui sont d'humeur fidèle, à mon avis, ils ne font pas ce métier indéfiniment, ou alors ils négocient deux mois à terre pour quatre mois en mer ou quelque chose comme ça. Sinon ça n'est pas vivable ! Ils ne verraient même pas grandir leurs enfants..."
Sylvia déposa un léger baiser sur sa joue.
" A ce sujet... promets-moi de ne jamais devenir marin ! Et je peux même te certifier que si tu dois partir pour une mission de plusieurs mois, je te suivrai, où que tu ailles !"

[Kasumi]

En réponse, il la serra dans ses bras et répondit après un soupir d'aise :

- Devenir marin ? Quelle idée ! Ce sera une promesse facile à tenir : il y a bien des sirènes en mer à ce qu'il parait mais pas de forêts, pas de Sylvia ou pas d'enfants à voir grandir donc ça ne vaudra jamais la terre !

Il marqua une pause et ajouta d'un ton plus énergique :

- Et je ne voudrais pas que nous soyons séparés plus de quelques semaines. En Anauroch déjà, c'était difficile pour moi de ne pas t'avoir à mes côtés. Les paysages y sont étonnants mais on n'en profite vraiment que lorsqu'on peut les partager.

[Voyageuse]

Elle ne répondit pas, songeuse. Elle avait un peu tressailli à la mention d'enfants à voir grandir, et avait instinctivement posé une main sur son ventre, songeant sans doute à l'avenir.
" J'exagère peut-être un peu, répliqua-t-elle après un instant de silence. Après tout, il y a bien des femmes qui voient partir leur mari pour de longues durées, et pas que chez les marins. Mais... je n'y suis pas prête, pas encore en tout cas ! Donc je risque de te coller aux basques, au début... Au moins le temps qu'on ait fait notre trou quelque part, j'imagine..."
Elle bailla, et n'ajouta rien. Il devina qu'elle dérivait, lentement, vers le sommeil. Demain serait leur dernière journée à terre, et, même s'il y avait encore bien des caisses à décharger, et davantage encore à embarquer, il faudrait qu'il savoure la sensation du sol stable sous ses pieds...

[Kasumi]

Il s'étira et trouva une position confortable pour eux deux avant d'ajouter dans un murmure :

- Je n'ai aucune envie de partir alors que je viens à peine de te retrouver.

Il ferma ensuite les yeux, espérant tout de même prendre un peu de repos pour être d'attaque le lendemain et faire en sorte que leur traversée ne les mette pas à sec. Le voyage jusqu'à Luménis serait ensuite long et ils auraient certainement besoin de se ravitailler en route et de loger dans plus d'une auberge sur leur chemin.

[Voyageuse]

Ils mirent longtemps à trouver le sommeil. Les bruits venant d'au-dessous étaient trop audibles. Mais la fête finit par se calmer, la musique par s'arrêter tandis que les conversations se poursuivaient, inlassablement. Ils s'endormirent heureusement bien avant que le silence se fasse -c'était à se demander s'il se ferait avant le petit matin d'ailleurs.

Ils s'éveillèrent l'esprit embrumé, nettement plus tard que d'habitude. Ils n'étaient certainement pas les seuls, vu l'ambiance qui régnait la veille. Pourtant, par la fenêtre, Kasumi aperçut des marins, déjà au travail, en train de décharger les dernières caisses de la cargaison. Le commandant de bord discutait avec animation devant la capitainerie, puis s'en fut en direction des rues commerçantes. En bas, une délicieuse odeur de pain chaud se répandait, et les bruits des conversations indiquait que la grande salle était très fréquentée.

[Kasumi]

Kasumi s'en voulait de se réveiller aussi tardivement et d'avoir peut-être gâché une chance de se rendre utile. Dès qu'il émergea, il s'empressa donc de s'habiller et s'excusa auprès de Sylvia : il avait l'intention d'emporter de quoi déjeuner sur le pouce et de se rendre aussitôt auprès du capitaine pour être peut-être embauché pour au moins une partie de la journée. Il répugnait de laisser la rôdeuse déjeuner seule mais il ne pouvait pas se permettre de laisser passer une telle occasion où le capitaine avait grand besoin de renforts.

[Voyageuse]

Sylvia le regarda s'éloigner avec une grimace, mais ne rechigna pas : elle comprenait bien qu'il leur fallait gagner de quoi réduire le coût de leur traversée, et déplorait de ne pouvoir se rendre utile elle-même. Elle déjeûnerait seule, et l'informa qu'elle irait ensuite rejoindre Vif-Argent quelque part dans la palmeraie. Elle serait de retour à midi à l'auberge pour manger faire la sieste.

Quant à Kasumi, son aide pour le déchargement était bienvenue, et personne ne lui reprocha son retard. Après tout, il n'était pas membre de l'équipage. Il passa deux petites heures à décharger des caisses, dont certaines devaient être livrées directement dans des boutiques de la cité. Puis il fallut charger d'autres caisses entreposées dans un hangar tout proche, activité tout aussi fatigante et nettement moins rapide puisqu'il était nécessaire de tout ranger soigneusement, à la fois pour rentabiliser au maximum l'espace disponible et pour limiter les risques de casse en cas de gros grain. Des marchands de l'île vinrent d'ailleurs vérifier qu'on prenait bien soin de leurs biens.
Le capitaine libéra toute l'équipe durant les trois heures les plus chaudes de l'après-midi -travailler n'était humainement plus possible-, et Kasumi put rejoindre sa fiancée pour une sieste indispensable qui lui permit de rattraper un peu son retard de sommeil. Puis le travail reprit, répétitif, fatigant. Les hommes parlaient peu, concentrés sur leur tâche. Vu la quantité de marchandise qui attendait encore d'être chargée à bord, il était probable qu'ils travaillaient encore au moins deux heures après le coucher du soleil. Mais une bonne partie de l'équipage était à terre, prête à festoyer une soirée encore, et on indiqua à Kasumi qu'il était libre d'arrêter quand il le voudrait. Le capitaine noterait de toute façon le nombre d'heures où il avait été mis à contribution.

[Kasumi]

Kasumi était complètement fourbu malgré sa sieste de l'après-midi aussi annonça-t-il au capitaine qu'il quittait le travail une fois que la nuit fut tombée. Il était en effet également soucieux de ne pas laisser Sylvia seule une journée entière et donc de se rattraper un peu en passant la soirée avec elle. Comme la veille, il ne doutait pas que l'auberge serait le théâtre d'une nouvelle fête et que la salle commune serait comble mais il espérait qu'on ne les importunerait pas et qu'ils pourraient se détendre devant un bon repas et se raconter leurs journées respectives.

[Voyageuse]

Ils veillèrent moins longtemps, cette fois-ci. Ils étaient tous les deux fatigués, Kasumi par son travail harassant de la journée, et Sylvia par les longues balades qu'elle avait faites lors des périodes d'absence de Kasumi. La rôdeuse avait passé une bonne journée, retrouvant avec un certain plaisir son faucon qu'elle avait un peu délaissé depuis le retour de Kasumi. Elle le questionna sur son lien avec sa louve, sur Hélonna, puis se mit à bailler.
Ils montèrent se coucher alors que la fête battait son plein, mais ne trouvèrent pas immédiatement le sommeil. A cause du bruit, bien sûr. Mais Kasumi devinait que Sylvia était nerveuse. Ils partiraient le lendemain, deux heures après l'aube, et devraient embarquer au moins une heure avant le départ. Il y avait de quoi être un peu stressée...

[Kasumi]

Kasumi avait demandé au tenancier de venir frapper à leur porte à l'aube et il ne craignait pas de se réveiller trop tard cette fois. En revanche, il comprenait bien que Sylvia puisse s'inquiéter de tout le reste : de son premier voyage en mer, du confinement dans une cabine des semaines durant, de la découverte d'un tout nouveau continent et d'une nouvelle vie.

Alors il s'efforça de la rassurer sur leur avenir d'une voix douce, caressant ses cheveux :

- Le voyage ne sera pas si long que ça si on nous débarque sur la côte est d'Helonna. Et après nous atteindrons certainement une des zones les plus belles et les plus sauvages de l'île. Je n'y suis passé qu'une fois mais je suis certain que tu t'y plairas.

[Voyageuse]

Sylvia hocha la tête.
" Ca doit sûrement être très beau, je te crois sur parole. Et en un sens j'ai hâte d'y être... Mais je suis un peu angoissée tout de même. Peur de ne pas m'y plaire, peur de me languir de ma région d'origine. C'est étrange, j'ai toujours rêvé de partir explorer le monde, et puis d'un coup, j'ai envie de freiner des quatre fers ! Mais ça doit être la fatigue. Ça me passera... Une fois là-bas je pense ! Mais demain c'est le grand départ et ça me fait tout drôle..."
Elle déposa un baiser sur sa joue, soupira, et se blottit contre lui.
" Allez, bonne nuit mon amour. On aura besoin d'être en forme demain..."

[Kasumi]

Kasumi lui souhaita bonne nuit à son tour sans rien ajouter. Mais si une telle éventualité devait se produire, si Sylvia ne se plaisait pas en Helonna et que le déracinement lui pesait trop, il serait toujours temps de faire machine arrière. Après tout, lui-même pensait pouvoir se plaire en se réinstallant un jour en Haute-Forêt.

Mais ce n'était pas le moment pour avoir cette longue discussion et il faudrait avant tout voir comment la rôdeuse allait s'acclimater. L'avenir déciderait bien du reste : pour Kasumi, le plus important lui semblait de trouver un endroit où ils se sentent tous les deux heureux, un endroit où ils pourraient construire une vie à deux. C'est sur cette pensée qu'il se sentit glisser vers le sommeil.

[Voyageuse]

Il eût l'impression qu'on frappait à sa porte bien trop tôt, qu'il n'avait dormi que quelques heures. Mais la luminosité au-dehors le rassura sur l'horaire : c'était l'aube... Sylvia, qui avait eu une journée moins harassante, émergea plus rapidement et plus efficacement que lui. Quelques ablutions à l'eau froide, quelques vêtements à enfiler, un sac à boucler, et elle était prête. Maintenant que le moment était venu de partir, ses doutes avaient laissé place à la détermination, et elle semblait de fort belle humeur.
L'aubergiste leur avait préparé un petit déjeuner particulièrement consistant, qu'il les poussa à avaler entièrement, insistant également pour qu'ils profitent des derniers fruits frais avant longtemps. Après un tel repas, il fallait espérer que les remous des courants ne les rendent pas malades...

Sur le quai, c'était l'effervescence : quelques marchandises de dernière minutes à charger, les adieux de certains passagers embarquant pour les terres lointaines de l'ouest, les manoeuvres des marins. Tout ce petit monde se croisait, se gênait parfois, dans une certaine frénésie.
Le commandant vint à leur rencontre.
" Bienvenue à bord, voyageurs... la mer est calme, le vent idéal, et nous appareillons dans une heure. On vous a attribué la cabine numéro 58, au deuxième entrepont, escalier central. Vous pouvez vous y installer tout de suite... Et je vous informe aussi que les repas sont servis à la cafeteria du bord entre midi et une heure et demie de l'après-midi. Y a-t-il d'autres choses que vous auriez besoin de savoir ?"

[Kasumi]

C'était à Kasumi de se sentir soudain étrangement nerveux à l'idée d'embarquer à nouveau sur un bateau. Mais il se laissa porter par la bonne humeur de sa compagne et il ne doutait pas que la routine du bord aurait bien vite raison de son anxiété. Il était du reste impatient de poser leurs affaire dans leur cabine, sans doute guère plus grande qu'un lit. Cela dit, la promiscuité ne le dérangeait pas outre mesure et il comptait bien passer beaucoup de temps sur le pont du navire de toute façon. Avant de prendre congé toutefois, il déclara d'un ton tranquille :

- Si je puis vous rendre un service à l'un ou l'autre moment de la traversée, n'hésitez pas à faire appel à moi.

Mais à son ton, le capitaine devait comprendre que cela n'avait rien d'une obligation : sans doute les séance de déménagement de caisses leur avaient-ils déjà valu d'économiser quelques pièces...

[Voyageuse]

" Nous nous en souviendrons", répondit le commandant, affable, avant de prendre congé pour se diriger vers la capitainerie.

Leur cabine était effectivement minuscule. Au lieu d'un lit assez large pour deux, il y avait deux couchettes superposées -et trop petites pour qu'ils envisagent d'y dormir à deux. Le mobilier était tout aussi spartiate : deux chaises et une petite tablette qui se rabattait contre le mur, des patères pour suspendre leurs manteaux, un pot de chambre dans un coin, ainsi qu'un coffre fixé au plancher pour y ranger leurs affaires. L'ensemble tenait dans une pièce de trois bons mètres de long pour moins de deux de large. Sans hublot. Mais la cabine était propre, le mobilier en bois clair verni plutôt agréable à l'oeil, et finalement, cela ressemblait à une chambre d'hôtel miniature simplifiée...

[Kasumi]

Sans les couchettes superposées, Kasumi aurait trouvé la cabine tout à fait à son goût mais ils allaient devoir s'y faire de toutes façons. Le demi-elfe ouvrit aussitôt le coffre pour y déposer soigneusement ses vêtements de rechange avant de se tourner vers sa fiancée :

- Bon, ce n'est pas le grand luxe mais j'ai connu pire et de toute façon, je n'ai pas envie de rester confiné ici plus que nécessaire... Tu verras, observer la mer depuis le large est un spectacle grandiose. En tous cas, pour deux ou trois veilles.

Il disait cela pour se rassurer lui-même autant que la rôdeuse : la traversée n'aurait pas grand chose à voir avec un voyage de noce, pour le coup.

[Voyageuse]

Sylvia paraissait plutôt déçue, plus surprise que Kasumi par l’exiguïté de l'endroit : c'était la première fois qu'elle entrait dans une cabine de bateau, après tout.
" Je parie que les riches commerçants que j'ai vu l'autre jour sur le pont ont droit à un vrai lit et à un hublo, eux ! Et peut-être même qu'ils ont des fauteuils ! Je serais curieuse de visiter leurs cabines... Tiens, plus sérieusement, tu crois que je devrais proposer mes services comme femme de ménage pour qu'on économise encore un peu plus d'argent sur la traversée ? Ça m'ennuie que tu fasses seul tous les efforts..."

[Kasumi]

Kasumi comprenait la préoccupation de Sylvia et il hésita car il ne voulait pas qu'elle se sente obligée de travailler ou alors gênée de ne pas le faire. Il se tourna vers elle et attrapa ses mains avant de répondre d'un ton doux.

- Cela ne deviendra nécessaire que si nous ne pouvons pas accoster sur la côte est. D'ici à ce que nous arrivions chez nous, j'aurais plutôt aimé que tu profites simplement de notre voyage mais si tu t'ennuies vraiment pendant la traversée, tu es maîtresse de tes décisions.

Il ajouta d'un ton plus léger :

- En revanche, ne crois pas avoir signé pour toute une vie de vacances ! Une fois chez nous, il y aura largement assez de travail pour deux si nous voulons être bien installés avant l'automne.

[Voyageuse]

Le regard de Sylvia se perdit un moment dans les songes.
" Et... ça ressemble à quoi ? Là où tu veux que nous nous installions ? C'est dans la ville de Luménis ? A côté ? Plus loin ? Dans des montagnes comme à Everaska? Au bord de la mer ? Dans une grande forêt ? Est-ce que tu as déjà une idée en tête ? Tu veux acheter une maison ? Ou qu'on la construise de nos mains ?"

[Kasumi]

Le demi-elfe lui adressa un sourire radieux avant de répondre d'un ton doux :

- Je n'ai pas encore trouvé où mais j'ai déjà trouver avec qui alors c'est un bon début ! Mais ce ne sera pas en ville : ça ne nous conviendrait pas. Mais toutes tes autres idées me paraissent bonnes pour commencer à chercher tous les deux. Il faudrait déjà commencer par trouver ce bosquet dont nous a parlé Celd, qu'en penses-tu ?

[Voyageuse]

Sylvia acquiesça.
" Oui, c'est vrai. Et assez vite, je suppose : il me semble qu'il vaut mieux planter ce gland dans le courant du mois de Mirtul, non ? Avant l'été, en tout cas... Je n'ai pas vraiment la notion des distances, et je ne connais pas le continent où tu nous amènes, mais il me semble qu'on n'aura pas beaucoup de temps pour faire du tourisme, en arrivant... J'espère qu'il n'est pas trop loin de la côte sud-est."

[Kasumi]

Il serait effectivement urgent de trouver le bosquet mais, malheureusement, étant donné les indications fournies par Celd - un simple nom de village probablement disparu depuis - ils risquaient de devoir faire un détour par Luménis et sa grande bibliothèque d'autant qu'il y avait laissé l'essentiel de ses affaire et son cheval. Quant à Première Neige, il ne doutait pas qu'elle saurait le repérer quand il serait à quelques lieues d'elle.

- C'est un peu dommage que le navire ne se rende pas directement à Luménis pour faciliter nos recherches mais nous nous en sortirons. Helonna n'est pas si grande au final.

[Voyageuse]

Sylvia haussa les épaules.
" Si tu le dis, je te fais confiance..."
Puis, comme la cabine était décidément un espace trop confiné pour y rester indéfiniment, elle l'entraîna par la main à la découverte des autres parties du bateau. Kasumi connaissait déjà les troisième et quatrième entreponts, consacrés aux marchandises. Il découvrit que le second entrepont était réservé aux passagers, tout comme une partie du premier entrepont, juste au-dessus d'eux. Mais celui-ci comportait également une caféteria plutôt spacieuse, dimensionnée pour accueillir quelques dizaines de personnes, jouxtée par un petit salon. Ce dernier était équipé d'une bibliothèque sommaire et de quelques jeux de dés et de cartes. Deux larges banquettes et plusieurs chaises molletonnées, autour de petites tables, attendaient les joueurs et les lecteurs.
Au-dessus se trouvait le pont, où, pour l'heure, les manoeuvres étaient sur le point de commencer.

[Kasumi]

Au moins le navire était-il équipé pour que les passagers puissent se distraire pendant la traversée... Mais pour l'heure, Kasumi avait envie d'emmener Sylvia à l'air libre pour observer la terre pour la dernière fois en quelques semaines tant que cela ne gênait pas aux manœuvres. Du reste, il y avait fort à parier qu'ils y passent l'essentiel de leur temps à bord étant donné l'exigüité de leur cabine n'incitant pas aux longues "siestes".

[Voyageuse]

Les manœuvres étaient complexes pour un non-initié. Cordages lancés d'un point à un autre, voiles à hisser, les marins couraient d'un endroit à l'autre et on fit comprendre aux passagers qu'ils devaient rester sur le château arrière pour ne pas déranger.
Les passagers en question étaient, pour l'essentiel, des marchands accompagnant leurs cargaisons -soieries et velours, porcelaine, épices, et mêmes des oeuvres d'art. On trouvait également une petite vingtaine de jeunes gens en quête de voyage et d'aventures, dont un jeune clerc qui avait si souvent rendu service en soignant les menues blessures qu'il avait obtenu une remise complète du coût de son voyage. Certains métiers étaient décidément favorisés. Ces deux catégories de voyageurs ne se mêlaient pas vraiment, et, si les premiers étaient reconnaissables à la richesse de leurs atours et à leur air un peu hautain, les seconds vinrent se présenter d'eux-mêmes à Sylvia et Kasumi, les accueillant parmi eux avec bonne humeur. Il y avait également une famille entière -un couple âgé accompagné de leurs deux filles et de leurs huit petits-enfants- qui rendaient visite à leurs deux jeunes fils installés à Manost. Ils ignoraient apparemment tout des rumeurs de guerre, et peut-être celle-ci était-elle terminée...
Kasumi et Sylvia découvrirent qu'ils n'étaient pas les seuls nouveaux arrivants : deux des marchands saluaient avec émotion leur famille restée à quai. Ils se rendaient à Luménis, à en juger par les bribes de conversation qui parvinrent à leurs oreilles.

Un grand cri annonça qu'on levait l'ancre, et le navire se mit à bouger, coupant court aux présentations : ils auraient tout le temps de faire plus ample connaissance durant les prochains jours à bord. Il y eut des cris joyeux, sur le quai, auxquels répondirent des au-revoir un peu plus émus à bord, des larmes d'émotion de part et d'autre, de grands gestes des deux mains... et vif-Argent qui vint se percher sur l'épaule de sa maîtresse, sous le regard admiratif des enfants. Et déjà, le bateau s'éloignait du quai, filant vers le large. La plus grande île à l'ouest de Zakhara ne serait bientôt plus qu'un point à l'horizon...

HRP : on va résumer le voyage, sauf si tu tiens à ajouter des choses ?

[Kasumi]

HRP : non, ça me convient tout à fait !

Somme toute et à condition d'éviter les marchands hautains ou les marins les plus entreprenants, il semblait que le voyage s'annonçait sous de bons auspices et qu'ils auraient maintes occasions de conversations et de jeux pour laisser passer le temps. Comme de coutume, il semblait que Sylvia ait immanquablement attiré l'attention des enfants à bord et le rôdeur en était secrètement fier et heureux pour elle. Ce jour-là, ils restèrent longuement à l'extérieur à observer la course du navire avant de se mêler aux autres voyageurs pour le moment du repas qui se prolongea dans le petit salon.

[Voyageuse]

Les premiers jours de voyage se déroulèrent sous un ciel presque sans nuage. Un léger vent soufflait, suffisant pour gonfler leurs voiles et avancer bon train. Le capitaine, satisfait, leur annonça qu'ils prenaient de l'avance sur l'itinéraire prévu. Hélas, ce bel optimisme ne dura pas. L'équinoxe amenait son lot de tempête, et, au matin du huitième jour, ils furent réveillés par un roulis impressionnant. Sylvia, verdâtre, passa sa journée à vomir par-dessus le bastingage. Le neuvième jour fut pire encore, et on finit par obliger tous les passagers à regagner l'intérieur du navire, que ce soit leur cabine ou la cafétéria : le tangage obligeait les marins à être sur le qui-vive en permanence, on affalait des voiles, on en hissait d'autres, on nouait un cordage, dénouait un autre, le tout à une vitesse impressionnante. Ils ne voulaient personne dans leurs jambes, et le risque de passer par-dessus bord était bien réel, aussi chacun obtempéra-t-il sans discussion.
La tempête dura trois jours, pendant lequel ils ne furent pas autorisés à sortir. Les pots de chambres étaient pris d'assaut, les repas restaient dans les assiettes tant il était impossible à leurs estomac d'avaler quoi que ce soit, et les odeurs dues au confinement particulièrement désagréables. Sylvia se découvrit des tendances claustrophobes, et ne put supporter de rester dans leur cabine. Elle passait son temps à lorgner par le hublot du petit salon -lorsqu'elle ne se précipitait pas aux lieux d'aisance les plus proches-, et finit même par monter prendre l'air en catimini sur le pont. Elle veilla à ne déranger personne, mais on ne la laissa pas y demeurer plus d'une demi-heure : les hommes d'équipage ne voulaient pas avoir à assurer sa sécurité et ils le lui firent clairement comprendre. Kasumi, en revanche, ainsi que deux des jeunes aventuriers -un elfe et un autre demi-elfe- eurent la "chance" d'être réquisitionnés pour jouer les vigies, de nuit, ce qui leur permit de prendre un peu l'air. La tempête durait, et il était indispensable que les hommes d'équipage prennent un peu de repos, aussi toute aide était-elle bienvenue.

Enfin, un beau matin, ils se réveillèrent au-dessous d'un ciel à nouveau sans nuage qui fut salué par des applaudissements nourris. Les marins, qui n'avaient guère dormi depuis trois ou quatre jours, avaient des cernes énormes sous les yeux, mais ils fêtèrent avec enthousiasme l'accalmie avant de se réfugier dans leurs dortoirs -du moins ceux qui n'étaient pas de quart. La seconde bonne nouvelle de la journée fut annoncée par le capitaine, après qu'il eût fait le point, à midi, sur leur position exacte : la tempête ne les avait pas détourné de leur route, et ne les avait pas retardés. C'était un petit miracle. Ils pourraient arriver en vue d'Hélonna avec un peu d'avance sur les prévisions, si la météo restait favorable. Ce qu'elle eût le bon goût de faire...

Le commandant convoqua Kasumi et Sylvia dans sa cabine, trois jours plus tard. Une cabine autrement plus vaste et confortable que la leur...
" Nous serons en vue d'Hélonna probablement demain, leur annonça-t-il. Nous serons à hauteur de Lunaros dans deux ou trois jours, d'Evendum quatre jours plus tard. Puisqu'il ne semble pas y avoir de grain qui se prépare, le capitaine vous déposera à celle de ces deux destinations qui vous convient le mieux. C'est à vous de décider. Compte tenu de votre aide lors des déchargements et pendant le tempête, le coût du voyage ne sera que de quarante pièces d'or. Ou même trente-cinq seulement pour Lunaros."