[Bâtiment] La Commanderie des Paladins de Lathandre

[Galathée]

" Nous recevons des visiteurs de temps en temps... mais surtout des paladins d'autres commanderies ou des paladins errants. Quand nos familles viennent à Luménis... elles logent rarement à la commanderie.
— Ce n'est pas exactement la meilleure hostellerie de la ville... Si Arthur n'avait pas insisté, je ne crois pas que Sire Armand aurait accepté...
— Donc on peut dire que vous êtes une exception... Quant à dire que vous êtes une privilégiée, ma foi... Ça dépend du point de vue.
— Un Sunite vous aurait payé une bonne auberge." dit Geoffroy, non sans malice.

[Chandara]

Chandara nota le ton implicite du second paladin local mais elle préféra rebondir sur le même ton de l'humour :

- Oh, mais je trouve votre commanderie tout à fait charmante, et même bien plus que la plupart des auberges j'ai fréquentées ! On m'a accueilli avec une délicieuse boisson fraîche, j'ai pu assister à une petite partie de votre entrainement, j'ai déjà profité de votre salle d'eau et je suis certaine que le repas sera admirable et pris en bonne compagnie ce qui est de loin le plus important !

Elle marqua une pause avant de regarder directement Jacob :

- Alors comme ça, Arthur a beaucoup insisté ? J'espère qu'il n'a pas dû se soumettre à d'autres corvées ou des choses du genre pour que je sois acceptée...

[Galathée]

" Ah ça... Je ne saurais dire." fit Jacob avec un léger sourire.
Geoffroy croisa les bras.
" Vous avez rencontré Arthur en Dorrandin, alors ? Pendant la guerre ?"

[Chandara]

Chandara se dit qu'il n'y avait pas grand mal à confirmer l'hypothèse de Geoffroy d'autant qu'il devait bien se douter de sa réponse. Toutefois, l'ancienne paladine répliqua avec une certaine prudence :

- Arthur m'a confié qu'il ne souhaitait pas trop parler de cet épisode mais oui, nous nous sommes connu sur Dorrandin, alors que nous étions tous les deux affectés à la même mission.

La Dorrandine ne sut s'empêcher d'ourler un sourire à cette évocation et son regard se fit quelque peu rêveur avant qu'elle ne se souvienne de l'endroit où elle se trouvait.

[Galathée]

Sa mine n'échappa pas à ses interlocuteurs et lorsqu'elle reprit ses esprits, elle réalisa que ceux qui n'étaient pas hilares étaient légèrement embarrassés. C'est le moment que choisirent Arthur et sa collègue pour arriver à leur table et servir leurs assiettes. Le jeune paladin semble deviner tout de suite qu'il y avait quelque chose dans l'air car il manqua renverser le premier plat qu'il posa devant eux. Blé concassé, sauce tomate et fenouil braisé, poisson blanc de la mer, Arthur n'avait pas menti. Il leur souhaita bon appétit et promit à Chandara qu'il arrivait incessamment, après quoi il retourna vers les cuisines. Les autres entamèrent aussitôt le service.

[Chandara]

Chandara devait maintenant présenter un joli teint pivoine qui contrastait d'autant plus avec le poisson qu'on leur avait apporté et qui ne faisait malheureusement que la trahir davantage. Elle regarda le fond de son assiette alors même qu'on ne l'avait pas encore servie, encore gênée d'avoir mis Arthur dans l'embarras qu'elle-même. Elle aurait aimé trouver un sujet pour relancer la conversation et faire diversion mais les mots lui échappaient totalement, une fois n'étant pas coutume.

[Galathée]

Arthur revint quelques secondes plus tard et se glissa à table, à côté de Chandara. Il lui décocha un sourire un peu embarrassé, puis poussa un soupir d'aise, tandis qu'on le servait. Chandara l'avait été un peu plus tôt.
" Fatigué ? demanda Geoffroy, affable.
— Un rien, répondit Arthur. Je me suis levé à l'aube."
Concert d'exclamations de sympathie : c'était leur lot à tous.
" Et couché tard.
— Ah oui... Les souris.
— On devrait quand même retrouver un ou deux chats. C'était pratique, dit Sullyan.
— Mais Othon est allergique, tu sais bien que c'est impossible."

[Chandara]

La jeune femme se sentit immédiatement plus à son aise dès qu'Arthur se fut installé à ses côtés et elle lui rendit un sourire discret et compatissant. Elle réagit aussitôt, sans prendre immédiatement conscience qu'elle étalait leur toute nouvelle familiarité :

- Et dire que j'ai exploité tes talents de guide toute l'après-midi ! Tu aurais du me dire que tu n'avais pas assez dormi !

Elle était pleine de sollicitude en disant cela et - désireuse de se montrer utile - elle réorienta la conversation vers le sujet plus consensuel des nuisibles :

- Pour les souris, vous avez mis des pièges ? Ou du fromage empoisonné ?

[Galathée]

" Il nous a d'abord fallu un certain temps pour les localiser, pour tout dire... dit Arthur. Puis il a fallu déménager les bouquins... parce que c'était dans la bibliothèque, tu vois... Bon, on n'a pas grand chose comme livres, mais on a quelques traités importants, des chroniques, ce genre de choses... Ça a pris un certain temps, d'autant qu'on n'était pas sûrs qu'il n'y avait pas de souris dans les autres pièces... Après, seulement, on a piégé. Mais on a rien attrapé, pour tout dire. Donc... Les traités vont rester en lieu sûr encore un certain temps.
— Mais vous avez vu des souris ? Vraiment ?
— On les a entendues... On a vu leurs crottes... et un peu de dégâts, aussi...
— Des dégâts ?
— Oui... Les pages 6 et 11 de la charte lathandrite sont... morcelées."

[Chandara]

Chandara se sentit à nouveau navrée d'entendre que des trésors de culture avaient ainsi été dégradés par quelque-chose d'aussi banal que des parasites. Et pour bien montrer sa solidarité, la jeune-femme proposa peut-être un peu étourdiment son aide - les lathandrites n'avaient sans doute pas vraiment besoin de renfort surtout venant de la part de leurs invités :

- Est-ce que je peux vous aider ? J'étais plutôt douée pour attraper les souris à l'Académie. Enfin, jusqu'à ce que les mages de Cojum développe des répulsifs efficaces qui les éloignaient du papier et des réserves de nourriture.

[Galathée]

" On utilise vraiment la magie pour tout et n'importe quoi..." s'exclama Kyle, stupéfait.
Sullyan haussa les épaules.
" Bah, si c'est efficace...
— La prochaine fois, ce sera un sortilège pour balayer les écuries, puis pour faire la vaisselle, plier les draps...
— J'ai entendu dire que certains Sunites avaient développé des sortilèges pour repasser les vêtements.
— N'importe quoi !"

[Chandara]

Chandara s'amusa de la remarque, sans doute complètement fantaisiste et partit d'un rire musical. Elle tint toutefois à défendre son point de vue - et à travers elle - celui des mages de sa cité natale :

- Pour ce qui est de défendre le papier, c'est que la priorité de Cojum a toujours été de défendre sa bibliothèque : on y trouve nombre d'ouvrages uniques et c'est la plus grande de Dorrandin. Il faudrait une armée de chats pour préserver tout ce qu'elle contient. Et puis, j'aime autant que les mages se consacrent à ce genre de sortilèges de protection plutôt qu'à développer des façons exotiques de tuer des gens ou - pire encore - aux arts sombres et interdits. Enfin, ce n'est que mon point de vue. Avouez tout de même que ce serait plutôt pratique, le coup du repassage ! Vous croyez que ça marche aussi pour ravauder les chaussettes ?

[Galathée]

" Le sort de réparation fait partie du bagage de base d'un novice de n'importe quelle religion, dit Sullyan. Ou d'un apprenti mage. Il n'y a que nous autres, paladins, qui en sommes réduits à manier l'aiguille.
— Le repassage sunite est d'ailleurs une petite variation sur ce sortilège, dit Geoffroy.
— Tu m'as l'air bien au courant, toi ! s'exclama Kyle.
— Je n'ai jamais mis les pieds dans ce temple et je ne mettrai jamais les pieds dans ce temple.
— Il ne faut jamais dire jamais."

[Chandara]

Chandara avait pris bonne note de l'information livrée par Sullyan et elle s'apprêtait à abonder dans son sens sur la cruauté que le sort réservait aux paladins, livrant leurs orteils à la froidure et à la honte. Mais déjà le débat prenait une autre tournure et la jeune-femme entreprit de s'y engouffrer avec malice et espièglerie :

- Est-ce que l'un d'entre vous s'y est déjà rendu ? Enfin, un qui oserait l'avouer devant une assemblée de ses pairs, bien sûr !

[Galathée]

Les paladins s'entreregardèrent.
" Pas moi, dit Kyle. Qu'est-ce que j'aurais bien été y faire ?
— Moi non plus, ajouta Sullyan. Pourtant, il y a plein de beaux garçons...
— Oui, mais ça, il y en a ici aussi, s'exclama Geoffroy.
— Beaucoup de garçons, peu de filles, et la plupart sont déjà prises. D'où l'intérêt d'aller traîner au Temple de Sunie...
— Sans doute qu'Othon y est déjà allé. Armand, sûrement. Mais... Nous vénérons Lathandre. Nous n'avons pas vraiment l'usage des charmes de Sunie."

[Chandara]

Chandara hocha calmement la tête, un sourire satisfait au coin des lèvres : la conversation ne portait à nouveau plus sur elle et sur Arthur ce qui lui permettait de déguster son poisson avec une plus grande liberté.

- Oh, parfois la combinaison de deux divinités fait des miracles ! En tous cas, je suis certaine qu'ils sont pleins de charmes mais qu'ils n'ont pas un cuisinier aussi doué que le vôtre, au temple de Sunie ! Il faudra que tu me le présentes, Arthur, pour que je le félicite ! Qui a osé dire que la commanderie ne s'assimilait pas une auberge de choix ?

[Galathée]

Les paladins rirent.
" Misère, je n'ose imaginer l'ordinaire dans une commanderie manostienne, fit Kyle.
— Allons, elle dit vrai, ce n'est pas si mauvais...
— Non, c'est même assez bon, mais de là à en faire un festin... Arthur, tu devras l'emmener à la Bienveillance, a minima.
— L'Auberge des Six Soeurs a une meilleure table.
— Plus chère."
Ils commencèrent à se chamailler quant au même restaurant luménien. Arthur se tourna vers la paladine et lui sourit.
" Je suis content que ça te plaise... mais je crois que mes amis vont devoir s'habituer à ton enthousiasme pour toute chose... Décidément, tu n'es vraiment pas très helmite..."

[Chandara]

Chandara lui adressa un clin d'œil qui n'avait effectivement rien d'Helmite puis elle se fit quelques instants songeuse - ou rêveuse - avant de reprendre le cours de la conversation générale :

- Je serais ravie de déjeuner une fois ou l'autre dans ces auberges. Enfin, si les prix sont raisonnables, bien entendu ! D'autant qu'Arthur ne me laissera jamais payer la note galant comme il est !

Elle n'avait pas pu s'en empêcher mais on ne se refaisait pas en un jour... Pas très helmite. Ce n'était effectivement pas la première fois qu'on lui faisait cette réflexion. Mais elle ne considérait plus que c'était là une lacune préjudiciable. Plus maintenant qu'elle avait pu gouter à la doctrine de divinités dont elle se sentait étrangement plus proche qu'elle ne l'avait jamais été du Dieu Gardien.

[Galathée]

" Misère, vous iriez vraiment bien chez les Sunites... Pauvre Arthur, il va finir par rester couleur coquelicot, un de ces jours." dit Kyle, hilare.
Le jeune paladin s'était effectivement empourpré de spectaculaire façon.
" Mais c'est mignon, allons ! s'exclama Geoffroy.
— Laissez les tranquilles." fit Sullyan, indulgente.

[Chandara]

Chandara se rendit aussitôt compte qu'elle était vraiment allé trop loin et elle s'en voulait terriblement : de gêner le pauvre Arthur, de s'être bêtement mise au centre de l'attention de la tablée, d'avoir dit une ânerie qui pouvait peut-être lui aliéner l'un et les autres. La jeune-femme s'était empourpré à son tour de bien visible façon et, la tête basse, elle répondit d'une toute petite voix :

- Pardon, j'ai dit une bêtise et je m'en excuse. Pour ma défense, je ne connais pas encore bien vos façons...

Les excuses s'adressaient avant tout au jeune paladin, évidemment.

[Galathée]

" Ce n'était pas une bêtise, vous le pensiez vraiment, Chandara, dit Sullyan avec douceur.
— C'est nous qui devons nous excuser. Vous venez d'une autre culture, fatalement vous vous exprimez autrement...
— C'est juste que nous avions sans doute imaginé les Helmites... moins démonstratifs. Mais ce n'est pas gênant, du tout.
— Excusez-nous pour notre maladresse."

[Chandara]

La jeune-femme était encore plus gênée que toute la tablée s'excuse alors que c'est elle qui était en tort. Elle sentit toutefois que l'ambiance menaçait de virer au morose si elle n'y remédiait pas tout de suite aussi répondit-elle avec le plus de légèreté possible :

- Si tout le monde s'excuse, on ne va pas s'en sortir ! Et puis, il n'en est guère besoin : votre surprise est bien naturelle car je ne suis certainement pas la plus représentative des helmites comme l'a si bien dit Arthur. Je me réjouis déjà de ne pas vous ennuyer !

Et oui, elle pensait vraiment ce qu'elle avait dit et elle esquissa un sourire à l'égard de Sullyan qui semblait être celle qui la comprenait le mieux à cette table. En dehors d'Arthur qui ne pouvait pas concourir dans la même catégorie, bien entendu !

[Galathée]

La conversation dévia sur des matières plus triviales, puis on interrogea Chandara sur le retour de Filu, le vieux cheval miraculé. Ensuite, certains se mirent à empiler les assiettes et lorsqu'Arthur fit mine de se lever, Geoffroy l'arrêta et proposa de le remplacer exceptionnellement. Le jeune homme remercia son confrère. Les autres se levèrent et saluèrent Chandara, lui souhaitant un bon séjour. Arthur se tourna alors vers elle.
" Veux-tu aller voir les écuries ? Il va faire clair pendant encore un certain temps."

[Chandara]

Heureusement, la fin du repas s'avéra bien moins mouvementée, sans doute en partie parce que Chandara laissa le soin aux lathandrites de mener la conversation et d'amener les sujets qui les intéressaient.

Quand ils eurent fini de souper, l'ancienne helmite se sentait beaucoup plus détendue et la proposition d'Arthur fut accueillie avec bonheur. Cela permettait à la fois d'aller prendre un peu l'air frais du début de soirée et de se retrouver dans un environnement plus familier :

- Ce sera avec grand plaisir !

Elle se leva sans attendre pour le rejoindre mais ne prit cette fois aucune initiative malencontreuse. A regrets.

[Galathée]

Il l'entraîna dans le couloir puis ils se glissèrent sous l'arche qui les séparait de la cour. Celle-ci était déserte, à l'exception de deux novices qui ramassaient des morceaux d'équipement oubliés dans le sable. Ils marchèrent côte à côte, en silence, vers la double porte ouverte des écuries. L'odeur caractéristique du foin chatouilla les narines de la Dorrandine. Une fois à l'intérieur, elle découvrit un vaste espace, très lumineux, similaire à ce qu'elle aurait pu trouver dans n'importe quelle commanderie d'importance. Ici comme ailleurs, les trois quarts de l'espace étaient inoccupés, cependant...

[Chandara]

Chandara lui adressa un regard brillant : c'était un lieu où on se sentait immédiatement à l'aise comme si la présence des chevaux pouvait tempérer même ses ardeurs parfois trop enthousiastes. Elle s'avança dans l'allée centrale en humant l'air et en tournant lentement sur elle-même pour embrasser du regard toute l'écurie. Elle souffla ensuite d'un ton doux :

- Allons voir Filu ! Je parie que tu n'as pas pu prendre le temps de lui souhaiter la bienvenue !

[Galathée]

" Mauvaise langue ! J'ai pris le temps de venir lui dire bonjour ! Il fallait que je le voie pour le croire."
Il mena la jeune femme jusqu'à la stalle qu'occupait le vieux hongre. L'animal s'ébroua et approcha des deux jeunes gens, semblant les saluer de sa tête dodelinante. Arthur posa la main sur le chanfrein de l'animal puis lui ébouriffa les crins.
" Je ne pourrai jamais assez te remercier pour ce que tu as fait pour lui... et pour moi."

[Chandara]

Le sourire extatique de la jeune-femme démontrait déjà le contraire : elle était visiblement très heureuse que la surprise et les retrouvailles inattendues. Sans un mot, la dorrandine caressa la tête de l'animal à son tour avant de frôler - comme par inadvertance - la main du paladin. Puis elle répondit d'un ton doux et rêveur :

- Vous rendre heureux tous les deux vaut bien tous les remerciements du monde : c'est là le vrai sacerdoce des paladins, non ?

Chandara prit conscience que son ami avait lui aussi les cheveux légèrement ébouriffés et elle ressentit une furieuse envie d'y mettre bon ordre de sa main mais ça aurait vraiment été abuser de la situation !

[Galathée]

Arthur fut plus audacieux, cette fois, et glissa une main autour de la taille de Chandara, jusqu'à la poser doucement sur sa hanche, sans la serrer ni se montrer inconvenant.
" Je ne suis pas certain que ce soient les termes exacts, non. Ce n'est pas assez ronflant. Mais ce n'est pas une affaire de profession, c'est une affaire de coeur. Pour moi, que tu sois paladine... C'est une jolie coïncidence, et cela nous a sûrement rapprochés, mais ce n'est pas le principal..."

[Chandara]

Chandara avait ressenti un délicieux frisson à cette initiative du jeune-homme. Le sentir si proche que sa chaleur corporelle irradiait sur sa peau, sentir sa main délicatement posée sur sa personne, les mots délicieux que le jeune-homme prononçait… Tout concourrait à la rendre toute chose et à faire battre son cœur beaucoup plus vite. Ils étaient seuls dans cette écurie et elle ressentait soudain un besoin irrépressible de se blottir dans les bras d’Arthur, d’écouter son propre cœur qui lui chuchoterait des choses merveilleuses. Alors, encouragée par le luménien, elle avança d’un pas jusqu’à ce que leurs poitrines se touche, passa ses bras derrière son dos et posa sa tête contre son épaule, appréciant au passage la force tranquille du paladin. D’un soupir et d’un murmure, elle exprima alors son bien-être à être là :

- Mon cœur n’aspirait qu’à trouver l’affection d’un jeune-homme aussi attentionné et sensible que toi.