[Lieu] La Vallée Fertile

[Galathée]

Tandis que Phelan aidait le garde forestier à boire, Taliesin s'écarta donc pour jouer de son pipeau, s'éclipsant plus ou moins discrètement derrière un arbre pour en tirer quelques notes. Il y avait fort à parier qu'on l'entendrait, cependant, et des questions seraient sans doute formulées.
Quelques notes plus tard, un rayon de lumière vint frapper le sol et le barde trouva une fiole remplie d'un liquide doré entre les feuilles mortes. Sans doute ce qu'il espérait... Il faudrait tester.

[Taliesin]

Après avoir soigneusement rangé le pipeau - c'était le genre d'artefact qu'il ne valait mieux pas exhiber devant des inconnus, en particulier dans une vallée dévolue à Chauntéea -, l'elfe rejoignit les autres.
-Je vais vous faire boire ceci, dit-il au garde-chasse en lui présentant la potion. Ensuite, vous devriez vous sentir beaucoup mieux.

[Galathée]

Le garde chasse n'était pas en état de refuser, aussi but-il ce qu'on lui proposait. Il parut se sentir tout de suite mieux, reprit des couleurs, et ses blessures se refermèrent.
" Pas mal, la potion de soins." nota Phelan, impressionné.
Ni Baptiste, ni Victor ne bronchèrent. Le blessé, lui, semblait n'avoir nulle intention de se lever.

[Taliesin]

Et Taliesin n'allait pas l'y forcer : la moindre des choses était de le laisser se remettre, reprendre ses esprits. D'ailleurs, aussi impatient soit-il de le questionner, il allait attendre encore un moment.
Il se mit donc à surveiller les alentours et... à observer le soleil pour avoir une idée de l'heure. Si midi approchait, ils pouvaient en profiter pour faire une pause.

[Galathée]

Le soleil était effectivement haut dans le ciel et tout le monde semblait mûr pour poser son sac. Le garde chasse les observa dans un état un peu second. Phelan lui avait prêté sa couverture en plus de l'outre qu'il tenait toujours entre les mains.
" On se connait, non ?
— Oui, je suis le gars que vous n'avez pas embauché.
— Ah bon ? Possible."

[Taliesin]

Puisqu'on lui tendait la perche...
-A ce sujet, messire... Je suis en quête d'une de mes amies : Cordélia, une jeune femme brune... Est-ce que ce n'est pas elle que vous avez finalement embauchée ?

[Galathée]

Le garde chasse releva les yeux et le dévisagea un moment, le regard un peu troublé. Il finit par acquiescer.
" Ben oui, je l'ai embauchée. Elle avait l'air drôlement plus dégourdie que ce jouvenceau.
— Oui, enfin...
— Elle m'a d'ailleurs tué la bête. Mais ensuite... Je ne sais pas ce qu'elle a fichu."

[Taliesin]

La nouvelle était à la fois encourageante - parce qu'ils n'avaient pas fait fausse route - et inquiétante - parce que quelque chose avait mal tourné.
-Quand vous vous en sentirez le courage, ce serait bien si vous pouviez nous raconter ce qu'il s'est exactement passé.
Il se tourna vers les enfants.
-Vu l'heure, nous allons prolonger la halte et manger.

[Galathée]

Les enfants commencèrent à déballer les victuailles. Victor guettait la suite de l'histoire. Phelan alluma un feu : il faisait bon mais le garde chasse avait toujours mauvaise mine. Seul Titus restait à l'écart, comme s'il refusait de s'exposer à encore un autre être humain.
" Je sais pas vous en dire des masses. Elle est partie il y a... bah... Je sais plus. Je la voyais pas revenir, alors qu'elle avait dit que c'était juste une reconnaissance, alors je l'ai pistée, et j'ai trouvé le sanglier... Du beau travail. Elle a coupé le groin, comme on en avait parlé, alors ça veut dire qu'elle était encore en état de le faire... Mais à la place de revenir en arrière, elle est partie dans une autre direction... Pourquoi, j'en sais rien. Après, j'ai été attaqué, et donc... Je vous dois une fière chandelle."

[Taliesin]

-Bah, oubliez ça : nous sommes heureux d'avoir été en mesure de vous aider. Mais pourriez-vous nous dire qui vous a attaqué ? Peut-être Cordélia a-t-elle changé de direction justement pour éviter vos assaillants... Peut-être l'ont-ils capturée malgré tout, ce qui expliquerait qu'elle ne soit pas reparue dans la vallée.
Il avait pu lui arriver pire encore mais... Il préférait ne pas y songer.

[Galathée]

" Je dois avouer que je ne sais pas bien ce qui m'a attaqué. Ça ressemblait à des chauve-souris... un peu obèses... Sauf que c'est la première fois que je me faisais attaquer par des chauve-souris... et qu'à ma connaissance, y'a pas de grotte dans le coin..."
Il grimaça.
" En plus, il était passé midi. Mais ça volait. Il y en avait bien... quatre ou cinq, je ne sais pas."

[Taliesin]

Il ne put s'empêcher de jeter un regard en direction des garçons; Avec de telles créatures dans les parages, il fallait les ramener dans la vallée, c'était indispensable pour leur sécurité. Mais peut-être que le garde-chasse accepterait de leur servir de guide pendant que Phelan et lui poursuivaient les recherches...
-Avez-vous une idée de la direction prise par Cordélia ? Sinon, il nous faudra retourner à la clairière pour chercher sa trace. Mais ça n'a rien d'infaisable;

[Galathée]

" Je suivais sa piste quand ces bestioles m'ont attaqué. J'ai voulu revenir à la clairière, c'était un bon point de repère pour repartir vers la Vallée, mais ensuite, j'avais une de ces soifs... Alors je suis parti vers le ruisseau... C'était..."
Il leva les yeux.
" Hier, j'espère."

[Taliesin]

Il lui sourit.
-Merci beaucoup pour ces renseignements. A présent, vous allez pouvoir vous reposer, reprendre des forces... Et si vous avez faim, nous avons largement de quoi partager.
Il faudrait ensuite rebrousser chemin, affronter la colère des enfants - de Victor, surtout - puis s'élancer sur les traces de Cordélia.

[Galathée]

L'homme avait faim, en effet, et il se fit un plaisir de partager leur repas. Baptiste s'esquiva en cours de dîner pour aller porter quelque chose à Titus : celui-ci avait décidé de ne pas s'approcher et s'était caché derrière un buisson. Le garde chasse était encore trop vaseux pour s'en rendre compte.
" Mais vous formez une drôle d'équipe, dites-moi... Vous vous êtes tous lancés à la recherche de cette fille ? Bon, toi, tu dois être le fiancé. Mais les autres ? Un elfe, en plus ?"
Victor était devenu rubicond. Phelan, lui, gloussait dans son morceau de pain.

[Taliesin]

-En réalité, Phelan n'a croisé Cordélia qu'une seule fois, ce qui ne l'a pas empêché d'accepter de nous aider à retrouver notre amie, dit-il, désireux de ménager la chèvre et le chou. Quant aux garçons, ce sont mes enfants.
Inutile d'entrer dans les détails, dans les cas particuliers...

[Galathée]

" Vos enfants ?"
Il paraissait incrédule, et même sur le point de rire. Mais il s'en abstint.
" Bref, en tout cas, merci pour le coup de main. Mais je me méfierais, à votre place, si vous voulez continuer à la chercher... Je vois que vous êtes armé, mais on est hors des limites de la Vallée, et donc hors du champ de protection de Chauntéa. Je sais pas bien ce qui se cache dans ces bois."

[Taliesin]

-Nous allons poursuivre les recherches : nous ne pouvons pas abandonner notre amie à son sort. Mais nous serons extrêmement prudents, oui...
Et de regretter de ne pas avoir commencé les recherches un jour plus tôt...
Mais ce qui était fait était fait : à présent qu'ils avaient une piste, il fallait la suivre tout en croisant les doigts pour qu'il ne soit pas trop tard.

[Galathée]

" Elle est partie vers le sud, à partir de la clairière. La piste doit être vieille, maintenant... Il vous faudrait un bon chien, mais je ne sais pas où vous pourriez trouver ça dans le coin. J'en avais un, avant, mais ce crétin s'est fait écraser par un tronc pendant le bûcheronnage, au printemps. Je l'ai pas encore remplacé, je l'aimais bien malgré sa cervelle de linotte."
Il poussa un soupir.
" Si vous avez des questions sur les bois... Je vous accompagnerais bien, mais je me sens pas complètement dans mon assiette, là."

[Taliesin]

-Il vaut vraiment mieux que vous vous reposiez, répondit-il. Quant aux bois, tout ce que vous pourrez nous en dire sera utile : leur étendue, la présence éventuelle de points d'eau et de bons lieux de bivouac plus au sud, les dangers qu'ils recèlent d'ordinaire... Ce genre de choses.

[Galathée]

" Disons que je ne sors guère de la vallée fertile... Tout ce que je peux vous dire, c'est que nous sommes au-delà, et plus au sud... vous serez tout aussi au-delà. Ce qu'on y trouve : une faune forestière globalement ordinaire, avec de temps en temps une bestiole sanguinaire qui surgit. On pense qu'il doit y avoir un site, quelque part, qui pervertit certaines bêtes, mais on ne l'a jamais trouvé... Il n'est pas à la frontière en tout cas, donc... Je ne saurais pas en dire grand chose. Y'a pas mal de clairières propices au bivouac, et la saison n'est pas mauvaise pour se ravitailler : beaucoup de bêtes sont suitées. Ça rend les femelles plus agressives, mais du coup, elles sont moins rapides : vous trouverez à manger aisément. Pour ce qui est des cours d'eau, ça ne devrait pas poser de soucis non plus, si vous tendez l'oreille..."

[Taliesin]

-C'est déjà ça.
S'il avait su qu'il passerait des jours et des jours en forêt, il aurait préu davantage de vivres et de matériel. Mais qu'importe, puisqu'il serait possible de chasser.
C'est en silence qu'il finit son repas. Dès que le garde-chasse serait remis, il leur faudrait gagner la clairière. Puis ce seraient les houleuses séparations.

[Galathée]

Ils repartirent vers la clairière une fois que tout fut remballé. Phelan aida le garde-chasse à marcher sur les premiers mètres, mais celui-ci finit par reprendre son aplomb, bien qu'il ne puisse marcher très vite. Ils finirent par gagner les abords de l'endroit où reposait le cadavre du sanglier et ses remugles. Ils ne prirent cependant pas la risque de s'y engager : la faune goulue s'y trouvait toujours.
" La piste est juste de l'autre côté. On voit que l'humus a été retourné, il y a une balafre sur un tronc... Vous trouverez. J'espère."

[Taliesin]

-D'accord. Mais si vous voulez bien m'accorder un moment...
Il se tourna vers les enfants : plus moyen de tergiverser, à présent.
-Les gars, il faut que je vous parle.
Et de leur faire signe de le suivre un peu à l'écart.

[Galathée]

Les deux garçons le suivirent, Titus n'avait toujours pas reparu, demeurant à distance, présent mais quasiment invisible.
" Qu'est-ce qui se passe ?" demanda Victor, la mine froncée.
Baptiste ne dit rien, lui, subodorant sans doute ce qui allait leur tomber dessus.

[Taliesin]

Il réprima un soupir.
Dire qu'à la base, ils avait pensé profiter de ce voyage pour passer du temps avec eux... Mais force était de constater que si on faisait exception de la journée précédente, il ne les voyait plus guère.
Enfin, on n'y pouvait rien.
-Je suis désolé mais la forêt est trop dangereuse pour que je vous laisse m'accompagner, dit-il sans tourner autour du pot. Nous savons à présent qu'il y a quelque chose de mauvais ici qui pervertit les animaux : sans doute est-ce là l'origine de ce gigantesque sanglier, de ces chauves-souris bouffies qui ont failli tuer le garde-chasse... Bref, je vais demander à ce dernier de vous ramener chez Mona. J'aimerais pouvoir faire autrement, vraiment, mais... Je n'ai pas le choix. Vous laisser venir serait irresponsable de ma part.

[Galathée]

" Quoi !?" s'exclama Victor, scandalisé.
Baptiste posa une main sur son bras.
" Je ne crois pas que Titus va vouloir venir avec le garde-chasse. Il ose même pas se montrer."

[Taliesin]

Il acquiesça.
-Oui. Et je ne sais de toute façon pas comment réagirait cet homme s'il découvrait qui il est vraiment. Déjà qu'il a cru à une plaisanterie quand j'ai dit que vous étiez mes enfants... Enfin, j'imagine que grâce à sa proximité avec la nature, Titus sera en mesure de se cacher efficacement s'il y a du danger.

[Galathée]

" Quoi ?! Titus peut rester et pas nous ? Mais c'est pas juste ! s'emporta Victor. Moi aussi, je veux rester ! J'ai pas peur des sangliers et des chauve-souris ! J'ai tué un loup avec une bûche ! Je sais me défendre !"
Baptiste grimaça.
" Victor...
— Taliesin, allez ! On sera sages !"

[Taliesin]

-Je suis convaincu que vous seriez sages, prudents, obéissants : je n'en doute pas un seul instant. Et tu sais, je n'ai aucune envie de vous renvoyer en arrière. Sincèrement, je pensais que nous passerions du temps ensemble, ici, mais depuis que nous sommes arrivés, je dois vous laisser sans arrêt chez Mona pendant que je vais à droite à gauche et... ça m'ennuie. D'ailleurs, pour te montrer à quel point ça m'ennuie... La princesse elfe que je suis allé voir m'a parlé d'un groupe de faunes dans la Lorien et m'a proposé de me guider jusqu'à eux : mais comme vous n'auriez pas eu le droit de venir juste parce que vous êtes humains, comme ça aurait duré au minimum cinq jours, j'ai décliné son offre.
Il soupira.
-Mais là... Je ne peux pas vous exposer sciemment. Il y a une différence entre affronter ensemble des périls qui nous tombent dessus à l'improviste et vous conduire tout droit et en toute connaissance de cause vers le danger.